This paper/book is the full PDF file of the acts and presentations of the colloquium that took place in Italy last year. The articles are rich and deserve a full and dense discussion.
Table des matières/ Les petits fours apéritifs
Introduzione
Louis Begioni
Alvaro Rocchetti
L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes ; comparaison avec les langues agglutinantes et isolantes 11
Luciana T. Soliman
Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 27
Sophie Saffi
La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 47
Mohammed Nabih
De l’organisation compositionnelle du discours médiatique électronique 91
Guy Achard-Bayle
Ondrej Pešek
La phrase en cotexte et la hiérarchie des unités mésotextuelles 121
Thomas Franck
Quand citer c’est faire. Analyse de la doxa existentialiste à partir de ses citations décontextualisées 161
Francesco Parisi
Le Schizo et les langues : la frase tra letteratura, linguistica e filosofia 177
Houda Landolsi
Le Rassemblement National et les prénoms. Construction du sens intégral dans le discours sur la francisation des prénoms : une affaire de… contexte ? 201
Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français "maintenant" et le...Louis de Saussure
Co-authored by Laua Baranzini. In Maas C. & Schrott A., Wenn Deiktika nicht zeigen:
Grammatikalisierung und Polyfunktionalität deiktischer Formen in den
romanischen Sprachen, Münster, Hamburg: Lit-Verlag, 53-71.
Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français maintenant et les ...Louis de Saussure
L. de Saussure & Laura Baranzini. 2009. Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français maintenant et les italiens ora et adesso. In : Christiane Maass / Angela Schrott (ed.): Wenn Deiktika nicht zeigen: Grammatikalisierung und Polyfunktionalität deiktischer Formen in den romanischen Sprachen, Münster, Hamburg: Lit-Verlag, 53-71.
Temporalité et spatialisation : théories et applications
XVIe colloque international de l’AIPL
Aix-en-Provence, 9 et 10 juin 2022
L’AIPL, en collaboration avec le Centre Aixois d’Études Romanes (CAER) d’Aix-Marseille Université et l’Università degli studi di Napoli « L’Orientale », organise les 9 et 10 juin 2022 son XVIe colloque international à l’Université d’Aix Marseille, France. En fonction de l’évolution de la situation sanitaire, le colloque se déroulera soit en présentiel dans les locaux de la faculté des Arts, Lettres, Langues et Sciences Humaines à Aix-en-Provence, soit à distance via la plateforme ZOOM.us, soit selon une formule mixte de participants en présentiel et de participants en visioconférence.
Les travaux et les échanges porteront sur la conception et l’expression linguistique de la temporalité et se répartiront en 3 sessions consacrées à l’application de la chronogenèse guillaumienne à différents systèmes de langue, à l’approche cognitiviste de la spatialisation du temps, et aux différentes théories linguistiques de la représentation du temps. Une session posters est également prévue.
Sophie Saffi
Chères et Chers collègues,
Je prie tous ceux et celles qui ne seraient pas encore inscrits de le faire le plus vite possible pour nous aider à l'organisation matérielle du colloque.
Si vous décidez de suivre le colloque par zoom, s'il vous plaît, inscrivez-vous quand même, vous ne cochez aucun repas.
Psycholinguistique / Psychomécanique Face à la Spiritualité HumaineEditions La Dondaine
Dans la perspective de ce colloque, il est temps et grand temps que je mette en chantier un travail fondamental sur la langue Pāli qui est un cas particulier de langue Indo-Aryenne? mais aussi un cas particulier d’une langue dont le discours principal est la spiritualité bouddhiste. La langue exprime les profondeurs les plus grandes de l’esprit et de l’âme humaines. Est-ce que l’étude d’une langue et d’un discours, de toutes les langues et de tous les discours peut permettre de saisir et d’approcfher la spiritualité humaine qui a produit le langage, qui a produit toutes les langues du monde? Si nous voulons comprendre ce qui se passe dans le cadre de la globalisation de notre monde comment peut-on trouver dans les langues humaines l’énergie multiple, diverse et même disparate qui permette cette même globalisation. Le monde de demain sera spirituel ou ne sera pas du tout, et la spiritualité ne peut s’exprimer que par le langage, les langues de tous les hommes. Voilà ma perspective mentale. Passons maintenant au projet de recherche des mois qui viennent.
une vue sur le structuralisme qui reste un courant linguistique qui a bouleversé le monde linguistique, un pas de l'humanité vers le développement vécu à nos jours.
(2005, avec Bertrand Sthioul), « Imparfait et enrichissement pragmatique », in Larrivée P. & E. Labeau (Eds), Nouveaux développements de l’imparfait, Amsterdam, Rodopi, 103-120.
Anticipation ou Extraction Cataphorique, Dans La Phrase en ContexteEditions La Dondaine
Vous trouverez ci-après la Table des matières et mes remarques sur l’article de Louis Begioni et Alvaro Rocchetti qui soulève un certain nombres de questions en phylogénie du langage considérée seulement pour les langues romanes exclusivement en Europe et donc tardivement dans l’après glaciation, excluant toute connexion avec le Grec (voire l’Arménien), mais faisant deux ou trois fois une comparaison avec l’anglais qui est une langue germanique très créolisée, il est vrai, au contact conquérant du français normand. Le français est fortement signalé comme exceptionnel sans faire référence au contact fort avec le Celte, gaulois, breton et autres, et les langues germaniques (spécificités de contacts importants pour la langue d’Oïl et le Picard).
Dr. Jacques Coulardeau, Université Paris I Panthéon Sorbonne.
L'influence de la linguistique structurale sur la didactique du français langue étrangère dans les années 60-70 avant son déclin à partir des années 80 en raison de la montée en force de l'interculturel.
Bernard Marr just published Generative AI in Practice (1), which brings together the matter he has been dealing with on his blogs: Artificial Intelligence from the simple practical point of view of a user along with a systematic question about what can the consequences be for the various jobs these users have? But the book is always schematic when it shows the negative consequences will not compare with the positive consequences, though bad or good, they will require a lot of changes in the way we work, the jobs available, and the mindset of the users.
Bernard Marr does not insist so much on the negative sides of GenAI, but he does list them, particularly all sorts of cheating by using GenAI to replace one’s own writing work, all types of misuse of the intellectual property of such mechanical production of text, images, videos or any other copyrightable product that the user presents as his/her own.
But he does not enter the details, and thus he remains superficial. The problems of misinformation, hallucination, and bias are a lot less important, even with deep fakes, though Bernard Marr remains superficial on such dangers. He considers these GenAI products more like patentable or trademark problems, which they are but that’s the only side or point of view of the businesses using this technology.
At the present moment, lawsuits are emerging on the Intellectual Property front with people getting ready to go to court for unauthorized use of protected data and items within LLMs, or the use of voices, slightly synthesized (hence plagiarism and plain theft) as commercial products sold with an unshared profit. I will concentrate, in the second part, on chapter 10 on education to enter some details I know from the practice of self-learning at many levels of the educational system. (2)
Les Arts en Balade in Clermont-Ferrand this month of May 2024 were a success because they expanded to two cities outside Clermont conurbation, Thiers and Vic-Le-Comte, there were many people everywhere, there were 240+ artists or groups in about the same number of places: public spaces dedicated for such events, supportive professional institutions like the Order of Lawyers and the Order of Architects, many stores of all sorts opening their businesses to one or two artists, and also many apartments in the city transformed into workshops where artists could present their work. They were also a success because they lasted four days and were just as dense on Friday, May 17 as on the three following days up to Monday, May 20. Note the case of Michelin who opened their conference rooms and galleries in their Headquarters to three artists with a very good service guiding the visitors and making feel, equally at ease, the audience and the works of art, even from some green challenge declared to be ecological. Thank God we are not in the Orsay Museum of Le Louvre
This complete covering of the event I was able to work on, plus some suggestions for further development and opening to other arts than only plastic arts inside exhibition rooms or halls and on portable media. The opinions and tips are just mine of course, not those of an Artificial Intelligence requested to caress the wild artistic animals of this event smoothly and avoid ruffling their hairs. I apologize if some find it slightly rough at times. Arts are often harsh, and thus critics have to be harsh too. To critically cover an art exhibition is a love affair, and as they say in French, we could pretend that good lovers are also good at chastising those they love.
Les Arts en Balade à Clermont-Ferrand ce mois de mai 2024 ont été un succès car ils se sont étendus à deux villes hors agglomération clermontoise, Thiers et Vic-Le-Comte, il y avait beaucoup de monde partout, il y avait plus de 240 artistes ou groupes dans environ le même nombre de lieux : des espaces publics dédiés à de tels événements, des institutions professionnelles exprimant ainsi leur soutien comme l'Ordre des Avocats et l'Ordre des Architectes, de nombreux magasins en tout genre ouvrant leurs commerces à un ou deux artistes, mais aussi de nombreux appartements en ville transformés en ateliers. où les artistes pouvaient présenter leur travail. Ils furent également une réussite car ils durèrent quatre jours et furent tout aussi denses le vendredi 17 mai que les trois jours suivants jusqu'au lundi 20 mai. A noter le cas de Michelin qui a ouvert ses salles de conférence et d’exposition à son siège social à trois artistes avec un très bon service guidant les visiteurs et faisant sentir, également à l'aise, le public et les œuvres d'art, même de quelque défi vert déclaré écologique. Dieu merci, nous ne sommes pas au Musée d'Orsay ou du Louvre
Ce reportage complet de l'événement sur lequel j'ai pu travailler, ainsi que ...
Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français "maintenant" et le...Louis de Saussure
Co-authored by Laua Baranzini. In Maas C. & Schrott A., Wenn Deiktika nicht zeigen:
Grammatikalisierung und Polyfunktionalität deiktischer Formen in den
romanischen Sprachen, Münster, Hamburg: Lit-Verlag, 53-71.
Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français maintenant et les ...Louis de Saussure
L. de Saussure & Laura Baranzini. 2009. Deixis temporelle argumentative: remarques sur le français maintenant et les italiens ora et adesso. In : Christiane Maass / Angela Schrott (ed.): Wenn Deiktika nicht zeigen: Grammatikalisierung und Polyfunktionalität deiktischer Formen in den romanischen Sprachen, Münster, Hamburg: Lit-Verlag, 53-71.
Temporalité et spatialisation : théories et applications
XVIe colloque international de l’AIPL
Aix-en-Provence, 9 et 10 juin 2022
L’AIPL, en collaboration avec le Centre Aixois d’Études Romanes (CAER) d’Aix-Marseille Université et l’Università degli studi di Napoli « L’Orientale », organise les 9 et 10 juin 2022 son XVIe colloque international à l’Université d’Aix Marseille, France. En fonction de l’évolution de la situation sanitaire, le colloque se déroulera soit en présentiel dans les locaux de la faculté des Arts, Lettres, Langues et Sciences Humaines à Aix-en-Provence, soit à distance via la plateforme ZOOM.us, soit selon une formule mixte de participants en présentiel et de participants en visioconférence.
Les travaux et les échanges porteront sur la conception et l’expression linguistique de la temporalité et se répartiront en 3 sessions consacrées à l’application de la chronogenèse guillaumienne à différents systèmes de langue, à l’approche cognitiviste de la spatialisation du temps, et aux différentes théories linguistiques de la représentation du temps. Une session posters est également prévue.
Sophie Saffi
Chères et Chers collègues,
Je prie tous ceux et celles qui ne seraient pas encore inscrits de le faire le plus vite possible pour nous aider à l'organisation matérielle du colloque.
Si vous décidez de suivre le colloque par zoom, s'il vous plaît, inscrivez-vous quand même, vous ne cochez aucun repas.
Psycholinguistique / Psychomécanique Face à la Spiritualité HumaineEditions La Dondaine
Dans la perspective de ce colloque, il est temps et grand temps que je mette en chantier un travail fondamental sur la langue Pāli qui est un cas particulier de langue Indo-Aryenne? mais aussi un cas particulier d’une langue dont le discours principal est la spiritualité bouddhiste. La langue exprime les profondeurs les plus grandes de l’esprit et de l’âme humaines. Est-ce que l’étude d’une langue et d’un discours, de toutes les langues et de tous les discours peut permettre de saisir et d’approcfher la spiritualité humaine qui a produit le langage, qui a produit toutes les langues du monde? Si nous voulons comprendre ce qui se passe dans le cadre de la globalisation de notre monde comment peut-on trouver dans les langues humaines l’énergie multiple, diverse et même disparate qui permette cette même globalisation. Le monde de demain sera spirituel ou ne sera pas du tout, et la spiritualité ne peut s’exprimer que par le langage, les langues de tous les hommes. Voilà ma perspective mentale. Passons maintenant au projet de recherche des mois qui viennent.
une vue sur le structuralisme qui reste un courant linguistique qui a bouleversé le monde linguistique, un pas de l'humanité vers le développement vécu à nos jours.
(2005, avec Bertrand Sthioul), « Imparfait et enrichissement pragmatique », in Larrivée P. & E. Labeau (Eds), Nouveaux développements de l’imparfait, Amsterdam, Rodopi, 103-120.
Anticipation ou Extraction Cataphorique, Dans La Phrase en ContexteEditions La Dondaine
Vous trouverez ci-après la Table des matières et mes remarques sur l’article de Louis Begioni et Alvaro Rocchetti qui soulève un certain nombres de questions en phylogénie du langage considérée seulement pour les langues romanes exclusivement en Europe et donc tardivement dans l’après glaciation, excluant toute connexion avec le Grec (voire l’Arménien), mais faisant deux ou trois fois une comparaison avec l’anglais qui est une langue germanique très créolisée, il est vrai, au contact conquérant du français normand. Le français est fortement signalé comme exceptionnel sans faire référence au contact fort avec le Celte, gaulois, breton et autres, et les langues germaniques (spécificités de contacts importants pour la langue d’Oïl et le Picard).
Dr. Jacques Coulardeau, Université Paris I Panthéon Sorbonne.
L'influence de la linguistique structurale sur la didactique du français langue étrangère dans les années 60-70 avant son déclin à partir des années 80 en raison de la montée en force de l'interculturel.
Bernard Marr just published Generative AI in Practice (1), which brings together the matter he has been dealing with on his blogs: Artificial Intelligence from the simple practical point of view of a user along with a systematic question about what can the consequences be for the various jobs these users have? But the book is always schematic when it shows the negative consequences will not compare with the positive consequences, though bad or good, they will require a lot of changes in the way we work, the jobs available, and the mindset of the users.
Bernard Marr does not insist so much on the negative sides of GenAI, but he does list them, particularly all sorts of cheating by using GenAI to replace one’s own writing work, all types of misuse of the intellectual property of such mechanical production of text, images, videos or any other copyrightable product that the user presents as his/her own.
But he does not enter the details, and thus he remains superficial. The problems of misinformation, hallucination, and bias are a lot less important, even with deep fakes, though Bernard Marr remains superficial on such dangers. He considers these GenAI products more like patentable or trademark problems, which they are but that’s the only side or point of view of the businesses using this technology.
At the present moment, lawsuits are emerging on the Intellectual Property front with people getting ready to go to court for unauthorized use of protected data and items within LLMs, or the use of voices, slightly synthesized (hence plagiarism and plain theft) as commercial products sold with an unshared profit. I will concentrate, in the second part, on chapter 10 on education to enter some details I know from the practice of self-learning at many levels of the educational system. (2)
Les Arts en Balade in Clermont-Ferrand this month of May 2024 were a success because they expanded to two cities outside Clermont conurbation, Thiers and Vic-Le-Comte, there were many people everywhere, there were 240+ artists or groups in about the same number of places: public spaces dedicated for such events, supportive professional institutions like the Order of Lawyers and the Order of Architects, many stores of all sorts opening their businesses to one or two artists, and also many apartments in the city transformed into workshops where artists could present their work. They were also a success because they lasted four days and were just as dense on Friday, May 17 as on the three following days up to Monday, May 20. Note the case of Michelin who opened their conference rooms and galleries in their Headquarters to three artists with a very good service guiding the visitors and making feel, equally at ease, the audience and the works of art, even from some green challenge declared to be ecological. Thank God we are not in the Orsay Museum of Le Louvre
This complete covering of the event I was able to work on, plus some suggestions for further development and opening to other arts than only plastic arts inside exhibition rooms or halls and on portable media. The opinions and tips are just mine of course, not those of an Artificial Intelligence requested to caress the wild artistic animals of this event smoothly and avoid ruffling their hairs. I apologize if some find it slightly rough at times. Arts are often harsh, and thus critics have to be harsh too. To critically cover an art exhibition is a love affair, and as they say in French, we could pretend that good lovers are also good at chastising those they love.
