2. ,
D(|SSIER
Arrivée des NPS
dans I'espace fesrif
en
Vincent Bens0 /
île-de-France
;
Sociologue, Technoplus/IREI{D
Iemitieuteltittechnoeôtuneapa"eae"nmatièredenouuelleôtenddnce|deconommation.c,eôtparti
qudlitiprodultr de ôlr.thèôe (NPg qui' en dépit de leur
culièrenent urdi en qu, "on"r*, let nouueaux
des ditte",
depui| plut d une ditaine d'année6' Anal!ôe
catton de nouuellet (trogue6 '', ! ôont conto'nmé|
le micro-milieu deô têteô techno trûnellienneô.
renteô étape6 de ta ditttuion ai cet produitd dant
((
Méthodologie
les données sur lesquelles s'appuie cet adicle
sont
issues de deux travaux complémentailes d'observation
des tendances de cons0mmation dans I'espace festil
Irancilien. lun, spécifique à Parisi réalisé dans le cadrc
du dispositif TREIID de l'0FDl relève de l'observation
indirecte (interviews de pelsonnes clés sélectionnées
pour la diversité de leurs ptolils: revendeuls' olganlsateurs de soirées, musiciens, barmens,
n novices
',
etc )'
pral-autre a été réalisé dans le cadre de la veille des
tiques à risques de Ïechnoplus' un prcjet d'0bservation
;,)
de
mis en place en 2007 dont la méthodologie relève
ment par les volontaires lors des interventions)'
de l'lPS
Si l'on dresse un historique de la consommation
schéma de.
dans I'espace festif francilien, on aboutit à un
diflusion comprenant plusieurs périodes'
Ite 2002 à 2009,
des consommations anecdotiques
Detuis 2002 environ, d'occasionnelles consommations
étaient observées en espace lestif ll s'agissait
de NPS
ou du 2C-ll
surtout de 2C-X (particulièrement du 2C-B
de
généralement consommé par des cercles restreints
et ne
consommaleurs s'approvisi0nnant sur Internet
produits hors de leut
revendant que très rarement ce{
l
cercle d'amis déià
principaD'autres NPS pouvaient aussi êtreconsommés,
i
i,
oadiculiers (aucun incident rapporté).
Du
fait de leur rareté, le 2C-B et le 2Cl pouvaient exercer
de
un celtain attlait suI des consommateurs désireux
étaient très
laire de nouvelles expériences, mais les NPS
peu connus et leur image entachée par la clainte d'eflets
indésirables, des ellets à long terme el une représentaproduits n0n
tion couramment ancrée qui veut que des
forts ou
classés stupéliants soient nécessairement moins
moin3 intéressants que les stupéfiants'
l'ob-
servation directe (le recueil de données se lait directe-
initiés
lement sur la scène lechno{rance, mais ces consommapas de problèmes
tions - rares et discrètes- ne posaient
2000. nénurie de 3,4-méthYlènedioxy-il-méthylamphétamine (MDMA)
et aiparition de la méPhédrone
I
d'un prodlit phare de l'espace
d'un
festif techno, la I'ilDMA, liée aux saisies massives
précutseur dans un pays asiatique, dure neuf mois et se
En 2d09,
la . pénurie
de
traduit par une tentative de la part des revendeurs
(mCPP) à la
substituer du métachlomphénylpipérazine
de MDMA' les
MDMA, puis disparition totale des ventes
les effets du
consommateurs semblant ne pas appréciés
mCPP.
le gammabutyroAprès la crainte d'un effet de report sur
métabolisé
lactone (GB[) lproduil d'entretien automobile
stupéen GHB (acide gammahydrobutyrique), non classé
la sur
fiant et aux effets appréciés des consommaleursl'
Pas encore
Dlise avec le timide essor de la méphédrone'
3. IU
classée stupéfiant, facilement disponible sur le l,let (elle
2012 : le n0mbre d'observati0ns relatives
est rev8ndue tantôt sous son nom, tahlôt en tant ou,engrais, sel de bain, etc. à des prix largement inférieurs à
aux llPS augmente largement
Avec n0tamment la forte diffusion de la consommation de
ceux de la MDMA, environ moitié moins cher), cette molé-
méthoxétamine et la multiplication des arnaques aux 25-
cule aux effets relativement prochesde la MDI/I{ apparaît
X-N-b0mes (hallucinogènes proche des 2C-X, souvent
d'abord sur la scène des clubs pui5 des free-parties et
dans l'ensemble du milieu techno. peu connue, elle est
vendus pour de la mescaline), 0n observe aussi des
d'abord revendue en tant que .dérivé ou résidu de
Les volontaires de Technoplus recueillent un certain
MDMA,, etc. Bien que son niveau dqconsommation reste
largement inférieur aux produits u classiques , (cocaine,
nombre de témoignages de personnes ayant des difticul_
tés à gérer des consommati0ns de l,lps, etc. Sans tomber
dans l'alarmisme, nous devons reconnaître qu,après plu_
LSD, kétamine, etc.), notons que c'est la oremière fois
qu'un NPS est autant consommé et vendu hors de mini_
réseaux d'usagers-revendeurs.
consommali0ns de RC stimulantes et de mélanges de RC.
sieurs années de frémissements, la consommation et la
revenle de NPS en espace lestif techno sont sorties de
l'invisibilité relative
2010: disparition de ta méphédrone,
augmentation de la médiatisation
des research chenicals (REl
or) elles étaient confinées
jusqu'à
présent et Technoplus publie un premier flyer sur
les RC.
