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Dix erreurs du MES
(à éviter ou à méditer)
Jean Vieille
SyntropicFactory, Control Chain Group, Interaxys
j.vieille@syntropicfactory.com
Résumé. Lesigle M.E.Ss’appliquedefaçon générale àl’informatique de support
aux opérations industrielles. La transformation de plus en plus rapide des
systèmes industriels nécessite une bonne prise en charge de la dimension
informationnelle. Cet article expose quelques-unes des difficultés auxquelles sont
confrontés les industriels pour appliquer les technologies de l’information aux
systèmes physiques dans une perspective d’optimisation systémique.
Mots-clé: systèmes industriels, ERP, MES, MOM, informatique, automation,
transformation, performance, standardisation, interopérabilité, créativité,
flexibilité, viabilité, organisation, projets, budget
Introduction
Jusqu’à la fin des années 1980, les systèmes informatiques de gestion de l’entreprise –
aujourd’hui les ERPs (Enterprise Resource Planning ou progiciels intégrés de gestion)
- et les systèmes de contrôle (en charge du contrôle des processus physiques de
fabrication) appartenaient à des mondes isolés. Tout d’abord, les technologies étaient
incompatibles : réseaux, systèmes d’exploitation, codage binaire, formats de fichiers…
Ensuite, le besoin d’interactions entre ces systèmes ne pesait pas encore suffisamment
face aux préoccupations cyber-sécuritaires considérées alors avec sérieux. Enfin, les
agents de développement et de mise en œuvre de ces applications informatiques étaient
– et sont toujours - bien distincts : services informatiques et SSII d’un côté, services
d’ingénierie générale et intégrateurs automaticiens de l’autre.
Plusieurs facteurs ont suscité l’apparition de nouvelles exigences et ouvertures en
matière d’interopérabilité entre ces types d’applications informatiques et à faire naitre
un nouveau domaine de support informationnel à la frontière entre la gestion
d’entreprise et le contrôle des processus physiques, entre autres :
 la demande d’un suivi détaillé et parfois certifié des processus de fabrication pour le
contrôle de gestion,l’amélioration des pratiques et des procédés, la réglementation ;
 la gestion de la performance qui nécessite l’acquisition et le croisement des données
du domaine opérationnel et de la gestion ;
 la dynamisation de la chaine logistique exigeant la synchronisation des activités
opérationnelles avec les processus de conception, d’approvisionnement et de
livraison ;
 la programmation de la production à très court terme avec une grande variabilité et
de faibles volumes exigeant l’optimisation de l’ordonnancement ;
 l’adoption des standards informatiques par les systèmes de contrôle (Windows /
Unix / Linux et réseau Ethernet principalement) et l’arrivée d’une nouvelle
génération d’automaticiens plus au fait de ces technologies que des risques
industriels.
Le sigle M.E.S. (Manufacturing Execution System que l’on peut traduire en français
par « Système d’exécution de la fabrication ») a été promu dans les années 1990 par un
consortiumd’éditeurs de logiciels destinés principalement aux industries réglementées
et / ou peu automatisées (en particulier la pharmacie, l’électronique), le MESA
(Manufacturing Execution system Association). Ces logiciels permettaient de guider
les opérateurs dans l’exécution manuelle des opérations de fabrication et d’attester de
leur exécution conforme. Avec la consolidation fonctionnelle autourdes « 11 fonctions
du MESA » puis de l’ISA-95, ils se sont ensuite propagés assez largement dans les
procédés discontinus ou batch (notion de « recette »). Les processus discrets (usinage,
assemblage) n’étaient pas en reste : à côté des logiciels MES, ils ont été également pris
en charge directement par les ERPs lorsqu’ils étaient manuels, ou par les fournisseurs
de machines ou de lignes de production intégrées. Dans le domaine de la production
continue apparaissent des solutions verticalisées de pilotage et d’optimisation au-dessus
du contrôle temps réel, sans nécessairement s’inscrire dans la mouvance MES
(Production et réseaux d’énergie, métallurgie, papier…). Les applications
d’ordonnancement, fonction centrale proclamée du domaine MES, revendiquent
rarement cette appartenance sauf lorsqu’elles font partie de la solution MES.
Hors de la cible originale peu automatisée, les résultats n’ont pas toujours été à la
hauteur des espoirs nés de la première vague d’intérêt. Parmi les raisons de cette
déception figuraient l’inaptitude à interagir avec l’automation, la lourdeur mal anticipée
de la gestion des données de techniques, la difficulté de contextualiser l’information
opérationnelle et la situation incertaine de ces solutions enfichées entre deux mondes
jusque-là isolés – la gestion et l’automation. L’automaticien n’est pas à l’aise avec les
traitements transactionnels, de même pour le gestionnaire vis-à-vis des contraintes du
contrôle en temps réel et de la réalité des processus physiques, suscitant des erreurs
conceptuelles du couplage avec l’ERP.
La situation a évolué, le sigle MES, secouru pour un temps par un cousin MOM
(Manufacturing Operation Management) retrouve des couleurs, tandis que le marché
devient plus mature. Les acteurs de l’automation s’y attèlent, le plus souvent en
absorbant des éditeurs spécialisés ; ceuxqui restent indépendants se concentrent surdes
secteurs industriels ou des zones géographiques et se font valoir leurs capacités
d’innovation. Une nouvelle génération d’experts voit le jour, capables d’appréhender
plus globalement la problématique du contrôle de la production industrielle. La cyber-
sécurité est sérieusement prise en compte, la communication avec l’automatisme est
devenue triviale grâce à OPC (Open Platform Communications).
En parallèle, les entreprises n’ont pas attendu les éditeurs de logiciels pour
développerleurs propres solutions internes afin de répondre précisément à leurs besoins
de supervision des activités opérationnelles : ces solutions « maison » sont sans doute
encore majoritaires de nos jours. Toutefois, les entreprises accueillent volontiers les
éditeurs pour externaliser le support informationnel de leur système de production.
