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Trombinoscope historique de la non-violence
3 - De 1870 à 1909
Étienne Godinot 18.10.2022
Sri Aurobindo
Aurobondo Ghose (1872-1950), homme politique, philosophe et
poète indien. Né à Calcutta, études de lettres à l'université de Cambridge.
En 1893, entre dans les services administratifs de la principauté de
Barodà. Tout en conservant ce poste, devient professeur de français, puis
d'anglais au College de Barodâ. En 1906, un an après la partition du
Bengale, rejoint Calcutta en tant que directeur du National College du
Bengale. S'engage activement dans la politique et se fait connaître par
ses éditoriaux dans le journal Bande Mâtaram comme porte-parole du
parti nationaliste. En 1908, soupçonné d'être mêlé à une affaire de fabri-
cation de bombes, est incarcéré pendant plus d'un an.
Quitte ensuite la scène politique, fonde à Pondichéry avec la
Française Mira Alfassa ("La Mère") l’ashram d’Auroville et se consacre au
yoga et aux écrits spirituels.
« La résistance passive* que nous prêchons est le seul moyen efficace, en
dehors de la résistance armée. La force organisée de la nation, sous l'autorité d'une
puissante autorité centrale et guidé par le principe de l'autonomie économique, peut
permettre de se libérer du contrôle de la puissance étrangère. »
« Les circonstances exigent que nous fassions l'expérience d'une méthode
de résistance résolue, mais pacifique qui, bien que moins audacieuse et agressive
que les autres méthodes, demande peut-être beaucoup plus d'héroïsme,
d'endurance et de souffrance. »
* Terme impropre utilisé alors pour désigner la résistance non-violente, qui est active…
Albert Schweitzer
(1875-1965), philosophe et médecin alsacien, musicien organiste,
théologien protestant. En 1915, pendant son incarcération par l’armée
française en tant que citoyen allemand, lui sont révélées l’idée et éthique du
respect de la vie, inspiré des religions de l’Inde, qui le conduira au
végétarisme.
Dans Kulturphilosophie, étude philosophique de la civilisation, aborde
la pensée éthique à travers l’histoire et invite ses contemporains à mettre en
œuvre une philosophie de respect de la vie.
Fonde en 1913 l’hôpital de Lambaréné au Gabon, un village-hôpital
de bois, de tôle et de torchis où il soigne notamment les lépreux, et un
hôpital-refuge pour les animaux. Prix Nobel de la paix (1952). Dénonce
l’arme nucléaire à partir de 1954.
Comprend le christianisme non comme une religion axée sur l’au-
delà, mais bien comme un message éthique devant transformer le monde.
« L'éthique c'est, la reconnaissance de notre responsabilité envers tout ce
qui vit. »
Voir aussi A. Schweitzer dans Sens et dans Nucl. 3
Henry Hodgkin
(1877-1933), médecin et missionnaire quaker anglais. Études au
King's College à Cambridge puis au St Thomas' Hospital à Londres,
Cofondateur de la West China Union University à Chengdu (Chine),
université soutenue par plusieurs églises protestantes.
En août 1914, participe à Constance à la conférence du ‘Conseil
des Églises des empires britannique et allemand pour la promotion des
relations amicales entre les deux peuples’, organisation dont le
secrétaire est le pasteur luthérien allemand Friedrich Siegmund-
Schultze (1885-1969). Sur le quai de la gare de Cologne, ils se
promettent mutuellement de ne pas participer à la guerre, de rester unis
dans le Christ malgré la guerre et de proclamer le message de paix de
l’Évangile quelles que soient les circonstances.
Fonde en 1915 en Angleterre le mouvement Fellowship of
Reconciliation (‘Mouvement de la Réconciliation’). Fonde en 1929 et
dirige le centre de rencontres quaker de Pendle Hill, près de
Philadelphie.
L'international Fellowship of Reconciliation (IFOR) est fondé en 1919 à Bilthoven (NL).
Né contre la Première Guerre mondiale, l'IFOR se définit d'abord, comme un mouvement chrétien
pacifiste. La rencontre de plusieurs de ses membres avec Gandhi conduit le mouvement à se
déclarer non-violent dès les années 1920.
Clemens August von Galen
(1878-1946). Allemand, évêque de Münster en Westphalie,
surnommé "le lion de Münster" par son opposition au national-
socialisme.
Durant l’été 1941, condamne les brutalités de la Gestapo *,
porte plainte contre les crimes commis dans son diocèse, dénonce
avec force le programme Aktion T4 d’assassinat des personnes
ayant un handicap mental.
Ses sermons circulent en Allemagne et jusque sur les lignes
de front.
Bormann veut le supprimer, mais Goebbels s’y oppose, car la
population de Westphalie serait perdue pour la durée de la guerre.
En août 1941, Hitler fait interrompre l’élimination des
malades.
* GeStaPo : GeheimeStaatsPolizei, police secrète d’État du régime nazi
Pierre Ceresole
(1879-1945), Suisse, études à Zürich, voyage aux États-
Unis, ingénieur au Japon.
En 1915, est profondément impressionné par le "refus de
servir" de l'instituteur vaudois John Baudraz, et par l'absence de
prise de position des Églises à son sujet.
Étant libéré de l'obligation militaire pour raisons de santé,
refuse de payer la "taxe militaire" (impôt remplaçant la participation
à l'armée). 1ère condamnation à un jour de prison.
En novembre 1917, appelle à refuser les "idoles nationales".
En 1919, cofondateur aux Pays-Bas du Mouvement
international de la Réconciliation. Devient le premier secrétaire
général de cette nouvelle internationale de chrétiens refusant la
guerre.
../..
Pierre Ceresole
En 1920, crée le ‘Service civil international’ (SCI), et ouvre
près de Verdun, avec des amis allemands, autrichiens et
anglais, le premier chantier (5 mois) de reconstruction.
En 1924, premier chantier de service civil en Suisse.
Rencontre plusieurs fois Gandhi en Inde.
Devient membre des Quakers en 1936.
À deux reprises, en 1942 et 1944, se rend à pied en
Allemagne. Nouvelles condamnations à la prison.
« Mieux vaut être au ban de tous les partis et de tout le
monde que d'être complice »
« Cette idée de vouloir faire triompher la justice par la
violence paraîtra un jour aussi bête et fausse que nous paraît la
torture pour savoir la vérité ».
Photo : un chantier du SCI
Sarojini Naïdu
Née Sarojini Chattopadhyay (1879-1949), militante indépendan-
tiste indienne et poète, surnommée "le rossignol de l’Inde". Maîtrise 5
langues, à l’âge de 12 ans entame des études supérieures à l’université
de Madras. Poursuit ses études en Angleterre (Londres et Cambridge),
où elle rencontre le Dr Govindarajulu Naïdu.
Lutte pour le droit de vote des femmes, fonde en 1917 la
Women’s India Association avec Annie Besant. Entre 1915 et 1918,
voyage dans différentes parties de l'Inde, intervenant sur la sécurité
sociale, l'autonomisation des femmes et l’indépendance.
Rencontre Gandhi en 1916. En 1924, voyage en Afrique de l'Est
et en Afrique du Sud pour défendre les Indiens. Joue un rôle de leader
dans le mouvement de désobéissance civile, organise avec Abbas
Tyabji le raid sur les dépôts de sel de Dharasana pendant la marche du
sel en 1930, incarcérée avec Gandhi et d'autres dirigeants.
Accompagne Gandhi à Londres pour la deuxième session non
concluante de la Table ronde sur la coopération indo-britannique (1931).
En 1942, est arrêtée à nouveau pendant le mouvement Quit India.
Premier gouverneur des Provinces unies d'Agra et d'Oudh de
1947 à 1949. Élue présidente de l’Indian National Congress en 1925.
Prononce l’éloge funèbre de Gandhi en 1948.
Camille Drevet
Née Camille Eugénie Bonnat (1881-1969), militante féministe
française. Après "dix années de bonheur", son mari Henri-Paul Drevet,
né en 1971, tombe au front en oct. 1914. Ce drame explique la lutte pour
la paix qu’elle mènera jusqu’à sa mort. Pendant la Première Guerre
mondiale, travailleuse sociale dans des Foyers de soldat, activité qu’elle
continue quelque temps après le retour de la paix.
En septembre 1920, s’installe à Paris, découvre la ‘Ligue interna-
tionale des femmes pour la paix et la liberté’ (Women International
League for Peace and Freedom - WILPF), devient déléguée de la
section française, collabore au journal La Voix des femmes qui lutte pour
le suffrage des femmes. Élue au Comité directeur de la section française
de la ‘Ligue contre l’impérialisme’ en juin 1927 avec Henri Barbusse,
Victor Basch, etc. Après un voyage en Indochine, dénonce le système
colonial, parcourt l’Europe.
À partir de décembre 1930, Secrétaire internationale de la
WILPF. Secrétaire générale d’avril 1937 à avril 1939 de la ‘Ligue interna-
tionale des combattants de la paix’.
Secrétaire des ‘Amis de Gandhi’ en 1957, fait plusieurs voyages
en Inde et écrit de nombreux livres et articles sur Gandhi et son combat
non-violent.
Pierre Robert de Saint Vincent
(1882-1954), général issu d'une vieille famille de la noblesse
française. Élève de l'École polytechnique, Commandant de la 14e région
militaire et gouverneur militaire de Lyon. Un des piliers de l’’Amitié
chrétienne’, œuvre fondée dans cette ville pour aider les Juifs persécu-
tés par le régime de Vichy. Fait aussi partie de l'organisation clandestine
‘Armée Secrète’ (AS).
Le 29 août 1942, à la suite de la grande rafle des Juifs en zone
non occupée, reçoit l'ordre de mettre des gendarmes à la disposition de
l'intendant de police Lucien Marchais pour procéder au convoyage de
650 Juifs de la zone Sud vers la zone Nord. Déclare alors : « Jamais je
ne prêterai ma troupe pour une opération semblable ». Le départ ne
peut avoir lieu que le lendemain, et ce délai permet à un certain nombre
de Juifs de s'enfuir et d’échapper à la déportation
Le surlendemain, est relevé de ses fonctions par le ministre de la
Guerre du gouvernement de Vichy, le général Eugène Bridoux. Son
limogeage est annoncé dans la presse sans que les raisons en soient
données. Poursuit son action au sein de la Résistance et se cache
pendant 2 ans. Reprend son activité en août 1944 à la Libération de
Lyon, à la demande du Général de Gaulle.
Honoré en 1993 comme ‘Juste parmi les nations’
.
Morihei Ueshiba
(1883-1969). Japonais, maître-fondateur de l’aï-kido.
Influencé par Sokaku Takeda (1859-1943), grand-maître de
jujutsu, puis par Onisaburo Deguchi (1871-1948), cofondateur de la
religion Omoto Kyo inspirée du shintoïsme.
L'aïkido se compose de techniques avec armes et à mains nues
utilisant la force de l'adversaire, ou plutôt son agressivité et sa volonté
de nuire. Ces techniques visent non pas à vaincre l'adversaire, mais à
réduire à néant sa tentative d'agression. L'aïkido peut être considéré
comme la concrétisation du concept de légitime défense : une réaction
proportionnée et immédiate à une agression.
Une des grandes motivations de Ueshiba est de promouvoir la
résolution non-violente des conflits en enseignant un art accessible à
tous et fondé sur le refus de la violence, l’union des efforts et non leur
opposition.