Cet historique permet de remettre en cause la nouveaulé
de la consommati0n des l,lPS: plutôt qu,une erplosion,
Fin 2009, les laboratoires clandestins resynthétisent de
la MDMA. À nouveau disponible, elle supplante instanta-
cette tendance prend la forme d,un accroissement
linéaire qui a cependant connu ùne accélérâtion en 2009.
nément la méphédrone pour reprendre sa place a0 trium_
D'ailleurs, à l'exception de la méphédrone, une molécule
virat des produits les plus c00sommés en espace festif
techn0 (cocâine, ISD, MDMA). En effet, après quelques
semble avoir vérltablement séduit une part non négligeable de cons0mmateurs: la méthoxétamine. peut-être
mois de consommation, les usagers commencent
s'agit-il d'une exception liée aux effets de cette sub-
à
découvrir les ettets non recherchés de la méphédrone:
stance, mais peut-être est-ce surtout la mar0ue d,une
forte compulsion, dépendance, descente particulièrement
certaine inertie dans les représentâtions et les habitudes
difficile, etc. Bien qu'elle conserve quelques amateurs, la
méphédrone enke donc en régression iapide. Elle n'est
d'ailleurs plus disponible hors des réseâux de oetits usageFfevendeurs.
leur sont tréquemment assæiées C'est ce que laisse sup_
Al0rs que les choses semblent rentrer dans I'ordre (en
espace festif), sa médiatisation preird une tournure
,
0bsessionnelle. En 2010, Technoplus est s0uvent sollici_
tée par des j0umalistes (Arte, iTélé, Diræt 8, Rue89, etc.)
désireux de réaliser des sujets sur la méphédrone et les
,
drogues de synthèse,. Cette médiâtisation étant dis-
proportionnée
de consommalion des teuteurs.
ll est fort possiblè que le principal frein à la diffusion des
l'lPS réside dans les représentations très négatives qui
et ayant de sérieux eflets pervers, le
conseil d'adminiskation refuse de donner suite à ces
demandes. En juin, la méphédrone est interdite en
France.
poser I'exemple des cannabinoides de synthèse qui
reslent peu cons0mmés en dépit d,un rapport pri/dose effective près de 100 fois inférieur à celui du haschich ou de
l'herbe pour des effets similaires, mais dont les reDrésen_
tations sonl aux antipodes de celles associées au cannabis (produit naturel, consommé depuis longtemps, etc.).
oepuis les études de Becker sur les jarzmen et la mari_
luana, on sait qu'un changement de comportement pré_
cède parfois un changement de représentation et l,hypo_
thèse à lormuler ici est que la méphédrone
consommee
-
comme substitut de la MDMA
201I : le battage médiatique continue
-
a agit comme un pied
dans la porte, poussant les personnês ayant testé ce pro-
Eien que la méphédrone semble avoir totalement disDa_
rue au pr0lil de la MDMA, nous obseruons une augmenta_
duit à faire évoluer leurs
tion de la disponibilité du 2C-1. Nous recueillons aussi
fusion de la méthoxétamine en s0it une conséquence
plusieurs lémoignages concernant une nouvelle
molé_
cule, la méthoxétamine. Cette dernière, aux effets
ploches de la kétamine (dont le niveau de consommation
a entre temps largement augmenté) est notamment
DIé-
sentée par des revendeurs comme
Iétamine
"
ou encore la
.
d
la reinplaçante de la
kétamine du
futur,.
représentations vers une
meilleure acceptati0n des l{pS. ll est possible que la dif_
active puisque sa consommation peut, elle aussi, faire
évoluer les représentations des leufeurs. ll en résulterait
un eftet boule de neige qui pourait toucher tous les l{ps.
ll demeure cependant difficile de se prononcer sur sa
possible diffusion dans d'autres espaces, mais ilest
clair
que les NPS possèdent des caractéristiques les
rendant
attractits p0ùr les consommateurs (taible Drix. taible
i
4. ti,
ment des attitudes individuelles et collectives envers
Encore laut-il que
risque iudiciaire' accès facile, etc '
pour séduirê les consomces molécules aient le potentiel
)
prise de décision publique. Rien d'anormal à cela, le pro-
journal à l'autre'
blème vient plutôt des interactions d'un
par la
notamment de la règle de non-dépassement
espaces.0n pense notamment aux usagers ptécaires et
désocialisés pour qui le faible prix des NPS pourralt se
c0ncurrence.