Les Arts en Balade à Clermont-Ferrand ce mois de mai 2024 ont été un succès car ils se sont étendus à deux villes hors agglomération clermontoise, Thiers et Vic-Le-Comte, il y avait beaucoup de monde partout, il y avait plus de 240 artistes ou groupes dans environ le même nombre de lieux : des espaces publics dédiés à de tels événements, des institutions professionnelles exprimant ainsi leur soutien comme l'Ordre des Avocats et l'Ordre des Architectes, de nombreux magasins en tout genre ouvrant leurs commerces à un ou deux artistes, mais aussi de nombreux appartements en ville transformés en ateliers. où les artistes pouvaient présenter leur travail. Ils furent également une réussite car ils durèrent quatre jours et furent tout aussi denses le vendredi 17 mai que les trois jours suivants jusqu'au lundi 20 mai. A noter le cas de Michelin qui a ouvert ses salles de conférence et d’exposition à son siège social à trois artistes avec un très bon service guidant les visiteurs et faisant sentir, également à l'aise, le public et les œuvres d'art, même de quelque défi vert déclaré écologique. Dieu merci, nous ne sommes pas au Musée d'Orsay ou du Louvre
Ce reportage complet de l'événement sur lequel j'ai pu travailler, ainsi que ...
A novel of political fiction that does not reach science-fiction but wants to tell us a lot about the modern world and what the choices are for us in this decaying future. The pattern, the Gestalt of this book seems to be that no matter what humans try to do, good or bad, progressive or reactionary, democratic or dictatorial, there is no hope and no future for those initiatives. Any attempt at changing the decaying world we live in is doomed to be a failure.
What is history? The production of what happens in our world, in fact, in the cosmos, and no human individual, no human crowd, no human anything can control or change the course of such events. If by any chance we want to understand what makes history, we have to consider billions, maybe trillions of parameters in the cosmos and we, the human dwarves we are, do not even control half a dozen of them and our vanity makes us believe we can command the cosmos because we want to be gods. In the old days and in other civilizations than the Western denied Bible, they were humble enough to give this power to a God that was not of the human species.
Here Salman Rushdie follows a witch bewitched by a goddess who pretends she can create a whole empire from a bag, or rather a sack of seeds, and this leads to a total and pitiful defeat and absolute termination of the attempt, but it means Salman Rushdie is predicting that all the positive elements his witch tries, religious tolerance, education for boys and girls equally, women’s rights, gender-friendly policies, peace and coexistence, and finally freedom of expression are all doomed to fail and crumble as soon as they reach some height. In other words, his novel and his vision are the rewriting of the Babel Tower myth.
Sorry boys and girls, no future for any progressive dream, just as much as for any regressive nightmare. Life and history are neither a dream nor a nightmare. They are nothing but cosmic determinism governed by the cosmos itself, and we can be happy with the fact our world is not in a black hole. But after all, maybe that’s the destiny and fate of humanity, to end up in a bottomless black hole.
This series is very well done, suspenseful, at least as much as possible, twisted and distorted like any crime series should be but unluckily it is biased. It states to anyone who wants to listen that crime has roots in only one thing: family dysfunctioning and nothing else. The fact that society leads some people who do not fit in the standard mold to rebellion, frustration and violence by being biased against them and bullying them all the time and if they want to have contacts with people, they have to go down on their knees and beg for a favor.
That’s too bad because the cases in this rural north Wales area deserve a lot better, and probably, a more open vision of crime in this community.
LA CHAISE-DIEU MÉDIÉVALE & LA RÉVOLUTION BÉNÉDICTINE--MEDIEVAL LA CHAISE-DIEU...Editions La Dondaine
On July 13, 2024, at La Chaise-Dieu, the European Network of Casadean Sites will present a public conference on the topic of the Benedictine Revolution in Livradois-Forez, led by the La Chaise-Dieu Abbaye, starting a bit earlier with the religious reform brought up by Charlemagne in the 9th century. The Abbaye was founded less than 200 years later. The conference will focus the discussion – and it has to be a discussion – on the consequences of the Carolingian religious reform, the agricultural revolution with the invention of the horse collar and the management of the land, the rotation of crops, cultivation, and fertilization. Then the proto-industrial revolution that will bring five types of watermills for grain, oil, tan, hemp (fiber and cloth), and slightly later paper. This will make Livradois-Forez an essential region producing hemp cables and hemp cloth for ships. The first result was 75 days without any work in the year, no work before and after morning and evening angelus, and a pause with midday angelus. The second result was better food and demographical expansion, up to the end of the 13th century.
Then things became darker. Overpopulation brought unrest and all sorts of contests and conflicts at the religious level itself (Crusades in the Middle East, but also against the Cathars in France. Then in 1346, the Black Death, a pandemic in Europe of the bubonic plague, caused a tremendous level of deaths. Then, the One Hundred Years War started in 1337. The resilience of the population enabled Europe in general to go through, and around 1450 the printing press was developed by Gutenberg enabling the printing of books for the highly-needed university training of great numbers of people to bring Europe back on its feet. The Renaissance was the result of this period, a tremendously positive and creative period, and at the same time, a highly-disturbed era with The Reformation, and the religious wars that concerned all countries at a time when nationalism was emerging.
Two speakers-debaters will present the five or six centuries concerned as fast as possible to let the audience debate questions like:
1- The influence and impact of Charlemagne’s religious reform.
2- The feudal system: land ownership and serfdom.
3- The role of technology to produce energy, replace human work, and develop new products.
4- Religious tensions with Avignon and Rome conformist Popes.
5- The role of The Inquisition and religious justice.
6- The fate of the cable industry when Omerin In Ambert is number one in Europe or the world for various high-security and high-technicity cables.
7- The culture: architecture, music, painting, carving, theater, oratorio and opera, literature.
It will take place at LA CHAISE-DIEU – AUDITORIUM GEORGES CZIFFRA
SAMEDI 13 JUILLET 2024 – 14-17 HEURES 30.
The two main speakers so far are Dr Jacques COULARDEAU (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) and PhD Graduate Student Clément GOMY (Université Clermont Auvergne
Xavier Rouard searches and researches the linguistic world, scientific research of course, for the origin, the cradle, the homeland, or the motherland, of Indo-European. He is not the only one in the world, but he goes against practically all the others by positioning this linguistic nursery in Central Asia based on a Eurasian or trans-Eurasian language or languages. But precisely Eurasian languages only came into existence from the moment when syntactic-analytic Indo-Iranian languages left the Iranian plateau where they had stationed themselves when they arrived from Black Africa, some 40,000 years ago, or BCE, not much difference here. They had to go through the Ice Age first and finally get on the move after this climate event probably around 15,000 BCE, some east to the southern Asian continent, with Pakistan and India, others west down into Mesopotamia and from there to Europe. These people, on both side, encountered people who spoke other languages, Turkic agglutinative languages, and isolating Sino-Tibetan languages, mostly. These languages had integrated the Denisovans and their own language(s). Thes encountered people were hybrid Homo Sapiens with a varying proportion of Denisovan DNA in Central Asia, and the same in Mesopotamia with a varying proportion od Neanderthalensis DNA. When they reached Europe, the population was essentially of Turkic language and origin with a varying level of hybridization with European Homo Neanderthalensis. It is such encounters that generated or engendered the various Indo-European or Indo-Aryan languages
My approach is phylogenetic and thus it is absolutely impossible for me not to take into consideration the migrations and geographic, hence social, cultural and linguistic movements of these populations. That’s the basic principle of Joseph Greenberg who considered that all these migrations had only one matrix or melting pot that produced the emergence of human articulated language on the basis of what these emerging Homo Sapiens inherited from the other Hominins from which they were descending.
But Joseph Greenberg and his disciples encountered a problem: in all language you should find a certain number of words whose “roots” are universal and stable in meaning. These are the roots coming from Black Africa before any migration out of Black Africa. The problem is then that it does not enable any topology of languages. So, they, Greenberg and his disciples, tried to introduce “grammatical” or “syntactic” words, but even so it does go that far.
To get somewhere you have to ask the question about the phylogeny of articulated language(s), and there you only find three articulations in a precise order: root-languages (by the way vastly ignored by Xavier Rouard), Isolating character languages, and agglutinative as well as synthetic-analytic languages according to the migrations out of Black Africa. If you do not consider this phylogeny, then you put all sorts of languages together in the melting pot [...}
Three crime series in one entry.
First, The Brokenwood Mysteries; seasons 1 to 3.
Second, The Coroner, Complete Series.
Third, The Unforgotten, Series 1 to 4, Complete Series.
Police series, detective stories, criminal mysteries, and many other options in the field of crime and delinquency have been explored by the English from the first moment they started existing, a very long time ago.
Shakespeare and he was not the first author in the field, loved those stories of crimes and criminals, having people assassinated, or mutilated, or tortured on the stage from Titus Andronicus to Romeo and Juliet.
Dickens was a good one too in that field, but Shakespeare looked at crime from the outside, from some ethical point of view. Dickens looked at it from inside, from the point of view of the criminals themselves forced to commit crimes in order to simply survive.
Then you had Mary Shelley and her Frankenstein and then later on Dracula came into the picture, and many others trill we came across Conan Doyle who edicted the proper form of a crime story or detective story, hence an investigation of a crime we can only see from outside, and the investigation is to get into it to see how it got developed and who was the criminal.
Since then, with the radio at first, the cinema next, and finally television leading directly to streaming and the Internet, those police adventures have just become adventures, and the extreme form is what they call action films where violence is no longer criminal since it has been transformed into the ultimate survival if not the final renascence before the apocalypse.
Enjoy these series.
The Mayas are more a cultural and historical mystery than a vast field of knowledge. We know less than we can even imagine about them. Where did they come from? What language did they speak before coming to Mesoamerica? What were their beliefs before arriving in Yucatan? They brought with them cacao, chocolate, writing, mathematics, extremely advanced calendars, phenomenal knowledge about stars, planets and the cosmos. They even brought with them a vigesimal counting system with the mathematics going along with it, including the equivalent of our zero (that we borrowed from the Arabs in the 17th century) that enabled them to count up to the infinite.
The most remarkable achievement is that they managed to merge phenomenal art with the glyphic writing system of theirs. We know the glyphs were works of art, for one, and a syllabary phonetic writing system, for two. For a very long time the second aspect was rejected, particularly by Sir Eric Thompson. Luckily this untruth was rejected after his death, with a little bit of disregard before his death. The glyphs were not flat symbolic of items and purely artistic, like some kind of secondary if not superfluous decoration. The colonizing Spaniards considered that decoration as diabolical and they burned and destroyed all the books and artifacts that carried such artistic representations of Maya reality and such glyphs that could only be the language of the devil.
Imagine how surprised I was when I discovered this catalogue of an exhibition at the MET Museum of Art in New York. They provide some images of the glyphs, and even some sentences written with them. But they systematically ignore the glyphs, transliterate the sentences and words into Latin-transliterated Maya, and simply work and speculate on these transliterations and their translations into English. They lose all the richness of meaning and beauty of the glyphs. In other words, they terminate, bring to a final end the destructive work of the Spaniards, the culturicide of the Mayas and the Maya culture and civilization. My full study (about 15,000 words, only in English) is available
The 3 Literacies of Modern Age, the Trikirion of CommunicationEditions La Dondaine
Review of the Trikirion of Communication:
Symboleracy, Numeracy and Techneracy
The starting point is the phylogeny of communication because the educational topic I am going to address cannot even exist if there is no communication. We have to understand that all Hominins were communicating. Probably all Hominins after Homo Erectus included had some command of some articulated language, but only Homo Sapiens reached the comprehensive and sustainable command of the fully-articulated language, probably around 200,000 BCE.
The next great stage Is the development of representational and symbolic Inscriptions and paintings or engravings on all durable media available, rockface in caves, stone, bone, ivory, and tusks. This symbolic transcription of stories and experience, maybe some spiritual language accompanying some rituals, is the first form of writing seen as symbolic transcription and going back to 300,000 BCE with Homo Naledi, 100,000 BCE with Homo Neanderthalensis, and 50,000 with Homo Sapiens.
Syllabic and alphabetical writing only came around 3,500 BCE for Homo Sapiens. There might have been older cases, but archaeology has not yet covered the whole world for all types of symbolic inscriptions that could have led to symbolic phonetic writing. The next stage was the printing press which enabled mass education and mass communication.
ENTRE IA & LES ÉCRANS LE THÉÄTRE EST EN QUESTION
The Journal “Théâtres du Monde” has just published its 34th issue. I have two articles published in that journal. So here is first of all the table of contents of the 2024 issue, and I added to these three pages all the preparatory work I have done to write the two articles that deal with the series HUNTERS and the author Lorraine HANSBERRY. These reviews and critiques are all bilingual, English for some and French for the others.
I do feel like a raisin the sun. I also added some documents on the recent question brought up about race in the USA where some states are restricting the teaching of slavery and Black history in the USA because it may, might, would, and I think SHOULD traumatize the poor white darlings who really need some traumatization about their imperialistic ideological terrorism.
Four films or series.
1- John Woo’s Silent Night (2023),
2- Doug Liman’s Road House (2024),
3- Albert Hughes’s The Continental (2023),
4- Marcela Saïd and Julien Despaux’s Ourika (2024),
all seen on Amazon’s Prime Video, hence distributed by Amazon Prime Video, all dealing with violence in our societies and all claiming that violence is justified top answer and respond to a violent society, a violence coming from outside our community, and that outside can introduce anti-immigrant accusations or plainly racist claims, both anti-white and anti-any-ethnicity.
Does it help us understand this violence ? Does these films enable us to devise a proper response to prevent and solve such violence? Both times, a resounding NO. But in both cases, it plays in the hands of the most extreme forces on the nationalist side of life, the side that refuses to consider those who are not pure according to their definitions as the cause of all our problems, and not only those people but also all products that may come from the countries concerned by these ethnic groups. This is true in the USA, in Canada, with Mexico playing the wide-open gate to the previous two, and all over Europe.
What game are these streaming services playing? Preparing coming elections! But it might go the wrong way for them. Now what is the wrong way? Good question. No answer because the ballot boxes will be the only valid answer. First stop, the European Elections in June 2024.
Mo Xiang’s third volume of the saga on The Blessing of a Heaven Official is there in front of me and this saga is emanating with so much force that no one can resist the tanha that tells them “Go For It! There is pleasure in it all!” I am sure you want to discover the pleasure there is in these volumes, but remember the authoress is a woman and as such she develops a sweet, soft, and catching psychology that will turn you completely berserk if you do not keep your feet well anchored in the earth.
The King Ghost Hua Cheng from Ghost City is behind every move the ascended Xie Lian is inspiring or is inspired by and for. His meeting this Xie Lian after 800 years of supernatural and surreal life in our vast cosmos was so mind-stirring, intelligence-moving, and body-inspiring that the pure ascetic Buddhist he is supposed to be, nearly fell into the cauldron of eroticism. He managed not to fall, but that was very close this time since he was unconscious and Hua Cheng took advantage of the situation and pretended that he had to save his “friend” before he drowned, though Hua Cheng knew perfectly well Xie Lian could not drown, hence cannot die. But, well, Hua Cheng kissed Xie Lian unconscious as he was, I mean in his unconscious mind, because Xie Lian was unconscious, and thus he could kiss him since he could not protest. What a twisted and I guess tortured mind he is. He should try Buddhist meditation to hypnotize himself into plain decent abstinence.
But sure enough, the encounter with the Venerable of Empty Words promises to be a fair adventure in which Xie Lian’s mind and body will be chastised, abused, and even probably raped. There will be quite a lot of repair work to do on the psyche and the conscious rightfulness of our Xie Lian. I guess Hua Cheng will take advantage of such situations to steal a couple more kisses. Never trust a ghost because they have no soul anymore and they have no honor either. So, lying, pretending, and even impersonating what they are not to seduce their gullible victims is some kind of sport for these fuzzy beings, if they can really BE.
Oppenheimer is an essential character in US history. He is the left-leaning Jew who provided the USA with the Atom Bomb that enabled the US to defeat Japan faster than the planned standard land and air attack by the Soviets and the Chinese Communists, officially endorsed in the Yalta Conference ( 4–11 February 1945) by Churchill, Truman, and Stalin. Truman did not have the atomic bomb yet and will only have it in July 1945. So, he bluffed and agreed with the Soviet plan because he had no alternative … yet. He reneged his agreement in July-August 1945, and he dropped two atomic bombs on Hiroshima and Nagasaki on August 6 and 9, 1945. The victory over Germany was a joint effort. The victory over Japan was a self-centered and egotistic solitary procedure not even negotiated with the allies of the US. The United Kingdom might have been informed, maybe. But the USSR was not. The Americans were already and had been for nearly two centuries, on the “America First” and “Make America Great Forever” lines that we have known all along and directly since 1918.