Aiguillonnée par l’offre, l’industrie commence à prendre la mesure du potentiel des
technologies de l’information à tous les niveaux, en témoignent les programmes Smart
Industry (USA), Industrie 4.0 (Allemagne), et récemment et plus timidement Industrie
du Futur (France). Pour en tirer parti, la transformation informatique industrielle doit
viser 4 objectifs :
 mettre à profit les technologies modernes favorisant le développement et le
déploiement rapides ;
 offrir une couverture fonctionnelle appropriée malgré le manque d’expression des
exigences ;
 stimuler la réactivité de l’adaptation informatique à la transformation industrielle ;
 assurer l’indépendance du cycle d’évolution des solutions informatiques en
interaction autour du système opératif.
Les deux premiers points seront correctement couverts dans le cadre de projets bien
gérés à condition toutefois que le délai effectif de réalisation soit compatible avec la
constante de temps d’évolution du système industriel. Ce n’est pas toujours le cas :
nombre de schémas directeurs ambitieux ont pour seul résultat après plusieurs années
de labeur d’en lancer un nouveau. Les deux points suivants conditionnent directement
la viabilité à moyen terme de la solution, son coût d’exploitation, son potentiel de
contribution au développement du système industriel. Ils sont liés à des options d’ordre
technique, organisationnel et stratégique qui dépassent la responsabilité des projets .
Face à ces exigences, voici une dizaine de points d’attention pourfavoriser le succès
des projets informatiques industriels ou « MES ».
1 Standardisation extrême
Avatarde la conception objet,l’approche « Core system» met à disposition des services
informationnels génériques susceptibles de servir de manière identique des besoins
similaires exprimés par des acteurs et pour des métiers différents. D’un point de vue
fonctionnel, la démarche consiste à conceptualiser, abstraire les spécifications pour
couvrir des besoins proches parun nombre réduit de fonctions. Globalement vertueuse,
cette approche ne doit pas être dogmatique au point de créer des problèmes graves
d’ordre fonctionnel, humain ou systémique.
 La réponse standard risque de ne pas couvrircorrectement le besoin fonctionnelréel,
ou se révéler inutilement sophistiquée et complexe pour certains métiers. Il sera
nécessaire de créer des variantes plus adaptées auxspécificités locales.
 Le facteur humain est récalcitrant aux initiatives dont il n’est pas partie prenante.
L’approche standard est par nature « top-down » et suscite la méfiance. Il est prudent
de différer le déploiement sur les ilots de résistance, susceptibles de devenir
positivement demandeurs lorsque le système aura démontré ses qualités.
 La viabilité de l’entreprise induit une certaine autonomie des entités opérationnelles
que la standardisation peut compromettre si elle n’est pas traitée au bon niveau. Il
est normal de standardiserles flux de communication, le reporting et les indicateurs
de performance opérationnelle pertinents au niveau de l’entreprise ou d’offrir une
plateforme informatique ouverte au développement à côté des fonctions standard.
Par contre, il peut être néfaste d’imposer aux usines leurs indicateurs internes de
performance ou leurs méthodes d’ordonnancement. De même, la granularité du
contrôle opérationnel doit être adaptée au besoin de la gestion opérationnelle de
l’entité concernée, et ne correspond pas à la maille du contrôle de gestion et de la
gestion de production. Mal conduite, la standardisation risque de figer la
régénération vitale créative du système opérationnel.
2 Périmètre fonctionnel trop large
La programmation de la transformation peut prendre différentes formes, succession de
projets ou d’actions de plus ou moins grande ampleur, du déploiement d’une fonction
sur une cible métier isolée jusqu’au remplacement global de l’ensemble des
applications sur tout le système opératif, par une planification à long terme ou de
manière opportuniste.
Le business case ambitieux d’un projet spécifique peut être motivé par l’espoir de
sa réalisation grâce à une pléthore d’arguments à destination des instances
décisionnelles. Techniquement, il est plus simple de procéderà la refondation complète
d’une construction intriquée difficile à faire cohabiter avec une nouvelle solution.
De façon générale, la taille des projets est corrélée avec le niveau de risque. L’effet
tunnel et sa durée découragent les acteurs et les utilisateurs, élargit l’écart avec
l’évolution continue des besoins, voire de la technologie. Dans le domaine particulier
de l’informatique industrielle, le besoin à couvrir est difficile à exprimer et rapidement
évolutif. Une spécification fonctionnelle longuement murie, cohérente, supposée
exhaustive se révèle parfois à côté de la plaque avec une réponse inappropriée, avec des
lacunes ou en excès par rapport aux véritables besoins.
Lorsque les projets sont traités de manière indépendante,en dehors d’un programme
de transformation cohérent permanent, il est difficile de servir des besoins ponctuels ou
nouveaux, et d’offrir la réactivité et la flexibilité exigées pour servir le système opératif.
L’informatique industrielle se présente comme un élément de perturbation du métier et
entre en conflit avec la transformation industrielle elle-même.
Le découplage de l’évolution technologique, de la couverture de besoins fonctionnel
et du déploiement à destination de cibles métiers / utilisateurs est à la base d’une gestion
de la transformation efficace dans les limites de l’engagement budgétaire. Il permet la
programmation dynamique et la gestion de la performance de transformation
informatique.
On pourra contournerces difficultés en réduisant le projet initial à sa part essentielle
– par exemple la mise en place de la plateforme et d’un pilote au périmètre fonctionnel
et topologique réduit. La suite du projet pourrait enchainer des phases,ou mieux passer
en mode structure de développement et déploiement permanent priorisé, monitoré et
encadré par un budget de fonctionnement annuel (transformation continue).
3 Jeter sans ménagement l’existant
Les applications en place, représentent une connaissance importante théoriquement
explicite, mais dont les subtilités résultant des améliorations successives échappent à la
transcription en exigences pour la nouvelle solution. Qu’il s’agisse de fonctionnalités
très spécifiques ou de la couverture fonctionnelle utile, de nombreux projets échouent
à reconstituer un écosystème offrant le même niveau de support que les applications
qu’ils cherchent à remplacer. La « résistance au changement » est alors évoquée,mais
la persuasion ne suffit pas toujours à compenser les besoins réels abandonnés dans
l’aventure.
