Conférence présentée à la maison de parc à Porquerolles le 2 juillet 2019 dans le cadre des rendez-vous du Parc national de Port-Cros, par Sandrine Heiser et Stéphane Launey, co-auteur du guide de généalogie sur la vocation militaire et le patrimoine culturel de l'île paru en mars 2019 aux éditions Archives & Culture.
3. Pourquoi un guide
de généalogie sur
Porquerolles ?
• une île où se mêlent depuis des
siècles histoires et légendes ;
• s’appuyer principalement sur les
sources qui permettent de faire
la part entre le mythe et la
réalité ;
• explorer l’histoire des hommes
de Porquerolles ;
• présenter des archives et des
documents emblématiques
dispersés sur le territoire.
(Archives nationales, MAP/G//207, pièce 33)
« Carte de la rade des îles d'Hyères relative au mémoire pour
prouver la nécessité de rétablir des ports des dites îles ; joint à la
lettre de M. Milet de Montville, du 10 janvier 1754 »
4. Connaître la
vocation militaire
des îles d’Hyères
Visite d’autorités au Centre de
perfectionnement de la
gendarmerie le 5 octobre 1976
(Archives municipales de la Ville d’Hyères, 2FI 101 015 006, Fonds André Durieux)
5. « Fragments d’histoire »
Jusqu’au milieu du XIe
siècle, il n’existe que peu de
traces sur les îles d’Hyères ;
Au XIIe siècle, les lettres
pontificales signale la
création sur l’une d’elles
d’un monastère dépendant
de l’abbaye du Thoronet ;
Il faut attendre le XVIe
siècle, pour trouver une
carte détaillée réalisée par
la cartographe Piri Re’is,
sans la plus ancienne
Livre de navigation de l’amiral Pirî Reis, 1525
(Walters Art Museum, W.658.250B).
6. Des Stœchades au
marquisat des îles d’Or
L’insécurité est
généralisée sur les côtes
provençales aux XVe et
XVIe siècles et les
habitants des îles ont
fréquemment subi les
pillages.
Les archives communales
d’Arles conservent plus de
4 000 lettres d’alarme
rédigées en provençal
entre 1463 et 1564 et
envoyées de villes en villes
pour informer les
populations des dangers.
Lettre d’alarme envoyée par porteur depuis Hyères pour Toulon, 12 mai 1518
(AC-Arles, CC530, folio 182)
7. Fortifier pour se défendre
À l’époque moderne, un
climat d’insécurité règne
toujours dans la rade
d’Hyères et au péril
corsaire s’ajoutent les
menaces espagnoles puis
anglaises.
Pour y faire face et à la
demande de Richelieu,
d’importants travaux de
défense sont enfin réalisés
sur les îles de Port-Cros et
de Porquerolles entre 1634
et 1643.
Détail de la Carte particulière des costes de Provence, 1634 (Gallica)
10. De la Révolution à la
Grande Guerre
Au XIXe siècle, la vocation militaire de
Porquerolles se confirme et les projets
envisagés par Napoléon Ier aboutissent
à la réalisation de nouvelles
fortifications ainsi qu’à la fondation
d’un village, œuvre de l’arme du genie ;
La construction de l’église Sainte-Anne
sur la place d’armes témoigne
également de cette activité.
11. Au XXe siècle
La vocation militaire de
Porquerolles évolue au rythme des
guerres mondiales.
En 1915, la garnison quitte
définitivement l’île, encore fortifiée
pourtant dans l’entre-deux-
guerres.
Au lendemain de la Seconde
Guerre mondiale, les bâtiments
militaires changent plusieurs fois
d’affectation avant de s’inscrire
dans une logique touristique.
14. Une île en
héritage
C’est sous l’impulsion de
Georges Pompidou, président
de la République du 20 juin
1969 au 2 avril 1974, que l’État
se porte acquéreur en 1971 de
la plus grande partie de
Porquerolles afin de préserver
ce site remarquable.
En 1978, le plan d’occupation
des sols classe l’île en zone
inconstructible, en raison de sa
valeur environnementale.
La succession Fournier donne lieu en 1957 au partage du domaine
familial de Porquerolles en quatre lots répartis entre Monita, Doria,
Lélia et Floria.
En mai 1971, les quatre héritières cèdent l’île à un prix « agricole ».
17. La richesse des fonds
privés (AD83, 2 J 457)
Outre dix cahiers, il contient des
copies de pièces authentiques,
des photographies et des
images, ainsi que des dépliants
touristiques.