« Une technique de défense qui ne passe pas par une attitude
d’attaque, un art martial qui pratique la non-violence (…). Ce n’est pas
se batte contre, mais avec l’adversaire, en profitant de l’énergie de
l’autre pour le faire renoncer. L’aï-kido prouve l’inutilité de la force
physique, qui ne rencontre que le vide »
Jean-François Blachon
Barthélemy de Ligt
(1883-1938), penseur et militant contre le militarisme, pacifiste liber-
taire néerlandais. Fils de pasteur calviniste, pasteur de 1910 à 1915, évolue
du christianisme à l'athéisme, et parallèlement, du socialisme à l'anarchis-
me. Sa rencontre avec Clara Wichmann (1885-1922) joue un rôle important
dans cette évolution.
Déploie, pendant et après la Première Guerre mondiale, une intense
activité de soutien aux réfractaires et aux insoumis qui lui vaut plusieurs
séjours en prison. Toute sa vie, récuse toutes les formes de guerre et de
recours à la violence, qu'elle soit « horizontale » (entre les nations et les
peuples) ou « verticale » (entre les classes sociales). En 1915, le co-auteur
d'une brochure, De Schuld der Kerken (La dette des Églises) où il affirme
que la plupart des dirigeants de l'Église et les pasteurs sont en partie
responsables de la guerre en raison de leur glorification du nationalisme et
du militarisme : est désavoué par sa hiérarchie de l'Église réformée
néerlandaise et banni de son domicile, de sa paroisse et d'une partie du
territoire des Pays-Bas.
En juin 1915, prononce un sermon radicalement antimilitariste lors de l'office de la Pentecôte
et est banni, sans procès, des provinces du Sud des Pays-Bas par les autorités militaires. En
septembre 1915, signe le Dienstweigeringsmanifest (Manifeste contre le service militaire) en soutien
aux réfractaires et aux insoumis. En mars 1916, est condamné à 15 jours de prison. Accueille avec
enthousiasme la révolution russe d'octobre 1917, avant de prendre assez rapidement conscience de
la brutalité et de l'oppression du nouveau pouvoir bolchevique. ../..
Barthélemy de Ligt
En 1925, quitte les Pays-Bas pour s'installer en Suisse, près de
Genève. Y noue des correspondances avec Gandhi, Nehru, Einstein et
Huxley.. En 1929, écrit son manuel de résistance non-violente traduit et
publié en 1935 en français : Pour vaincre sans violence.
De tous les penseurs antiautoritaires non-violents, il est celui qui
arrive à définir et à organiser sur un plan théorique les nouvelles
méthodes de lutte non violente. Son Plan de Mobilisation contre la Guerre,
en 1934, développe de façon radicalement novatrice pour l’époque la
« stratégie et la tactique antimilitariste », en période de paix ou de guerre.
Cet ouvrage reste un guide pratique de l’action directe contre la guerre. En
1937, dans la brochure Le problème de la guerre civile, exprime
publiquement ses critiques sur les choix militaires des anarcho-
syndicalistes de la ‘Confédération nationale du travail’ pendant la guerre
d'Espagne.
« L'emploi des moyens de guerre moderne rend injuste la cause la
plus juste, puisque ceux qui s'y laissent entraîner ne peuvent faire
autrement que de descendre au même niveau de violence brutale que
ceux qu'ils combattent. »
« Plus il y a de véritable révolution, moins il y a de violence ; plus il
y a de violence, moins il y a de révolution. »
Louis Massignon
(1883-1962), universitaire et islamologue français.
Après une période d’athéisme et d’agnosticisme, se lie d’amitié
avec Charles de Foucauld et retrouve la foi de son enfance.
Entre aux côtés de Lawrence d’Arabie dans Jérusalem libérée
de l’occupation ottomane.
Soutient en 1922 une thèse sur le mystique et martyr soufi
Mansur al-Hallaj, crucifié à Bagdad en 922.
Acteur majeur de l’établissement d’un dialogue entre l’islam et
l’Église catholique. S’engage à fond pour la reconnaissance de la
Palestine après 1948.
Président des ‘Amis de Gandhi’, dénonce pendant la guerre
d’Algérie avec Lanza del Vasto, François Mauriac et l’abbé Pierre les
exactions de la France envers les Algériens. Gardé à vue une nuit en
1960, à l’âge de 77 ans.
“À la limite, nous ne vivons pas ici-bas pour conquérir, mais pour
témoigner, et passer à de plus jeunes que nous le témoignage.”
L.M. est aussi dans la trombinoscope de la non-violence
Friedrich Siegmund-Schultze
(1885-1969), théologien protestant allemand. Très engagé dans
l’Église luthérienne, devient en 1908 secrétaire du ‘Comité d'Église pour
l’amitié entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne’.
Lors de la conférence mondiale des églises de Constance en août
1914, cofondateur du Weltbundes für Freundschaftsarbeit der Kirchen
(Alliance mondiale pour le travail des Églises en faveur de l’amitié).
Après l’accolade et le serment avec le pasteur anglais Henry Hodgkin
(1877-1933) de rester amis malgré la guerre, prend la tête de la branche
allemande du Versöhnungsbund (Association pour la Réconciliation).
En 1920, participe en Suisse à une réunion avec les représen-
tants protestants de 23 nations européennes plus l’Amérique, décidés à
se réconcilier et à maintenir la paix en réactivant la World Alliance for
International Friendship through the Churches (ou Church Peace Union)
créée aux USA en 1914.
En 1933, participe à la fondation d’un comité international d’aide
aux réfugiés juifs allemands, est expulsé par les nazis vers la Suisse
avec sa femme et ses 4 enfants.
En 1957, devient le premier président de la ‘Centrale pour les
droits et la protection des objecteurs de conscience’.
Clara Wichmann
Clara Meijer-Wichmann (1885-1922), avocate et philosophe
germano-néerlandaise, militante anarchiste et féministe, syndicaliste.
Docteure en droit. D'origine allemande, vit aux Pays-Bas. Publie (la
plupart de ses écrits ont été publiés en hollandais) quantité d'articles sur
l'anarchisme, le syndicalisme révolutionnaire, le féminisme, la non-
violence, la critique du droit de punir, les droits des enfants, mais aussi
des animaux domestiques et la philosophie de l'histoire.
En 1917, sa rencontre avec le pasteur antimilitariste Barthélémy de
Ligt est décisive dans son cheminement vers la non-violence. Est proba-
blement l'une des toutes premières en Europe à utiliser le mot de "non-
violence" en rapport avec l'idée de non-violence. Est aussi certainement
parmi les penseurs et les militant-e-s de l'anarchie, celle qui a le plus
clairement et le plus brillamment établi le lien entre l'anarchisme et la non-
violence. Partisane d'un « socialisme éthique », pousse très loin sa
réflexion sur la fin et les moyens, sur l'illégitimité de la violence dans le
combat révolutionnaire et sur la force de la non-violence qu’elle nomme
« vaillance de l’esprit ».
Décède à 37 ans, quelques heures après la naissance de son
premier enfant.
« Nous ne devons pas seulement désapprouver le choix de la
violence mais également la croyance en la violence ».
Abraham Johannes Muste
(1885-1967), né en Hollande, émigre aux États-Unis avec ses
parents à l’âge de 6 ans. Études de philosophie, fréquente l'Union
Theological Seminary, pasteur de l'Église réformée néerlandaise à
Washington et à New-York. Salarié de l’American Civil Liberties Union
(ACLU), organisation d’aide juridique qui défend les opposants
politiques et pacifistes, puis pasteur chez les Quakers.
En 1919, anime une grève de 16 semaines dans une entreprise
textile à Lawrence (Massachusetts), permet d’éviter le recours à la
violence. Secrétaire du syndicat Amalgamated Textile Workers of
America, leader reconnu du mouvement ouvrier américain. Dirige la
grève victorieuse de Toledo Auto-Lite en 1934.
De 1940 à 1953, directeur exécutif du Fellowship of Reconcilia-
tion (FOR, membre de IFOR-MIR), organisation chrétienne
œcuménique non-violente. Mène campagne contre l'implication des
États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale. Forme de futurs
dirigeants du Mouvement des droits civiques, dont Bayard Rustin,
proche conseiller de Martin Luther King. Membre actif du Congress of
Racial Equality (CORE) et de War Resisters League. En 1945, se joint
à David Dillinger et Dorothy Day pour fonder le magazine Direct
Action. À la fin de sa vie, leader dans le mouvement contre la guerre
du Vietnam.
Richard Gregg
Richard Bartlett Gregg (1885-1974), diplômé de Harvard, puis
juriste en entreprise, philosophe états-unien. En 1925, fait un voyage en
Inde pour connaître Gandhi.
Propose en 1939 un programme non-violent contre la guerre et le
fascisme aux États-Unis.
Est le premier philosophe social à avoir développé une théorie
substantielle sur la résistance par la non-violence au XXe siècle. Cette
théorie exercera une influence majeure sur l’activiste des droits civils
Bayard Rustin ainsi que sur Martin Luther King Jr.
Suite à la rencontre de Gandhi, auteur de la phrase célèbre "Vivre
simplement pour que les autres puissent simplement vivre", utilise pour la
première fois en 1936 le concept de "simplicité volontaire". Dans les
années 1940, s'intéresse à l'écologie et à l'agriculture biologique et passe
plusieurs années dans une ferme.
Armin Wegner
(1886-1978), photographe allemand, poète, docteur en droit,
écrivain.
Engagé volontaire comme infirmier dans l’armée allemande, est
confronté à la détresse des Arméniens dans le désert de Mésopotamie.
En 1915, malgré une interdiction formelle, prend des clichés du
génocide qui comptent parmi les premières sources photographiques
conservées aujourd'hui. Publie en 1919 des textes qu’il a rédigés sur
place et adresse au président états-unien Thomas W. Wilson une lettre
appelant à la création d’un État arménien.
Fonde en 1919 avec Helene Stöcker, Magnus Schwantje et
d'autres le Bund der Kriegsdienstgegner (‘Union des objecteurs de
conscience’).
Proteste contre les persécutions à l'encontre des Juifs dans
l'Allemagne hitlérienne.
En avril 1933, écrit une lettre ouverte à Hitler pour protester
contre la législation antisémite. Arrêté par la Gestapo, incarcéré dans
plusieurs prisons et camps de concentration, parvient à s'enfuir en
l'Italie.
Georges Bernanos
(1888-1948), écrivain français. Catholique fervent, monarchiste
passionné, rompt ensuite avec Maurras et ‘L’Action Française’ en
1932. Fustige un patriotisme perverti qui humilie l'ennemi allemand
dans la défaite, s’engage contre la dictature de Franco en Espagne.
Installé au Brésil, soutient la ‘France Libre’ en 1940.
Écoeuré par l’épuration.
Dans les dernières années de sa vie, dénonce l'inconséquence
de l'homme face aux progrès techniques effrénés qu'il ne pourra
maîtriser, les perversions du capitalisme industriel, ne cesse de
protester contre la bombe atomique et contre « la civilisation de la
bombe atomique ».
« À un monde de violence et d’injustice, au monde de la bombe
atomique, on ne saurait déjà plus rien opposer que la révolte des
consciences, du plus grand nombre de consciences possible .»
« La barbarie polytechnique menaçante n’a plus devant elle que
des consciences. » ../..
Voir aussi G.B. dans le trombinoscope des chercheurs de sens
Georges Bernanos
« Je pense depuis longtemps que si un jour les méthodes
de destruction de plus en plus efficaces finissent par rayer notre
espèce de la planète, ce ne sera pas la cruauté qui sera la cause
de notre extinction, et moins encore, bien entendu, l'indignation
qu'éveille la cruauté, ni même les représailles et la vengeance
qu'elle s'attire, mais la docilité, l'absence de responsabilité de
l'homme moderne, son acceptation vile et servile du moindre
décret public.