L’identification de ces applications et leur analyse critique sont indispensables pour
prévenir une perte fonctionnelle inacceptable. On pourra par exemple redéfinir les
contours et emballer proprement les éléments applicatifs concernés, de façon à les
intégrer au moins temporairement dans le nouveau système en attendant leur migration
lors d’une nouvelle étape de transformation bien préparée.
4 Pré-consultations déviantes
Les projets MES intègrent souvent une phase d’exploration des solutions du marché :
la veille technologique est l’un des moteurs de la transformation qui permet d’intégrer
l’état de l’art dans les options de progrès.Parcontre,cette démarche n’est pas forcément
appropriée lors du cadrage d’un projet. Le dangerréside dans la confusion entre le rêve
– ou la déception - suscité par l’action commerciale des fournisseurs, et les besoins
réels de l’entreprise.
D’une part, l’exposé ou la démonstration commerciale du logiciel ne sont pas probants,
la présentation étant soit sans rapport avec la problématique de l’entreprise, soit biaisée
parce que ratée ou trop bien réussie. Les impressions laissées par ces présentations
peuvent limiter les options face à des critères importants d’ordre technique,économique
ou contractuel : on évitera de convier les futurs utilisateurs aux pré-consultations de
façon à éviter la contamination des besoins par l’esthétique et l’argumentation
commerciale.
D’autre part,la démonstration d’une fonction non prévue pour le projet peut faire naitre
un « besoin » dont la réalité sera mise à l’épreuve d’une évaluation objective de l’apport
au métier.
5 Implication interne insuffisante
L’industriel délègue souvent la mise en œuvre informatique à des prestataires
spécialisés et cherche à minimiser l’intensité de son implication en tant que donneur
d’ordre soit en restreignant ses responsabilités et son activité dans la réalisation du
projet, soit en s’entourant d’une AMOA (assistance à maîtrise d’ouvrage)externe. Cette
approche l’expose au risque d’être dépossédé de son système de transformation qu’il
confie à une entité externe non concernée en premier chef par le devenir de l’entreprise.
Or, la transformation (gestion et contrôle de l’évolution de l’entreprise) est
précisément l’activité qui assure la survie, le développement de l’intelligence et en
filigrane de la performance. L’informatique, en particulier « industrielle » c’est-à-dire
liée à l’objet même de l’existence de l’entreprise est un élément essentiel de cette
transformation permanente.
L’allocation des moyens internes nécessaires pour un projet informatique représente
un défi pour l’entreprise en mettant à contribution des acteurs qui devront partager leur
temps avec leur activité opérationnelle.
Le second point (périmètre du projet trop large) n’offre guère d’autre solution que
de constituerune équipe interne ad hoc dédiée au projet. Une telle structure éphémère
traite la transformation comme une activité exceptionnelle sans lendemain alors qu’elle
devrait être un processus structurel.
L’entreprise doit impérativement garder la maitrise de la dimension informationnelle
de sa transformation, et donc dédier des ressources à cet effet. L’ampleur de ces
ressources devra être en rapport avec la dynamique de transformation souhaitée et
adaptée à la taille maximale des projets.
6 Approche projet et intégration des prestataires insuffisante
La gestion de projet tend à circonscrire les rôles et les prestations au cadre du projet.
Lorsqu’un intégrateur est sollicité pour le contexte exclusif du projet sans espoir de
collaboration à long terme, il doit considérerson seulintérêt immédiat dans ce contexte.
Il est alors nécessaire d’établir des spécifications très précises, chaque modification /
ajout fera l’objet d’avenants pris en compte pour le seul bilan du projet (compromis
coût – qualité). Le bon gestionnaire de projet la plupart de ces aménagements pours’en
tenir au cahier des charges initial. Un second projet traitera des problèmes non résolus
ou soulevés parle premier. Il en résulte une insatisfaction des utilisateurs,une mauvaise
adéquation au besoin,et très souvent un échec du projet,que ce soit surle plan qualitatif
(gestion de projet rigoureuse) financière (avenants) ou délais (contractualisation des
évolutions).
Cette rigidité affecte directement la performance de transformation. Combinée avec
l’erreur précédente elle aggrave la perte de la connaissance et donc de la maitrise même
de cette transformation, aux conséquences létales.
Considérant l’importance de la transformation informatique, l’entreprise devra soit
installer une cellule informatique industrielle conséquente en charge du pilotage de la
stratégie et de la réponse aux besoins,de la conception au déploiement, soit établir un
contrat de partenariat à long terme avec un fournisseur/intégrateur qui fera de cette
société une entité support de l’entreprise. Cette cellule ou ce partenaire traitera tous les
ajustements et développements évolutifs sur la plateforme technologique en place, et
interviendra en supervision des projets plus importants.
7 Incohérence de la conception informatique avec
l’organisation
La planification et l’exécution doivent interagir de manière appropriée selon les options
organisationnelles qui fixent par exemple le degré de liberté du domaine opérationnel
vis-à-vis des directives de la planification. Il en est de même pour le partage des tâches
et responsabilités des activités de conception produit/industrialisation, maintenance,
logistiques et qualité. La conception informatique doit les respecteren ajustant les accès
et la profondeur de visibilité aux utilisateurs que ce soit à travers l’urbanisation des
applications calquée sur les domaines de responsabilité ou de manière plus fine et
flexible par une approche SOA (Service Oriented Architecture) d’abstraction
applicative des fonctions.
La réflexion systémique, l’optimisation organisationnelle, l’ajustement
informationnel correspondant et la coordination générale des développements
informatiques sont souventabsents de la cartographie des applications dont l’empreinte
fonctionnelle découle davantage de leur potentialité et de la précédence des projets,que
d’une programmation consciente. Par exemple :
 la gestion des stocks ricoche entre ERP et MES, sa consolidation est laborieuse
 les ordres et réponses de fabrication portent nombre d’informations redondantes ou
inutiles en s’attachant à une granularité et un niveau de détail inadaptés
 L’évolution et l’introduction de nouveaux produits sont difficiles en imposant une
élaboration et propagation complexes des données techniques
 La gestion de la performance est entraînée dans des dérives dommageables , comme
le suivi dans l’ERP des temps d’arrêt des machines perçu comme « flicage » inutile
au lieu de l’efficience des équipements justifié pour la planification capacitaire.
