1. Thème 1 : Immigration,
reconnaissance des diplômes,
autorisation d’exercer et obtention
d’un emploi
Forum sur l’échange des connaissances
Novembre 2014
Marion Brown, Annie Pullen Sansfaçon, Amy Fulton
2. Une intégration complexe
• Mosaïque multiculturelle idéale
• Niveau de vie confortable
• Système santé
• Beauté naturelle
• Population vieillissante
• Initiatives encourageantes du gouvernement fédéral
Pourtant, l’expérience de 66 travailleurs sociaux formés à
l’extérieur du Canada suggère une réalité quelque peu
différente…
3. De nombreux travailleurs sociaux formés à
l’étranger doivent surmonter d’importants défis
avant de commencer à travailler au Canada :
Politiques d’immigration
+
Reconnaissance des diplômes étrangers
+
Autorisation d’exercer à titre de travailleur social
+
Obtention d’un emploi
4. Les difficultés des politiques :
Immigration
• Les politiques manquent de clarté, exigent beaucoup de
temps et ne sont pas conviviales.
Selon mon expérience, quiconque veut s’installer au Canada doit
attacher sa tuque et se préparer à un long processus qui est loin
d’être simple. Le mener à terme exige beaucoup de ténacité.
(Angleterre - 1)
Le processus d’immigration est extrêmement difficile. Le ministère
de l’Immigration a un site Web et une adresse courriel. Sans
numéro de téléphone, on n’a nulle part où appeler en cas de
questions. Tous les renseignements doivent être dénichés dans
Internet. Et lorsqu’on pose une question par courriel, la réponse –
qui vient généralement après plusieurs jours seulement – se résume
à un simple « consultez notre site Web ». (Australie - 1)
5. • Processus circulaire : Une offre d’emploi est
requise pour obtenir la résidence permanente
alors que la résidence permanente est
nécessaire pour obtenir une offre d’emploi
J’ai voulu immigrer en participant au
programme pour les travailleurs qualifiés. Le
hic, c’est qu’on doit avoir un emploi pour y
être admissible. Or, si tu n’as pas de permis de
travail, personne n’ose t’embaucher.
(Allemagne)
6. Les difficultés des politiques :
Reconnaissance des diplômes
étrangers
• Les critères manquent d’uniformité, les délais sont
considérables, et le processus est coûteux.
Le processus a pris quatre mois. Quatre mois! Et ils exigeaient
l’original de tous mes diplômes et certificats… Pour l’amour du
ciel! Ma famille et moi avons dû attendre quatre mois avant
de pouvoir nous nourrir! (Libéria)
Je me rappelle le sentiment de révolte qui m’a envahi à l’idée
d’avoir déboursé plus de 300 $ pour une lettre d’une page
dont le message était en réalité très peu clair et qui ne me
disait rien de précis. (Angleterre - 2)
7. Les immigrants doivent :
Faire affaire avec l’organisme responsable de reconnaître les
diplômes étrangers (souvent avec peu de conseils autres que
ceux du site Web)
+
Produire divers documents provenant de leur pays d’origine
+
Payer des frais
+
Composer avec d’autres défis liés à la langue, la culture et le
transport
8. Certains immigrants ayant une formation en travail
social décident de ne pas faire reconnaître leurs
diplômes :
Je sais que de nombreux immigrants résidents
permanents diplômés en travail social choisissent de
ne pas travailler dans ce domaine. Ils redoutent
l’obligation de passer par l’ordre professionnel.
(Pays-Bas)
Cela complique encore plus leur adaptation, puisque la
reconnaissance des diplômes est une étape importante
de la reconstruction d’une identité professionnelle dans
un nouveau contexte (Cardu, 2007: 433).
9. • Le délai de confirmation de reconnaissance
des diplômes a beaucoup varié d’un
participant à l’autre : de moins de six mois à
quatre ans, mais le plus souvent un an.
• Bien qu’il soit possible d’entreprendre les
démarches avant d’immigrer, très peu de
participants s’étaient prévalus de l’option.
10. Les difficultés des politiques :
Autorisation d’exercer
• C’est un processus long, pénible et contradictoire.
• Il faut se faire valoir.