Les horreurs auxquelles nous avons assisté, les horreurs
encore plus abominables auxquelles nous allons maintenant
assister, ne signalent pas que les rebelles, les insubordonnés,
les réfractaires sont de plus en plus nombreux dans le monde,
mais plutôt qu'il y a de plus en plus d'hommes obéissants et
dociles. »
Toyohiko Kagawa
(1888-1960), réformateur japonais, militant chrétien, social et écolo-
giste. Fils d'un homme d'affaires et d'une danseuse qui meurent pendant
son enfance. Se convertit au christianisme, ce qui lui vaut d’être rejeté par
sa famille. Étudie au Tokyo Presbyterian College, puis au Kobe Theological
Seminary.
Pour épouser la pauvreté, abandonne, le jour de Noël 1909, le
séminaire presbytérien pour le sordide quartier de Shenkawa à Osaka, et
choisit une maison qu'un assassinat avait rendue maudite. Y agit comme
missionnaire, travailleur social et sociologue.
De 1914 à 1916, étudie aux États-Unis au Princeton Theological
Seminary. En plus de la théologie, y étudie l'embryologie, la génétique,
l'anatomie comparée et la paléontologie. Affirme que le christianisme est
une éthique d’action et non l’adhésion à des doctrines.
En 1916, publie Recherches sur la psychologie des pauvres, où il
décrit différents aspects de la pauvreté dans la société.
Arrêté en 1921 puis en 1922 pour son rôle dans l'activisme ouvrier
pendant les grèves. Aide à organiser les secours à Tokyo suite au grand
tremblement de terre de 1923 et lutte pour le suffrage universel masculin
en 1925. ../..
Toyohiko Kagawa
Anime la ‘Fédération japonaise du travail’ ainsi que la ‘Ligue nationale
anti-guerre’ en 1928, continue son travail auprès des plus pauvres, préco-
nise le suffrage des femmes et appelle à une politique étrangère pacifique.
Précurseur de l'agriculture forestière moderne et de la plantation
d'arbres fruitiers et de noix sur les terres agricoles, convainc durant les
années 1930 les fermiers japonais situés dans les hauteurs que la solution
à leur problème d'érosion des sols est de planter de nombreux arbres. La
plantation d'arbres fruitiers ou à coques protège le sol, procure de la
nourriture aux hommes et du fourrage aux animaux, les trois "dimensions"
de son système.
Sa théorie économique, exposée dans son livre Économies frater-
nelles, préconise l’action coordonnée de l'Église chrétienne, de l'économie
sociale et du mouvement pacifiste en une « puissante synthèse de travail »
pour fournir une alternative viable au capitalisme, au socialisme d'État et au
fascisme.
En 1940, demande pardon à la République de Chine pour l'occupation
du Japon par la Chine, est de nouveau arrêté pour cet acte.
Parfois appelé "le Gandhi du Japon" ou "le St François japonais",
auteur de plus de 150 livres, nominé pour le prix Nobel de littérature en
1947 et 1948, et pour le prix Nobel de la paix en 1954 et 1955.
Carl von Ossietzky
(1889-1938), journaliste, écrivain et intellectuel pacifiste
allemand. allemand.
Fondateur de la ‘Ligue des droits de l’homme’ dans son pays,
élu au comité directeur de la Deutsche Friedensgesellschaft
(Association allemande pour la paix)
Militant anti-nazi, publie en 1929 un article sur les centres
d’essais clandestins de l’aviation militaire allemande. En tant
qu'éditeur du magazine Die Weltbühne (La scène mondiale), est
condamné en 1931 avec l'ingénieur aéronautique Walter Kreiser à 18
mois de prison pour haute trahison, pour avoir publié des informations
sur le réarmement clandestin de l'Allemagne. Libéré en déc. 132,
réincarcéré en fév. 1933 à la prison de Spandau suite à l’arrivée au
pouvoir de Hitler. Prix Nobel de la Paix en 1935, mais le gouverne-
ment nazi lui interdit de se rendre en Norvège. Mort des suites de sa
détention.
Le 11 juillet 1991, la Cour d’appel de Berlin refuse la révision du
procès demandée par sa famille. L’arrêt est signé du juge Egbert
Weiss, le même qui, en 1968, avait acquitté un membre du « tribunal
populaire" nazi responsable en 1944 de 231 condamnations à mort…
Jamnalal Bajaj
(1889-1942), industriel et philanthrope indien. À sa majorité, sous la
tutelle de Seth Bachhraj, s’implique dans l'entreprise familiale de sa famille
adoptive, acquiert les compétences d’un chef d’entreprise (commerce,
gestion, management). Après la mort de Seth Bachhraj, fonde en 1926 ce
qui va devenir le groupe d'industries Bajaj : le groupe compte aujourd'hui
24 sociétés, dont 6 sont cotées en Bourse.
Renonce au titre de Rai Bahadur que lui confère le gouvernement
britannique et rejoint le mouvement gandhien de non-coopération en 1921.
En 1923, défie une interdiction de faire flotter le drapeau du mouvement
Satyagraha à Nagpur, est détenu par les Britanniques. Enthousiasmé par
la vie menée par Gandhi à l'ashram de Sabarmati, proche du Mahatma,
qui déclare à plusieurs reprises que Jamnalal est son cinquième fils.
Crée en 1923 le Gandhi Seva Sangha (photo du haut) pour promouvoir
les idées et les programmes de Gandhi. Membre du Comité de travail de
l’Indian National Congress et trésorier du parti en 1933.
Le ‘prix Jamnalal Bajaj’, créé en 1978 par la Fondation Jamnalal
Bajaj, est décerné chaque année à l'occasion de l’anniversaire de sa
naissance. ../..
Jamnalal Bajaj et les prix décernés par sa Fondation
Les divers prix (Awards) décernés chaque année par la Fondation
Jamnanal Bajaj sont :
- le prix ​​Jamnalal Bajaj pour le travail constructif en Inde selon les
valeurs gandhiennes,
- le prix ​​Jamnalal Bajaj pour l'application de la science et de la
technologie au développement rural,
- le prix ​​Jamnalal Bajaj pour le développement et le bien-être des
femmes et des enfants,
- le prix Jamnalal Bajaj pour la promotion des valeurs gandhiennes en
dehors de l’Inde (depuis 1988).*
* Le Jamnalal Bajaj Award for Promoting Gandhian Values Outside India est décerné à
Pierre Parodi (France, 1988), Danilo Dolci (Sicile-Italie, 1989), A.T. Ariyaratne (Sri-Lanka,
1990), Charles Walker (États-Unis, 1991), Homer A. Jack (États-Unis, 1992), Johan Galtung
(Norvège, 1993), Gedong Bagoes Oka (Bali-Indonésie, 1994), Srimati Kamala (États-Unis,
1995), Adolfo de Obieta (Argentine, 1996), Young Seek Choue (Corée du Sud,1997), Jharna
Dhara Chowdhury (Bangladesh, 1998), Joseph Rotblat (États-Unis,1999), Desmond Tutu
(Afrique du Sud, 2000), Satish Kumar (Grande-Bretagne, 2001), George W. Willoughby (États-
Unis, 2002), Mary King (États-Unis, 2003), Marie Thoeger (Danemark, 2004), Daisaku Ikeda
(Japon, 2005), Ismail Serageldin (Égypte, 2006), Michael Nagler (États-Unis, 2007), Louis
Campana (France, 2008), Charles Peter Dougherty (2009), Lia Diskin (Brésil, 2010), Agus
Indra Udayana (Indonésie, 2011), Glenn D. Paige (États-Unis, 2012), Jean-Marie Muller
(France, 2013), Sulak Sivaraksa (Thaïlande, 2014), Minoru Kasai (Japon, 2015), Cheikh
Rached Ghannouchi (Tunisie, 2016), Ziad Medouk (Palestine-Gaza, 2017), Clayborne Carson
(États-Unis, 2018), Sonia Deotto (Inde et Mexique, 2019), David H. Albert (États-Unis, 2021),
Ogarit Younan et Walid Slaybi (Liban, 2022)
Bhimrao Ramji Ambedkar
(1891-1956, surnommé Babasaheb Ambedkar), juriste et homme
politique indien, originaire du groupe des Intouchables mahars. Doctorat
d'économie à la Columbia University, aux États-Unis.
En désaccord avec Gandhi sur la question d'une assemblée
séparée pour les Dalits ou Intouchables et sur le principe d'une loi
électorale de discrimination positive les favorisant.
Pour faire valoir les droits des Intouchables, lance des mouve-
ments de désobéissance civile, consistant notamment à leur permettre de
rentrer dans des temples ou boire de l'eau dans les fontaines, ce qui leur
est interdit par les Brahmanes.
Ministre de la Justice dans le premier gouvernement de l'Inde
indépendante, chargé par Nehru de rédiger la constitution du pays.
Convaincu que l‘Intouchabilité, liée au système des castes, est
consubstantielle à l'hindouisme, organise, peu avant son décès, la
première conversion en masse de ses compagnons au bouddhisme en
présence de 380 000 intouchables rassemblés à Nagpur.
Rédige 22 vœux à prononcer par les convertis.
Martin Niemöller
(1892-1984), pasteur luthérien et théologien allemand. Officier
sous-marinier pendant la 1ère Guerre mondiale, torpille en 1917 un
navire de transport* et en 1918 trois navires alliés. Ordonné pasteur en
1924.
En 1933, appelle les pasteurs hostiles aux mesures antisémites à
s'unir au sein d'une nouvelle organisation, le Pfarrernotbund, ("Alliance
d’urgence des pasteurs") respectueuse des principes de tolérance
énoncés par la Bible.
À la fin de l'année 1933, 6 000 pasteurs, soit plus d’1/3 des
pasteurs protestants, ont rejoint ce groupe dissident.
Déchu de ses fonctions de pasteur en novembre 1933.
En automne 1934, rejoint Karl Barth, Dietrich Bonhoeffer, etc.
pour fonder ‘l'Église confessante’ (Bekennende Kirche), groupe
protestant opposé à l’idéologie nazie.
* « Ce 25 janvier 1917 a marqué un point de non-retour dans ma vie, car il m'a ouvert
les yeux sur l'impossibilité absolue d'un univers moral. »
Photos : - Niemöller en officier sous-marinier
- Évêques catholiques lors d’une rencontre de jeunes organisée par le parti nazi au
stade de Berlin-Neukölln en août 1933 ../..
Martin Niemöller
Arrêté en 1937, envoyé au camp de concentration de
Sachsenhausen, puis de Dachau et du Sud Tyrol.
Libéré par les Américains en juin 1945 après une grève de la
faim de 44 jours, se consacre à la reconstruction de l'Église
protestante d'Allemagne. Prêche que toute renaissance allemande
exige au préalable que les Allemands reconnaissent leur culpabilité.
Président en 1961 du Conseil Œcuménique des Églises. Milite
pour le désarmement nucléaire et contre la guerre du Vietnam.
« Lorsqu'ils sont venus chercher les communistes, je n'ai rien
dit, je n'étais pas communiste. Lorsqu'ils sont venus chercher les
syndicalistes, je n'ai rien dit, je n'étais pas syndicaliste. Lorsqu'ils
sont venus chercher les Juifs, je n'ai rien dit, je n'étais pas Juif.