Les projets sont finalement plus difficiles à réaliser, avec des options de mise en œuvre
réduites tandis que les utilisateurs souffrent d’une situation détériorée et de contraintes
résultant de la distorsion de l’informatique avec l’organisation.
8 Négliger l’interopérabilité
Les logiciels intégrés d’entreprise comme les ERPs facilitent le développement des
applications autourd’une base de données unique. Les logiciels MES créent un espace
linguistique à part tout en restant lié de manière très étroite aux autres applications
(ERPs, maintenance, qualité, ingénierie, développement) par les ressources et les flux
d’activités.
Les interfaces des applications d’un projet avec les applications existantes sont
souvent laissées à l’appréciation et à l’expertise de l’intégrateur. La relégation des
interfaces au rang de trivialités à traiter de manière ad hoc par les informaticiens n’est
pas toujours une cause immédiate de l’échec, mais inocule les germes d’un cancer. A
court terme, le maintien de la cohérence des référentiels (produits, matières,
équipements) devient vite un cauchemar. Plus tard, l’évolution applicative et
handicapée par le codage purement technique des canauxde communication.
Ce point découle du précédent. L’interopérabilité est liée directement au couplage
systémique dans l’organisation industrielle et à la cartographie applicative. Il est
indispensable d’encadrer la notion technique d’interface par celle linguistique
d’interopérabilité prenant en compte le sens de l’information sur la base d’un langage
d’entreprise cohérent avec le modèle d’architecture qui guide la transformation
industrielle. Elle implique la gestion d’une taxonomie des concepts et des données de
référence.
9 Ouvrir un champ de bataille IT/ingénierie
Le domaine fonctionnel MES empiète sur celui de l’ERP ; il est normal l’ERP ou le
MES soit en compétition sur la réalisation de certaines fonctions. La justification du
MES réside moins dans la couverture fonctionnelle que dans la fourniture d’un outil
plus adapté à l’exploitant qu’au gestionnaire, apte à gérer un niveau de détail
indispensable dans l’atelier, inutile voire nuisible pour les acheteurs, vendeurs et
stratégistes de l’entreprise,à absorberla complexité opérationnelle pourrendre possible
son pilotage et son contrôle au sein de l’entreprise.
La nécessité de maitriser la complexité de l’entreprise aboutit à des schémas
d’organisation où l’informatique industrielle s’insère de différentes manières,
aboutissant souvent à l’attribution du domaine MES à une entité différente de celui de
l’ERP, aboutissant à un positionnement concurrentiel sur les projets lorsque les
responsabilités ou les règles d’allocation ne sont pas clairement établies.
Auxiliaire du système de production, service autonome à l’échelle de l’entreprise,
extension de l’informatique d’entreprise, de l’ingénierie ou structure mixte, il peut être
nécessaire de repenser le modèle organisationnel de l’informatique industrielle pour
prévenir des conflits inutiles. On peut chercher à optimiser le service informationnel en
découplant l’aspect plateforme centralisée (offrir des services de développement et de
déploiement) et l’aspect service et réalisation localisé sous la responsabilité de l’unité
de fabrication s’appuyant surles ressources offertes jugées sur le contrat de service et
l’adéquation fonctionnelle sans exclure le prototypage Excel...
10 Budget inadapté
On entend parfois que le retour sur investissement d’un projet MES n’est pas plus
chiffrable que celui d’un ERP, il faut donc convaincre la direction qu’il est
indispensable. D’autres prétendent chiffrer des économies de main d’oeuvre alors que
personne ne sera licencié à l’issue du projet – au contraire ! D’autres décomptent les
bouts de chandelles liés à une amélioration présumée de la productivité, alors que
l’usine est sur-capacitaire. Dans la plupart des cas,le business case est fragile. A moins
de parvenir à susciter l’enthousiasme, le projet ne se décide qu’à la condition d’une
dépense minimale faute d’une valorisation crédible du potentiel économique. Un
budget insuffisant aboutissant à une solution insatisfaisante,la preuve est faite du bien-
fondé de la méfiance managériale. Cette difficulté budgétaire entraine donc deux types
d’échec : abandon du projet et projet raté.
Le soin apporté à l’évaluation de l’impact économique est déterminant pour définir
le budget et les livrables du projet soutenant une projection crédible pour la direction.
Une telle évaluation devrait porter sur différents horizons temporels, sur le plan
purement économique ainsi que sous l’angle de la survie et du développement moyen-
long terme, et ceci en impliquant de manière contradictoire les acteurs concernés. Cette
évaluation peut être conduite pour un projet, mais elle est plus facilement et utilement
déterminée globalement pourl’activité permanente de transformation informatique : un
budget multi-annuel (afin de pouvoir absorber les pics de transformation) calibré en
conséquence serait utilisable aussi bien pour les ajustements continus que pour les
projets plus importants à la discrétion du responsable de l’informatique industrielle. Le
contrôle est simplifié, permettant une plus grande réactivité de la transformation qui
n’aurait pas à justifier par exemple de ses décisions technologiques incompréhensibles
par la direction.
En conclusion,
L’informatique industrielle apparait comme un domaine sensible pour 3 raisons
principales
 Elle croise des domaines fonctionnels de l’entreprise dont les interactions ne sont
pas toujours bien formalisées, sans sponsor naturel capable de diriger l’alignement
technologique et fonctionnel sur une organisation systémique cohérente
 La rencontre des processus de gestion triviaux et stables avec des processus
physiques très technique en développement permanent représente un défi pour la
mise en œuvre qui doit rationaliser une connaissance propre à l’industriel
difficilement décrite dans des cahiers des charges.
 La dynamique de transformation informatique doit accompagner celle du système
industriel au cœur de la raison d’être de l’entreprise. Elle nécessite d’encadrer les
projets dans un processus structurel doté des moyens nécessaires.
Cet inventaire est loin d’être exhaustif. Les difficultés humaines (résistance au
changement) et programmatiques (changement de stratégie et de contexte en cours de
projet) n’ont pas été citées en entrées parce qu’elles ne sont que la conséquence des
points mentionnés.