And within 9 years Oppenheimer will be ostracized because he was leaning to the left and there were Communists around him. He submitted and disappeared in some sideline university job. He had nowhere to go, as opposed to Charlie Chaplin who went back to England. As a Jew, he could have gone to Israel, but that was not a real optimistic solution at the time. He might even have gone to the USSR with his communist wife. But he stayed put in the USA, in his closet-university-job. The film does not really explore this dilemma: hide away in the USA, go to the Jewish Israel, or go to the USSR. On one hand, it was his old depressive nature that came back. On the other hand, it would have been going back to his faith and his roots, even if it could have looked like treason. On the third hand, on yet another other hand, it would have been plain treason.
THE DESCENT TO HELL IN THREE STAGES – 2003-2015-2019
I brought together three films and series presented here both in English and French in anti-chronological order.
1- The film 7500, 2019.
2- The series Blindspot, 2015-2020.
3- The film The Dreamers, 2003
If you take them in this backward order, you may understand that today’s world is not at all different from the one in 1968 when the Vietnam War was going on full blast, the Chinese Cultural Revolution was in full swing and the West per se was living its first full sexual revolution with the arrival of the baby-boomers to the full unquenchable desire to hormonally and fully enjoy life. Have some interesting reading.
FIRST STAGE – AMAZON STUDIOS – 7500 – 2019
There is little to say about such a film. It is just artificial entertainment that shows nothing and proves nothing. It is all stressing detail to keep the audience glued to the screen.
SECOND STAGE – BLINDSPOT – FULL SERIES – FIVE SEASONS – 2015-2020
A very long series for very little apart from stressed and stressful situations that always end well anyway, meaning leading to a worse situation in the next episode.
THIRD STAGE – BERNARDO BERTOLUCCI – THE DREAMERS – 2003
Paris Spring 1968. We all know what happened then in France. The victory of the unions, the defeat of the left, and the impossibility for the left to understand that any “events” of that sort will always lead to the victory of the right in the next elections, and today we have to update the data and say the victory of the extreme right. It might be slightly more complex, but basically, that’s what it is and when the left wins this social-minded left will become conservative within at the most two years and it might even turn reactionary within these two years, at times even less. They like power so much.
Amazon Prime Video and Blumhouse Productions love dysfunctioning mothers who, in the name of their love for their children, are ready to kill anyone only on their gut feelings that this anyone is guilty of who knows what apart from the devil.
The film is tricky enough to lure and fool the audience, and the horror of the racist and dysfunctional situation can be believed till the end when the trick is revealed. Note this revelation implies that all daughters from divorced or motherless families are by definition, even by principle, liars.
You might also find the father falling in an ice-cold river under a blizzard of some sort funny, and with his winter coat on, and then he goes on parading around outside, in the unheated car, and even in some kind of social situation without changing his freezing clothes. Like at the Oscars yesterday the costume design Oscar was delivered to a costume designer wearing no clothes at all, except a small cardboard sign where sexually necessary for the picture, meaning that costume designers are so badly treated and paid that they cannot even afford to buy underwear.
A little bit more about the context, schools, religion, Islam and girls, divorced parents, single Muslim male parent, etc. would have maybe given some depth to the story and made it less artificial.
A film that wants to be science-fiction. So, learn the lessons that emerge from it.
1- Let black doctors or scientists get into a hospital “laboratory” and the most unimaginable horrors will take place.
2- Let black people be fully treated in a hospital and they will become guinea pigs, especially in the hands of black doctors.
3- Let a mother treat her son and the worst possible crime will take place under your own nose and in front of your own eyes.
4- Shall I go on?
If this is not pure racism laced with some sexism, I just wonder what would qualify. How can anyone imagine such man-made scientific schizophrenia to be possible in the hands and under the scalpel of a doctor, a scientist? I guess it is urgent to have clear regulations and controls on such activities. Because be sure that wild clandestine medical experiments are happening every day in the world.
Duration is all that plants and animals experience. They last as long as either possible or necessary. When the phylogenic target of bringing in the next generation of life is fulfilled, the plant or the animal can die or wither away. Homo Sapiens, and probably most Hominins developed from experience the need to measure this duration, at first in days and nights, and then in clusters of days and nights. Then they can coordinate their observations and notice some cosmic items go through regular existential cycles, first of all, the sun rising or lowering in the sky with shortening or lengthening days and nights. Second, the moon and its phases are numbered as two, four, or three, but systematically waxing and waning. You can easily measure all that in solar days and that is the beginning of time: a human invention quantifying the duration of anything in observable regular elements.
From what we know the Mayas were among the most advanced people for such time-quantification and they developed all sorts of calendars to do this. But they were neither the first one nor the last one. They were not the best either, though they were very good. I will even say that all the lines of dots or check marks or squares or other geometric forms we can find in all the caves in the world in which Hominins and Homo Sapiens lived and that they decorated in many ways are the quantification of various phenomena, though we don’t always know which ones.
This book by Hunbatz Men concentrates on Mayan calendars but in modern language and modern terms, not necessarily in the real Mayan terms at the time, up to 3,000 years ago. It assumes the Mayas were aware of the leap years, though we do not seem to have any real reason to believe so. The author does not work on any serious lunar hypothesis, maybe a calendar. It vaguely mentions but does not explore the Venus cycles as Morning Star and as Evening Star. To work on the Pleiades, why not, yet one question does not concern such a long cycle but the simple working of the ritualistic 260-day Tzolk’in Calendar that is out of sync with the solar calendar, the 365-day Haab Calendar, and even more so if we consider the 360-day Haab Calendar, and how the ritual activities dictated by the Tzolk’in Calendar can be prescribed and predicted and performed when their Tzolk’in dates can fall at any time, in any season in the Haab Calendar. It is hard enough to coordinate the 12-and-a-half moon cycles over a solar calendar, but many civilizations are dealing with it and managing it with cyclical corrections.
That’s why it would have been good to give us some elements on this very same problem with the Tzolk’in calendar when we can compare with the difficult adaptation of the Muslim Lunar ritualistic calendar to the Gregorian calendar. The floating Ramadan is the result of this necessary adaptation. In other words, the present book is slightly short.
To bring together South Africa in the days of apartheid and from the point of view of the white Afrikaners with the tremendous career of Queen with Freddie Mercury and after his death without him shows how ahead of their times this band was when they started as a boys’ band and then when they matured into a full-fledged career.
Apartheid and racism bring segregation and discrimination which systematically reject differences. No future for those who do not have the skin color, the religion, the language, the sexuality, the musical affiliation, even as a simple audience, as the dominant, selected, elected, chosen entity that only has god and science over their heads. And their God has chosen these people to be his chosen people, and these people chosen by God believe what God has explained to them that science justifies their elected-ness, selected-ness or chosen-ness. They are the acme of the creation, and all others are just plain rejects that no one has the heart to destroy.
But be sure God will do it some day. Which god since there are many if not even plenty? Who cares. Each God will recognize his own supporters when they are all dead.
But then you may have no supporters at all, dear God or Gods. It does not really matter. We don’t need these supporters to eat, drink and survive. We have all we need in heaven and the sky. In fact, it was a mistake of ours to have created humanity. The planet would be so much better with none of the human parasites.
Meet the Madman Prophet, who is most the time mixed up with the other God Profit who is universal and derails every so many years, not so many as you may think every ten years or so. But with this God there is always a small population that manages to store away what they need to take over when the crisis has come to an end and the dead victims have been buried or cremated.
An interesting experiment to bring a poetry workshop in a prison For us who have lived in the mythology of Johnny Cash and San Quentin, and all his songs and work about and in prisons there is nothing strange about that But what happens afterward? The inmates get some satisfaction in their work, writing poetry and singing, slam or whatever it may be, but what’s next after their prison term? No reason to reject the experiment but a follow-up action is necessary to know what these men – and it is only men – have become or will become when they get out of the railings, out of the cage. We are not all Johnny Cash, are we?
Since this operation was sponsored by Alliance Française, it would nice to know what kind of follow-up work this Alliance Française is going to perform. The responsibility cannot be the poet’s. But it is interesting to be confirmed one more time that there are many ways for prison inmates to reform. One element is not taken into account. 98% of the population is Sunni Muslims. What is the impact on such an experiment? What does Islam bring to the experiment that would otherwise not be there. Étienne Russias should try to show us this dimension, since, as far as I know, he is a standard young man educated in the Christian traditions, maybe not the religion, but the traditions definitely like being christened, being buried religiously, being married religiously. How did he deal with a 98 percent Muslim group? How many Muslims were taking part, among the inmates and among the workshop workers?
But that’s the beginning of the intelligent globalization we need, a globalization that is founded on differences and not some westernized homogenization.
(No French Translation) The Incas partly inherited and partly developed phenomenal agriculture in the very hard conditions of the Andes: desertic areas, difficult water resources, high altitude, no real draft animal, no wheel, and yet the Andes before and under the Incas produced miraculous results that the Spaniards destroyed in a few years with epidemics and mass killing.
It is easy to say the Incas were barbarians and that covers the genocide, the culturicide, the systematic uprooting and exposing of anything they could have believed or done, based on NO direct contact with them before the “conquest” that must have killed 50% of the population in two or three years with smallpox and other infantile and childhood diseases, plus a few sword killings when there was some resistance.
Unluckily, Gordon McEwan does not really come to a clear vision in his book because he only bases his work on what has been collected by others essentially on the only source of some Spanish colonizers trying to justify the massacre and apocalyptic colonization. The real barbarians were the colonizers, and it is their testimony that is nearly only taken into account. Archaeology is about one century behind what it is in other regions of the world.
Things have slightly changed over the last ten years, but we are still a long way behind what we should have done. That leaves the door open to some like Hunbatz Men pretending the Mayas, Incas and many other Indigenous Native Americans are the descendants of the humanoid people who were established in two continents that have disappeared without leaving any trace of their existence behind them, Mu and Atlantis. And then it is easy to bring in that the inhabitants of these two disappeared continents were extra-humans from some distant civilization who landed on earth and prospered and then found some humanoid animals there and civilized them. We are their descendants, I mean of these extra-humanly civilized humanoid animals from long ago.
Maybe we could simply ask some questions about the origins of the Incas, the Mayas, and many other native American peoples of South and Meso-America. We know the Native Americans of North America and Canada up to Greenland came from Siberia. But that solution is not, feasible for the Native Americans of South and Meso-America. But we are so mentally colonized by North American Protestant Puritans who believe they are the center of the world that research about South America and Mesoamerica has scandalously been neglected. Some mental colonization of this type is also a genocide since it excludes millions of people from what these North American WASPs call the “human race” which is of course white, etc.
Impact des Critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) sur les...mrelmejri
J'ai réalisé ce projet pour obtenir mon diplôme en licence en sciences de gestion, spécialité management, à l'ISCAE Manouba. Au cours de mon stage chez Attijari Bank, j'ai été particulièrement intéressé par l'impact des critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) sur les décisions d'investissement dans le secteur bancaire. Cette étude explore comment ces critères influencent les stratégies et les choix d'investissement des banques.
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4. Table des matières
Introduzione
Louis Begioni
Alvaro Rocchetti
L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux
langues romanes ; comparaison avec les langues agglutinantes
et isolantes 11
Luciana T. Soliman
Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 27
Sophie Saffi
La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée
en français et en italien 47
Mohammed Nabih
De l’organisation compositionnelle du discours médiatique
électronique 91
Guy Achard-Bayle
Ondřej Pešek
La phrase en cotexte et la hiérarchie des unités mésotextuelles 121
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5. 6 La phrase en contexte : grammaire et textualité
Thomas Franck
Quand citer c’est faire. Analyse de la doxa existentialiste à
partir de ses citations décontextualisées 161
Francesco Parisi
Le Schizo et les langues : la frase tra letteratura, linguistica e
filosofia 177
Houda Landolsi
Le Rassemblement National et les prénoms.
Construction du sens intégral dans le discours sur la
francisation des prénoms : une affaire de… contexte ? 201
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 6 23/06/2023 11:58:43
6. Introduction
Dans la perspective psychomécanique qui nous occupe de près, le
rapport langue/discours est généralement centré sur les mots et leurs
éléments formateurs, mais l’observation des faits de discours garde
une importance remarquable dans la démarche méthodologique de
Gustave Guillaume (1883-1960). Certes, la théorie de Guillaume, ins-
crite dans le cadre de la linguistique structurale, ne va pas au-delà de
la phrase, au point que l’idée de texte est pour le moins décevante.
C’est la linguistique textuelle des années 1970 qui prendra en compte
l’enchaînement de groupes plus vastes que la phrase et qui examinera
les relations existant entre ces groupes et leur contexte. Les remarques
sur quelques faits grammaticaux isolés demeurent pourtant gravées
dans les raisonnements des linguistes intéressés par certains segments
récursifs du texte. Si ce n’est pas un système de contraintes relatif à la
phrase et à sa continuité qui définit l’ensemble, l’exploration en long
et en large de la structure du texte et de ses propriétés intrinsèques
peut conduire au dévoilement de la cohérence et de la cohésion obser-
vées à travers le grand angle du contexte. Cette dernière notion, que la
linguistique théorique a souvent négligée, mais que Guillaume a ébau-
chée dans sa célèbre contribution sur le problème de l’article de 19191
,
intègre – ou mieux éclaire – l’interprétation linguistique et textuelle
1
Guillaume, G. (1975 [1919]) : Le problème de l’article et sa solution dans la langue
française, préface de Roch Valin, Paris/Québec, Nizet/Les Presses de l’Université Laval.
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7. 8 La phrase en contexte : grammaire et textualité
en permettant de profiter des informations données par l’environne-
ment linguistique, voire celles qu’offrent la situation socio-discursive
ou le patrimoine culturel partagé par les co-énonciateurs, dans le but
de comprendre certains usages ou certaines régularités du discours.
Pour nous, la portée discursive et textuelle des faits de langue « en
action » est tangible dans les domaines de la narratologie, de la sty-
listique, sans compter les territoires fort complexes de la sémiotique.
Mais toute textualité répondant à une visée globale du sujet écrivant/
parlant et puisant à une situation socio-discursive déterminée peut
posséder une cohésion et une cohérence valables.
Le présent recueil, qui a pour but de théoriser ou de décrire les
aspects grammaticaux, stylistiques et compositionnels des textes,
s’ouvre sur la contribution de Louis Begioni et Alvaro Rocchetti qui
développent une réflexion importante sur l’ordre des mots. Ils exa-
minent l’unité-phrase en étudiant le passage du latin aux langues ro-
manes, sans négliger la comparaison avec les langues agglutinantes et
isolantes. Leur étude s’avère productive dans la mesure où elle permet
de saisir la portée des variations dans le temps de l’agencement syn-
taxique au sein de la phrase. Intéressée par la texture micro-linguis-
tique du texte, Luciana T. Soliman examine et inventorie les formes
verbales voici/voilà et leurs fonctions dans un corpus de légendes en
français en décodant les paramètres clés de ces deux anciens « pré-
sentatifs ». Afin de ne pas limiter la notion de texte au champ linguis-
tique, Sophie Saffi explore une bande dessinée en montrant d’abord
les caractéristiques distinctives de ce discours iconotextuel, et en révé-
lant ensuite la complémentarité des textes et des dessins. Après avoir
décrit les constructions syntaxiques privilégiées dans les didascalies
et les bulles, elle revisite de manière novatrice le découpage d’un scé-
nario de BD selon l’organisation séquentielle d’un texte conçue par
Jean-Michel Adam. C’est grâce au même modèle d’analyse de départ
que Mohammed Nabih examine les pratiques discursives du journa-
lisme numérique en identifiant d’emblée une hétérogénéité qui marque
le discours médiatique en ligne : les séquences narratives, descriptives,
argumentatives et explicatives se combinent jusqu’à s’imbriquer dans
un rapport hiérarchique variable. Guy Achard-Bayle et Ondřej Pešek,
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 8 23/06/2023 11:58:43
8. Introduzione 9
quant à eux, vérifient le passage de la phrase au texte et définissent le
niveau mésotextuel. Ils creusent les questions liées à la diversité et à
la quantité des unités intermédiaires pour se pencher ensuite sciem-
ment sur le trouble existant entre période et macroproposition, entre
séquence et paragraphe. Pour ce qui est de la contribution de Thomas
Franck, qui s’inscrit dans la linguistique pragma-énonciative, elle ex-
ploite le discours existentialiste d’après-guerre afin de témoigner de la
manière dont la force des citations de ce type de discours en porte-à-
faux entre le littéraire et le philosophique est déformée par son emploi
hors contexte, valorisant ainsi la plénitude du sens contextuel d’un
acte de parole. Le rapport étroit existant entre la phrase et le contexte
est également supposé par Francesco Parisi, qui examine de près les
particularités de l’énoncé « schizophrénique » dans un roman auto-
biographique d’élite. Pour conclure, Houda Landolsi se concentre
sur le discours politique de l’assimilation en prônant un décryptage
textuel fondé non seulement sur les données condensées entre les
frontières du texte, mais aussi sur ces données que l’on trouve en de-
hors du discours et précisément aux niveaux inter- et extra-discursif
en vue de découvrir les mécanismes sociétaux gouvernant le rapport
entre le dit et le non-dit.