Puis ils sont venus me chercher, et il ne restait plus personne pour
protester ». (1942)
Carte de membre de la
Bekennende Kirche
(Église confessante)
Joseph Cornelius Kumarappa
(1892-1960), économiste indien chrétien, ami et disciple de
Gandhi. Études d’économie aux États-Unis.
Présenté par l’historien Ramachandra Guha comme "le Gandhi
vert", fondateur de l'écologie moderne en Inde.
Son ouvrage The economy of permanence : A quest for a social
order based on non-violence a été écrit en prison pendant le
mouvement Quit India.
Identifie cinq types d’économies de nature différente : parasitaire,
prédatrice, d’entreprise, grégaire et de service. L’économie de service
est la plus haute forme d’économie.
Selon lui, l’économie actuelle, dominée par sa quête infinie de
croissance, génératrice de dégradation de l’environnement et de
troubles sociaux, est transitoire et sans avenir.
../..
Joseph Cornelius Kumarappa
Voyage en Chine, en Europe orientale et au Japon et
étudie les systèmes économiques ruraux.
Cofondateur en 1935 de la All India Village Industries
Association.
Le Kumarappa Institute of Gram Swaraj ou KIGS (‘Institut
Kumarappa pour l’autonomie des villages’) est créé après sa
mort, en 1967, à Jaïpur. Il élabore et fait évoluer des méthodes
pour un développement autonome et équilibré.
Il vise particulièrement les femmes, les Intouchables et les
populations tribales, les paysans pauvres et marginalisés.
Les projets de micro-développement reposent sur les
besoins basiques des populations (agriculture et élevage,
artisanat, énergie, adduction d’eau, petite industrie, hygiène) et la
création de conseils de villages.
Mahadev Desai
(1892-1942), militant indien pendant dans le mouvement pour
l'indépendance de l'Inde. Est jeune avocat à Ahmedabad quand il
décide de rejoindre Gandhi avec Narhari Parikh, Mohanlal Pandya et
Ravi Shankar Vyas. Secrétaire dévoué de Gandhi pendant plus de 25
années, de 1917 à sa mort en 1942.
En 1920, Motilal Nehru, père de Jawaharlal Nehru, demande à Gandhi
les services de Mahadev pour éditer le quotidien d'Allahabad, Independant.
Mahadev sort un journal manuscrit polycopié, car les machines à écrire et le
matériel d’imprimerie a été confisqué par les Anglais. Condamné à un an de
prison ferme pour ses écrits. En prison, constate que les autorités pénitentiaires
maltraitent les prisonniers, les flagellant fréquemment. Son rapport décrivant la vie
à l'intérieur d'une prison indienne, publié dans Young India et Navajivan, force les
britanniques à réformer drastiquement le système pénitentiaire.
Arrêté à nouveau avec le Mahatma pendant l'ensemble des
campagnes non-violentes.
Auteur de plusieurs livres sur les luttes sociales des Indiens
contre le colonisateur britannique, et d'un journal intime Jour après jour,
en 9 volumes, sur son activité avec le Mahatma. Contribue aussi
régulièrement à Young India et Navajivan, deux journaux dont Gandhi
est rédacteur en chef. Pendant l'incarcération de Gandhi, Mahadev
prend son relais à la direction du Navajivan.
Madeleine Slade
(1892-1982), militante britannique de la non-violence, plus connue
ensuite sous le nom de Mirabehn ou Meera Behn.
Passionnée de Beethoven, lit les ouvrages de Romain Rolland sur
le musicien, puis rencontre l’auteur, qui lui parle alors de Gandhi. Écrit au
Mahatma pour lui demander si elle peut devenir sa disciple et vivre avec
lui à l'ashram de Sabarmati.
Arrive en Inde en nov. 1925, y passe 34 ans, participe aux luttes
gandhiennes. Accompagne Gandhi et d'autres à la conférence de la
table ronde à Londres en 1931, rend visite avec lui à Romain Rolland en
Suisse. Après la reprise du mouvement de non-coopération, est empri-
sonnée en 1932-1933. Se rend à l'étranger pour rencontrer David Lloyd
George, le général Smuts et Winston Churchill, Eleanore Roosevelt.
Participe à la création de l'ashram de Sevagram. Arrêtée et détenue
avec Gandhi au palais de l'Aga Khan, à Puna, d'août 1942 à mai 1944.
Après l'indépendance, fonde des ashram, où elle se lance dans des
expériences laitières et agricoles, passe aussi un certain temps au
Cachemire.
Revient en Angleterre en 1959, déménage en Autriche en 1960 et
passe 22 ans dans des petits villages du massif du Wienewald.
Abdul Ghaffar Khan
(1892-1988). Personnage central de la vie politique en Inde,
puis au Pakistan.
Chef d’une peuple de tradition guerrière, les Patchouns,
présents en Afghanistan et au Pakistan.
Connu comme Badshah Khan, « Le roi des chefs », ou « le
Gandhi de la frontière ».
Un des plus proches compagnons de Gandhi dès 1919,
probablement le plus précieux pour réunir Musulmans et Hindous
dans les campagnes de non-coopération. En 1929, fonde le Khudai
Khidmatgar (litt. ‘Serviteurs de Dieu’), mouvement de résistance anti-
coloniale non-violent qui rassemble jusqu'à 100 000 satyagrahis,
hommes et femmes et fait respecter sa charte. À son exemple, des
milliers de guerriers acceptent d’abandonner le fusil pour la chemise
rouge, signe distinctif de son armée pacifique. Les "soldats non-
violents" prêtent serment, portent des galons, ont un drapeau, une
fanfare, évoluent dans les grades, marchent en rythme entre les
collines et les montagnes en chantant leur ‘Hymne de la non-
violence’.
../..
Abdul Ghaffar Khan
L’organisation subit de la part des Britanniques l'une des
répressions les plus sévères de tout le mouvement d'indépendance
indien : les colonisateurs pensent à juste titre qu’un Pachtoun non-
violent est plus dangereux pour le système colonial qu’un Pachtoun
violent.
Se préoccupe en fait moins de l’oppression britannique que de
la violence qui hante le Pachtoun et l’esprit de vengeance qui l’habite.
« La non-violence est devenue un remède à tout mal qui habite mon
entourage. »
Subit 15 années d’emprisonnement par les colonisateurs anglais.
Opposé à la partition souhaitée par la ‘Ligue musulmane’ de
Muhammad Ali Jinnah. Choisit de vivre au Pakistan, où il continue à
se battre pour les droits bafoués de la minorité pachtoune et pour un
Pushtunistan autonome. Subit au Pakistan 16 nouvelles années
d’incarcération entre 1947 et 1976.
Se réfugie en 1976 en Afghanistan, mais l’occupation soviétique
ne lui permet pas de repos. Mort en résidence surveillée.
« Je suis né soldat et je mourrai soldat »
Stephen King Hall
(1893-1966), Britannique, officier de marine pendant 20
années de sa vie. Contre-torpillage des sous-marins allemands
pendant la 1ère Guerre mondiale.
Siège à la Chambre des Communes de 1939 à 1945.
Auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont 3 de stratégie.
Dans son ouvrage Defence in the nuclear age (1959),
estime que l’arme nucléaire ouvre une ère nouvelle, et qu’il faut
repenser totalement la défense. Critique la stratégie de
dissuasion nucléaire, préconise un désarmement unilatéral de
son pays et un système de résistance civile non-violente.
« Il ne faut pas assimiler l’aspect psychologique de notre
défense civile à de la résistance passive, mais le penser plutôt
en tant que véritable offensive lancée contre les esprits des
forces d’occupation. »
Basil Liddell Hart
(1895-1970), historien anglais, théoricien de la pensée militaire,
considéré par Raymond Aron comme "le plus grand écrivain militaire de
notre temps". Blessé 2 fois en 1916-1917.
Quitte l'armée en 1927 et travaille comme spécialiste des questions
militaires pour le Daily Telegraph et le Times.
Développe sa théorie de l'approche indirecte, qui privilégie le
harcèlement des lignes de ravitaillement et le contournement plutôt qu'une
attaque frontale des positions ennemies.
Après la 2ème Guerre mondiale, peut interroger, pendant leur
captivité, plus de 100 généraux ou officiers allemands qui avaient
commandé des troupes d’occupation en Europe, sur les diverses formes
de résistance qu’ils avaient rencontrées.
../..
Basil Liddell Hart
En 1967, apporte à un ouvrage collectif dirigé par Adam
Roberts une contribution essentielle :
"Les déclarations de ces généraux révélaient l'efficacité de la
résistance non-violente.(...) D'après leur propres déclarations, ils
avaient été incapables d'y faire face.
Ils étaient experts en violence, et avaient été entraînés à
affronter des adversaires qui employaient des méthodes violentes.
Mais d'autres formes de résistance les déconcertaient, et cela
d'autant plus que les moyens employés étaient subtils et secrets.
lls étaient soulagés quand la résistance devenait violente et
quand, aux méthodes non-violentes, venaient se joindre des actions
de guérilla. Car il était plus facile d'appliquer des mesures sévères de
répression contre les deux formes de résistance à la fois."
Acharya Vinoba Bhave
(1895-1982). Militant indien, fils d'une pieuse famille de
brahmanes, un des proches et des héritiers de Gandhi, soucieux de
mettre en place une société fondée sur le sarvodaya (bien-être de
tous, promotion des plus pauvres).
Crée en 1951 le mouvement Boodhan ("don de la terre") qui
organise la redistribution des terres entre riches et pauvres.
À la suite de marches et d’exhortations dans les villages,
5 millions d’hectares de terre sont donnés aux plus pauvres.
Crée en 1952 le mouvement Gramdan ("don du village") qui
organise les villages au niveau économique (coopérative), politique
(conseil de village) et culturel.
Décide de décéder selon les règles de la mort par inanition,
se privant de nourriture pendant de nombreux jours, à l'âge de 87
ans, suivant une pratique sacrée commune aux ascètes hindous et
jaïns, auto-sacrifice couronnant une vie pieuse en Inde.
Morarji Desai
(1896-1995), homme politique indien. Participe au mouvement de
désobéissance civile contre les Britanniques pendant la lutte pour
l'indépendance, passe près de 10 ans en prison. Devient un membre
influent du parti du Congrès au sein de son État du Gujerat. Ses idées
politiques sont un mélange de libéralisme et d'idéaux gandhiens. Prêche
la vie simple, porte le vêtement en textile naturel qu'il tisse lui-même à la
main (le khadi), suit un régime strictement végétarien.
Ministre entre 1956 et 1963. Candidat malheureux face à Indira
Gandhi (fille de Nehru) en janvier 1966, devient néanmoins l'année
suivante son vice-Premier ministre, entre en conflit avec elle.
Réélu député en 1971, il rejoint le mouvement de protestation de
J.P. Narayan. Est arrêté lors de la proclamation de l'état d'urgence en
1975 par Indira Gandhi. Relâché en janvier 1977, est membre avec le
Congrès de la coalition du Janata Party lors du retour des élections
libres. Premier ministre de l'Union indienne de mars 1977 à 15 juillet
1979, dirige le premier gouvernement non congressiste de l'histoire de
l'Inde et succède à Indira Gandhi après la fin de l'état d'urgence.
Dorothy Day
(1897-1980), journaliste et militante états-unienne.
Dès 1917, demande que les femmes incarcérées à la suite
d’actions en faveur du suffrage féminin aient le statut de prisonnières
politiques. Arrêtée à son tour, fait une grève de la faim de 10 jours
dans sa prison.