Le plus important est sans doute la prise de conscience de l’importance et du
couplage intime de la dimension informationnelle dans le système industriel. Cet état
d’esprit guidera naturellement l’industriel vers des choix pragmatiques et cohérents
faces aux modes et argumentaires commerciaux pour tirer profit d’une technologie
disponible sans perdre de vue son caractère utilitaire au service de la transformation
industrielle.

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Les 10 erreurs du mes

  • 1. Dix erreurs du MES (à éviter ou à méditer) Jean Vieille SyntropicFactory, Control Chain Group, Interaxys j.vieille@syntropicfactory.com Résumé. Lesigle M.E.Ss’appliquedefaçon générale àl’informatique de support aux opérations industrielles. La transformation de plus en plus rapide des systèmes industriels nécessite une bonne prise en charge de la dimension informationnelle. Cet article expose quelques-unes des difficultés auxquelles sont confrontés les industriels pour appliquer les technologies de l’information aux systèmes physiques dans une perspective d’optimisation systémique. Mots-clé: systèmes industriels, ERP, MES, MOM, informatique, automation, transformation, performance, standardisation, interopérabilité, créativité, flexibilité, viabilité, organisation, projets, budget Introduction Jusqu’à la fin des années 1980, les systèmes informatiques de gestion de l’entreprise – aujourd’hui les ERPs (Enterprise Resource Planning ou progiciels intégrés de gestion) - et les systèmes de contrôle (en charge du contrôle des processus physiques de fabrication) appartenaient à des mondes isolés. Tout d’abord, les technologies étaient incompatibles : réseaux, systèmes d’exploitation, codage binaire, formats de fichiers… Ensuite, le besoin d’interactions entre ces systèmes ne pesait pas encore suffisamment face aux préoccupations cyber-sécuritaires considérées alors avec sérieux. Enfin, les agents de développement et de mise en œuvre de ces applications informatiques étaient – et sont toujours - bien distincts : services informatiques et SSII d’un côté, services d’ingénierie générale et intégrateurs automaticiens de l’autre. Plusieurs facteurs ont suscité l’apparition de nouvelles exigences et ouvertures en matière d’interopérabilité entre ces types d’applications informatiques et à faire naitre un nouveau domaine de support informationnel à la frontière entre la gestion d’entreprise et le contrôle des processus physiques, entre autres :  la demande d’un suivi détaillé et parfois certifié des processus de fabrication pour le contrôle de gestion,l’amélioration des pratiques et des procédés, la réglementation ;
  • 2.  la gestion de la performance qui nécessite l’acquisition et le croisement des données du domaine opérationnel et de la gestion ;  la dynamisation de la chaine logistique exigeant la synchronisation des activités opérationnelles avec les processus de conception, d’approvisionnement et de livraison ;  la programmation de la production à très court terme avec une grande variabilité et de faibles volumes exigeant l’optimisation de l’ordonnancement ;  l’adoption des standards informatiques par les systèmes de contrôle (Windows / Unix / Linux et réseau Ethernet principalement) et l’arrivée d’une nouvelle génération d’automaticiens plus au fait de ces technologies que des risques industriels. Le sigle M.E.S. (Manufacturing Execution System que l’on peut traduire en français par « Système d’exécution de la fabrication ») a été promu dans les années 1990 par un consortiumd’éditeurs de logiciels destinés principalement aux industries réglementées et / ou peu automatisées (en particulier la pharmacie, l’électronique), le MESA (Manufacturing Execution system Association). Ces logiciels permettaient de guider les opérateurs dans l’exécution manuelle des opérations de fabrication et d’attester de leur exécution conforme. Avec la consolidation fonctionnelle autourdes « 11 fonctions du MESA » puis de l’ISA-95, ils se sont ensuite propagés assez largement dans les procédés discontinus ou batch (notion de « recette »). Les processus discrets (usinage, assemblage) n’étaient pas en reste : à côté des logiciels MES, ils ont été également pris en charge directement par les ERPs lorsqu’ils étaient manuels, ou par les fournisseurs de machines ou de lignes de production intégrées. Dans le domaine de la production continue apparaissent des solutions verticalisées de pilotage et d’optimisation au-dessus du contrôle temps réel, sans nécessairement s’inscrire dans la mouvance MES (Production et réseaux d’énergie, métallurgie, papier…). Les applications d’ordonnancement, fonction centrale proclamée du domaine MES, revendiquent rarement cette appartenance sauf lorsqu’elles font partie de la solution MES. Hors de la cible originale peu automatisée, les résultats n’ont pas toujours été à la hauteur des espoirs nés de la première vague d’intérêt. Parmi les raisons de cette déception figuraient l’inaptitude à interagir avec l’automation, la lourdeur mal anticipée de la gestion des données de techniques, la difficulté de contextualiser l’information opérationnelle et la situation incertaine de ces solutions enfichées entre deux mondes jusque-là isolés – la gestion et l’automation. L’automaticien n’est pas à l’aise avec les traitements transactionnels, de même pour le gestionnaire vis-à-vis des contraintes du contrôle en temps réel et de la réalité des processus physiques, suscitant des erreurs conceptuelles du couplage avec l’ERP. La situation a évolué, le sigle MES, secouru pour un temps par un cousin MOM (Manufacturing Operation Management) retrouve des couleurs, tandis que le marché devient plus mature. Les acteurs de l’automation s’y attèlent, le plus souvent en absorbant des éditeurs spécialisés ; ceuxqui restent indépendants se concentrent surdes secteurs industriels ou des zones géographiques et se font valoir leurs capacités d’innovation. Une nouvelle génération d’experts voit le jour, capables d’appréhender
  • 3. plus globalement la problématique du contrôle de la production industrielle. La cyber- sécurité est sérieusement prise en compte, la communication avec l’automatisme est devenue triviale grâce à OPC (Open Platform Communications). En parallèle, les entreprises n’ont pas attendu les éditeurs de logiciels pour développerleurs propres solutions internes afin de répondre précisément à leurs besoins de supervision des activités opérationnelles : ces solutions « maison » sont sans doute encore majoritaires de nos jours. Toutefois, les entreprises accueillent volontiers les éditeurs pour externaliser le support informationnel de leur système de production. Aiguillonnée par l’offre, l’industrie commence à prendre la mesure du potentiel des technologies de l’information à tous les niveaux, en témoignent les programmes Smart Industry (USA), Industrie 4.0 (Allemagne), et récemment et plus timidement Industrie du Futur (France). Pour en tirer parti, la transformation informatique industrielle doit viser 4 objectifs :  mettre à profit les technologies modernes favorisant le développement et le déploiement rapides ;  offrir une couverture fonctionnelle appropriée malgré le manque d’expression des exigences ;  stimuler la réactivité de l’adaptation informatique à la transformation industrielle ;  assurer l’indépendance du cycle d’évolution des solutions informatiques en interaction autour du système opératif. Les deux premiers points seront correctement couverts dans le cadre de projets bien gérés à condition toutefois que le délai effectif de réalisation soit compatible avec la constante de temps d’évolution du système industriel. Ce n’est pas toujours le cas : nombre de schémas directeurs ambitieux ont pour seul résultat après plusieurs années de labeur d’en lancer un nouveau. Les deux points suivants conditionnent directement la viabilité à moyen terme de la solution, son coût d’exploitation, son potentiel de contribution au développement du système industriel. Ils sont liés à des options d’ordre technique, organisationnel et stratégique qui dépassent la responsabilité des projets . Face à ces exigences, voici une dizaine de points d’attention pourfavoriser le succès des projets informatiques industriels ou « MES ». 