1. L
esassureursbelgess’appuient
surunelonguetraditiond’au-
torégulation. Sous la houlette
de la fédération sectorielle
Assuralia,lesassureursontobéi
à leur propre code de conduite pendant
delonguesdécennies.C’estainsiqueles
assureurs et produits d’assurance ont
échappéjusqu’iciàuncarcanrégulatoire.
Cela dit, plusieurs problèmes sont
apparus, qui concernent plus particu-
lièrement les assurances placement qui
investissent dans le teck, les caves à vin,
lesassurances-viereconditionnées(life
settlements) et autres actifs américains
difficiles à valoriser. Souvent, les assu-
reurs se contentent d’entourer d’un joli
ruban branche 23 des fonds de place-
mentdéjàexistants.Lelégislateurbelge
a voulu mettre fin aux excès en définis-
santuncertainnombredenouvellesobli-
gationslégalesapplicablesaux129assu-
reursetauxplusde16.500intermédiaires
qui vendent des assurances dans notre
pays.Cesrègless’appliquentnotamment
aux assurances épargne et placement.
Nous nous limiterons ici aux change-
ments apportés aux assurances-vie.
96 28 AOÛT 2014 | WWW.TRENDS.BE
MONEYTALKINVESTIR
L A D I R E C T I V E M I F I D I M P O S E D A V A N T A G E
D ’ O B L I G A T I O N S A U X A S S U R E U R S
1.
Profil
de risque
La Belgique a récemment étendu les
règles de comportement tirées de la
directive européenne MiFID (Markets
in Financial Instruments Directive)
appliquées aux banquiers et à l’ensem-
ble des prestataires de services du sec-
teur des assurances. Quelles sont les
conséquencesdanslapratique?Leven-
deur d’une assurance-vie doit au préa-
lable établir un profil de risque de son
client. Il lui soumettra donc une liste
de questions relatives à ses connais-
sances et son expérience, à sa situation
financière, ses objectifs, etc. Le secteur
desassurancesapréparéundocument-
modèle pour l’assureur lambda. Ce
document contient 12 pages.
Ilsepourraitqueleclientaitdéjàéta-
bli ce profil de risque. Depuis quelques
années déjà, plusieurs acteurs du mar-
ché appliquent en effet la directive de
manièrespontanéepourlesproduitsd’as-
surance.BKCP,notamment,acommencé
en 2009 à établir les profils de risque de
ceuxdesesclientsquisouhaitaientache-
ter une assurance placement. «Nous
avons décidé de ne pas établir de dis-
tinction entre les divers produits pro-
posés,expliquelaporte-paroleNathalie
Elsocht.Lorsqu’unebarricadesedresse
devant un produit déterminé, le client
s’orientenaturellementversd’autrespro-
duits,quinesontpasforcémentadaptés
àsonprofil.»Enalignantlesassurances-
vie sur les autres produits d’épargne et
de placement, le législateur souhaitait
créerunterraindejeuidentiquepourla
commercialisationdeproduitsfinanciers
similaires.
La plupart des bancassureurs travail-
lent avec un questionnaire unique et un
seul profil de risque. Certains, comme
AXA,utilisentunquestionnairepourles
produits bancaires et un autre pour les
produits d’assurance, une décision qui
Lesassurances-vie
soussurveillance
plusstricte
La nouvelle
législation ne résout
certainement pas tous
les problèmes.
Depuis peu, l’assuré bénéficie d’une plus grande protection. Cela signifie que le courtier
ou l’agent d’assurance est contraint de vous poser davantage de questions et de vous fournir
un complément d’informations par rapport aux produits qu’il propose. Au cours
des prochaines années, cette protection s’étendra encore. Voici la liste des principaux
changements pour le consommateur. ILSE DE WITTE
2. WWW.TRENDS.BE | 28 AOÛT 2014 97
s’explique surtout par le fait que leurs
produitsd’assurancesontvenduspardes
courtiersindépendants.«Nousmettrons
desoutilsàdispositiondescourtiers,qui
leurpermettrontàtoutmomentdedéter-
miner si le portefeuille du client est bel
etbienconformeàsonprofilderisque»,
annonce-t-on chez AXA.