En 1933, crée avec Peter Maurin le Catholic Worker
Movement, qui rassemble les aspirations du christianisme social, du
radicalisme militant et de l’anarchisme non-violent, promeut l’aide
mutuelle directe, la solidarité avec les plus pauvres.
Plaide avec force pour le droit à l’objection de conscience,
contre la guerre du Vietnam et les essais nucléaires. Invite ses
concitoyens à la non-coopération et au refus de l’impôt.
À 75 ans, passe 12 jours en prison pour avoir participé à un
piquet de boycott avec Cesar Chavez et les Farm-Workers.
Otto et Elise Hampel
O. H. (1897-1943), ouvrier d'usine allemand. Épouse
en 1935 Elise Lemme (1903-1943), domestique.
Après avoir appris que le frère d’Elise a été tué sur le
front en France en 1940, encouragent la résistance contre le
Troisième Reich.
De septembre 1940 à leur arrestation à l'automne
1942, écrivent plus de 230 cartes postales, les déposent dans
les boîtes aux lettres, dans les cages d' escalier. Les cartes
incitent les Allemands à refuser de coopérer avec les nazis, à
s'abstenir de donner de l'argent, à refuser le service militaire et
à renverser Hitler.
Bien que beaucoup de cartes aient été immédiate-
ment portées à la Gestapo, ne sont identifiés qu’au bout de 2
ans. Jugés coupables de ‟haute trahison”, décapités le 8 avril
1943 à la prison de Plötzensee à Berlin.
« Que sommes-nous devenus ? Un troupeau de moutons !
Nous devons nous libérer des nos chaînes, sinon il sera trop
tard ! »
Albert Luthuli
(1897-1867). Homme politique sud-africain, professeur de
littérature zoulou, puis chef de tribu.
Devint en 1952 président de l’African National Congress,
organisation qui avait adopté une stratégie non-violente depuis sa
fondation en 1912.
Emprisonné une année, en 1956. Boycott des autobus en 1957,
grève générale en 1958, longue lutte après 1959 contre le port
obligatoire d’un pass (laisser passer).
Prix Nobel de la paix en 1960, année du massacre de Sharpeville
par la police (68 morts, 118 blessés).
Écrasé "accidentellement" ? par un train en 1967.
« Le boycott économique de l’Afrique du Sud entraînera sans aucun
doute une période d’épreuves pour nous. Mais si cette méthode doit
abréger le temps du massacre, notre souffrance est un prix que nous
sommes disposés à payer. »
Henri Roser
(1899-1981), pasteur protestant français. En janvier 1923,
tandis que l’armée française occupe la Ruhr, renvoie ses papiers
militaires au nom de l'Évangile.
Révoqué de sa charge d'officier, se déclare objecteur de
conscience. En 1925, année de son mariage, devient secrétaire du
‘Mouvement International de la Réconciliation’ (MIR) pour la France,
puis pour l'Europe.
En 1939, opposé à la guerre, condamné à 4 ans de prison
pour refus d'obéissance et insoumission, en sort après la défaite
1940.
Sauvetage d’enfants juifs d’Aubervilliers, contact avec les
émissaires du général de Gaulle.
Prend position contre la répression à Madagascar en 1947,
contre la guerre d’Indochine, contre la guerre d’Algérie et la torture,
contre le réarmement de l’Europe et les essais nucléaires.
Préside pendant 25 ans La Croix Bleue, une association
nationale consacrée à l’aide et à la guérison des alcooliques.
Howard Thurman
(1899-1981), pasteur baptiste, philosophe, théologien, enseignant
états-unien, auteur de 21 livres. Le premier Afro-étatsunien à rencontrer
Gandhi en février 1936 à Bartoli, près de Bombay. Dès cette époque,
tente de traduire, en pensée et en actes, la philosophie du Satyagraha
dans le contexte du christianisme noir étatsunien.
Premier afro-étatsunien à occuper la charge de doyen de l'univer-
sité de Boston (pendant plus de deux décennies). Condisciple et ami du
père de Martin Luther Jr. Sa théologie marque énormément le futur
leader de la lutte non-violente pour les droits civiques..
Contribue en 1944 à fonder à San Francisco, avec l’International
Fellowship of Reconciliation (IFOR-MIR), la première communauté
ecclésiale multiraciale et multiculturelle des États-Unis, la Church for
the Fellowship of All Peoples .
Leader dans la lutte pour les droits civiques, conseiller et ami des
pasteurs Martin Luther King senior et junior.
« Ne vous demandez pas ce dont le monde a besoin. Demandez-
vous ce qui vous éveille à la vie. Puis faites-le. Car ce dont le monde a
besoin, c’est d’êtres qui s’éveillent à la vie. »
Cette citation de Howard Thurman est souvent attribuée à tort à un certain
Harold Whitman, nom fictif.
Aldo Capitini
(1899 -1968). Philosophe italien, éducateur, poète, militant
politique, emprisonné à 2 reprises pour ses activités anti-fascistes
en 1942 et 1943.
Maître de conférence en philosophie morale à Pise, et en
pédagogie aux universités de Cagliari et Pérouse. Dans le même
temps, met en place des Centres d'Orientation Sociale (COS),
sortes d'assemblées populaires de discussion et d'autoédu-cation
pour contrebalancer le pouvoir central et promouvoir la démocratie.
Parfois appelé le "Gandhi italien", car l’un des premiers
Italiens à prendre au sérieux et à faire connaître la pensée et l’action
de Gandhi. Défend une spiritualité laïque.
Dès 1952, propose une vision claire de la non-violence. Fait le
choix, très vite, d'écrire le mot "nonviolence" en un seul mot (au lieu
du terme "non-violence" retenu en France par ex.) car il considère
qu'on doit l'entendre comme une proposition active.
../..
Aldo Capitini
En 1952, organise une conférence internationale pour la non-
violence à Pérouse et crée un ‘Centre international de coordination
pour la non-violence’.
La même année, tient une autre conférence à Pérouse pour
étudier la non-violence à l'égard de la vie végétale et animale.
En septembre 1961, initiateur de la ‘Marche pour la paix entre
les peuples’ de Pérouse à Assise qui réunit des dizaines de milliers
de personnes. Contribue ainsi à la fondation du mouvement non-
violent italien en 1962 à travers le "Conseil italien de la paix" dont il
est le président jusqu'à sa mort.
Fondateur du Movimento Nonviolento et de la revue mensuelle
Azione Nonviolenta, auteur de nombreux ouvrages.
Propose une définition simple de la nonviolence : « Elle est le
choix d'une manière de penser et d'agir qui n'opprime et ne détruit aucun
être animé, et surtout aucun être humain ». Cette définition sera souvent
reprise en français, notamment par Lanza del Vasto, sous la traduction
suivante : « La non-violence est une manière de faire qui résulte d'une
manière d'être ».
Pie Raymond Régamey
(1900-1996), prêtre dominicain français, historien de l'art et écrivain
spirituel. Engagement volontaire puis démobilisation en 1919, licence
d'histoire et de géographie en 1921. Abandonne ses cours de l‘’École du
Louvre’ avant la thèse car devient soutien de famille. Engagé avec le frère
Marie-Alain Couturier dans l'aventure de ‘L'Art sacré’ aux ‘Éditions du Cerf’.
Rejoint le ‘Comité des Amis de Gandhi’, se lie avec Lanza del Vasto,
Danilo Dolci, Jean Goss. S’intéresse au jeûne, à l’objection de conscience,
à l’arme atomique. Soutient le combat de l’’Action civique non-violente’
contre la torture en Algérie et les arrestations et détentions arbitraires en
France dans les années 1954-1962 : la télévision retransmet l’épisode d’une
manifestation où il est ramassé sur le trottoir par les agents de police en
1960.
Auteur d’un numéro des ‘Cahiers St Jacques’ sur La conscience
chrétienne et la guerre, en 1958 du livre Non-violence et conscience
chrétienne et en 1962 des livres Face à la violence : Pour un statut des
objecteurs de conscience et Non-violence et objection de conscience.
Préfacier du livre de Camille Drevet Gandhi interpelle les chrétiens (1965).
Aumônier de congrégations de religieuses après 1957.
« Nous sommes certainement à un de ces moments où la conscience
chrétienne met en cause des conduites qu’elle considérait jusque là comme
normales. »
Lanza del Vasto
Giuseppe Lanza di Trabia-Branciforte (1901-1981). Écrivain,
poète, artiste, philosophe et militant, de père sicilien et de mère
flamande.
En 1936, passe plusieurs mois près de Gandhi qui l'appelle
Shantidas ("serviteur de paix"). En juin 1937, en pèlerinage aux
sources du Gange dans l'Himalaya, reçoit une vision qui lui dit
« Rentre et fonde ! »
En 1954, participe à la campagne de Vinoba Bhave pour la
redistribution des terres.
Fonde en 1948 en France un ordre spirituel, laborieux et non-
violent,’ L’Arche’, dont les grands axes sont : respect de la nature,
refondation sociale (autonomie économique maximale), résolution
non-violente des conflits, conversion spirituelle, dialogue interreligieux.
L’Arche mène des luttes non-violentes (pendant la guerre
d’Algérie, contre l’armement nucléaire, aux côtés des paysans du
Larzac, contre les OGM, etc.) et s’est développée dans plusieurs pays.
../..
Lanza del Vasto
Pour lui, dans l’homme, entre sensibilité et intelligence,
il y a un équilibre, une harmonie à trouver, grâce à une
troisième faculté qui fait leur unité : la volonté. C’est la "trinité spirituelle".
Dénonce les "quatre fléaux" de l'humanité contemporaine (guerre,
sédition, misère, servitude) qui reposent sur l’avidité.
L’asservissement de l’homme à l’économique et à la technique,
séparées de la sagesse, se manifeste dans l’abrutissement du travail à la
chaîne et culmine dans la bombe atomique.
« Les exemples historiques d’action non-violente enseignent que le
recours à la violence, douteux en tout temps, aujourd’hui désastreux, est
désormais inutile.»
«Avec la bombe atomique, la non-violence est la découverte
capitale du XXème siècle, l’une répondant à l’autre et obligeant l’humanité
à choisir entre la mort et la vie. » ../..
Lanza del Vasto
« Pensez que ces gens qui préparent la bombe nous parlent de
tous les moyens de sécurité qu’ils ont mis en œuvre pour éviter les
accidents, et qu’ils n’ont même pas pensé à ce que donnerait un
bombardement sur leurs installations ! (…)
L’autre année, je me trouvais à New York, à Wall Street, là où il
y a toutes les banques, toutes les tours pleines de dollars, de belle
tours, hein, luisantes et noires ! Je me disais : une simple bombe
arrivant là où j’ai mis les pieds, vous voyez ce que ça donnera ? (…)
Naturellement, si nous avons la bombe, nous sommes à l’abri de tout
ça ! » (interview en 1978)
« Moi, je vois le jour où les non-violents devront cacher les
techniciens, les ingénieurs et les savants que le peuple accusera de
nous avoir mis dans des catastrophes, s’apercevant enfin d’où
viennent les périls mortels. »
Lanza del Vasto
« Regardez le laboureur penché et songez aux grappes humaines pendues à ses
membres, à la pyramide bâtie sur son échine : car il laboure pour le marchand, le
gendarme, pour le contrôleur, pour le percepteur, pour le soldat, pour le gratte-papier,
pour le banquier, pour celui qui tourne des discours et pour celle qui vend son corps,
pour celui qui avale des petits fours et débite des fadaises de salons, pour le filou et le
ministre, pour la danseuse et pour le président; il porte leurs châteaux, leurs hôtels, leurs
casinos, leurs laquais, leurs espions et leurs officiers, leurs trains et leurs canons. »
André et Magda Trocmé
(1901-1971), Pasteur français et théologien protestant, un des
fondateurs du ‘Collège Cévenol’.