On y trouve notamment ses
recherches généalogiques sur
les familles Forbin, de Pontevès,
d’Ornano, Molé, de Lenoncourt,
etc.
23. André Scotti
Les documents concernant la centaine
d’enfants assistés ou « moralement
abandonnés » envoyés à Porquerolles sont
à rechercher aux archives de Paris dans les
séries D3X4 à D5X4.
À titre d’exemple, le dossier d’André
Charles Scotti, né à Lyon le 17 avril 1868,
permet de, retracer son parcours en
général et son placement à Porquerolles en
janvier 1885.
Bulletin individuel d’André Scotti (Archives de Paris, D5X4 1380,
matricule n° 3349).
24. Etienne Eugène Bazin
Matricule 1848 – cause de l’abandon
“décès des parents”
Observations
• Evadé de Romorantin (Réintegré par
le parquet le 13 novembre 1883
• Envoyé à Moulins le 16 novembre
1883
• Réintégré le 29 février 1884 (évadé)
• Envoyé à Porquerolles le 3 mars 1884
• Réintégré le 24 septembre
25. Parcourir quatre siècles de
fortifications
Durant quatre siècles, les militaires ont marqué
Porquerolles de leur empreinte. Avec pertinence, le
génie militaire avait distingué les « fortifications » et
« bâtiments militaires ». De cette classification
découle la vocation de ce riche patrimoine
architectural, entre défense des côtes et
casernement.
De nombreuses sources permettent de retracer
l’histoire des forts et batteries de Porquerolles. Elles
sont principalement réparties entre les Archives
nationales et le Service historique de la Défense sur
ses sites de Vincennes (GR) et de Toulon (MT).
26. Fort Sainte-Agathe
Construit dans une logique de défense à
la fois de la rade d’Hyères et de l’île elle
même, l’ouvrage fortifié qui domine le
village a longtemps été appelé « château
de Porquerolles ».
À droite, plan du fort de Porquerolles. Ci-dessus, détail du croquis du château par le
sous-lieutenant Lacretelle, 1845 (SHD, GR 1 M 1215)
29. Batterie du Lion
Carte postale des casernements et de la batterie du Lion qui accueillent
actuellement le centre IGeSA (AM-Ville d’Hyères, 12NUM345, Fonds Roux-Buson).
30. Batteries du Bon Renaud et
du Galéasson
La défense des régions côtières entre dans une
nouvelle phase sous l’impulsion de Napoléon.
Ainsi, les batteries de la rade d’Hyères sont
construites à partir de 1810. Ces ouvrages
défensifs standardisés s’inscrivent dans un
vaste programme de fortification du littoral
réévalué durant tout le XIXe siècle.
La Médiathèque de l’architecture et du
patrimoine détient les sources de
l’administration des Monuments historiques
qui permettent aujourd’hui de retracer
l’histoire des édifices protégés.
31. Batterie du Lequin
Déclassées vers 1884, les
batteries du Bon Renaud et
du Lequin sont finalement
affectées au Conservatoire
du littoral au tout début du
XXIe siècle.
32. Batteries des mèdes
Située au nord-est de l’île, la pointe des
Mèdes offre le paysage atypique d’une arête
rocheuse descendant vers la mer.
De 1790 aux années 1930, cet emplacement
a accueilli différentes batteries qui
témoignent de la permanence du potentiel
stratégique de Porquerolles et des
évolutions en matière de fortifications.
33. Fort de la Repentance
Construite dans les années 1880,
la Repentance est l’avant-dernière
fortification mise en place à
Porquerolles, avant l’apparition
de la batterie haute des Mèdes
dans les années 1930.
Elle est le fruit d’une évolution
des ouvrages de défense apparue
dans le sillage de nouveaux
armements qui ont augmenté la
portée des projectiles.
Concédée à une communauté
orthodoxe, le fort est devenu le
monastère Sainte-Marie du
Désert.
34. Découvrir le riche patrimoine
culturel et environnemental
Georges Simenon débarque à Porquerolles avec son
épouse Tigy en mai 1926.
L’île a également inspiré de nombreux artistes dont les
œuvres variées offrent une vision originale et colorée
de ce lieu magique.
Le Parc national de Port-Cros et le Conservatoire du
littoral œuvrent à la pérennité des paysages
porquerollais.
Les questions environnementales sont ainsi au cœur des
réflexions patrimoniales dans de nombreux domaines :
nature et biodiversité, eau, sites et paysage, air et
climat, énergie, etc.
35. Georges Simenon
Quelques années après son compatriote
François Joseph Fournier, l’écrivain belge
Georges Simenon tombe sous le charme de
l’île.