Laresponsabilitéinhérenteàl’obliga-
tiondes’assurerqu’unproduitesteffec-
tivement adapté au client incombe aux
intermédiaires. Les courtiers et agents
d’assurancedoiventeux-mêmesconsti-
tuer et conserver un dossier. Cette pré-
caution leur permettra du reste de se
défendre en cas de plainte du client a
posteriori. Pour ce dernier, la constitu-
tion de ce dossier se traduit avant tout
par une plus grande quantité de pape-
rasse, sous couvert d’une plus grande
protection du consommateur.
La nouvelle législation ne résout
certainement pas tous les problèmes.
L’épargnantquiinjecteplusde100.000
euros dans un produit est considéré
comme un «investisseur informé». Les
produitsd’assuranceayantunseuild’en-
tréede100.000eurosouplusnesonten
effet pas soumis au contrôle de l’organe
desurveillancedusecteurbelge,laFSMA.
2.
Participationauxbénéfices
pourlabranche21
Plusieurs nouveautés entreront en
application à partir du 1er
novembre.
Ilnepeutnotammentplusêtrequestion
de participation aux bénéfices dans
ladocumentationetlapublicitépourles
produitsdebranche21quelorsqu’existe
un plan de répartition des bénéfices.
Ce qui signifie que la clé de répartition
des bénéfices doit d’abord être claire-
ment définie. L’assureur ne peut plus
verser de bonus bénéficiaire à sa guise.
Par ailleurs, le client doit être tenu
informé annuellement des bonus béné-
ficiaires auxquels il a droit. Plusieurs
assureursdevrontdèslorsadapterleurs
brochures et fiches d’information à la
nouvelle donne.
3.
Règlesd’investissement
applicablesàlabranche23
Depuis le 1er
juillet, les assureurs ne
peuvent plus investir l’argent de leurs
assurés que dans «des actifs et instru-
ISTOCK
ments dont l’assureur est en mesure
d’évaluer précisément les risques». Ces
risquesdoiventenoutreêtreclairspour
le client.
Auxnouvellesassurancesdebranche
23 s’appliquent désormais les mêmes
prescriptions d’investissement qu’aux
fonds de placement. Les assureurs ne
peuvent désormais presque plus inves-
tir l’argent du client que dans des fonds
de placement, dans des dépôts ou des
titres cotés sur un marché réglementé.
Ilsnepeuventplusinvestirdirectement
dans les métaux précieux, les matières
premières,lesbitcoins,leslifesettlements
ou autres produits exotiques. Il existe
par ailleurs plusieurs règles de réparti-
tion, qui doivent empêcher l’épargnant
de placer trop d’œufs dans le même
panier. Les fonds de placement ne peu-
vent notamment plus injecter plus de
10%del’encoursduclientdansuneseule
action. Toutes les positions ayant une
pondérationcompriseentre5et10%ne
peuvent totaliser plus de 40% de l’en-
cours du fonds.
4.
Fiches produits
avec label de risque
A compter du 12 juin 2015, les assu-
reursdevrontattribuerunscorederisque
à leurs produits. «En soi, le wrapping
ne modifie en rien les risques inhérents
à un produit financier donné, affirme
BKCP. Un fonds de placement ou un
fondsdeplacementprésentécomme ≤
3. un produit d’assurance (branche 23)
relève de la même classe de risque.»
PourBelfius,leproduitdebranche21
estcomparableaubondecaisse.KBCdit
déjàattribuerunscoreàsesproduits«en
tenant compte des fluctuations de mar-
ché, du remboursement prédéterminé
du capital, de la solvabilité, de la répar-
tition,del’expositionauxmonnaiesétran-
gères et de la liquidité.» Au niveau du
secteur, le moyen d’uniformiser ces
classes de risque est encore à l’étude.