Affecté en 1934 au village du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire).
Pendant la 2ème guerre mondiale, appelle la population à la résistance
active sans violence et l’organise à sa mesure.
Avec son épouse Magda, la communauté protestante, le Service
Civil International (SCI), l’Armée du Salut, les Quakers, la CIMADE, etc.,
fait du Chambon une cité d’accueil et de sauvegarde de réfugiés juifs,
allemands anti-nazis, français échappant au STO : recherche de fonds,
fabrication de faux papiers, réseau d’alerte, mise au point de filières
d’évasion, ouverture d’une école.
On estime à 5 000 le nombre de Juifs sauvés.
../..
André Trocmé
Après la guerre, secrétaire itinérant du ‘Mouvement
international de la Réconciliation’ (MIR) pour l’Europe.
« La non-violence comporte dans la vie de tous les jours un choix
entre deux alternatives dont l’une est plus proche que l’autre de
l’obéissance à Jésus-Christ. C’est celle qu’il faut adopter coûte que
coûte, même si elle est contraire aux exigences de l’État. Aucun
gouvernement ne peut nous obliger à tuer. Il faut trouver le moyen
de résister au nazisme sans tuer des hommes.»
Photos : - André Trocmé
- Le film de Jean-Louis Lorenzi (1994) inspiré de l’expérience du
Chambon-sur-Lignon
Théodore Monod
(1902-2000). Philosophe français, naturaliste, professeur et
chercheur au ‘Muséum national d’histoire naturelle’.
Parcourt à pied les déserts africains à la recherche de météorites,
fossiles, squelettes, plantes et minéraux. Recueille, répertorie et analyse
plus de 20 000 échantillons.
Militant non-violent, prend part aux mouvements contre la guerre
d’Algérie, l’apartheid, l’exclusion.
Végétarien, engagé contre la corrida, la chasse à courre, la
vivisection, l’égorgement à vif des animaux et toutes les formes de
maltraitance animale.
Théologien de tradition protestante, président de l’’Assemblée
Fraternelle des Chrétiens Unitariens’ (AFCU).
Membre du ‘Mouvement International de la Réconciliation’ (MIR),
estime que l’ "ère chrétienne", ou définie comme telle, s’est achevée le 5
août 1945 avec le bombardement d’Hiroshima.
../..
Théodore Monod
Jeûne contre l’arme nucléaire chaque année du 6 au 9
août près du PC de déclenchement de l’arme nucléaire de
Taverny, près de Paris, avec une pancarte « La préparation d’un
crime est un crime ».
« Toutes les bombes sont naturellement répréhensibles et
doivent être supprimées, mais la bombe atomique, c’est
diabolique, inexpiable… »
« Le christianisme n’a pas échoué : il n’a pas encore été
essayé ! Si l’on appliquait l’Évangile, ce serait une révolution
extraordinaire.»
Voir aussi T.M. dans le trombinoscope des chercheurs de sens
Jayaprakash Narajan
(1902-1979), connu sous le nom de "JP" (prononcer JiPi).
Militant gandhien et responsable politique indien.
Études en Indes et aux États-Unis (Patna; Wisconsin, Iowa, Ohio,
Berkeley). En 1932, condamné à un an de prison pour sa participation
au mouvement de désobéissance civile contre la domination britan-
nique. À sa libération, joue un rôle de premier plan dans la formation
du Congress Socialist Party, un groupe de gauche au sein du Con-
gress Party, l'organisation mène la campagne pour l'indépendance de
l'Inde. De nouveau emprisonné par les Britanniques en 1939 pour son
opposition à la participation indienne à la Seconde Guerre mondiale
aux côtés de la Grande-Bretagne.
Voyant que le Congrès s’écarte des idées de Gandhi dès 1948,
fonde le parti socialiste Praja puis s’engage quelques temps aux
côtés de Vinoba Bhave dans le mouvement de redistribution des
terres. En 1959, plaidé pour une « reconstruction de la politique
indienne » au moyen d'une hiérarchie à quatre niveaux de conseils de
village, de district, d'État et d'union.
../..
Jayaprakash Narajan
Alors de Nehru ne reconnaît pas la souveraineté du Tibet
ni le gouvernement du Dalaï-lama en exil, entraîne les socialistes
du Lok Sabha ("Chambre du peuple") dans un groupe de pression
pro-tibétain.
Fonde dans les années 1970 les mouvements Citizens for
Democracy et Peoples Unions for Civil Liberties.
Plaide pour un programme de transformation sociale
conforme aux orientations gandhiennes, qu’il appelle sampurna
kranti (« révolution totale »), et devient la véritable conscience
politique de l’Inde.
Lorsqu’ Indira Gandhi décrète l’état d’urgence, organise en
juin 1975 une manifestation de 100 000 personnes à Patna. Est
emprisonné quelques mois. Fonde ensuite le Janata Party, qui
fera chuter Indira Gandhi aux élections de 1977.
« Une des conséquences négatives de la révolution
violente, c’est que le pouvoir finit par être usurpé le plus souvent
par d’anciens révolutionnaires. Ceci est inévitable quand le
pouvoir vient des fusils, car les fusils ne sont pas dans les mains
des couches moyennes. C’est pourquoi une révolution violente a
toujours apporté une dictature d’une espèce ou d’une autre. »
Isaac Bashevis Singer
(1902-1991), écrivain juif polonais.
Pour fuir l'antisémitisme, quitte la Pologne pour les États-Unis en
1935 avec son frère Joshua et devient citoyen américain en 1943.
Dans les années 1970, établit des liens entre le comportement
humain envers le monde animal et celui des nazis envers les Juifs durant
le second conflit mondial, et devient un végétarien militant.
Prix Nobel de littérature en 1978.
Une femme lui demande s’il évite de manger du poulet "pour des
raisons de santé". " - Oui, pour la santé des poulets !"
« Tout ce que les nazis ont fait aux Juifs, nous le pratiquons
aujourd’hui sur les animaux. Un jour, nos petits-enfants nous
demanderont :« Où étais-tu pendant l’holocauste des animaux ? Qu’as-tu
fait contre ces crimes terrifiants ? »
« Il n’y a pas de meilleur moyen de servir le créateur que d’être bon
pour ses créatures (…) Le végétarisme est ma religion, ma protestation. »
Bruno Bettelheim
(1903-1990). Psychanalyste et pédagogue états-unien
d’origine autrichienne et juive.
Directeur pendant 30 ans de l’école d’orthogénie de l’université
de Chicago.
À la suite de son expérience en camp de concentration, écrit
sur les phénomène psychologiques à l’oeuvre entre les prisonniers et
leurs tortionnaires.
« L’État SS n’aurait jamais pu fonctionner sans la coopération
des victimes. Plus spécifiquement, les SS auraient été incapables de
tenir les camps sans la collaboration de nombreux prisonniers, en
général involontaire, dans certains cas accordée avec répugnance,
mais beaucoup trop souvent empressée. (…)
Rétrospectivement, il apparaît très clairement que seul un
refus total de collaboration de la part des Juifs aurait pu offrir une
petite chance de contraindre Hitler à une solution différente.»
Matěj Šindelář (1903-1939), footballeur morave, austro-hongrois puis
autrichien. Attaquant dans l’équipe nationale d’Autriche. Fait les beaux jours
de la Wunderteam autrichienne, une des meilleures équipes du monde.
Envahie par l'Allemagne nazie en mars 1938, l'Autriche devient
allemande, la Wunderteam n'a plus d'existence légale. Les autorités nazies
décident de marquer l'intégration forcée par un match de football amical. Le
3 avril 1938, ce match doit sceller "les retrouvailles" des deux peuples en
faisant se rencontrer la Mannschaft allemande et la Wunderteam dans la
fraternité du football sous les yeux d'Hitler et des dignitaires nazis. Sindelar
marque un premier but à la 70ème minute. Un second but est marqué peu
après par le défenseur Karl Szestak. Cette victoire sportive est souvent
présentée comme une opposition politique de Sindelar à l'Anschluss, le
transformant en un symbole d'opposition au pouvoir nazi. Plusieurs joueurs
autrichiens intègrent la Mannschaft, mais Sindelar refuse, prétextant soit
son âge avancé, soit une blessure ancienne de 15 ans.
Traqué par la Gestapo pendant 8 mois, retrouvé mort sur son lit à
Vienne à côté de sa compagne italienne juive, officiellement asphyxiés à la
suite d’une intoxication au monoxyde de carbone due à une cheminée
défectueuse. Plus de 15 000 personnes accompagnent sa dépouille dans
les rues de Vienne, « le premier et le dernier rassemblement de Vienne
contre les nazis », selon le journaliste anglo-autrichien Robin Stummer.
Matthias Sindelar
Éric Weil
(1904-1977), philosophe français d’origine allemande et juive,
ayant fui le nazisme en 1933.
Fonde la revue Critique avec Georges Bataille. Professeur à la
faculté de lettres de Lille puis de Nice.
Fidèle à la conception kantienne du devoir et de la morale, son
œuvre tout entière est fondée sur une réflexion sur la violence et la
non-violence, mais « son erreur décisive et de ne pas avoir distingué
la force et la violence » (Jean-Marie Muller).
« Le philosophe veut que la violence disparaisse du monde. »
« La philosophie se réalise et se termine dans l’action. (…)
Toute fuite est interdite. »
« La non-violence est le point de départ comme le but final de
la philosophie. »
« Le progrès vers la non-violence définit pour la politique le
sens de l’histoire. »
Emmanuel Mounier
(1905-1950), un des premiers philosophes français à avoir
intégré la non-violence dans ses réflexions.
Fondateur en 1932 la revue Esprit, qui se présente comme
troisième force entre le capitalisme et le marxisme et développe la
conception du "personnalisme".
Participe pendant la guerre au journal Combat, puis à la
réconciliation franco-allemande.
Avec son maître spirituel Jacques Maritain, s’intéresse à la
philosophie et à l’action politique de Gandhi.
Définit la non-violence comme « politique de la vertu de force
qui rejette toute alliance avec la peur et la faiblesse », revendique
« un droit insurrectionnel non-violent contre les lois injustes. »
« Il arrive que l'histoire récompense ceux qui s'obstinent et
qu'un rocher bien placé corrige le cours d'un fleuve. »
../..
Emmanuel Mounier
“La non-violence n’est pas un état de tranquillité que l’on
atteint en deçà de la violence, elle est un état de maîtrise et de
tension que l’on conquiert par-delà la violence. Seul celui qui est
capable de violence, et, par dessus le marché, de réfréner sa
violence, est capable de non-violence”
Il importe “d’étudier et d’éprouver tout le champ encore
inexploré des méthodes non-violentes, sans jamais perdre de vue
leur efficacité et en tâchant de rattraper le temps perdu”
N’écarte pas la possibilité de la contre-violence, mais “nous
aurons auparavant essayé héroïquement tous les moyens non-
violents qui sont à notre disposition, et n’accepterons la violence que
comme un dernier pis-aller.”
«Nous savons lutter contre l’incendie, contre la peste, contre
le vol, nous ne savons pas encore lutter à armes égales contre la
guerre.»
Hannah Arendt
(1906-1975). Philosophe, journaliste et militante politique
allemande puis états-unienne, issue d’une famille juive. Fuit le régime
nazi, connaît l’exil à Paris puis à New-York.