1 Standardisation extrême Avatarde la conception objet,l’approche « Core system» met à disposition des services informationnels génériques susceptibles de servir de manière identique des besoins similaires exprimés par des acteurs et pour des métiers différents. D’un point de vue fonctionnel, la démarche consiste à conceptualiser, abstraire les spécifications pour couvrir des besoins proches parun nombre réduit de fonctions. Globalement vertueuse, cette approche ne doit pas être dogmatique au point de créer des problèmes graves d’ordre fonctionnel, humain ou systémique.
  • 4.  La réponse standard risque de ne pas couvrircorrectement le besoin fonctionnelréel, ou se révéler inutilement sophistiquée et complexe pour certains métiers. Il sera nécessaire de créer des variantes plus adaptées auxspécificités locales.  Le facteur humain est récalcitrant aux initiatives dont il n’est pas partie prenante. L’approche standard est par nature « top-down » et suscite la méfiance. Il est prudent de différer le déploiement sur les ilots de résistance, susceptibles de devenir positivement demandeurs lorsque le système aura démontré ses qualités.  La viabilité de l’entreprise induit une certaine autonomie des entités opérationnelles que la standardisation peut compromettre si elle n’est pas traitée au bon niveau. Il est normal de standardiserles flux de communication, le reporting et les indicateurs de performance opérationnelle pertinents au niveau de l’entreprise ou d’offrir une plateforme informatique ouverte au développement à côté des fonctions standard. Par contre, il peut être néfaste d’imposer aux usines leurs indicateurs internes de performance ou leurs méthodes d’ordonnancement. De même, la granularité du contrôle opérationnel doit être adaptée au besoin de la gestion opérationnelle de l’entité concernée, et ne correspond pas à la maille du contrôle de gestion et de la gestion de production. Mal conduite, la standardisation risque de figer la régénération vitale créative du système opérationnel. 2 Périmètre fonctionnel trop large La programmation de la transformation peut prendre différentes formes, succession de projets ou d’actions de plus ou moins grande ampleur, du déploiement d’une fonction sur une cible métier isolée jusqu’au remplacement global de l’ensemble des applications sur tout le système opératif, par une planification à long terme ou de manière opportuniste. Le business case ambitieux d’un projet spécifique peut être motivé par l’espoir de sa réalisation grâce à une pléthore d’arguments à destination des instances décisionnelles. Techniquement, il est plus simple de procéderà la refondation complète d’une construction intriquée difficile à faire cohabiter avec une nouvelle solution. De façon générale, la taille des projets est corrélée avec le niveau de risque. L’effet tunnel et sa durée découragent les acteurs et les utilisateurs, élargit l’écart avec l’évolution continue des besoins, voire de la technologie. Dans le domaine particulier de l’informatique industrielle, le besoin à couvrir est difficile à exprimer et rapidement évolutif. Une spécification fonctionnelle longuement murie, cohérente, supposée exhaustive se révèle parfois à côté de la plaque avec une réponse inappropriée, avec des lacunes ou en excès par rapport aux véritables besoins. Lorsque les projets sont traités de manière indépendante,en dehors d’un programme de transformation cohérent permanent, il est difficile de servir des besoins ponctuels ou nouveaux, et d’offrir la réactivité et la flexibilité exigées pour servir le système opératif. L’informatique industrielle se présente comme un élément de perturbation du métier et entre en conflit avec la transformation industrielle elle-même. Le découplage de l’évolution technologique, de la couverture de besoins fonctionnel et du déploiement à destination de cibles métiers / utilisateurs est à la base d’une gestion
  • 5. de la transformation efficace dans les limites de l’engagement budgétaire. Il permet la programmation dynamique et la gestion de la performance de transformation informatique. On pourra contournerces difficultés en réduisant le projet initial à sa part essentielle – par exemple la mise en place de la plateforme et d’un pilote au périmètre fonctionnel et topologique réduit. La suite du projet pourrait enchainer des phases,ou mieux passer en mode structure de développement et déploiement permanent priorisé, monitoré et encadré par un budget de fonctionnement annuel (transformation continue). 3 Jeter sans ménagement l’existant Les applications en place, représentent une connaissance importante théoriquement explicite, mais dont les subtilités résultant des améliorations successives échappent à la transcription en exigences pour la nouvelle solution. Qu’il s’agisse de fonctionnalités très spécifiques ou de la couverture fonctionnelle utile, de nombreux projets échouent à reconstituer un écosystème offrant le même niveau de support que les applications qu’ils cherchent à remplacer. La « résistance au changement » est alors évoquée,mais la persuasion ne suffit pas toujours à compenser les besoins réels abandonnés dans l’aventure. L’identification de ces applications et leur analyse critique sont indispensables pour prévenir une perte fonctionnelle inacceptable. On pourra par exemple redéfinir les contours et emballer proprement les éléments applicatifs concernés, de façon à les intégrer au moins temporairement dans le nouveau système en attendant leur migration lors d’une nouvelle étape de transformation bien préparée. 4 Pré-consultations déviantes Les projets MES intègrent souvent une phase d’exploration des solutions du marché : la veille technologique est l’un des moteurs de la transformation qui permet d’intégrer l’état de l’art dans les options de progrès.Parcontre,cette démarche n’est pas forcément appropriée lors du cadrage d’un projet. Le dangerréside dans la confusion entre le rêve – ou la déception - suscité par l’action commerciale des fournisseurs, et les besoins réels de l’entreprise. D’une part, l’exposé ou la démonstration commerciale du logiciel ne sont pas probants, la présentation étant soit sans rapport avec la problématique de l’entreprise, soit biaisée parce que ratée ou trop bien réussie. Les impressions laissées par ces présentations peuvent limiter les options face à des critères importants d’ordre technique,économique ou contractuel : on évitera de convier les futurs utilisateurs aux pré-consultations de façon à éviter la contamination des besoins par l’esthétique et l’argumentation commerciale. D’autre part,la démonstration d’une fonction non prévue pour le projet peut faire naitre un « besoin » dont la réalité sera mise à l’épreuve d’une évaluation objective de l’apport au métier.