Après avoir consacré sa matinée à l’écriture, le
père du commissaire Maigret part souvent
faire des parties de pêche sur son bateau, le
Potam ou Potham, dont on retrouve la trace
dans les archives du SHD-Toulon.
Porquerolles est le décor de quelques-unes de
ses œuvres. Le Cercle des Mahé (1944) est un
témoignage d’un temps révolu de la vie sur
l’île. Publié en 1949, Mon ami Maigret voit le
commissaire poser le pied sur la plus grande
des îles d’Hyères pour enquêter sur un
meurtre lié au milieu de l’art.
36. Jean Francis Auburtin
C’est en 1894 que Jean Francis Auburtin
découvre les îles d’Hyères, grâce à son
beau-père, Félix Deloye, général d’artillerie.
Très régulièrement, à partir de cette date, il
s’installe avec sa famille dans le seul hôtel
de l’époque, tenu par Gautier Barbu, peintre
à ses heures.
Auburtin diversifie sa palette (aquarelle,
gouache, peinture à l’huile) pour capter la
beauté des calanques lui donnant matière à
travailler un style que l’on peut rattacher au
japonisme.
37. « Qu’est ce que je peux
faire, j’sais pas quoi faire ! »
Cette célèbre scène qui est une improvisation,
témoigne du fait que tourner sur une île est
synonyme de grande liberté.
38. Dans la famille Delaflore,
je demande…
Sur une part importante du
territoire de Porquerolles, le
Conservatoire botanique offre un
refuge pour les espèces menacées.
Ce riche patrimoine floristique a
déjà fait l’objet d’un inventaire
botanique publié en 1885 par
l’abbé Ollivier.
Émile Jahandiez, éminent botaniste
et naturaliste édita en 1913 une
notice sur les plantes rares.
39. Parc national En 2012, le parc national a vu son territoire multiplié en surface avec l’extension à l’île de
Porquerolles et l’espace maritime.
40. Ne détruisons pas, par excès ou défaut
de « civilisation », ce que ni Barbares ni
autres vandales n’ont réussi à faire
disparaître.
Henry de Lumley
Directeur du Muséum d’histoire naturelle (1997)
Editor's Notes
Le plan de ma présentation va suivre celui du guide qui se décline en 4 parties.
Une partie historique qui rappelle la vocation militaire
Des parcours et des documents d’hommes qui ont vécu sur l’île
Une présentation des fortifications
Pour finir sur quelques exemples patrimoniaux. L’œuvre présenté se trouve à la villa Carmignac. Depuis le mois de juin 2018, la Fondation Carmignac présente sa collection d’art contemporain dans un mas provençal et expose des œuvres inspirées par le lieu.
Porquerolles vue du ciel
Porquerolles est située à environ 3 km au large de la presqu’île de Giens. Et fait partie de la commune d’Hyères.
Sur une superficie de 12,54 km2, elle possède 30 km de côtes, dont 3 km de plage qui comme vous le voyez se trouvent sur la partie nord de l’île
Elle forme un arc de 7,5 km de long sur 3 km de large et culmine à 142 m.
Elle doit son état de conservation au fait qu'elle est propriété de l'État français depuis 1971 et bénéficie du statut de parc national depuis
Comment je suis passée de touriste sur l’île à co-auteur de ce guide ?
Parcours professionnel et personnel.
J’ai travaillé 12 ans pour le ministère des Armées (plusieurs guides) et j’étais notamment chargée de la valorisation des fonds.
Depuis la fin des années 1990 j’allais en vacances à Porquerolles et je me rendais compte que j’avais plus d’information sur l’histoire des fortifications que la plupart des habitants ou des personnes chargées de valoriser le patrimoine de l’île.
J’ai proposé au SHD de faire une guide des sources sur les fortifications, accepté en 2012 mais projet abandonné à mon départ en 2013.
C’est là qu’intervient le parcours personnel… mon conjoint voyant que ce projet me tenait toujours a cœur m’a proposé de la reprendre et d’écrire cette histoire « amoureux de Porquerolles ».
Le fil rouge de cette conférence est de vous montrer la variété des sources archivistiques et leur dispersion.
Pour illustrer cette première partie j’ai utilisé le fonds privé André Durieux qui renferme plus de 91 000 négatifs de photographies de presse, qui offre en outre un panorama original sur l’histoire de l’île durant la deuxième moitié du XXe siècle
A travers les siècles ont connait les îles d’Hyères sous différents appellations
L’insécurité est généralisée sur les côtes provençales aux XVe et XVIe siècles et les habitants des îles ont fréquemment subi les pillages.