Travaille sur les thèmes de la révolution, du totalitarisme, de la
culture, de la modernité et de la tradition, de la liberté, de la vie active
(travail – œuvre – création).
À l’occasion du procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem, analyse ce
qui a rendu possible la shoah, l’obéissance servile de fonctionnaires, "la
banalité du mal", et aussi la collaboration de certains Conseils juifs.
Une de ses affirmations principales est que la violence est
impropre à fonder le politique. Dénonce aussi les excès de
l’automatisation et de la production de masse, la prédominance de
l’économique sur le politique.
Dans Du mensonge à la violence (1972), plaide pour que la
désobéissance civile à des ordres inhumains ou des lois scélérates soit
reconnue comme un droit dans les constitutions des pays démocrati-
ques.
Dietrich Bonhoeffer
(1906-1945), pasteur luthérien évangélique, théologien, écrivain
allemand.
Assistant à l’université de Berlin, puis une année à New-York,
une à Londres.
En 1935, rejoint l’’Église confessante’ (Bekennende Kirche),
opposée au nazisme, dissoute en 1937.
Interdit d’enseigner, dirige un séminaire pastoral clandestin.
À Stockholm, donne aux Britanniques des preuves de
l’extermination des Juifs et leur demande de l’aide pour éliminer Hitler.
Arrêté le 5 avril 1943 sous l'inculpation d’ "affaiblissement du
potentiel de guerre de l'Allemagne", emprisonné à la prison militaire de
Tegel à Berlin puis à Buchenwald.
Condamné à mort par la Cour martiale, comme l'amiral Wilhelm
Canaris (1887-1945) et le général Hans Oster (1887-1945), pendu
dans le camp de Flossenburg le 9 avril 1945.
../..
Dietrich Bonhoeffer
« La bêtise est une ennemie du bien plus dangereuse que la
méchanceté. On peut protester contre le mal, le mettre à nu,
l’empêcher par la force. Nous sommes impuissants contre la bêtise.
(…). N’importe quel déploiement de puissance extérieure,
politique ou religieuse, frappe de bêtise une grande partie de
l’humanité. La puissance des uns a besoin de la bêtise des autres »
1er janvier 1943
« En s’en tenant au seul devoir, on ne court jamais le risque
d’une action responsable qui seule peut atteindre le mal en son
centre et le vaincre. (…)
Une notion fondamentale nous manquait : celle de la
nécessité d’une action libre et responsable, même en opposition à la
mission et à l’ordre qu’on nous dictait. (…)
Le courage civique ne peut naître que de la libre responsa-
bilité d’un homme libre. »
Photo du bas : Statue de bronze de Bonhoeffer à Hamburg
Franz Jägerstätter
(1907-1943) Agriculteur et objecteur de conscience autrichien.
En 1938, après que les troupes d'Hitler ont pénétré en Autriche,
seul de son village à voter contre l'Anschluss.
Alors père de trois filles, est appelé au service actif en février
1943. Refuse de combattre pour le IIIème Reich.
Emprisonné à Linz, puis à Berlin, condamné à mort par un
tribunal militaire, décapité le 9 août 1943 à la prison de Brandenburg.
Béatifié par le pape Benoît XVI à la cathédrale de Linz le 26
octobre 2007, jour de la fête nationale autrichienne.
« Si Dieu ne m'avait pas accordé sa grâce et la force de mourir,
si nécessaire, pour défendre ma foi, je ferais peut-être simplement ce
que fait la majorité des gens ».
Photo du bas : Plaque à son hommage à Berlin
Jacques de Bollardière
(1907-1986). Général français. Campagne de Norvège.
Condamné à mort par un tribunal militaire du régime de Vichy.
Batailles en Égypte, en Érythrée, en Lybie, dans maquis des
Ardennes, en Hollande. Compagnon de la Libération.
En Indochine, prend conscience qu’il participe à une guerre
coloniale.
Colonel pendant la guerre d’Algérie, créé une ‘Section adminis-
trative spéciale’ (SAS) pour remplacer dans les zones inaccessibles
une administration défaillante, met sur pied des "commandos noirs",
formés de 7 ou 8 volontaires qui partagent la vie des populations.
En opposition avec le général Jacques Massu, s’oppose à la
torture.
Condamné à 60 jours de forteresse pour avoir confirmé les
récits de Jean-Jacques Servan-Schreiber sur la torture dans
L’Express.
Démissionne de l’armée après le putsch des généraux. Cadre
d’entreprise et animateur social en Bretagne.
../..
Jacques de Bollardière
Découvre la non-violence en 1970 lors d’une conférence de
Jean-Marie Muller où l’emmène son épouse Simone.
Manifeste à Mururoa son opposition aux essais nucléaires
français en 1973, renvoie sa plaque de Grand Officier de la Légion
d’Honneur.
Co-fondateur du ‘Mouvement pour une Alternative Non-violente’
(MAN) en 1974. Préconise une défense civile non-violente, soutient les
paysans du Larzac menacés d’expropriation par l’armée, s’investit dans
les luttes écologiques.
Rongé par le cancer, défend au tribunal en 1985 Jean-Louis
Cahu, officier de tir de missiles nucléaires déserteur du plateau
d’Albion.
« Je suis scandalisé que ces méthodes (de résistance civile non-
violente) ne soient pas ouvertement exposées dans les différentes
instances où s’élabore la pensée militaire française. »
Photo du bas : Inauguration du carrefour Général Jacques Pâris de Bollardière à Paris par
Bertrand Delanoé, Maire, en présence de Simone de Bollardière
Piotr Grigorenko
(1907-1987), Ukrainien, vétéran de la 2ème guerre mondiale,
général de division dans l’armée soviétique.
En 1961, critique la politique de Khrouchtchev, est muté à titre
de punition dans l’extrême Est du pays. Devient membre du Helsinki
Watch Group à Moscou .
Condamné à l’emprisonnement psychiatrique en 1964-1965,
déchu de ses grade militaire, médailles, et prestations de retraite.
Figure de proue dans le mouvement de défense des droits de
l'homme.
Arrêté en mai 1969 et interné pendant cinq ans pour
"schizophrénie paranoïde" à l'hôpital de la prison de Chernyakhovsk.
En 1977, après un traitement médical aux États-Unis, est
déchu de la nationalité soviétique.
« Les convictions ne sont pas comme des gants, on ne peut
pas facilement les retourner ».
Jean Lasserre
(1908-1983), Français, pasteur de l’Église réformée de France.
Lors de ses études de théologie à New York, rencontre et
influence Dietrich Bonhoeffer.
Pasteur dans diverses villes de 1953-1961, puis secrétaire
itinérant du ‘Mouvement international de la réconciliation’, et rédacteur
de son journal Les Cahiers de la réconciliation durant de nombreuses
années.
Milite contre l'alcoolisme, la prostitution, le racisme. Participe à
de très nombreuses actions non-violentes, fait partie de l'équipe
recevant Martin Luther King à Lyon en 1966.
Anime de nombreux groupes et donne des conférences dans
les pays francophones (France, Belgique, Suisse) sur les thèmes lui
tenant à cœur : déshonorer la guerre, la violence et l'exploitation sous
toutes les formes, favoriser l'objection de conscience et la non-
violence évangélique active, l'entraide et la solidarité.
Mahmoud Muhammad Taha
(1908-1985), ingénieur hydraulicien, parfois surnommé "le Gandhi
soudanais". Condamné à deux ans de prison en 1946 pour s’être
opposé aux Anglais durant la colonisation du Soudan.
Crée des communautés d’homme et de femmes, ‘Les Frères
républicains’, sous le signe du partage des biens, de la prière, de la
réflexion, du débat d’idées. Propose d’abandonner la charia du
Mahomet de Médine (guerre contre les infidèles) pour établir la vraie
charia de la Mecque (combat non-violent contre l’égoïsme et la
violence). Affirme que la constitution soudanaise doit être réformée pour
réconcilier « le besoin individuel de liberté absolue et le besoin commun
de justice sociale totale ».
Condamné dès 1968 comme hérétique par les responsables
religieux. S’oppose au général Gaafar Nimeiry après la promulgation
d’un code pénal conforme à la charia. Condamné à mort pour « hérésie,
opposition à l’application de la loi islamique, trouble à la sécurité publi-
que, incitation à s’opposer au gouvernement, et reconstitution d’un parti
politique interdit.»
Pendu en janvier 1985 dans sa prison à Khartoum.
Simone Weil
(1909-1943), philosophe et écrivaine française née dans une
famille juive mais agnostique. ‘École Normale Supérieure’, agrégée de
philosophie puis ouvrière à la chaîne.
Résistante au franquisme et au nazisme. Séjour aux États-Unis.
Rédactrice dans les services de ‘La France Libre’ à Londres en
1942 .
Dénonce la violence dans le système industriel, dans les
mécanismes de la vie collective (partis politiques, système pénal, etc.),
dans le nationalisme et le miltarisme, et même dans les luttes de
libération.
Son expérience de la guerre civile espagnole lui montre la
perversité de l’utilisation de moyens en contradiction avec la fin
recherchée.
S’indigne surtout de la collusion du christianisme avec la
violence, au point de refuser le baptême après sa conversion.
../..
Simone Weil
Qu’on exerce la violence ou qu’on la subisse, « de toutes manière
son contact pétrifie et transforme un homme en chose. »
« Frapper ou être frappé, c’est une seule et même souillure. Le froid
de l’acier est pareillement mortel à la poignée et à la pointe. »
Nous tuons « pour nous venger d’être mortels. »
« S’efforcer de devenir tel qu’on puisse être non-violent .(…)
S'efforcer de substituer de plus en plus, dans le monde, la non-violence
efficace à la violence."
« L’amour fait la guerre aussi bien que la paix. Amour va à la guerre
plus naturellement qu’à la paix, par ce fanatisme qui fonde la tyrannie (…)
La paix ne sera pas fondée par l’amour, mais par la pensée. »
« La plénitude de l'amour du prochain, c'est simplement d'être
capable de lui demander : "Quel est ton tourment ?" »
« La religion en tant que source de consolation est un obstacle à la
véritable foi, et en ce sens l'athéisme est une purification.»
S.W. figure aussi dans le trombinoscope de la non-violence
Saul Alinsky
(1909 -1972). Sociologue, homme d’action et stratège états-
unien, fils de parents juifs immigrés de Russie.
Se consacre à l’organisation des habitants dans les quartiers
les plus pauvres de Chicago, puis dans diverses régions des États-
Unis.
Père du Community organizing, précurseur des méthodes
d’empowerment (confiance en soi), processus qui permet à chacun
de prendre conscience de ses problèmes et lui donne accès aux
instruments qui permettent de faire des choix, d’avoir une conscience
politique et d’agir.
Son manuel d’action non-violente apprend à affaiblir
l’adversaire en désorganisant son pouvoir pour le conduire à la
négociation, dans la démocratie et dans le pragmatisme.
« Il faut être politiquement insensé pour dire que le pouvoir est
au bout du fusil quand c’est l’adversaire qui possède tous les fusils. »
../..
Saul Alinsky
Quelques règles d’or d’Alinsky dans l’éducation, le travail social, la
politique de la ville :
- Le point de départ est le système, la réalité ;
- La boussole de toute action est la dignité humaine. « Ne demande
pas tes droits, prends-les ! » ;
- Ne jamais faire à la place de quelqu’un ce qu’il peut faire lui-même ;
- Processus et objectif sont indissociables ;
- Imagination, créativité, humour, solidarité, alliances ponctuelles.
Agir pour le plaisir d’être ensemble, pour mener sa vie, pas pour
voir l’adversaire à terre. Fêter les victoires.