journal haite d'un
Ceite règle veut que, dès lors qu'un
(ainsi
sujet, les autres se voient obligés de le traiter aussi
révéler déterminant' Jusqu'à présent la france semble
épargnée par une diflusion vers ces espaces mais
ie lendemain de la parution de l'article initial de
M. Power3, deux gros tirages ont repris l'informati0n)'
dèC
incite
l'exemple d'autres pays (notamment la Roumanie)2
à conserver une certaine vigilance'
(développer
Combinée à la première catégorie d'influence
I'intérêt du Dublic), cette règle est cause des emballe-
lnfluence des médias dans la ditfusion
des NPS, I'exemPle de la méPhédrone
En ce qui concerne le rôle des médias dans la
diffusion de
au
certaines ptatiques, I'exemple de la méphédrone
titrée
Royaume-Uni est frappant Dans une interview
panic
How I caused an international drug
''
Mike Power
nouvelle
le Dremler l0urnaliste a avoir écrit sur cette
molécule en 2007
(
-
alors qu'elle n'était encore cons0m-
mée que dans des cercles d'initiés
-
raconte au lournat
ont tait
tllix tlagcomment les fonctionnalités de G0ogle
exoloser la consommation de méphédrone: "Dèsleiùul
/e Guardian
où mon afticle a été ptrbllé dans Drugscope'
et /e Telegraph t'ont repris et
atticles
à
lnt
écrit leurs propres
pattir de nes conclusions' Mais' les vendeu$
la néphédnne sur tes
d'engrais [appetlation courante de
inscrits à Gogle Adwqtds'
sites de vente en lignel étaieût
étaient payés pal
tandis lue teïuadian ef /eTelegraph
qui récupère des
pour utiliser Adsense (togiciel
Êoogle
nots-ctés à
paitt de bulletins d'infÛmatin et
les asso-
âfin de génêtel
cie avec les nots-clés des annlncews
Le résultat
annunces reliant I'un avec I'autre)'
.
flt
des
a
que chaque article qui
tésulté de mon histoirc
était
læteuts
suivi d'annoncils clmnerciates indiquant-aux
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est complexe'
comDortements face aux drogues
loin d'être uniforme' il existe
multifactoriel et
4
quaÙe
lien. tancaster et al distinguent
À'o"nn u'n
'"'pn*' '.1i1l-1"11; r'el et
@ Lt9Êr6 F/scrttltr'/tocrd'r u
tn.mcrh.drcne-!û'co.dttt
'!'û
0
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'
I'in'
d'inlluence médiatique: développer
dru tvoes
pratiques; dé{itorot ou puttic p'ur certâines
'd"r'1'1'.
trDese,oee
uu!.p6)Etoiroûte'r/'rl$*t:'y:11:, rl
trrtÙ nir
t. ltn'Ût &_toL tlt_dur_dfttnure
q/ €'
produits et, enlin, alimenter le débat oolitique et d0nc la
mateurs,l. cetle temarque, particuliètement vraie en
espace festif techno, a moins de sens dans d'autres
'
les
laç0nner
les termes du problème;
indirecte-
à
ments médiatiques qui s'aut0renf0rcent et aboutissent
des 0auiques nhrules parlois tolalement déconnectées
du ohénomène réel. Car la saturation médiatique d0nne
par un
I'imoression d'un envahissement de la société
0u en
comportement, même s'il est en réalité très rare
recul. Les effets pervers de ces incendies médiatiques
des ailes à
sont très variés: d'un côté ils peuvent donner
radicales' de
des entrepreneurs de morale aux méthodes
qu'ils
I'autre ils peuvent normaliser le c0mp0rtement
beaucoup de
entendent pourtant dénoncer Ainsi,
première heure voient dans
consommateurs de liPS de la
et des NPS
le buzz médiatique autour de la méphédrone
la véritable cause de leur difiusion'
I'antériorité de la
Mais, plutôt que de s'intenoget sur
de leur médiatisade masse des NPS ou
consommati0n
que les deux phénomènes se
tion, mieur vaut âdmettre
plus un phénomène prend de
renlorcent mutuellement:
et' inversement' plus il
l'ampleur plus il sera médiatisé
plus il aura de chance de prendre de l'amsera médiatisé
pleur.
I'influence des médias
bependant, si I'on veut analyser
se pencher sur le
surr{'arrivée des NPS, il faut aussi
le suiet' 0n 0bserve souvent
contenu des articles traitânt
(
des NPS pour drauneLamplifhation des avantages
d'être psychologue pour
matiser le proposs'6. Nll besoin
qul
messages ambigus
imaginer les eflets pervers des
à la di{luPourtant, alors qu'un magazine
'
sontienvoyés.
,ion,.urri tirnitor rt tOlective
qu'AsUD est systématique-
peut titrer:
gros tirage comme I'fxpress
ment attaqué, un
en vente
nouvelle cocaine de synthèse
"
i. toOlot*,
1i5rr,;'runt qu,
de
quiconque n'y voit d'incitation 0u
présentation sous un iour lâvorable'