Luciana T. Soliman
Università di Padova
Sophie Saffi
Aix-Marseille Université
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10. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin
aux langues romanes ; comparaison avec les langues
agglutinantes et isolantes
Louis Begioni
Università degli Studi di Roma Tor Vergata, Université de Lille
Alvaro Rocchetti
Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
Lorsqu’on observe de près l’évolution des langues romanes1
, de-
puis le latin jusqu’à nos jours, on est constamment mis en présence de
déplacements dans l’ordre des mots qui vont pratiquement toujours
dans le même sens : on est passés, par exemple, d’une langue mère
que l’on qualifie de « flexionnelle », avec des déclinaisons à la finale
de ses substantifs et des désinences à la fin de ses verbes, à des langues
filles qui les ont réparties différemment. Ces flexions sont réduites ou
remplacées dans les langues romanes, pour le substantif, par des élé-
ments anticipés (articles et nouvelles prépositions) et, pour le verbe,
partiellement ou totalement, selon la langue – moins systématique-
ment toutefois que dans le cas du substantif –, par des auxiliaires, eux
aussi anticipés, et dans l’une des langues romanes (le français), par des
pronoms personnels anticipés « liés ». Toutes les langues romanes ne
sont pas au même stade d’évolution, mais la tendance à l’anticipation
des marques morphologiques est commune.
Dans un premier temps nous étudierons l’anticipation des marques
morphologiques du substantif et du verbe, puis les mouvements au ni-
veau de la phrase qui concernent plus directement le plan syntaxique
comme par exemple l’anticipation de la conjonction pour les propo-
1
Le présent article se fonde sur les positions défendues ailleurs par Begioni (2012),
Begioni et Rocchetti (2010, 2013, 2015, 2019) et Rocchetti (1980, 2005).
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11. 12 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
sitions subordonnées. Nous porterons une attention particulière pour
la remontée du verbe de la fin de la phrase – position qui caractérise
les langues agglutinantes – à la seconde place après le sujet – plutôt ca-
ractéristique des langues flexionnelles – afin d’interpréter l’évolution
générale du fonctionnement systémique des langues romanes.
1. Les anticipations au niveau du substantif et du verbe
Le mouvement d’anticipation qui touche à la fois le substantif et
le verbe se traduit par un processus de démorphologisation. Pour le
substantif, la morphologie générale du genre et du nombre n’est plus
portée par le nom lui-même : elle est transférée sur un mot gramma-
tical antéposé et étroitement lié à lui. Pour le verbe, on peut observer
un mécanisme analogue pour toutes les langues romanes, avec l’antici-
pation de l’auxiliaire aboutissant à la démorphologisation de l’aspect.
1.1. Au niveau du substantif
Dans toutes les langues romanes, l’anticipation concerne à la fois
les morphèmes grammaticaux du genre et du nombre, mais aussi, dans
une moindre mesure, les morphèmes lexicaux comme les suffixes.
1.1.1. L’anticipation de la morphologie du genre et du nombre
On peut constater que toutes les langues romanes passent par
une phase où la double morphologie est présente : elles conservent la
marque post-nominale du genre et du nombre, tout en ayant anticipé
– sauf pour l’article défini du roumain qui est postposé au substantif –
ces mêmes marques sur un déterminant qui peut être un article, un
adjectif démonstratif, un adjectif possessif. C’est le cas, à ce stade,
de toutes les langues romanes, y compris de l’ancien français. Mais,
dans cette dernière langue, la morphologie nominale du pluriel ne
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 12 23/06/2023 11:58:43
12. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 13
distingue pas le masculin du féminin au cas régime. Or, comme c’est
le cas régime qui sera généralisé dans la phase ultérieure, cela explique
que le français ne distingue pas le genre au pluriel. Du moyen fran-
çais au français d’aujourd’hui, l’anticipation est devenue totale dans la
langue orale, même si la langue écrite conserve encore la morphologie
de l’ancien français. La neutralisation du genre au pluriel opérée sur
les déterminants a pour conséquence de le renvoyer au signifié du
substantif. Cette tendance est l’un des signes avant-coureurs de l’évo-
lution typologique du français jusqu’à ce jour.
Les autres langues romanes – qui, remarquons-le, ne sont pas
passées par une opposition entre cas sujet et cas régime – ont, elles,
conservé la double morphologie. La marque morphologique finale du
substantif se trouve anticipée dans la forme de l’article, puis systéma-
tiquement répétée par le substantif : ainsi, it. sing. la casa/pl. le case,
esp. sing. la casa/pl. las casas.
1.1.2. La réduction des suffixes par anticipation
Comme nous venons de le voir, l’anticipation au niveau du subs-
tantif concerne surtout les morphèmes grammaticaux du genre et du
nombre. Les morphèmes lexicaux postposés au substantif – comme
les suffixes diminutifs, augmentatifs, péjoratifs… – semblent épar-
gnés par ce processus. Seule la langue française amplifie largement
aujourd’hui l’anticipation de ce type de suffixe. Ainsi, on ne dira plus
un garçonnet mais un petit garçon, alors que, dans la plupart des autres
langues romanes, le suffixe n’est pas anticipé : it. un ragazz-ino, esp.
un chiqu-ito, un chiqu-it-ín, un chiqu-irr-it-ín, roum. mic-uţ. On peut
penser qu’en français, après l’anticipation de la morphologie du genre
et du nombre, le suffixe lexical se retrouve à la dernière place du subs-
tantif et peut donc être anticipé à son tour. La nouvelle logique de la
construction du substantif en français repose sur un accent tonique
qui clôt l’expression du signifié. Ainsi le substantif se réduit au seul
signifié de son radical et tout ajout de morphème est de moins en
moins cohérent avec la logique du système linguistique. Toutefois, en
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13. 14 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
français, dans les langues spécialisées, ce type de suffixation est encore
possible (ex. cancer > cancéreux, cancérigène, cancérologue…).
1.2. Au niveau du verbe
1.2.1. L’anticipation de l’auxiliaire
Elle constitue le mécanisme le plus général au niveau du verbe : il
s’agit d’une anticipation de l’aspect verbal qui passe d’une morpholo-
gie interne en latin à une expression anticipée, constituée d’un auxi-
liaire et d’un participe passé. L’auxiliaire porte la marque de l’aspect
verbal accompli et le participe passé du verbe apporte la signification.
Ce rapport entre auxiliaire et participe passé diffère selon les langues.
Par exemple, en italien, le participe passé est encore fortement lié à
l’auxiliaire, avec une dimension verbale évidente, alors qu’en français
le participe passé fonctionne véritablement comme un adjectif. Ainsi,
le camion est chargé peut être rendu en italien de deux manières : il
camion è caricato qui exprime une action accomplie du verbe caricare
(« on est en train de le charger »), et il camion è carico, lequel exprime
un état du sujet (« il a été chargé »).
1.2.2. Le pronom personnel sujet obligatoire en français
C’est le point sur lequel la différence entre le français et les autres
langues romanes est la plus nette. Alors qu’en espagnol, en portugais,
en italien ou en roumain, la forme verbale aux différents temps inclut
le pronom sujet, implicitement ou dans sa finale flexionnelle, la langue
française ne l’inclut plus : il doit donc être exprimé soit par un subs-
tantif, soit par un pronom sujet. Cela signifie que l’on se retrouve dans
les deux cas, dans une situation comparable à celle du substantif :
comme les langues romanes autres que le français incluent dans leur
forme verbale le sujet de l’action, elles n’ont pas recours à un pronom
sujet anticipé, cependant que lorsque le verbe est rattaché à un subs-
tantif (qui précède le verbe ou le suit), le sujet de l’action est spécifié
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14. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 15
deux fois, par la forme verbale elle-même et par le substantif sujet qui
la précède ou qui lui fait suite. En revanche, en français, le sujet du
verbe n’est exprimé qu’une seule fois, soit par le substantif, soit par
le pronom, lequel est désormais obligatoire s’il n’y a pas de substantif
sujet.
Remarquons cependant qu’en français parlé, très fréquemment, le
sujet thématique de la phrase est repris par un pronom clitique obliga-
toire ; la phrase tend à se constituer en deux éléments fondamentaux :
le thème, élément qui est posé, et le rhème qui explicite le thème. Par
exemple, dans la phrase du français parlé, Mon frère, il va au cinéma
ce soir, « mon frère » constitue le thème, c’est-à-dire le sujet logique
de la phrase, et « il va au cinéma ce soir » en constitue le rhème. On
peut constater que dans le rhème le pronom personnel sujet reprend
le sujet de la phrase.
Par rapport aux autres langues romanes, on a donc franchi succes-
sivement deux étapes.
La généralisation obligatoire du pronom lorsqu’il n’y a pas de
substantif sujet (cas du français standard : ex. Mon frère (ma sœur)
va au cinéma ce soir > il (elle) va au cinéma ce soir), contrairement
aux autres langues romanes : esp. va al cine esta tarde/it. va al cinema
questa sera/roum. se duce la cinema în seara asta.
L’utilisation de la reprise par un pronom personnel sujet, même
si on dispose d’un substantif sujet : c’est la reprise du thème par le
rhème (ex. : Mon frère, il va au cinéma ce soir).
On peut penser que cette nouvelle structure de la langue parlée
sera celle du français de demain. Elle est déjà courante lorsque le
thème est exprimé par un pronom fort : Lui, il va au cinéma ce soir/
Elle, elle va au cinéma ce soir.
2. Les mouvements au niveau de la phrase
Ces mouvements sont caractérisés par des anticipations qui ren-
forcent, d’une part, les prépositions et, d’autre part, les conjonctions
de subordination.
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15. 16 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
2.1. Le rôle des prépositions
Les prépositions, déjà partiellement présentes dans la langue latine
en complément de la flexion, se sont développées, en particulier pour
remplacer les désinences casuelles du génitif, du datif et de l’ablatif
qui se trouvent ainsi antéposées. Pour la distinction entre le nominatif
et l’accusatif, c’est essentiellement la position par rapport au verbe qui
sert de discriminant : le nom qui précède le verbe est généralement
le sujet et celui qui suit le verbe exprime l’objet. Certaines langues
(espagnol, roumain) ont introduit des prépositions même dans le cas
de l’objet pour distinguer l’objet animé de l’objet inanimé : ainsi, en
espagnol, la préposition « a » précède l’objet animé (ex. He conocido a
tu padre, « j’ai connu ton père ») et la langue roumaine fait de même,
en rajoutant un pronom et la préposition pe à l’objet animé : L-am
cunoscut pe tatăl tău.
2.2. Les conjonctions de subordination
Des particules sont venues compléter certains modes verbaux,
comme le subjonctif précédé de « que » (français, espagnol), « che »
(italien), « să » et « că » (roumain) et même, pour cette dernière langue,
l’infinitif a trouvé, comme en anglais, une particule anticipée en rem-
placement de l’infinitif en -r ou en -re des autres langues romanes :
chanter, dormir, se disent en roumain : a cânta, a dormi. Cette évolution
plus poussée de la langue roumaine est à mettre en relation avec la
double particule d’introduction de la subordination que nous venons
d’observer (să et că) et avec le fait que la troisième personne comporte,
comme en anglais, un marquage spécifique : le subjonctif a en effet
identifié ses formes de première et de deuxième personnes avec l’in-
dicatif, mais il a gardé une forme verbale spécifique pour la troisième
personne. Ainsi, le présent du subjonctif du roumain reprend, pour les
personnes de l’interlocution, les formes du présent de l’indicatif : ex.
indicatif (eu) cânt, (tu) cânţi/subjonctif (eu) săcânt, (tu) să cânţi. Mais
la troisième personne est différente : (el) cântă/(el) săcânte.
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16. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 17
En revanche, les autres langues romanes – y compris le français –
ont généralisé la conjonction « que », laquelle fonctionne comme une
particule de troisième personne antéposée à l’ensemble de la propo-
sition subordonnée. Seule la langue française a porté cette généralisa-
tion à son terme dans la langue orale, mais seulement pour les verbes
réguliers du premier groupe et pas pour l’interlocution au pluriel :
– ind. je chante subj. que je chante
– ind. tu chantes subj. que tu chantes
– ind. il chante subj. qu’il chante
Mais :
– ind. nous chantons subj. que nous chantions
– ind. vous chantez subj. que vous chantiez
On peut donc observer deux orientations au niveau des simplifi-
cations morphologiques en cours qui font ressortir une grande cohé-
rence au sein de chaque système linguistique : soit la simplification
porte sur les personnes interlocutives (cas du roumain, cf. l’anglais)
et, dans ce cas, la troisième personne doit recevoir une marque mor-
phologique spécifique pour bien souligner l’opposition entre interlo-
cution et hors interlocution (d’où le -s ajouté à la troisième personne
en anglais et le maintien d’une troisième personne du subjonctif en
roumain) ; soit la simplification se porte sur la généralisation de la
troisième personne et, dans ce cas, ce sont les éléments de l’interlocu-
tion qui doivent être marqués. Ces choix, somme toute, très différents
– on pourrait même dire qu’ils sont systémiquement opposés – ont été
effectués en fonction de la cohérence du système de chaque langue et
ce processus est en cours depuis presque deux millénaires.
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17. 18 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
3. Explication générale
3.1. La remontée du verbe
Quelle peut être la cause d’un tel bouleversement de l’ordre des
mots entre la langue-mère et les langues-filles ? Et cette langue-mère
n’était-elle pas déjà, elle aussi, en cours d’évolution à partir d’une
langue-mère antérieure ? Il est évident que la langue latine présente
des caractéristiques qui la rattachent au type des langues aggluti-
nantes, mais aussi des innovations qui se prolongeront et se dévelop-
peront dans les futures langues romanes. Ainsi, dans les phrases com-
plexes, comprenant plusieurs propositions enchâssées les unes dans
les autres, le verbe de la proposition principale tend à remonter en
deuxième position afin de clarifier l’enchaînement sémantique et syn-
taxique de l’ensemble des propositions. Par la suite, ce nouvel ordre
des mots va s’imposer, même dans les phrases simples et entraîner de
nouvelles interactions systémiques
3.2. Les interactions systémiques
Le passage progressif d’une typologie agglutinante à une typolo-
gie fonctionnelle des langues romanes a donc pour conséquence le
changement de l’ordre des mots de S O V à S V O. Le nouvel ordre
des mots, qui fixe dans la phrase la place des syntagmes suivant leur
fonction, va provoquer l’affaiblissement progressif des déclinaisons.
L’anticipation de la morphologie nominale est sans doute une consé-
quence de tous ces bouleversements. On peut constater que, dans les
langues romanes où l’anticipation nominale n’est pas complètement
aboutie, l’ordre des mots n’est pas définitivement fixé car le sujet
n’arrive pas systématiquement à la première place. On peut décrire
l’ordre des mots dans ces langues par la formule suivante : (S) V O.
Seule la langue française qui a totalement anticipé la morphologie no-
minale et bien avancé dans l’anticipation de la morphologie verbale, a
désormais un ordre des mots strict du type S V O.
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18. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 19
4. D’une typologie à l’autre : des langues agglutinantes aux langues
flexionnelles et aux langues néo-isolantes
4.1. Quelle nouvelle opposition typologique entre les langues romanes ?
Nous venons d’examiner le passage progressif d’une typologie ag-
glutinante à une typologie flexionnelle, en analysant en particulier les
changements au sein même du latin, puis du latin aux langues romanes.