Les archives communales d’Arles conservent plus de 4 000 lettres d’alarme (série CC – impôts et comptabilité) principalement rédigées en provençal entre 1463 et 1564 et envoyées de villes en villes pour informer les populations des dangers.
Messieurs les syndics de Toulon, nous nous recommandons à vous de bon coeur. Aujourd'hui 12 mai, nos pêcheurs d'Hyères étaient venus de l'île de Porquerolles c'est à dire du château qu'a fait faire monseigneur de Solliés. Ils ont découvert deux fustes de Maures dont une est grosse comme une galère. Les pêcheurs disent que les gens du château ont parlé aux Maures puis les fustes se sont retirées en mer. Ainsi vous en serez informé, vous informerez la côte et payerez le porteur comme à l'accoutumée. Rien d'autre. Vos bons amis, les syndics de Hyères Il existait, au XVeme, XVIeme siècle, un réseau de surveillance de la mer qui couvrait toute la côte
Le relevé dressé l’année suivante par le cartographe Christophe Tassin3, représente l’île de Porquerolles durant la construction des forts. On y voit le fort de l’isle de Langoustier, son voisin sur l’extrémité ouest de l’île de Porquerolles et la tour de la Licastre.
Les cartes sont une source de premier plan pour l’histoire de l’île. Exceptionnel
L’église est un des symboles de Porquerolles… même si son histoire est souvent déformée
C’est en 1849 que le génie de Toulon dresse un plan intitulé « Construire une petite église sur la place du village de Porquerolles » (SHDVincennes, GR 1 VH 885). Le chef de bataillon Antoine Pichon qui signe le plan de 1849, avait notamment été en poste au Sénégal et en Guadeloupe avant de rejoindre Porquerolles comme en atteste son dossier de carrière (SHD-Vincennes, GR 4 YF 20434).
Au XIXe s. les militaires sont envoyés en convalescence
20 plus tard on y installe le chemin de croix sculpté par le détenu convalescent Joseph Wargner /
Défendu par le père Ollivier un des aumôniers militaires
+ de cinquante ans
Le poète André Mâche, lui, est né à Paris en 1890. Évacué d’hôpital en hôpital après les Éparges (Meuse), il meurt à Porquerolles le 30 décembre 1916. Une plaque dans le cimetière de l’île, sur la tombe de la famille Pellet, rappelle le décès du poète à la guerre. Son nom est également mentionné au Panthéon, sur la plaque commémorative dédiée aux écrivains ainsi que sur le nouveau monument du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, inauguré en mars 2018.
En vue de l’opération Dragoon (nom de code du débarquement de Provence), les Alliés préparent le terrain. Le 12 août, l’aviation américaine bombarde les environs du sémaphore, sérieusement endommagé. Le débarquement a lieu trois jours plus tard
L’école de détection de la marine, puis en 1971 le centre de perfectionnement de la gendarmerie et en 1984 le centre de vacances du ministère des Armées que je fréquente assidument
En 1957 Bénédic est décédé depuis 6 ans et la succession se fait entre les 6 filles. Viviane resta au domaine de La Doultre (Aisne) et Mireille se voit attribuer le château de Saint-Pré avec ses dépendances qui se trouve près de Brignoles.
« […] Il ne faut pas parsemer l’île de constructions hétéroclites ! L’essentiel doit rester vierge et ouvert à la promenade des visiteurs ».
A travers des exemples de personnages plus ou moins connu dans l’île nous avons essayé de présenter les sources disponibles… pour les officiers les simples soldats comme Wargner
Documentation photographique des monuments historiques
En contrebas du fort Sainte-Agathe, la batterie du Lion se situe sur un éperon rocheux, à l’est du village et à proximité immédiate de la côte. Cet aménagement militaire fait partie des nouveaux ouvrages construits à partir de 1794 pour défendre le port de Porquerolles, la rade et la plage de la Courtade.
La batterie du Lion et l’enceinte en terre enveloppant SainteAgathe font partie de la troisième génération d’ouvrages fortifiés des îles d’Hyères, réalisés sous la Révolution et l’Empire. !
Cherchant un peu de repos, Georges Simenon débarque à Porquerolles avec son épouse Tigy en mai 1926 pour cinq mois. Le couple séjourne au Café de la Poste, sur la place d’Armes du village, puis dans un cabanon au Grand Langoustier. Le lieu lui inspire en 1931 une nouvelle (Le Grand Langoustier). Après un bref séjour en 1934, Simenon passe beaucoup de temps sur l’île de 1936 à 1938, résidant près du port à la villa Tamaris.