J’ai commencé à comprendre comment les choses
fonctionnent en Amérique du Nord, et puis j’ai
commencé à me rebiffer, à résister. J’ai compris que, dans
ma province, et c’est propre à celle-ci, ce n’est pas ce que
tu connais qui compte. C’est qui tu connais. Alors j’ai
commencé à poser les bonnes questions et à faire des
pressions de la bonne manière et, au bout d’un moment,
on a considéré ma candidature. (Pays-Bas)
11. • Pour certains participants, se retrouver dans
une profession réglementée est une réalité
toute nouvelle, car dans de nombreux pays, la
profession de travailleur social ne l’est tout
simplement pas.
Ce qui m’a surpris initialement, c’est [l’ordre
professionnel provincial]. L’obligation d’être membre
d’un ordre professionnel est une importante
différence. En France, aucun ordre ou organisme ne
réglemente le travail social. Ainsi, rien ne t’oblige à
t’affilier de quelque manière. C’est une différence. Ici,
on n’a pas le choix. (France)
12. • Certains participants avaient appris entre les
branches que les exigences d’obtention d’une
autorisation d’exercer n’étaient pas les mêmes
pour tous.
Certains travailleurs sociaux des Philippines que j’ai
côtoyés avaient dû accumuler des heures pouvant
être créditées en faisant un stage, un cours, ou les
deux. Dans mon cas, [l’ordre professionnel] n’a rien
exigé de tel. (Philippines)
13. • Certains se sont résignés à suivre le processus.
Bien que je sois travailleur social, que j’aie un
diplôme en travail social, j’ai dû rencontrer les
responsables de l’ordre – c’était exigé. Le directeur
et moi avons eu une conversation téléphonique, puis
il m’a rappelé la semaine suivante pour me dire que
ses collègues et lui étaient impressionnés de ce que
j’avais à dire et qu’ils avaient une opinion favorable
à mon égard. J’ai trouvé ça drôle. Puis, j’ai arrêté d’y
penser en me disant que c’est ainsi que se font les
choses dans cette province. On n’a qu’à s’y faire.
(Angleterre - 1)
14. Recoupements entre la reconnaissance
des diplômes et l’autorisation d’exercer
Les participants ressentaient de la frustration à voir que ces deux
étapes sont inutilement distinctes.
[L’ordre professionnel provincial] m’a dit de faire reconnaître
mes diplômes par l’association canadienne. Mais quand j’ai
voulu obtenir l’autorisation d’exercer, [l’ordre] exigeait mes
relevés et autres documents. J’ai alors répondu : « Vous savez,
ça a été plutôt difficile de les faire venir d’Angleterre. Ne
pourriez-vous pas communiquer avec l’association
canadienne? » On m’a dit que l’ordre n’avait aucun contact à
l’association. J’ai alors répliqué : « Attendez, vous m’avez dit
que je ne pouvais pas m’inscrire tant que l’association
canadienne n’aurait pas reconnu mes diplômes. Alors, vous
pouvez sûrement appeler quelqu’un! » (Angleterre - 3)
15. Si les travailleurs sociaux canadiens connaissent
l’historique de cette division entre les paliers
national et provinciaux , les travailleurs sociaux
immigrants l’ignorent et la perçoivent comme
pénible, inutilement complexe et incohérente.
J’ai soumis tous les documents requis à l’Association
canadienne des travailleurs sociaux, qui a reconnu
mes diplômes et m’a agréé, mais tout en me disant
que si je voulais travailler dans une province, je
devrais soumettre ma candidature de nouveau, à
l’ordre professionnel provincial. (Israël)
16. Les difficultés des dynamiques
socioculturelles : Obtenir un emploi
• Ceux qui trouvent un emploi = « chanceux » +
« choyés » de n’avoir pas subi de
discrimination évidente durant le processus de
recherche d’emploi et d’embauche
• Ceux qui ne trouvent pas un emploi =
« déprimés », « frustrés », « découragés »,
« anxieux » et « perturbés »
17. Obtenir un emploi
• Exigences explicites et implicites
• Interactions et interprétations subtiles
Comment dois-je procéder pour faire connaître mes
compétences et dire : « Je suis disponible. Je suis prêt à faire
du bénévolat. Je vous offre mon temps et mes
connaissances... »? Comment dois-je faire? C’est ce qui me
semble le plus difficile. (Inde)
C’est un cercle vicieux : je n’ai pas d’expérience locale, n’est-ce
pas? Et je ne peux pas en avoir, car je n’ai jamais travaillé ici.