Dans un premier temps, le latin perd définitivement les dernières ca-
ractéristiques de la typologie agglutinante avec l’anticipation du verbe
à la seconde place de la phrase en affirmant ses caractéristiques typo-
logiques flexionnelles. Dans un deuxième temps, du latin aux langues
romanes, l’anticipation morphologique nominale de toutes les langues
romanes annonce-t-elle le passage à une nouvelle typologie linguis-
tique et, si oui, laquelle ? On constate que toutes les langues romanes,
sauf le français, évoluent vers une anticipation morphologique nomi-
nale partielle, avec une double morphologie – celle du déterminant et
celle du substantif – mais sans anticipation au niveau du verbe, dans
la mesure où la morphologie post-verbale (exprimant la personne) est
renforcée. Ces deux mouvements typologiques opposés ne semblent
pas annoncer un changement typologique susceptible de se produire
dans un proche avenir.
4.2. Le français, langue à part dans les langues romanes ?
Dans l’évolution du latin aux langues romanes, seule la langue
française a entamé une double anticipation à la fois nominale et verba-
le. L’anticipation nominale est quasiment achevée dans la langue par-
lée et l’anticipation verbale, avec un décalage diachronique, est bien
avancée, elle aussi, par l’instauration du pronom personnel sujet obli-
gatoire et l’affaiblissement progressif des désinences post-verbales. La
désinence de la première personne du pluriel « -ons » est déjà antici-
pée sous la forme du pronom « on » suivi de la forme verbale commu-
ne aux trois premières personnes du singulier. À l’origine, le pronom
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19. 20 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
« on » avec une valeur d’impersonnel, provenait du nominatif latin
homo. Mais, récemment, au cours du XXe
siècle, le pronom « on »
s’est progressivement imposé dans la langue parlée avec la valeur de
« nous », au point qu’on peut estimer qu’aujourd’hui il remplace le
pronom « nous » dans plus de neuf fois sur dix. Seule la désinence de
la seconde personne du pluriel résiste encore, même si, dans des situa-
tions de communication particulières, on peut constater sa disparition
(ex. au marché : « qu’est-ce qu’elles veulent les petites dames ? » pour
« que voulez-vous acheter ? »). Ces deux mouvements d’anticipation
(verbale et nominale) vont dans le même sens et sont le signe d’une
nouvelle structuration typologique de la langue française. Le substan-
tif et le verbe vont vers un modèle démorphologisé qui ressemble de
plus en plus à celui des langues isolantes. Toutefois, ce nouveau mo-
dèle ne ressemble pas complètement à celui des langues isolantes, en
particulier celles d’Extrême-Orient comme le mandarin. Le détermi-
nant porte en effet désormais la morphologie nominale et est intime-
ment lié au substantif. De la même manière le pronom personnel sujet
porte la morphologie verbale et est, lui aussi, intimement lié au verbe.
Par ailleurs, le substantif et le verbe appartiennent toujours à deux
catégories linguistiques bien distinctes, chacune avec un fonctionne-
ment qui lui est propre : articles et prépositions pour le substantif,
pronoms et auxiliaires pour le verbe. Le français est pour l’instant la
seule langue romane à se diriger vers un nouveau modèle typologique
que nous qualifierons de « néo-isolant lié », dans la mesure où le lien
obligatoire et intime entre le déterminant et le substantif d’une part, et
celui entre le pronom personnel sujet et le verbe d’autre part, en sont
les caractéristiques fondamentales et spécifiques.
Ces liens entraînent aussi une autre conséquence qui rapproche,
cette fois, le français du fonctionnement des langues isolantes : la
disparition de l’expression de la morphologie dans la désinence du
substantif, aussi bien que dans celle du verbe, a conduit la langue
française à disposer d’un nombre de monosyllabes bien plus élevé que
les autres langues romanes. C’est qu’en effet, une fois la désinence
morphologique anticipée, la partie du substantif qui apporte le sens
se trouve réduite et tend à devenir commune au substantif et au verbe
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20. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 21
puisque la différence entre ces deux valeurs est déjà exprimée par les
éléments morphologiques anticipés. Ce n’est pratiquement jamais le
cas dans les autres langues romanes : sauf cas exceptionnel, la double
composition aussi bien du substantif que du verbe (1- apport du sens
+ 2 - désinence morphologique) entraîne dans ces langues la nécessité
de disposer au minimum de deux syllabes.
Un exemple concret de comparaison peut être parlant : prenons
le cas du verbe faire en français et de ses correspondants dans les
autres langues romanes : l’italien fare, l’espagnol hacer et le roumain
a face. Observons d’abord l’utilisation, en français parlé, du même
monosyllabe pour le verbe : je fais, tu fais, il/elle fait, on fait, j’ai fait,
j’avais fait… mais aussi pour le nom, au singulier comme au pluriel : le
fait, les faits, un fait, des faits… En revanche, en espagnol, les formes
correspondantes sont au moins bisyllabiques : hago, haces, hace, ha-
cemos, haceis, hacen… el hecho, los hechos. Elles sont, de plus, très
diversifiées les unes par rapport aux autres, au point qu’on peut re-
marquer que la seule consonne qui se trouve dans toutes les formes
– la consonne initiale h – est aussi la seule qui… ne se prononce pas !
La diversité italienne est tout aussi remarquable : faccio, fai, fa, fac-
ciamo, fate, fanno, pour le verbe et il fatto, i fatti, pour le substantif.
Il en est de même pour le roumain : (eu) fac, (tu) faci, (el) face, facem,
faceti,(ei) fac, pour le présent du verbe et faptul, fapte, pour le subs-
tantif singulier et pluriel. On notera qu’il y a en roumain, dans ce cas,
une seule forme commune (fac, monosyllabique, remarquons-le) entre
la première personne du singulier et la troisième du pluriel, mais, en
revanche, aucune forme commune entre le substantif et le verbe.
La réduction formelle dans la langue française que nous venons
d’observer pour les dérivés du verbe faire (devenu, lui aussi mono-
syllabique depuis l’amuïssement du e final) touche un grand nombre
de verbes français. Il suffit de penser aux verbes du premier groupe
en -er, comme par exemple passer : je passe, tu passe(s), il passe, on
passe… ils passe(nt) qui coïncident avec le singulier et le pluriel du
substantif : la passe, les passe(s), une passe, des passe(s). On voit que
les formes bisyllabiques de l’espagnol (paso, pasas, pasa… un paso,
dos pasos) et de l’italien (passo, passi, passa… un passo, due passi) sont
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21. 22 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
devenues régulièrement monosyllabiques en français. L’anticipation
de la morphologie liée nominale et verbale permet donc une grande
réduction des formes avec une tendance très nette à se rapprocher
des monosyllabes des langues isolantes d’Extrême-Orient. On est loin
de l’indo-européen – la langue agglutinante du départ – avec le verbe
placé à la fin de la phrase et tous les substantifs et les verbes pourvus
de désinences morphologiques. La langue intermédiaire – le latin –
gardait encore souvent le verbe à la fin de la phrase et n’avait entrepris
l’évolution d’anticipation que pour le substantif : il avait bien déjà
développé des prépositions, mais pas encore créé les articles. Toutes
les langues romanes ont poursuivi cette évolution en anticipant aussi
la morphologie verbale avec la création des auxiliaires. Mais seule la
langue française a été jusqu’au bout de ce processus d’évolution en
anticipant aussi la morphologie verbale du genre et du nombre sous la
forme du pronom personnel sujet obligatoire.
Conclusion
Les phénomènes que nous avons analysés nous permettent donc
de mieux comprendre les évolutions différenciées des langues ro-
manes. On assiste à la création progressive d’une nouvelle syntaxe qui
conserve des éléments liés tout en mettant en évidence le caractère
indépendant des constituants fondamentaux de la phrase. On peut
comparer la construction d’un discours à la construction d’une mai-
son : de même que pour la maison on utilise des briques, des portes,
des fenêtres, des poutres, des tuiles, etc., de même pour le discours
on utilise des substantifs, des adjectifs, des verbes, des adverbes, etc.
Mais une accumulation de briques, de portes, de fenêtres, de poutres
et de tuiles ne fait pas une maison. Il faut ajouter du ciment pour que
les briques soient bien reliées entre elles et pour que les portes et les
fenêtres soient bien à leur place. Il en est de même dans le discours où
les éléments qui apportent le sens (les substantifs, les adjectifs qualifi-
catifs…) et ceux qui apportent les actions (les verbes, les adverbes…)
sont bien reliés entre eux par ce que l’on appelle « la morphologie ».
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22. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 23
Il s’agit d’éléments d’ordre syntaxique qui assurent la cohésion de
la phrase, comme les articles, les prépositions, les pronoms, les au-
xiliaires… Ils sont à la fois indépendants des éléments qu’ils intro-
duisent, mais aussi intimement liés à eux. Employés seuls, ils n’au-
raient aucun sens et seraient incompréhensibles. Nous venons de voir
qu’ils n’existent pas dans toutes les langues et que, dans les langues ro-
manes, ils sont de création relativement récente et à un stade différent
selon les langues. Une question se pose dès lors : comment procèdent
les langues qui ne les possèdent pas ?
Nous nous permettons de montrer ici, brièvement, par un exemple,
comment fonctionne, sur ce point, une langue agglutinante qui ne
dispose pas d’éléments syntaxiques indépendants-liés. Dans le mot-
phrase turc suivant, on ne compte pas moins de 14 éléments suffixés
au mot initial Paris :
Parislileştiremediklerimizdensinizdir
La traduction de ce seul mot turc est une phrase française com-
posée, elle, de 13 éléments ! Elle commence par la fin du mot turc
(sinizdir = vous êtes) et se termine par le début de la phrase turque
(Parisli = parisien) :
« Vous êtes de ceux que nous n’avons pas réussi à rendre parisiens ».
L’unité de ce mot est liée à l’harmonie vocalique (i/e) qui est don-
née par le -i- contenu dans la syllabe finale du premier élément (Paris).
Si on avait utilisé le mot Istanbul, l’harmonie vocalique aurait été en
rapport avec le u de la dernière syllabe (bul), ce qui aurait donné :
Istanbullulaştıramadıklarımızdansınızdır
« Vous êtes de ceux que nous n’avons pas réussi à rendre stambouliotes ».
Morer (1986 : 10), dans son ouvrage Grammaire de la langue
turque, définit ainsi l’harmonie vocalique :
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23. 24 Louis Begioni, Alvaro Rocchetti
La règle de l’euphonie, ou harmonie vocalique, constitue la base de la
grammaire turque. En tant que langue agglutinante, le turc exprime les
rapports grammaticaux au moyen de suffixes en nombre fort important.
Toutes les fois qu’il s’agit d’ajouter à un mot une terminaison quelconque,
ce suffixe se prononcera avec un son doux, si la voyelle dominante qui est
la voyelle finale du mot, est une voyelle douce (e, i, ö, ü), ou avec un son
dur, si c’est une voyelle dure (a, ı, o, u).
Quel est l’intérêt, pour une langue agglutinante, d’avoir recours
à cette variation des voyelles de tous les suffixes à partir de la der-
nière syllabe du mot de base ? Deny (1955 : 16), dans ses Principes de
grammaire turque, explique que « l’harmonie vocalique est un phéno-
mène à la fois phonétique et morphologique : elle assure, en effet, une
certaine cohésion entre les éléments morphologiques constitutifs du
mot ». On pourrait combiner les constatations de ces deux grammai-
riens de la langue turque en observant que, devant le nombre « fort
important » de suffixes, il est nécessaire que soit soulignée « la cohé-
sion entre les éléments constitutifs du mot » (ibid.). C’est donc, en
dernière analyse, pour un besoin de clarté que le discours turc recourt
à l’harmonie vocalique. Ne peut-on pas penser qu’il pourrait en être
de même avec la création dans nos langues – encore partiellement
flexionnelles, mais aussi ex-agglutinantes, ne l’oublions pas – d’un
nombre de plus en plus important de « particules antéposées-liées »
lesquelles tendent manifestement à remplacer les suffixes. C’est, en
tout cas, une idée à méditer…
Bibliographie
Begioni, L., Rocchetti, A. (2010) : « Phénomènes de déflexivité du latin
aux langues romanes : quels mécanismes systémiques sous-tendent cette
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le cadre d’une systémique diachronique des langues: exemples en français
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24. L’évolution de l’ordre des mots dans la phrase du latin aux langues romanes 25
cologie des langues d’Europe. Théories, méthodes et applications, Rennes,
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26. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif
Luciana T. Soliman
Università di Padova
Le genre discursif de la légende se caractérise généralement par
un emploi important de phrases dénuées d’artifices rhétoriques puis-
sants. Ces phrases, qui gouvernent la narration à l’aide d’une parataxe
fréquente, assurent la clarté et l’accessibilité au sens, comprimant ain-
si les élans d’érudition et évoquant ce raffinement sans excès que la
tradition connaît.
Dans les légendes écrites par Henri Gougaud1
(L’Arbre à soleils,
1979), les outils morphosyntaxiques voici et voilà, qui répondent à
cette exigence de simplicité, recourent avec une certaine abondance.
Leur présence s’inscrit dans une narration visant à instruire le lecteur,
qui peut méditer sur le secret de sa morale ou sur les valeurs humaines
perpétuelles qu’elle préconise. En effet, les histoires recueillies et re-
formulées par le conteur découlent d’une énonciation dictée pour la
plupart par la logique du mythe ou du rêve : l’homme se confronte à
1
Henri Gougaud (Villemoustaussou 1936 −) est romancier et conteur. Il est l’auteur
de nombreux ouvrages, notamment Les Sept Plumes de l’aigle (1995) et L’Enfant de
la neige (2011). Grâce à un vaste répertoire de légendes et de contes, il a écrit une
vingtaine de recueils, parmi lesquels Contes du vieux moulin (1968), Contes de la Hu-
chette (1973), L’Arbre à soleils : légendes du monde entier (1979), L’Arbre aux trésors :
légendes du monde entier (1987), L’Arbre d’amour et de sagesse : contes du monde
entier (1992), Contes des sages soufis (2005), La Clé des cœurs : contes et mystères du
pays amoureux (2017).
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 27 23/06/2023 11:58:43
27. 28 Luciana T. Soliman
ses limites ou est gagné de manière temporaire par ses passions dans
de longs voyages jusqu’aux frontières du monde connu, voire au-delà
de celui-ci, dans des aventures qui peuvent garantir le succès du projet
de départ ou offrir une réponse au mystère du destin ou des origines
de l’univers.
L’étude du comportement de voici/voilà dans les légendes de cet
écrivain français nous semble utile afin de saisir leurs signifiés et leurs
fonctions textuelles. Comme on le verra, ces formes sont issues de
l’impératif du verbe « voir » et sont employées comme formes ver-
bales puisqu’elles peuvent se combiner avec un pronom (le, nous),
tandis qu’elles auraient le statut de prépositions dans le cas d’un em-
ploi temporel2
(voici et voilà peuvent être suivis d’un localisateur tem-
porel indiquant l’antériorité).
Voici et voilà sont liés soit à une situation d’énonciation particulière,
soit au contexte linguistique. Il suffit de considérer leur histoire dès
le début : en ancien français veez ci figurait uniquement en discours
direct et comportait le renvoi concret à un être ou à un objet présents
dans le lieu d’énonciation (Oppermann-Marsaux 2008 : 318). Quant
au développement progressif de l’emploi de voici/voilà dans la nar-
ration écrite, le lecteur continue de jouer le rôle de témoin, quoique
fictif, de ces événements qui aboutissent souvent à un stade crucial du
récit. C’est donc dans le territoire privilégié du texte qu’opèrent les
occurrences de voici/voilà dont nous allons examiner la nature et les
fonctions.
2
Le Trésor de la Langue Française informatisé (1994) définit voici/voilà selon leur
emploi : soit comme des verbes défectifs réduits à la forme unipersonnelle du présent
de l’indicatif de l’aspect inaccompli, soit comme des prépositions. Le Petit Robert
(2020) précise plutôt que voici/voilà, quoique classés parmi les prépositions, ont en
fait la valeur de verbe. Rétrospectivement, leur catégorie d’appartenance a été tou-
jours assez floue : conçus par Wartburg et Zumthor (1958 : 297) comme des adverbes
démonstratifs en raison de leur emploi déictique, ils ont été traités par Brunot et
Bruneau (1969 : 210) comme des adverbes présentatifs.