  • 6. 5 Implication interne insuffisante L’industriel délègue souvent la mise en œuvre informatique à des prestataires spécialisés et cherche à minimiser l’intensité de son implication en tant que donneur d’ordre soit en restreignant ses responsabilités et son activité dans la réalisation du projet, soit en s’entourant d’une AMOA (assistance à maîtrise d’ouvrage)externe. Cette approche l’expose au risque d’être dépossédé de son système de transformation qu’il confie à une entité externe non concernée en premier chef par le devenir de l’entreprise. Or, la transformation (gestion et contrôle de l’évolution de l’entreprise) est précisément l’activité qui assure la survie, le développement de l’intelligence et en filigrane de la performance. L’informatique, en particulier « industrielle » c’est-à-dire liée à l’objet même de l’existence de l’entreprise est un élément essentiel de cette transformation permanente. L’allocation des moyens internes nécessaires pour un projet informatique représente un défi pour l’entreprise en mettant à contribution des acteurs qui devront partager leur temps avec leur activité opérationnelle. Le second point (périmètre du projet trop large) n’offre guère d’autre solution que de constituerune équipe interne ad hoc dédiée au projet. Une telle structure éphémère traite la transformation comme une activité exceptionnelle sans lendemain alors qu’elle devrait être un processus structurel. L’entreprise doit impérativement garder la maitrise de la dimension informationnelle de sa transformation, et donc dédier des ressources à cet effet. L’ampleur de ces ressources devra être en rapport avec la dynamique de transformation souhaitée et adaptée à la taille maximale des projets. 6 Approche projet et intégration des prestataires insuffisante La gestion de projet tend à circonscrire les rôles et les prestations au cadre du projet. Lorsqu’un intégrateur est sollicité pour le contexte exclusif du projet sans espoir de collaboration à long terme, il doit considérerson seulintérêt immédiat dans ce contexte. Il est alors nécessaire d’établir des spécifications très précises, chaque modification / ajout fera l’objet d’avenants pris en compte pour le seul bilan du projet (compromis coût – qualité). Le bon gestionnaire de projet la plupart de ces aménagements pours’en tenir au cahier des charges initial. Un second projet traitera des problèmes non résolus ou soulevés parle premier. Il en résulte une insatisfaction des utilisateurs,une mauvaise adéquation au besoin,et très souvent un échec du projet,que ce soit surle plan qualitatif (gestion de projet rigoureuse) financière (avenants) ou délais (contractualisation des évolutions). Cette rigidité affecte directement la performance de transformation. Combinée avec l’erreur précédente elle aggrave la perte de la connaissance et donc de la maitrise même de cette transformation, aux conséquences létales. Considérant l’importance de la transformation informatique, l’entreprise devra soit installer une cellule informatique industrielle conséquente en charge du pilotage de la stratégie et de la réponse aux besoins,de la conception au déploiement, soit établir un
  • 7. contrat de partenariat à long terme avec un fournisseur/intégrateur qui fera de cette société une entité support de l’entreprise. Cette cellule ou ce partenaire traitera tous les ajustements et développements évolutifs sur la plateforme technologique en place, et interviendra en supervision des projets plus importants. 7 Incohérence de la conception informatique avec l’organisation La planification et l’exécution doivent interagir de manière appropriée selon les options organisationnelles qui fixent par exemple le degré de liberté du domaine opérationnel vis-à-vis des directives de la planification. Il en est de même pour le partage des tâches et responsabilités des activités de conception produit/industrialisation, maintenance, logistiques et qualité. La conception informatique doit les respecteren ajustant les accès et la profondeur de visibilité aux utilisateurs que ce soit à travers l’urbanisation des applications calquée sur les domaines de responsabilité ou de manière plus fine et flexible par une approche SOA (Service Oriented Architecture) d’abstraction applicative des fonctions. La réflexion systémique, l’optimisation organisationnelle, l’ajustement informationnel correspondant et la coordination générale des développements informatiques sont souventabsents de la cartographie des applications dont l’empreinte fonctionnelle découle davantage de leur potentialité et de la précédence des projets,que d’une programmation consciente. Par exemple :  la gestion des stocks ricoche entre ERP et MES, sa consolidation est laborieuse  les ordres et réponses de fabrication portent nombre d’informations redondantes ou inutiles en s’attachant à une granularité et un niveau de détail inadaptés  L’évolution et l’introduction de nouveaux produits sont difficiles en imposant une élaboration et propagation complexes des données techniques  La gestion de la performance est entraînée dans des dérives dommageables , comme le suivi dans l’ERP des temps d’arrêt des machines perçu comme « flicage » inutile au lieu de l’efficience des équipements justifié pour la planification capacitaire. Les projets sont finalement plus difficiles à réaliser, avec des options de mise en œuvre réduites tandis que les utilisateurs souffrent d’une situation détériorée et de contraintes résultant de la distorsion de l’informatique avec l’organisation. 8 Négliger l’interopérabilité Les logiciels intégrés d’entreprise comme les ERPs facilitent le développement des applications autourd’une base de données unique. Les logiciels MES créent un espace linguistique à part tout en restant lié de manière très étroite aux autres applications (ERPs, maintenance, qualité, ingénierie, développement) par les ressources et les flux d’activités.