Alors comment je vais faire pour obtenir de l’expérience si
personne ne m’en donne l’occasion? (Ukraine)
18. Obstacles et défis rapportés :
• Discrimination
• Difficultés langagières
• Manque de familiarité avec les pratiques et les stratégies en
ressources humaines au Canada
• Travailleurs sociaux formés ici postulent pour les mêmes
emplois
• Diplômes étrangers
• Manque d’expérience de travail au Canada
• Autres « obstacles invisibles » - les raisons pour lesquelles un
travailleur social n’est pas embauché ne lui sont pas toujours
dévoilées
J’ai postulé de nombreux emplois. Parfois, à la suite de
l’entrevue, j’étais certain que je serais embauché, et puis je ne
l’étais pas. Et je ne sais vraiment pas pourquoi. (Libéria)
19. • Les participants ont affirmé avoir l’impression
que des employeurs potentiels ne les
convoquaient pas en entrevue en raison de :
– stéréotypes
– préjugés
– discrimination
• Les participants ont l’impression de recevoir des
messages confus quant à leur employabilité en
tant que travailleurs sociaux dans le contexte
canadien.
On nous fait comprendre entre les lignes qu’on veut nous
embaucher, qu’on cherche des étrangers, mais ils ne
nous convoquent même pas en entrevue. (Espagne)
20. • L’obtention d’un emploi de travailleur social =
un impératif économique qui facilite en plus
l’adaptation globale à la vie dans un nouveau
pays
• Le stress et la déception qui accompagnent la
difficulté de décrocher un emploi peuvent
entraîner des difficultés personnelles, comme
l’impression d’être inadéquat et le
découragement
21. Travailler dans un domaine autre que
le travail social
• De nombreux participants ont travaillé dans un
autre domaine, y compris les suivants :
– services correctionnels, tourisme, commerce de
détail, services d’alimentation, agriculture,
construction, entretien ménager, garde d’enfants,
soins de santé à domicile et services sociaux
• Certains de ces emplois ont néanmoins débouché
sur un poste en travail social une fois que les
participants ont acquis une certaine expérience
de travail au Canada.
22. Travailler dans un domaine autre que
le travail social
Au départ, je n’ai pas eu un poste en travail social; je
faisais plutôt des visites à domicile. Maintenant, j’occupe
un poste de travail social dans le cadre du programme
d’adoption. (Angleterre)
• Tous les participants ne considèrent pas les
postes dans un domaine autre que le travail
social de la même manière. Certains y voient des
avantages (tels que l’acculturation et l’occasion
d’accroître leur maîtrise d’une des langues
officielles du Canada) alors que d’autres y voient
une source de déception et de désillusion.
23. Conclusions
• L’intégration professionnelle n’est pas aussi simple qu’elle
paraît.
• L’expérience des travailleurs sociaux migrants est
déterminée par des facteurs multidimensionnels découlant
de contraintes personnelles, culturelles et structurelles à
petite, moyenne et grande échelle.
• Ajustements et adaptations sont requis non seulement de
la part des immigrants, mais des structures et des systèmes
canadiens également :
– Complexité des dynamiques socioculturelles (racisme,
discrimination, xénophobie)
– Reconnaissance des diplômes
– Autorisation d’exercer
24. Questions de discussion
• De quelles manières pourrait-on éliminer les obstacles propres au
processus de reconnaissance des diplômes?
• De quelles manières pourrait-on éliminer les obstacles propres au
processus d’autorisation d’exercer?
– Les RH et les agences qui embauchent ont-elles l’impression que la
reconnaissance des diplômes et l’autorisation d’exercer constituent
des obstacles?
• Dans quelle mesure les exigences liées à la reconnaissance des
diplômes et à l’autorisation d’exercer s’alignent-elles sur celles que
vous imposez aux travailleurs sociaux que vous embauchez?
• À quel point trouvez-vous que les travailleurs sociaux formés à
l’étranger sont bien préparés (prêts à travailler dans un nouveau
contexte)?
• Offrez-vous dans votre milieu de travail une formation/orientation
adaptée aux travailleurs sociaux formés à l’étranger?