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 28 23/06/2023 11:58:43
28. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 29
1. Nature de voici/voilà
Voici et voilà sont des verbes de perception. Comme le note Op-
permann-Marsaux à maintes reprises (2004, 2006, 2008), on a iden-
tifié des variantes non soudées aux XIIe
et XIIIe
siècles composées
de l’impératif du verbe veoir et de l’adverbe ci ou la. Ce n’est qu’à
partir du moyen français, notamment dès le XVe
siècle, que les formes
soudées commencent à voir le jour : veci et vela, avec base verbale ve-.
Avec la soudure, le sens du verbe de perception s’est dégradé (Op-
permann-Marsaux 2006 : 88) et au XVIe
siècle les nouvelles formes
voici et voilà sont également employées en renvoyant à des mots du
contexte immédiat (Oppermann-Marsaux 2008 : 318). En français
préclassique, la forme voici est encore plus fréquente que voilà, celle-
ci apparaissant de plus en plus régulièrement dans la construction
avec complétive (XVIIe
-XVIIIe
siècles). Mais un nouvel emploi de
voici/voilà suivis d’un indicateur temporel et de la conjonction que
signale que la valeur sémantique de ces deux outils s’est enrichie : si en
français médiéval voici/voilà sont liés à l’espace, les nouveaux emplois
les inscrivent dans la catégorie du temps (ibid. : 327) modifiant ainsi
leur classe morphosyntaxique d’appartenance.
C’est la théorie de la psychomécanique du langage qui a clarifié la
double nature de ces deux formes. Moignet (1969 : 201) les définit en
langue comme
une sorte de verbe sans variation morphologique verbale, impersonnel,
unimodal (indicatif) et unitemporel (présent), qui désigne ce qui est posi-
tivement dans le moment même de la parole. À ce titre, il constitue l’élé-
ment temporel du prédicat et est donc bien un verbe […]. Cependant, il
peut être déchu en discours de cette fonction de prédicat quand il s’agit
de faire entrer dans un énoncé une référence temporelle. Il fonctionne
alors comme une sorte de préposition.
Le fait d’exclure l’impératif, même si la lecture interprétative de
voici/voilà pourrait être proche dans certains cas de l’injonctif (le
premier élément exhorte le lecteur à regarder et le second élément
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 29 23/06/2023 11:58:43
29. 30 Luciana T. Soliman
oriente le regard en précisant la place proche ou éloignée de l’être/ob-
jet), et le fait de passer donc le relais au mode indicatif découleraient
de l’incompatibilité syntaxique avec la pronominalisation. En effet, le
voici prouve qu’il est impossible de placer le pronom personnel après
la base verbale.
Dans le cadre de leurs fonctions prioritaires, voici sert essentielle-
ment à désigner, alors que voilà appelle généralement l’attention sur
un être ou un objet, voire une situation qui viennent d’être mention-
nés. Les deux garderaient de leur origine verbale « le pouvoir de servir
de centre à la proposition » (Gardes-Tamine 1990 : 41). Certes, l’op-
position proche/éloigné s’est adoucie, au point que la langue courante
ne retient que voilà (Rey 2019 : 4142). Si à l’oral les deux formes ne
s’opposent presque plus en termes de deixis3
, il faut admettre que
voici introduit plus souvent une entité dans la situation d’énonciation,
tandis que voilà l’introduit même dans d’autres circonstances en rai-
son d’une véritable neutralisation sémantique. Par contre, à l’écrit, le
premier se différencie du second en termes de registre : voici est perçu
comme plus formel que voilà ; dans la succession des énoncés, voici/
voilà renvoient à un élément mentionné ailleurs dans le contexte : ce
qui est dit par voici est qualifié par le contexte qui suit, tandis que ce
qui est énoncé par voilà reprend le contexte qui précède.
Même en usage textuel, quand ces deux formes annoncent ou ré-
sument un fait, il n’y a plus d’opposition nette entre elles. Néanmoins,
on peut aller jusqu’à dire que toutes les deux, en particulier dans un
contexte soutenu, font de la phrase qu’elles introduisent la suite de
ce qui a été déjà énoncé tout en introduisant une nouveauté (Riegel,
Pellat et Rioul 20074
: 453-454). Ce n’est pas par hasard si dans Le
bon usage (Grevisse-Goosse 1986 : §§ 1043, 1046-1047) voici et voilà
sont conçus comme des « introducteurs » assertifs4
, leur fonction se
3
Comme le note Landragin (2021 : 2004), le rôle présentatif de voici/voilà ne serait
que le vestige de leur fonctionnement déictique d’origine.
4
Voilà peut être employé dans une phrase interrogative à valeur exclamative, mais
avec la négation, même si cet usage (ne voilà pas, voilà pas) marquant la surprise est
désormais désuet. On introduit plutôt le pronom il avec inversion : voilà-t-il pas que…
([2] Voilà-t-il pas qu’ils assiègent le village !). Comme le précise Combettes (2021 :
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30. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 31
bornant à l’introduction d’une entité nouvelle qui ne sert pas à unir.
En ce sens, on pourrait les considérer comme des formes expressives
« d’attaque » (Guillaume 1973 : 189) à l’instar de c’est, mais la notion
de Grevisse-Goosse ne coïncide pas entièrement avec celle de présen-
tatif. Qui plus est, voici/voilà sont différenciés des « ligateurs » (pré-
positions, conjonctions ou adverbes), car ils ne relient pas les phrases
entre elles. Ce qui mériterait d’être approfondi, car ce couple parti-
cipe copieusement à la description de la réalité référentielle en termes
d’espace et de temps dans le texte et contribue pour ce faire à l’agen-
cement, quoique dissimulé, des unités phrastiques qui le composent.
Outre la structure « voici/voilà suivis d’un groupe nominal » qui
aurait une valeur pour la plupart désignationnelle, il existe le cas de
voici/voilà que, traité par Delahaie (2009 : 3-4) comme une conjonc-
tion de subordination introduisant « une sorte de complétive : Voici/
voilà qu’il arrive, mais sans proposition principale ». Il serait donc
question d’une phrase incomplète, car voici/voilà ne sont pas classés
par cette linguiste comme des formes verbales englobant le rôle de
matrice. Pourtant, à la lumière de la théorie de Moignet (1969, 1974),
cet emploi peut être conçu comme la version syntaxique d’une phrase
à part entière ayant un effet scénique.
Le statut de voici/voilà suivi d’un indicateur temporel est actuelle-
ment moins controversé :
[1] Voici/voilà deux ans qu’elle ne vit plus dans son village.
Dans cet exemple, les deux outils jouent le rôle d’une préposition5
et sont interchangeables, même si voici peut être perçu comme plus
littéraire.
1969), c’est là une formule figée qui « ne dit pas l’absence d’une situation », car voilà
ne peut être nié dans d’autres cas.
5
Tseng et Abeillé (2021 : 775) situent voici/voilà parmi les prépositions temporelles
exprimant la durée et instaurant une relation chronologique d’antériorité.
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31. 32 Luciana T. Soliman
2. Le corpus écrit
Notre corpus se compose de 98 légendes tirées du recueil L’Arbre
à soleils (Gougaud 1979) qui contiennent les formes verbales voici/
voilà (Tab. 1-2) : voici figure uniquement comme forme verbale (dans
38 légendes de l’ensemble textuel, à savoir 38,8% du corpus), alors
que voilà est attesté comme forme verbale de manière très élevée, mais
non maximale, soit 92,2% (dans 37 légendes du corpus, soit 37,8%)
(A-H), en raison d’un emploi prépositionnel de 7,8% (I)6
.
Nous avons d’abord répertorié ces occurrences selon leur modalité
assertive (A-F), interrogative (G) et exclamative (H). Aussi bien dans
le cas de voici que dans le cas de voilà, toutes les occurrences sont des
assertions, car le but principal de ces formes verbales est de poser
l’identité, de signaler ou de situer la présence d’un être/objet. L’ex-
pression de l’engagement d’un procès qui est typique de la modalité
interrogative est absente. Quant à l’expressivité de la modalité excla-
mative, le conteur n’y a jamais recours dans les légendes du recueil en
question.
Les formes verbales voici/voilà ont été répertoriées comme suit : en
emploi isolé, combinées avec des groupes nominaux ou des adverbes,
avec des pronoms personnels antéposés, avec l’infinitif, en phrase fo-
calisée et suivies du conjonctif que. Nous avons également recensées
les emplois prépositionnels de voici/voilà suivis d’une expression tem-
porelle dans l’objectif, comme on l’a décrit plus haut, de comprendre
la distribution des formes de ces outils bivalents. Les occurrences les
plus fréquentes concernent les emplois avec GN/Adv (23/55 voici,
soit 41,8% du total ; 13/51 voilà, à savoir 25,5%) et avec les pronoms
personnels conjoints (25/55 voici, c’est-à-dire 45,5% du total ; 22/51
voilà, à savoir 43,1%). La forme verbale voici n’est employée seule
que 4 fois (7,3%) ; il en va de même pour la forme verbale voilà (4
6
Dans notre corpus, voilà suivi d’une expression indiquant la durée peut définir des
états de fatigue ou l’attente : [3] Voilà des années qu’il s’épuise à bâtir une tour qui
refuse de tenir debout. (Balam et le destin, 76) ; [4] Voilà des années que je t’attends,
mon fils. (Hiawatha, 194)
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32. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 33
occurrences, soit 7,8%). Quant à voici suivi d’une sous-phrase com-
plétive, nous n’avons observé que 2 occurrences (3,6%), alors que le
même cas avec voilà est nettement plus fréquent (12 occurrences, soit
23,5%). Aucune occurrence n’a été recensée quant aux formes ver-
bales suivies d’un infinitif. Pour ce qui est de la focalisation, un seul
cas d’« extraction »7
a été repéré.
Tab. 1. Traitement de voici dans le corpus.
VOICI
A
Seul
B
+GN/
Adv
C
+Pro
D
+Inf
E
Foc
F
+que
G
?
H
!
I
durée
+que
38/98 légendes 4 23 25 0 1 2 0 0 0
Enkidou et
Gilgamesh
2
Kessi-le-chasseur 1
Comment Lune
fit le monde
1
Kiutu et la Mort 1
Le monstre-
calebasse et le
bélier divin
1
Les nuits rouges
de Kouri
1
Koybo-l’intrépide 1 1
Farang 1
7
Chevalier (1969 : 85) définit les procédures de focalisation, qui sont limitées à la
dislocation et au clivage. Il propose ces exemples : [5] L’homme, le voilà ; [6] En
voilà, des histoires ; [7] Dormir, voilà (quelque chose) qui est bon. Quant à notre cor-
pus, le seul cas d’extraction répertorié est le suivant : [8] Voici le message qu’il nous
a chargés de vous transmettre […]. (La rançon d’Uryzmaeg, 352)
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33. 34 Luciana T. Soliman
VOICI
A
Seul
B
+GN/
Adv
C
+Pro
D
+Inf
E
Foc
F
+que
G
?
H
!
I
durée
+que
Samba Gana et la
princesse Annalja
1 1
La pierre rouge 1 1 1
Le Veilleur 2
La broderie 1 1
Tsougpa, le mar-
chand clairvoyant
1
Histoire de Feng,
le vagabond du
temps oublié
1
Drit-de-rien 1
Kogi-le-sage 1
La tortue rouge 1
L’épopée de Maui 1
La légende du
poisson volant
1
Histoire de Lono 1
La fille tuée sept
fois
1
Les chants et les
fêtes
1
La naissance des
hommes blancs
1
Ti-Jean et la bel-
le-sans-connaître
1 1
Le garçon de
Nérac et la grande
bête à tête d’hom-
mes
1 1
L’amour des trois
oranges
1
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34. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 35
VOICI
A
Seul
B
+GN/
Adv
C
+Pro
D
+Inf
E
Foc
F
+que
G
?
H
!
I
durée
+que
Jean l’Or 2
Les trois vagues 1
L’enfance de Cu-
chulaïnn
1
Le voyage de
Bran à l’île des
Bienheureux
1
Conn Eda 1 1
La légende d’E-
taine
1
Fenrir 1
La danse des
Nartes
3
La rançon d’Uryz-
maeg
1 1
Soslan à la con-
quête de la belle
Beduha
1 1
La légende d’At-
saematz
1
La fin des Nartes 1 2
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35. 36 Luciana T. Soliman
Tab. 2. Traitement de voilà dans le corpus.
VOILÀ
A
Seul
B
+GN/
Adv
C
+Pro
D
+Inf
E
Foc
F
+que
G
?
H
!
I
durée
+que
37/98 légendes 4 13 22 0 0 12 0 0 4
Enkidou et
Gilgamesh
3
Kessi-le-chasseur 1
Comment Lune
fit le monde
1
Le monstre-
calebasse et le
bélier divin
1
Farang 1
La pierre rouge 1 1
Les babouches
d’Abou Kacem
2
Hachachi-le-
menteur
1
Balam et le destin 1 1
La broderie 1
Histoire de Spani 1 1
Tsougpa, le
marchand
clairvoyant
1
Koan le prince et
Sheng le magicien
1 1 1
L’aventure de
Chu
1 2
La maison hantée 1
La princesse Déa 1
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36. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 37
VOILÀ
A
Seul
B
+GN/
Adv
C
+Pro
D
+Inf
E
Foc
F
+que
G
?
H
!
I
durée
+que
Le peintre Touo
Lan
1 1
Le ver à soie 1 1
L’ermite Unicorne 1 1
Le sang de
Kaduan
1 1
Un peu de soleil
dans la mer
1
L’épopée de Maui 1
Histoire de Lono 1
Hiawatha 1
Kotsi et le géant 1
Ti-Jean et la belle-
sans-connaître
1
Le magicien de
Venise
1
Louis-le-boiteux 1 1
L’amour des trois
oranges
1
Jean de Calais 1 1 1
Jean l’Or 1
Jean-le-chanceux 2
Le serpent au
diamant
1
La mort de
Cuchulaïnn
1
John-l’archer 1
La mort de Balder 1
La mort du dieu
Odin
1
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37. 38 Luciana T. Soliman
3. Fonctions de voici/voilà
D’après nos lectures (Charaudeau 1992 ; Delahaie 2009 ; De Ce-
sare 2011), les fonctions que l’on peut attribuer à voici/voilà peuvent
être résumées au nombre de quatre (Tab. 3). En premier lieu, ces
formes verbales sont perçues comme jouant un rôle identitaire, à sa-
voir identificatoire ou définitoire selon le cas : un nouvel être est in-
troduit dans le discours ; il est nommé ou classifié selon la catégorie à
laquelle il appartient. En deuxième lieu, ces formes peuvent remplir
une fonction présentielle, l’identité étant généralement considérée
certaine. Deux valeurs s’alternent dans cette fonction : la monstra-
tion et la présence soudaine d’un être/objet dans une sorte de tableau
préconstruit. En troisième lieu, la fonction locative a trait au repérage
tout court : elle permet d’encadrer un être/objet ou une situation dans
l’espace ou dans le temps. Il faut préciser que la fonction présentielle
et la fonction locative relèvent de la deixis, à savoir de ce procédé
spatio-temporel qui ancre les mots dans le monde, mais la seconde est
fondamentalement narrative, car elle permet de situer d’emblée dans
le décor ou dans le temps l’être/objet qui accompagne voici/voilà en
dramatisant le récit. Quant à la dernière fonction qui rend compte de
la continuité référentielle intra-discursive, les deux formes verbales en
question peuvent annoncer ce qui va être présenté ou résumer le nom
ou le segment antérieurs. Contrairement aux attentes d’un voilà fac-
totum, les deux formes voici/voilà sont employées dans notre corpus
de manière équitable et gardent leur trait diaphorique traditionnel :
voici anticipe sur ce qui constitue souvent une expansion du groupe
nominal, tandis que voilà renvoie à ce qui a été énoncé. Cette fonc-
tion est cumulable avec les trois premières fonctions que nous venons
d’illustrer.
SOLIMAN-SAFFI La phrase en contexte 2023.indd 38 23/06/2023 11:58:44
38. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 39
Tab. 3. Fonctions de voici/voilà.
Voici
Voilà
Fonction identitaire
Fonction
présentielle
Fonction locative
Fonction
textuelle
Identification Monstration
Repérage
spatial
Anaphore
Définition Apparition
Repérage
temporel
Cataphore
4. Fonctions de voici/voilà en contexte
L’étude des fonctions des formes verbales voici/voilà en discours
a une valeur documentaire et classificatoire à la fois, puisque les oc-
currences authentiques que nous allons fournir nous permettent de
motiver les remarques que nous avons récapitulées dans le Tab. 3.