  • 8. Les interfaces des applications d’un projet avec les applications existantes sont souvent laissées à l’appréciation et à l’expertise de l’intégrateur. La relégation des interfaces au rang de trivialités à traiter de manière ad hoc par les informaticiens n’est pas toujours une cause immédiate de l’échec, mais inocule les germes d’un cancer. A court terme, le maintien de la cohérence des référentiels (produits, matières, équipements) devient vite un cauchemar. Plus tard, l’évolution applicative et handicapée par le codage purement technique des canauxde communication. Ce point découle du précédent. L’interopérabilité est liée directement au couplage systémique dans l’organisation industrielle et à la cartographie applicative. Il est indispensable d’encadrer la notion technique d’interface par celle linguistique d’interopérabilité prenant en compte le sens de l’information sur la base d’un langage d’entreprise cohérent avec le modèle d’architecture qui guide la transformation industrielle. Elle implique la gestion d’une taxonomie des concepts et des données de référence. 9 Ouvrir un champ de bataille IT/ingénierie Le domaine fonctionnel MES empiète sur celui de l’ERP ; il est normal l’ERP ou le MES soit en compétition sur la réalisation de certaines fonctions. La justification du MES réside moins dans la couverture fonctionnelle que dans la fourniture d’un outil plus adapté à l’exploitant qu’au gestionnaire, apte à gérer un niveau de détail indispensable dans l’atelier, inutile voire nuisible pour les acheteurs, vendeurs et stratégistes de l’entreprise,à absorberla complexité opérationnelle pourrendre possible son pilotage et son contrôle au sein de l’entreprise. La nécessité de maitriser la complexité de l’entreprise aboutit à des schémas d’organisation où l’informatique industrielle s’insère de différentes manières, aboutissant souvent à l’attribution du domaine MES à une entité différente de celui de l’ERP, aboutissant à un positionnement concurrentiel sur les projets lorsque les responsabilités ou les règles d’allocation ne sont pas clairement établies. Auxiliaire du système de production, service autonome à l’échelle de l’entreprise, extension de l’informatique d’entreprise, de l’ingénierie ou structure mixte, il peut être nécessaire de repenser le modèle organisationnel de l’informatique industrielle pour prévenir des conflits inutiles. On peut chercher à optimiser le service informationnel en découplant l’aspect plateforme centralisée (offrir des services de développement et de déploiement) et l’aspect service et réalisation localisé sous la responsabilité de l’unité de fabrication s’appuyant surles ressources offertes jugées sur le contrat de service et l’adéquation fonctionnelle sans exclure le prototypage Excel... 10 Budget inadapté On entend parfois que le retour sur investissement d’un projet MES n’est pas plus chiffrable que celui d’un ERP, il faut donc convaincre la direction qu’il est indispensable. D’autres prétendent chiffrer des économies de main d’oeuvre alors que personne ne sera licencié à l’issue du projet – au contraire ! D’autres décomptent les
  • 9. bouts de chandelles liés à une amélioration présumée de la productivité, alors que l’usine est sur-capacitaire. Dans la plupart des cas,le business case est fragile. A moins de parvenir à susciter l’enthousiasme, le projet ne se décide qu’à la condition d’une dépense minimale faute d’une valorisation crédible du potentiel économique. Un budget insuffisant aboutissant à une solution insatisfaisante,la preuve est faite du bien- fondé de la méfiance managériale. Cette difficulté budgétaire entraine donc deux types d’échec : abandon du projet et projet raté. Le soin apporté à l’évaluation de l’impact économique est déterminant pour définir le budget et les livrables du projet soutenant une projection crédible pour la direction. Une telle évaluation devrait porter sur différents horizons temporels, sur le plan purement économique ainsi que sous l’angle de la survie et du développement moyen- long terme, et ceci en impliquant de manière contradictoire les acteurs concernés. Cette évaluation peut être conduite pour un projet, mais elle est plus facilement et utilement déterminée globalement pourl’activité permanente de transformation informatique : un budget multi-annuel (afin de pouvoir absorber les pics de transformation) calibré en conséquence serait utilisable aussi bien pour les ajustements continus que pour les projets plus importants à la discrétion du responsable de l’informatique industrielle. Le contrôle est simplifié, permettant une plus grande réactivité de la transformation qui n’aurait pas à justifier par exemple de ses décisions technologiques incompréhensibles par la direction. En conclusion, L’informatique industrielle apparait comme un domaine sensible pour 3 raisons principales  Elle croise des domaines fonctionnels de l’entreprise dont les interactions ne sont pas toujours bien formalisées, sans sponsor naturel capable de diriger l’alignement technologique et fonctionnel sur une organisation systémique cohérente  La rencontre des processus de gestion triviaux et stables avec des processus physiques très technique en développement permanent représente un défi pour la mise en œuvre qui doit rationaliser une connaissance propre à l’industriel difficilement décrite dans des cahiers des charges.  La dynamique de transformation informatique doit accompagner celle du système industriel au cœur de la raison d’être de l’entreprise. Elle nécessite d’encadrer les projets dans un processus structurel doté des moyens nécessaires. Cet inventaire est loin d’être exhaustif. Les difficultés humaines (résistance au changement) et programmatiques (changement de stratégie et de contexte en cours de projet) n’ont pas été citées en entrées parce qu’elles ne sont que la conséquence des points mentionnés. Le plus important est sans doute la prise de conscience de l’importance et du couplage intime de la dimension informationnelle dans le système industriel. Cet état d’esprit guidera naturellement l’industriel vers des choix pragmatiques et cohérents faces aux modes et argumentaires commerciaux pour tirer profit d’une technologie
  • 10. disponible sans perdre de vue son caractère utilitaire au service de la transformation industrielle.