Unefichedevraparailleursêtrefour-
nie pour chaque produit suivant le
modèle des fiches disponibles pour les
fonds de placement. «L’une des princi-
pales nouveautés est que nous avons
jusqu’iciétabliuneuniqueficheparpro-
duit de branche 23, alors
qu’à l’avenir, nous devrons
rédiger une fiche pour
chaque fonds de placement
sous-jacent», explique-t-on
chezAGInsurance.L’inves-
tisseur reçoit en d’autres
termes davantage d’infor-
mationssurlesfondsdepla-
cementdanslesquelsilinves-
tit indirectement.
L’apparence des fiches
d’information des produits
financiers et leur contenu
sontdécritsdansledétailpar
lelégislateur.Lafichedoitse
composer au maximum de
trois pages A4 et les infor-
mations doivent être «cor-
rectes, claires et non trom-
peuses». Les informations
doiventduresteêtreformu-
lées dans un «vocabulaire
non technique».
5.
Structure
de coûts
Avant la conclusion d’un
contrat, les intermédiaires
doiventinformerclairement
leclientdesindemnitésqu’il
verseraoupercevradelapart
d’unetiercepartie,lesinducementsdans
le jargon. Il peut s’agir de commissions,
de provisions de gestion ou d’indemni-
tés versées en échange de l’apport de
clients.Ainsileclientsait-ilparfaitement
où va son argent et aussi ce que l’inter-
médiaire«gagne»àprodiguerunconseil
déterminé.
Deuxautresconditionssontimposées
aux indemnités: elles doivent servir à
accroîtrelaqualitéduserviceetnepeu-
vent aller à l’encontre de l’obligation du
prestataire de services de défendre les
intérêts de son client. Les courtiers et
agentsdoiventdurestepouvoirledémon-
trer.Lesassureursetleursintermédiaires
doiventdéfinirunepolitiquevisantàévi-
ter les conflits d’intérêt. z
Avantages
et inconvénients
du profil de risque
Enthéorie,leprofilderisque
devraitprotégerlesinvestisseurs
dedécisionsirrationnelles,comme
investirdansdesactionsaumoment
oùlescoursdeBoursesont
àunsommetousortirdecertaines
positionsàdescoursplancher.
Lespourcentagesd’actions,d’obliga-
tions,etc.dansvotreportefeuille
doiventàtoutmomentêtre
conformesàvotreprofil.
Lemomentdel’établissement
duprofilderisquebiaisecependant
leditprofil.Lesbanquiersbelgesont
commencéàtravaillerconformément
àladirectiveMiFIDle1er
novembre
2007.Nombredeprofilsderisque
ontétéétablisdanslecourantdes
annéessuivantes,enpleinecrise
financièreouaulendemaindukrach
boursier.Lesépargnantsbelgesont
perduénormémentd’argentdans
leursinvestissementsenactions
FortisetDexia,notamment.Onpeut
dèslorscomprendrequ’ilsaient
àl’époquecochélesréponseslesplus
prudentesenregarddesquestions
àchoixmultiplerelativesàleur
appétencepourlerisque.
Cesdernièresannées,denombreux
Belgessesontdèslorsheurtés
—pendantl’ascensionboursière—
auxlimitesdeleurprofil.Inversement,
beaucoupcochentaujourd’hui
—sansautreformederéflexion—
lesréponsescorrespondantàunprofil
plusagressif.Cequileurpermetde
recevoirdeleurbanquierdesinforma-
tionsconcernanttouslesproduits
financiersetleurévitededevoirsys-
tématiquementsignerunedécharge
lorsqu’ilschoisissentunproduit
risquécontrel’avisdeleurbanquier.
Lesprofilsontdoncmanquéleur
cible.Quantauxinvestisseurs,
ilsontlesentimentquelapaperasse
àlaquellelescontraintladirective
MiFIDsertsurtoutàdécharger
lesbanquiersdetouteresponsabilité.
98 28 AOÛT 2014 | WWW.TRENDS.BE
MONEYTALKINVESTIR
La fiche d’information
des produits financiers doit
se composer au maximum
de trois pages A4
et les informations doivent
être «correctes, claires
et non trompeuses».
ISTOCK