Dans les cas où la fonction identitaire a le dessus sur la fonction
présentielle, nous signalons des occurrences d’identification qui sont
annoncées par le contexte verbal antérieur (cf. infra) :
[9] Au fond d’une salle aux dalles étincelantes un homme est assis dans
un fauteuil d’or. – Voici le roi, dit une voix lointaine. (Histoire de Feng, le
vagabond du temps oublié, 115)
[10] Elle la conserva précieusement dans une armoire et quand Odin fut
en âge de régner elle la lui confia en lui disant : – Voilà ta vie, veille sur
elle. (Odin, 330)
En effet, dans [9] le « roi » confère une identité à l’homme « assis
dans un fauteuil d’or » qui figure dans la phrase précédente. Malgré
le renvoi au contexte gauche, voici peut être également conçu comme
une cataphore d’ordre situationnel en raison du discours rapporté di-
rect où il figure ; il serait donc question d’un cas mixte anaphore-cata-
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39. 40 Luciana T. Soliman
phore. Qui plus est, dans [10] la « vie » du dieu Odin renvoie anapho-
riquement à la bougie que la mère du dieu Odin a soigneusement
gardée et que les vieilles du destin lui ont donnée.
En ce qui concerne la fonction identitaire exprimée par une sorte
de définition, qui peut gloser le groupe nominal jusqu’à assumer les
traits de la description, nous citons uniquement l’occurrence suivante :
[11] Voici la merveille : ceux qui les accueillent dans cette ville neuve sont
des hommes blancs bizarrement vêtus qui ne parlent pas la langue des
Indiens. (La naissance des hommes blancs, 216)
La fonction présentielle, quant à elle, obéit aux règles de la mons-
tration dans la situation d’énonciation. Voici en emploi seul désigne
par un geste l’être ou l’objet de l’interaction :
[12] − Quelle est cette lumière qui t’éclairait cette nuit ?
Emhammed ouvre sa main :
− Voici, dit-il. Cette pierre rouge m’éclairait. (La pierre rouge, 61)
[13] − Mes babouches, dit-il, je vous le donne. Je vous en fais cadeau.
Voilà. Non, ne me remerciez pas. (Les babouches d’Abou Kacem, 67)
Relativement à la fonction présentielle d’apparition, à savoir celle
qui consiste à signaler cette « présence concrète et vivante » d’un ob-
jet ou d’un être « dont l’identité singulière représente une sorte de
‘promesse’ » (Charaudeau 1992 : 319), voici/voilà peuvent ouvrir une
scène-destination que l’on a attendue pendant un long intervalle de
temps :
[14] Ils sortent du rocher. Voici l’herbe verte à nouveau, le ciel bleu, les
arbres. (Le monstre-calebasse et le bélier divin, 41)
[15] Ils traversent la nuit, les montagnes, les forêts. A l’aube, les voilà sur
la vaste plaine. (Le ver à soie, 125)
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40. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 41
Dans ce cadre sémantico-fonctionnel, voici/voilà suivis du conjonc-
tif que introduisent un être, un objet ou un événement nouveaux com-
portant généralement une accélération inopinée de la narration. Les
deux formes verbales sont souvent précédées d’une conjonction coor-
donnante d’addition (et) ou d’opposition (mais) qui renforcent l’effet
de surprise :
[16] Conn Eda obéit, son cheval entre dans l’eau, s’enfonce. Et voici que
la surface du lac au-dessus de leurs têtes est semblable à une voûte céleste.
(Conn Eda, 303)
[17] Mais voici qu’un coup de vent subit traverse le village, siffle dans les
buissons, couche les touffes d’herbe. (La broderie, 86)
[18] Ils chantent, le visage ensoleillé, pour se donner du cœur. Et voilà
que le premier à la proue de la barque tout à coup se dresse tout droit.
(Un peu de soleil dans la mer, 151)
[19] Mais voilà que Yin, toujours couché, immobile, est pris soudain
d’une irrépressible envie d’éternuer. (La maison hantée, 113)
Si voici/voilà que sont introduits par la conjonction d’enchaîne-
ment or, ils règlent la successivité événementielle de manière logique.
[20] Ce texte sacré dans son sac, le prince Koan s’en revint de Chine.
Or, sur le chemin de retour, se reposant un jour à l’ombre d’un arbre, au
bord du ravin de la Licorne, voilà qu’il rencontre un fameux magicien
très savant et très rusé, nommé Sheng. (Koan, 106)
Voilà que, qui contribue à l’expressivité de la phrase, comme le
remarquent Wagner et Pinchon (1962 : 504), dégage ici un élément
que l’on considère comme essentiel dans la progression de l’histoire.
En association avec un connecteur du raisonnement qui jette une
nouvelle lumière sur le rôle narratif de cette forme verbale, voilà que
centralise l’attention du lecteur sur le magicien qui modifie à jamais
le sort du prince.
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41. 42 Luciana T. Soliman
La fonction locative de voici/voilà répond à des exigences de
construction d’un espace ou d’encadrement temporel qui favorisent la
mise en relief de l’endroit ou de l’instant. Dans le cas de la localisation
spatiale [21, 23], qui peut être complétée par une location temporelle
[22], voici/voilà sont suivis d’un groupe nominal ou précédés d’un
pronom personnel d’ordre anaphorique. Le champ visuel où les deux
formes verbales introduisant les lieux s’inscrivent peut être guidé par
le narrateur qui promène le lecteur jusqu’à cette pause descriptive
où les personnages dominent la scène. Tout semble culminer dans la
phrase introduite par voici/voilà qui ne se différencient presque pas :
[21] Au fond de cette caverne une lumière brille. Il court. Le voici devant
un grand jardin paisible sous le ciel bleu. (L’épopée de Maui, 154)
[22] Le bateau, déjà, quitte le port. Le ciel pâlit à l’horizon. […] Il aide à
la manœuvre. Les voici au large, sur les vagues tranquilles, dans le soleil
du matin. (Les trois vagues, 282)
[23] Il fait le tour de ce château, il ne découvre dans la muraille qu’une
petite porte vermoulue qui grince comme un battant de ruine. Il entre. Le
voilà dans une vaste cour pavée. (L’amour des trois oranges, 257)
[24] Le voilà donc sur le chemin du retour. (John-l’archer, 314)
Pour ce qui est de la localisation temporelle, l’emploi exclusif de
voici suivi d’un groupe nominal est important dans la représentation
du temps physique ou du temps vécu. Il isole le laps de temps en
acclimatant ce qui suit ou envisage l’événement qui va être décrit en
dressant la toile de fond :
[25] Le cheval galopant traverse la journée. Voici le soir. La grande lune
rouge descend sur le désert. (Jean l’Or, 266)
[26] Voici l’instant des retrouvailles. Les guerriers nartes acclament Uryz-
maeg et l’embrassent comme un père après longtemps d’absence. (La ran-
çon d’Uryzmaeg, 354)
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42. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 43
Quant à la fonction textuelle, qui assure la cohésion, nous allons
nous attarder sur l’annonce d’un événement, auquel cas on parle de
cataphore. Voici en emploi seul ou suivi d’un groupe nominal joue un
rôle spécifique en ce sens :
[27] Voici : je vais grimper là-haut, sur cette montagne rocheuse qui do-
mine la forteresse. (Soslan à la conquête de la belle Beduha, 358)
[28] − Voici mes ordres, dit le seigneur : je veux que demain matin tu me
rapportes une feuille de figuier assez grande pour recouvrir entièrement
le village. (Drit-de-rien, 128)
Voilà en usage seul peut résumer le segment qui le précède à tra-
vers un mécanisme d’identification de la source de l’anaphore qui est
totalisant, c’est-à-dire que cet outil est capable d’impliquer par infé-
rence un paragraphe tout entier. Lorsqu’il est suivi du pronom indé-
fini quantificateur tout, voilà condense et clôture en même temps ce
qui précède.
[29] Il grimpe au sommet de la montagne, s’envole dans les nuages, at-
trape les dragons de la pluie par la queue. Il les fourre dans un gros pot,
ferme le couvercle.
– Voilà, dit-il, maintenant je suis tranquille. Il ne pleuvra plus de si tôt.
(L’ermite Unicorne, 131)
[30] − Aurais-tu donc oublié que tu m’as chassé de ta maison ? Je m’en
vais. Voilà tout. Je reviens chez mes parents. (Satana renvoyée chez ses
parents, 342)
Le type de liaisons diaphoriques que voici/voilà instaurent s’inscrit
dans ces relations qui forment un fil rouge entre les phrases ou des
pans de texte. On pourrait donc concevoir ces deux formes verbales
comme des marqueurs référentiels, voire des « organisateurs »8
qui se
8
La classe (élargie) des organisateurs remplirait, tout bien considéré, la fonction pri-
maire d’annoncer ou de fermer des portions de textes (Adam 2004 : 58-59).
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43. 44 Luciana T. Soliman
différencient des connecteurs dont le rôle est plutôt d’orienter argu-
mentativement le récit. Qui plus est, si ces outils jouent autour de la
réalité référentielle spatiale et temporelle au point que l’on pourrait
parler parfois de voici/voilà comme des cadratifs tout court en début
de phrase, l’implication d’un raisonnement peut les rapprocher occa-
sionnellement du rôle de ces articulateurs logiques avec lesquels ils
ont également la capacité de se combiner. En effet, la transition événe-
mentielle, qui peut être nuancée par l’idée d’opposition, est évoquée
par la structure suivante : et/mais voici/voilà (que). C’est là un moyen
dynamique qui assure la bonne mise en intrigue et qui s’avère utile
afin de compliquer l’équilibre de la situation précédente et de faire
avancer rapidement l’histoire.
Conclusion
Les formes verbales voici/voilà, qui ont été explorées dans un cor-
pus de légendes défini, répondent à une exigence commune d’écono-
mie linguistique. En effet, le choix d’une syntaxe réduite dériverait de
la volonté de promouvoir essentiellement un mouvement scénique.
Il est clair que l’édification en langue de la phrase avec voici/voilà est
liée à l’« empreinte » cognitive préalable à l’orientation formelle que
le locuteur donne à son dire, la cohérence du psychique coordonnant
le sémiologique. En psychomécanique du langage, le contexte, ce pré-
cieux allié, remplit une fonction de filtre9
permettant de choisir ce
qui se prête à la construction du sens. L’étude fonctionnelle que nous
avons conduite après un traitement quantitatif des formes verbales
voici/voilà a mis la lumière sur leur actualisation. C’est la visée de dis-
cours d’une phrase avec voici/voilà qui permet d’aboutir à identifier
un être ou un objet, à définir une circonstance, à énoncer la présence
de cet être/objet, à retirer une image de celui-ci du fond de tableau
évoqué. Pour ce qui est des liaisons fortes que voici/voilà construisent
9
Guillaume (1985 : 78) traite du rôle du contexte dans sa leçon du 25 janvier 1946 à
propos de l’article.
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44. Les formes verbales voici/voilà en contexte narratif fictif 45
entre les phrases de ces légendes, les morphèmes soudés -ci et -là as-
surent l’anticipation ou le rappel d’un segment du texte subséquent
ou antérieur selon la bonne règle classique de l’endophore in situ, le
conteur offrant au lecteur, avec un style très fin, des légendes au par-
fum d’antan.
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46. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée
en français et en italien
Sophie Saffi
Aix Marseille Université, CAER
Nous proposons l’analyse du texte de la bande dessinée (BD)
L’Appel, dessinée par le congolais Pat Masioni, sur un scénario du
franco-camerounais Christophe N’Galle Edimo – à partir d’une nou-
velle de l’écrivaine belge Pascale Fonteneau, publiée par les éditions
Lai-Momo en 2005.
Nous remercions les Éditions Lai-Momo pour leur compréhen-
sion de l’intérêt scientifique d’une étude sur l’une de leur BD et pour
leur autorisation d’en reproduire ici quelques planches afin d’illustrer
notre propos.
Cette BD fait partie du projet pédagogique Valeurs communes por-
té par Eurodialog et Lai-Momo, cofinancé par la Commission euro-
péenne Direction Générale Justice, Liberté, Sécurité dans le cadre du
programme INTI 2003 pour l’intégration des immigrés. Ce projet a
pour but de promouvoir la culture de la paix à travers la confronta-
tion et le dialogue entre les religions et les cultures qui sont à l’œuvre
en Europe. Les actions du projet prévoient, en effet, d’engager les
élèves, les enseignants et la population civile de quatre pays européens
(Belgique, Espagne, France, Italie) dans une réflexion concernant les
valeurs communes aux différents systèmes de pensées, en utilisant la
BD comme outil de communication et de développement. L’Appel est
la première des 5 BD publiées par le projet. Elle aborde les thèmes
de l’amour et du pardon dans un récit de science-fiction : dans la
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47. 48 Sophie Saffi
Ville, on célèbre la Journée de l’Entente, mais c’est une fête imposée
dans une cité divisée en secteurs selon l’appartenance religieuse des
habitants. Ce récit embarque le lecteur pour une dimension de guerre.
Dans ce monde fictif, mais aussi vrai que le nôtre, on suit le parcours
d’un adolescent qui vit dans un futur proche et qui, en l’espace d’une
journée, passe de l’euphorie de remporter une course au désespoir
de perdre ses deux parents, disparus avec tant d’autres personnes au
cours d’émeutes. Au fil de ses rencontres avec sa cousine, des camion-
neurs et un metteur en scène de théâtre, le pardon devient une étape
essentielle pour le dialogue et la réconciliation.
Nous nous proposons de montrer les caractéristiques particulières
du texte de BD qui tente majoritairement de reproduire des
interactions orales dans la mise en dialogues du récit. La BD
étant un média hétérogène constitué de la combinaison de deux
vecteurs informationnels, l’écrit et le dessin, nous montrerons la
complémentarité des textes et des dessins. Nous présenterons les
constructions syntaxiques privilégiées dans les didascalies et les bulles.
Nous tenterons de rapprocher le découpage d’un scénario de BD et
l’organisation séquentielle d’un texte proposée par Adam (2011).
1. Composition de l’album L’Appel
Les 28 planches de la BD sont encadrées par 2 préfaces de pré-
sentation et 1 postface renvoyant au site du projet où sont téléchar-
geables un guide didactique et du matériel pédagogique à l’attention
des enseignants souhaitant utiliser la BD dans leurs classes. Ces textes
d’encadrement définissent la visée illocutoire de l’album mais dans les
usages, le lecteur de BD lit – éventuellement – ces textes d’encadre-
ment après avoir lu les planches de la BD.
Dès les premières planches, l’architecture des édifices (Fig. 1) et les
codes vestimentaires (Fig. 2) opèrent une mise à distance fictionnelle
et donne au lecteur une instruction sur l’ancrage énonciatif non actuel
et sur le monde singulier futuriste du récit.
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48. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 49
Cependant, la course de moto et les publicités1
de la planche 1
(Fig. 1), tout comme l’écran de télévision et le mobilier du bureau-bi-
bliothèque de la planche 2 (Fig. 3), ainsi que les dialogues du maire
avec ses conseillers et ses invités de la planche 4 (Fig. 4), indiquent au
lecteur que cet univers futuriste fonctionne selon des lois conformes à
celles qui régissent son univers de référence. La rupture entre fiction
1
Le rôle du pertexte a longtemps été sous-estimé et peu étudié (cf. Manco 2015,
2016, 2018).
Fig. 1. L’Appel, 1re
case, p. 1.
Fig. 2. L’Appel, p. 3.
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49. 50 Sophie Saffi
et réalité du lecteur est ainsi atténuée, la cohésion sémantique globale
est posée d’emblée par la caractérisation de la BD comme une fiction
dans un futur proche.
Fig. 3. L’Appel, p. 2.
Fig. 4. L’Appel, p. 4.
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50. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 51
2. Caractéristiques du texte de BD
Le texte d’une BD se répartit entre les bulles, les didascalies, le
pertexte et les onomatopées2
(Fig. 7). Ces dernières sont généralement
incluses dans le dessin mais peuvent aussi apparaître dans les
bulles3
. La répartition du texte de la BD est majoritairement dédiée
aux dialogues (ou monologues intérieurs) des personnages, la BD
introduisant une nouvelle catégorie de langue écrite qui reproduit la
langue parlée et altère la dichotomie classique « écrit vs parlé » (Gadet
2004 : 98 ; Pietrini 2008).
Le texte des dialogues de L’Appel se caractérise par le respect de la
langue standard alors que d’autres auteurs se permettent d’écrire en
néo-standard et en argot. Dans le cas présent, l’appartenance de la BD
à un projet pédagogique a peut-être conduit les auteurs à une forme
d’autocensure. Les écarts à la norme du français standard relevés dans
cette BD sont répartis avec parcimonie afin que le lecteur comprenne
qu’un registre moins soutenu accompagne un statut social, ou quand
le personnage change de registre sous le coup de l’émotion :
– la marque unique de la négation (pas vs ne…pas) dans certains
dialogues des camionneurs (Fig. 5) ;
– l’absence de pronom personnel sujet de 3e
personne en tête de
phrase (Fig. 6) ;
– l’interrogatif Qu’est-ce que c’est que (variante longue de Est-ce
que)4
;
2
Nous n’avons pas pris en compte d’autres textualités mineures (épitexte) telles que
le numéro des planches, la signature du dessinateur qui peuvent être inclus dans les
vignettes.
3
Dans la BD étudiée, 16 onomatopées sont incluses dans le dessin et 3 dans des
bulles.
4
« Le double introducteur Est-ce que c’est que (ou … qui) appartient seulement à
la langue parlée familière. Il est ancien pourtant. Il semble plus fréquent dans l’inter-
rogation partielle que dans l’interrogation globale. Dans la littérature, où il est peu
attesté, il apparaît seulement quand les auteurs font parler leurs personnages : Quand
est-ce que c’est que vous en aurez ? (Pagnol, Schpountz, cit. Renchon, p. 174.) − Où
donc que tu vas comme ça, ma Julia, et qu’est-ce que c’est donc que tu portes ? (Jou-
handeau, Chaminadour, p. 369) » (Grevisse-Goosse 2001 : 398, a).
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51. 52 Sophie Saffi
– l’emploi du présentatif Il y a que, un dispositif en miroir qui in-
troduit une proposition indépendante en reprenant la structure
de la question à laquelle elle répond (Fig. 24) ;
– le juron Putain ! (Fig. 6) et le blasphème Nom d’un chien !
(Fig. 22).
Fig. 5. L’Appel, p. 17-18.
Fig. 6. L’Appel, p. 3, 22.
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52. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 53
Fig. 7. Répartition du texte dans L’Appel5
.
La bulle (ou ballon, phylactère) est l’espace, généralement cerné
d’un trait, qui contient les dialogues ou les pensées des personnages. La
didascalie (ou récitatif) est l’espace encadré intégrant un commentaire
sur l’action ou une intervention du narrateur. Le pertexte est :
[…] un texte sur un support spécifique (par exemple, un graffiti sur un
mur, un journal, la couverture d’un livre, une enseigne, etc.) qui est repré-
senté dans un texte figuratif, tel qu’une bande dessinée ou une publicité ;
la représentation du média est donc inhérente à la définition de la pertex-
tualité. (Manco 2018 : 93)
Enfin, les onomatopées de la BD sont des mots dont le signifiant
imite le son associé au fonctionnement ou au déplacement d’un objet
ou d’un personnage, ou qui reproduit les sons de la nature, les cris des
animaux ou des bruits non linguistiques émis par des personnages.
5
L’Appel : texte de la BD : 2678 mots ; bulles : 1918 mots = 71,6% ; didascalies : 548
mots = 20,4% ; pertexte : 196 mots = 7,3% ; onomatopées : 16 mots = 0,6%.
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53. 54 Sophie Saffi
Fig. 9. Autres exemples de pertexte dans L’Appel, p. 10, 23.
Fig. 10. Exemples d’onomatopées dans L’Appel, p. 4, 5, 15.
Fig. 8. L’Appel, p. 2.
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54. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 55
Les dialogues des BD sont enrichis de représentations des dis-
fluences orales rarement présentes dans les textes littéraires ou de
presse (Saffi 2014). Les phénomènes de disfluence sont des ruptures
de la linéarité syntagmatique (Blanche-Benveniste et Jeanjean 1987),
ils sont les traces d’une élaboration linguistique liées au mode de pro-
duction oral (Dister 2007), qu’ils soient associés à la planification du
discours (temps de réflexion, hésitation : Fig. 11) ou qu’ils dépendent
de facteurs extralinguistiques (émotions, froid, essoufflements et
tremblements divers).
En dépit de l’absence de contenu propositionnel, les disfluences jouent
un rôle important dans le discours. Elles en améliorent la compréhension
par des auditeurs, signalent la complexité de propos à venir (Tree 2001,
Rose 1998, cités par Adell et al. 2012) et, en situation de dialogue, faci-
litent la synchronisation interlocuteurs (Clark 2002). (Qader et al. 2017)
Fig. 11. L’Appel, p. 13.
Les différentes représentations des disfluences en BD sont princi-
palement de 4 types : la ponctuation, les propos non lexicaux (hum,
heu), les répétitions de phonèmes (allongement vocalique ou dupli-
cation de la consonne initiale) ou de mots, ou l’interruption de mot
(Saffi 2022). La BD L’Appel n’utilise que les 2 premiers types.
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55. 56 Sophie Saffi
2.1. La ponctuation
Les points de suspension sont indéniablement la stratégie la plus
employée pour représenter une pause. Leur emploi peut marquer une
pause utilisée pour un temps de réflexion (Fig. 12) ou d’hésitation
(Fig. 13), l’attente après l’interpellation ou la gêne (Fig. 11).
Des symboles de ponctuation peuvent aussi être utilisés seuls dans
une bulle : ils remplacent alors une phrase entière et indiquent princi-
palement des émotions telles que la surprise ou la stupeur :
Fig. 12. L’Appel, p. 9. Fig. 13. L’Appel, p. 16.
Fig. 14. L’Appel, p. 3.
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56. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 57
Dans une précédente publication (Saffi 2014 : 7-8), nous avons
montré dans les publications Disney des années Trente, un emploi
caractéristique de points de suspension surnuméraires au-delà de
3. Cette caractéristique a disparu dans les BD actuelles. L’évolution
entre ces deux périodes s’explique par le changement des habitudes
de lecture et l’installation de codes visuels spécifiques. Les auteurs de
BD recherchant le confort de lecture afin de faciliter l’interprétation
qu’ils préconisent chez le lecteur, ils suivent de près ces évolutions.
Nous avons également montré une prolifération de points d’excla-
mation, « signe qui, dans les numéros des années 2000, est presque
assimilé au point final de phrase, comme s’il y avait la nécessité d’une
marque spécifique de l’accent de phrase en lien avec la prosodie »
(ibid. : 7). Nous ne remarquons rien de tel dans la BD L’Appel, ce
qui s’explique par la différence du public visé : enfants et pré-ado-
lescents pour Disney, adolescents et adultes pour la BD L’Appel. Ces
derniers n’ont pas besoin d’une lecture guidée, ils n’apprécient pas les
redondances que l’ont peu trouver dans les BD pour enfants, que ce
soit entre le texte et l’image ou au sein du texte avec une ponctuation
excédentaire.
2.2.Les propos non lexicaux
Parmi les propos non lexicaux (Fig. 11, 13, 15) relevés dans notre
corpus, figure l’emploi de euh. C’est probablement la syllabe la plus
reconnue à travers le monde (Schuessler 2013), indépendamment de
la géographie, de la langue, de la culture et de la nationalité (Dinge-
manse et al. 2013). Dans le discours oral réel, la fréquence d’utilisation
de euh reflète souvent l’état émotionnel ou de vigilance du locuteur
(Clark et Fox Tree 2002 ; Corley et Oliver 2008). Dans notre corpus,
elle marque une hésitation (Fig. 11, 13), l’emploi de ho et ah (Fig. 15)
la surprise et celui de eh (Fig. 15) l’attaque de discours, ce qui permet
d’introduire une information personnelle ou un constat.
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57. 58 Sophie Saffi
3. Constructions syntaxiques privilégiées dans les didascalies et les
bulles de L’Appel
La BD L’Appel présente 31 didascalies de diverses longueurs :12
se composent d’1 phrase6
(38,7%), 6 de 2 phrases (19,3%), 2 de
3 phrases (6,4%), 1 de 4 phrases (3,2%) et 1 de 5 phrases (3,2%) ;
6
Nous appliquons ici la définition de la phrase de Paulo De Carvalho (2005 : 90) :
« […] on définira donc la phrase comme le résultat, plus ou moins « élaboré », plus
ou moins complexe, d’un acte de langage, celui par lequel un être parlant répond – et
c’est là une réponse typiquement humaine – à la sollicitation pressante d’un certain
cas d’expérience. » Sachant que Gustave Guillaume (1971 : 29-30) définit la phrase
comme une « unité de discours » dont la construction est subordonnée à celle du
mot et conditionnée par les systèmes morphosyntaxiques de la langue : « L’unité de
puissance une fois construite en langue, on procède, s’il y a lieu, c’est-à-dire s’il est
besoin, à la construction de l’unité d’effet, qui est la phrase de discours. L’unité d’ef-
fet se construit à partir des unités de puissance préconstruites et sa construction, ses
possibilités de construction, dépendent de ce que sont dans la langue, de par leur
constitution, les mots de puissance. Il découle de là qu’en bonne méthode, en saine
linguistique, toute étude du mécanisme constructif de la phrase se subordonnera à
une considération préalable de la structure du mot. »
Fig. 15. L’Appel, p. 6, 18
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58. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 59
par 4 fois, 2 ou 3 didascalies séparées forment une seule et même
phrase (29%, Fig. 17).
Notre corpus compte 141 bulles7
: 2 ne contiennent que des
signes de ponctuation, 2 autres contiennent une onomatopée. Sur
les 137 bulles restantes, 94 contiennent 1 seule phrase (68,6%), 31
contiennent 2 phrases (22,6%), 11 contiennent 3 phrases (8%) et 1
bulle contient 4 phrases (0,7%).
On constate que la contrainte spatiale exercée sur les textes de BD
favorise la répartition dans les bulles et les didascalies d’une phrase
à la fois, mais elle s’applique avec beaucoup plus de force dans les
bulles de dialogue.
La Fig. 17 illustre le cas d’une phrase de didascalie commencée en
bas de la page se terminant en haut de la page suivante : ce stratagème
fait partie des multiples stratégies développées par les auteurs de BD
pour éveiller la curiosité du lecteur et l’inciter à tourner la page, c’est
un principe récurrent du découpage d’une BD, l’hameçonnage peut
être textuel, iconographique ou scénaristique.
7
Nous avons exclu du corpus 5 bulles contenant du texte anglais.
Fig. 16. Comparaison des constructions syntaxiques
des textes des didascalies et des bulles.
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59. 60 Sophie Saffi
3.1. Une modalité majoritairement assertive
Les 42 phrases qui composent les didascalies sont assertives. Nous
relevons cependant un cas où une proposition interrogative est le
sujet d’une assertive (Fig. 18). Nous relevons aussi un cas de phrase
dubitative avec une inversion du sujet – mais sans point d’interrogation
(Fig. 19 : « Peut-être, comme pour l’appel de Etchoki viendront-ils. »).
Fig. 17. L’Appel, p. 2, 3.
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60. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 61
Alors que les didascalies sont à 100% assertives, seulement 55%
des 197 phrases utilisées dans les bulles sont assertives, 18% sont
exclamatives, 16% sont interrogatives, 9% sont injonctives et, dans
2% des cas, on relève une modalité mixte avec une entame injonctive
d’une phrase assertive :
Fig. 19. L’Appel, p. 27.
Fig. 18. L’Appel, p. 3.
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61. 62 Sophie Saffi
Alors que le rôle des didascalies est de livrer des informations per-
mettant de contextualiser le récit, celui des bulles est de représenter
les interactions verbales et les pensées des personnages. Cette distinc-
tion explique la différence de distribution des modalités discursives
entre ces 2 types de textes de BD : les modalités injonctives, exclama-
tives et interrogatives côtoient les assertions dans les discours oraux
réels, ce que cherche à imiter le texte des bulles.
Fig. 20. L’Appel, p. 14, 18, 26.
Fig. 21. Distribution des modalités de discours
dans le texte des bulles de la BD L’Appel.
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62. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 63
3.2. Une situation d’action langagière interne, une composante narrative
Nous avons constaté que l’ensemble des didascalies présente une
situation d’action langagière interne (Bronckart 1997), considérant
qu’il s’agissait de la voix off du conteur qui s’avère être celle de Nor-
man, le protagoniste masculin qui raconte cette histoire.
Dans n’importe quelle bande dessinée, il y a un narrateur. […] il arrive
que le narrateur soit l’un des personnages du récit et que cette informa-
tion importante ne soit apportée que tardivement dans l’histoire… (Gor-
ridge 2010 : 163)
La confirmation arrive à la planche 13 quand le lecteur constate
que 4 didascalies à la 1e
personne représentent les pensées de Norman
(13% des cas). Les didascalies représentant un long monologue inté-
rieur du protagoniste qui se remémore son histoire, elles relèvent d’une
situation d’action langagière interne dont le lecteur est le spectateur.
Dans les bulles, nous avons constaté l’inverse : la situation d’ac-
tion langagière interne est minoritaire, elle est représentée par 5 bulles
aux contours de type « nuage » indiquant les pensées du protagoniste
(planches 9, 10 et 11) et 2 bulles ne contenant pas de texte mais un signe
de ponctuation (Fig. 14) figurant une émotion interne. La majorité des
bulles situent une action langagière externe dans la représentation de
l’interaction verbale. Il semble bien que les auteurs aient choisi de dis-
tinguer nettement les actions langagières internes et externes en distri-
buant les premières dans les didascalies et les secondes dans les bulles.
Pour Adam (2011 : 30), les séquences élémentaires (prototypiques)
se réduisent à quelques types d’articulation des propositions : narratif,
descriptif, argumentatif, explicatif et dialogal. Les textes hétérogènes
sont les plus fréquents et sont généralement classés en fonction du
type encadrant et non pas en fonction du type quantitativement ma-
joritaire car « c’est le type encadrant qui définit l’appartenance géné-
rique du tout. » (ibid. : 195) C’est pourquoi, nous en déduisons que la
BD L’Appel est un texte narratif bien que dans le corps de l’album les
dialogues soient quantitativement majoritaires. En effet, la 1e
planche
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63. 64 Sophie Saffi
est une narration dessinée et la dernière vignette de la planche finale
est narrative avec une didascalie qui reprend le texte de la bulle de la
case précédente en l’amplifiant.
Fig. 22. Première et dernière planches de L’Appel.
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64. La phrase en contexte : étude d’une bande dessinée en français et en italien 65
Cependant, les bulles représentant 71,6% du texte de la BD, il
convient de regarder de plus près ce texte dialogal. L’unité d’analyse
de la conversation définie par Atkinson et Heritage (1984 : 5), « […]
sont les séquences et les tours de parole dans une séquence, plutôt
que les phrases et énoncés isolés », définition proche du modèle
proposé par Adam. Selon ce dernier (Adam 2011 : 154), il convient
d’ajouter d’autres unités entre les « séquence » et les « tours de pa-
role », conformément à son modèle hiérarchique [Texte < Séquence <
macro-phrases < phrases] :
Le texte dialogal peut être défini comme une structure hiérarchisée de
séquences appelées généralement « échanges ». Deux types de séquences
doivent être distinguées :
– les séquences phatiques d’ouverture et de clôture,
– les séquences transactionnelles constituant le corps de l’interaction.
En guise d’illustration, analysons les planches 11 et 12 qui ouvrent
la 3e
des 4 macro-séquences de la BD et qui constituent chacune une
séquence : la conversation de Norman et Nautile sur l’importance
des messages transportés par les ballons (Fig. 23) et la conversation
de Nautile et de l’oncle Nanky qui tente de l’empêcher de partir,
car Nautile veut répondre à l’Appel (Fig. 24).
Planche 11, les bulles phatiques qui encadrent la transaction sont
des phrases impératives. Cet échange met en place la position poli-
tique du personnage féminin ainsi que son caractère tranché. La cu-
riosité du lecteur pour le développement argumentatif de Nautile sur
sa position politique concernant les messages, le conduit à tourner la
page (hameçonnage en fin de planche).
Planche 12, les bulles phatiques qui encadrent la transaction sont
des prises de parole d’Oncle Nanky dont l’une introduit le sujet de
cette conversation avec une question, et l’autre la conclut par un
constat amer. Ce 2e
dialogue reprend pour l’introduction du person-
nage d’Oncle Nanky la même stratégie de découverte du personnage
du dialogue précédent. Il est possible d’appliquer à nouveau les types
élémentaires d’Adam aux bulles dialogales transactionnelles. On
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