« S’il y a un au-delà, j’irai en enfer, mais en arrivant, je
commencerai à organiser les plus démunis que je trouverai ! Ce sont
mes frères !»
Helder Camara
(1909-1999). Brésilien, évêque catholique d’Olinda et Recife de
1964 à 1985.
Quitte son palais épiscopal et s’installe dans une modeste
maison au cœur d’un bidonville.
Défenseur des droits humains, figure de la ‘théologie de la
libération’, s’engage au côté des plus pauvres.
Marginalisé dans l’épiscopat brésilien et opposant à la dictature
des généraux entre 1964 et 1985, fait une tournée de conférences en
Europe, dénonce la torture, la dictature, la misère, la guerre du
Vietnam, les ventes d’armes.
Se référant à Gandhi et à Martin Luther King, met en place une
pastorale dirigée vers le service des pauvres, souhaite que les prêtres
soient formés à l’action sociale comme à la théologie.
Don H.C. figure aussi dans le trombinoscope des spirituels ../..
Dom Helder Camara
Son successeur nommé par Jean-Paul II, Jose Cardoso
Sobrinho, fera table rase de toute l’action de son prédécesseur.
« Quand je donne à manger aux pauvres, on m’appelle un saint.
Quand je demande pourquoi il y a des pauvres, on me traite de
communiste »
« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les
autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les
dominations, les oppressions et les exploitations.La seconde est la
violence révolutionnaire qui naît de la volonté d’abolir la première. La
troisième est la violence répressive qui a pour objet d’étouffer la
seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence,
celle qui engendre toutes les autres. Il n’y a pas de pire hypocrisie de
n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première,
qui la fait naître, et la troisième qui la tue. » ../..
Dom Helder Camara
La violence institutionnelle est « celle qui légalise et perpétue les
dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et
lamine des millions d’êtres humains dans ses rouages silencieux et
bien huilés. »
« Les religions doivent dialoguer et marcher ensemble pour être la
conscience éthique de l'humanité et le cri pacifique des pauvres. »
« Être une simple flaque d'eau reflétant le ciel. »
Photos du bas : avec l’abbé Pierre
avec Desmond Tutu
Kwame Nkrumah
(1909-1972), homme politique indépendantiste et panafrica-
niste ghanéen (ex-Côte de l’Or). Études en Angleterre et aux États-
Unis.
Secrétaire général du parti indépendantiste UGCC (United
Gold Coast Convention), qu'il quitte pour fonder un parti de masse,
le Convention People's Party (CPP).
Appelle au boycott et à la désobéissance civile. Emprisonné
par les autorités britanniques jusqu'en 1951.
Premier ministre du Ghana indépendant (1957-1960), puis
président (1960-1966).
Devient dictateur après 1961, s’abîme dans la contemplation
de sa grandeur, se fait appeler l’Osagyefo ("le rédempteur").
Proie facile d’un coup d’État militaire, exilé dans la Guinée de
son ami Ahmed Sékou Touré (1922-1984), autre dictateur.
■

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Histoire et figures de la non-violence. — 03. De 1870 à 1909

  • 1. Trombinoscope historique de la non-violence 3 - De 1870 à 1909 Étienne Godinot 18.10.2022
  • 2. Sri Aurobindo Aurobondo Ghose (1872-1950), homme politique, philosophe et poète indien. Né à Calcutta, études de lettres à l'université de Cambridge. En 1893, entre dans les services administratifs de la principauté de Barodà. Tout en conservant ce poste, devient professeur de français, puis d'anglais au College de Barodâ. En 1906, un an après la partition du Bengale, rejoint Calcutta en tant que directeur du National College du Bengale. S'engage activement dans la politique et se fait connaître par ses éditoriaux dans le journal Bande Mâtaram comme porte-parole du parti nationaliste. En 1908, soupçonné d'être mêlé à une affaire de fabri- cation de bombes, est incarcéré pendant plus d'un an. Quitte ensuite la scène politique, fonde à Pondichéry avec la Française Mira Alfassa ("La Mère") l’ashram d’Auroville et se consacre au yoga et aux écrits spirituels. « La résistance passive* que nous prêchons est le seul moyen efficace, en dehors de la résistance armée. La force organisée de la nation, sous l'autorité d'une puissante autorité centrale et guidé par le principe de l'autonomie économique, peut permettre de se libérer du contrôle de la puissance étrangère. » « Les circonstances exigent que nous fassions l'expérience d'une méthode de résistance résolue, mais pacifique qui, bien que moins audacieuse et agressive que les autres méthodes, demande peut-être beaucoup plus d'héroïsme, d'endurance et de souffrance. » * Terme impropre utilisé alors pour désigner la résistance non-violente, qui est active…
  • 3. Albert Schweitzer (1875-1965), philosophe et médecin alsacien, musicien organiste, théologien protestant. En 1915, pendant son incarcération par l’armée française en tant que citoyen allemand, lui sont révélées l’idée et éthique du respect de la vie, inspiré des religions de l’Inde, qui le conduira au végétarisme. Dans Kulturphilosophie, étude philosophique de la civilisation, aborde la pensée éthique à travers l’histoire et invite ses contemporains à mettre en œuvre une philosophie de respect de la vie. Fonde en 1913 l’hôpital de Lambaréné au Gabon, un village-hôpital de bois, de tôle et de torchis où il soigne notamment les lépreux, et un hôpital-refuge pour les animaux. Prix Nobel de la paix (1952). Dénonce l’arme nucléaire à partir de 1954. Comprend le christianisme non comme une religion axée sur l’au- delà, mais bien comme un message éthique devant transformer le monde. « L'éthique c'est, la reconnaissance de notre responsabilité envers tout ce qui vit. » Voir aussi A. Schweitzer dans Sens et dans Nucl. 3
  • 4. Henry Hodgkin (1877-1933), médecin et missionnaire quaker anglais. Études au King's College à Cambridge puis au St Thomas' Hospital à Londres, Cofondateur de la West China Union University à Chengdu (Chine), université soutenue par plusieurs églises protestantes. En août 1914, participe à Constance à la conférence du ‘Conseil des Églises des empires britannique et allemand pour la promotion des relations amicales entre les deux peuples’, organisation dont le secrétaire est le pasteur luthérien allemand Friedrich Siegmund- Schultze (1885-1969). Sur le quai de la gare de Cologne, ils se promettent mutuellement de ne pas participer à la guerre, de rester unis dans le Christ malgré la guerre et de proclamer le message de paix de l’Évangile quelles que soient les circonstances. Fonde en 1915 en Angleterre le mouvement Fellowship of Reconciliation (‘Mouvement de la Réconciliation’). Fonde en 1929 et dirige le centre de rencontres quaker de Pendle Hill, près de Philadelphie. L'international Fellowship of Reconciliation (IFOR) est fondé en 1919 à Bilthoven (NL). Né contre la Première Guerre mondiale, l'IFOR se définit d'abord, comme un mouvement chrétien pacifiste. La rencontre de plusieurs de ses membres avec Gandhi conduit le mouvement à se déclarer non-violent dès les années 1920.
  • 5. Clemens August von Galen (1878-1946). Allemand, évêque de Münster en Westphalie, surnommé "le lion de Münster" par son opposition au national- socialisme. Durant l’été 1941, condamne les brutalités de la Gestapo *, porte plainte contre les crimes commis dans son diocèse, dénonce avec force le programme Aktion T4 d’assassinat des personnes ayant un handicap mental. Ses sermons circulent en Allemagne et jusque sur les lignes de front. Bormann veut le supprimer, mais Goebbels s’y oppose, car la population de Westphalie serait perdue pour la durée de la guerre. En août 1941, Hitler fait interrompre l’élimination des malades. * GeStaPo : GeheimeStaatsPolizei, police secrète d’État du régime nazi
  • 6. Pierre Ceresole (1879-1945), Suisse, études à Zürich, voyage aux États- Unis, ingénieur au Japon. En 1915, est profondément impressionné par le "refus de servir" de l'instituteur vaudois John Baudraz, et par l'absence de prise de position des Églises à son sujet. Étant libéré de l'obligation militaire pour raisons de santé, refuse de payer la "taxe militaire" (impôt remplaçant la participation à l'armée). 1ère condamnation à un jour de prison. En novembre 1917, appelle à refuser les "idoles nationales". En 1919, cofondateur aux Pays-Bas du Mouvement international de la Réconciliation. Devient le premier secrétaire général de cette nouvelle internationale de chrétiens refusant la guerre. ../..
  • 7. Pierre Ceresole En 1920, crée le ‘Service civil international’ (SCI), et ouvre près de Verdun, avec des amis allemands, autrichiens et anglais, le premier chantier (5 mois) de reconstruction. En 1924, premier chantier de service civil en Suisse. Rencontre plusieurs fois Gandhi en Inde. Devient membre des Quakers en 1936. À deux reprises, en 1942 et 1944, se rend à pied en Allemagne. Nouvelles condamnations à la prison. « Mieux vaut être au ban de tous les partis et de tout le monde que d'être complice » « Cette idée de vouloir faire triompher la justice par la violence paraîtra un jour aussi bête et fausse que nous paraît la torture pour savoir la vérité ». Photo : un chantier du SCI
  • 8. Sarojini Naïdu Née Sarojini Chattopadhyay (1879-1949), militante indépendan- tiste indienne et poète, surnommée "le rossignol de l’Inde". Maîtrise 5 langues, à l’âge de 12 ans entame des études supérieures à l’université de Madras. Poursuit ses études en Angleterre (Londres et Cambridge), où elle rencontre le Dr Govindarajulu Naïdu. Lutte pour le droit de vote des femmes, fonde en 1917 la Women’s India Association avec Annie Besant. Entre 1915 et 1918, voyage dans différentes parties de l'Inde, intervenant sur la sécurité sociale, l'autonomisation des femmes et l’indépendance. Rencontre Gandhi en 1916. En 1924, voyage en Afrique de l'Est et en Afrique du Sud pour défendre les Indiens. Joue un rôle de leader dans le mouvement de désobéissance civile, organise avec Abbas Tyabji le raid sur les dépôts de sel de Dharasana pendant la marche du sel en 1930, incarcérée avec Gandhi et d'autres dirigeants. Accompagne Gandhi à Londres pour la deuxième session non concluante de la Table ronde sur la coopération indo-britannique (1931). En 1942, est arrêtée à nouveau pendant le mouvement Quit India. Premier gouverneur des Provinces unies d'Agra et d'Oudh de 1947 à 1949. Élue présidente de l’Indian National Congress en 1925. Prononce l’éloge funèbre de Gandhi en 1948.
  • 9. Camille Drevet Née Camille Eugénie Bonnat (1881-1969), militante féministe française. Après "dix années de bonheur", son mari Henri-Paul Drevet, né en 1971, tombe au front en oct. 1914. Ce drame explique la lutte pour la paix qu’elle mènera jusqu’à sa mort. Pendant la Première Guerre mondiale, travailleuse sociale dans des Foyers de soldat, activité qu’elle continue quelque temps après le retour de la paix. En septembre 1920, s’installe à Paris, découvre la ‘Ligue interna- tionale des femmes pour la paix et la liberté’ (Women International League for Peace and Freedom - WILPF), devient déléguée de la section française, collabore au journal La Voix des femmes qui lutte pour le suffrage des femmes. Élue au Comité directeur de la section française de la ‘Ligue contre l’impérialisme’ en juin 1927 avec Henri Barbusse, Victor Basch, etc. Après un voyage en Indochine, dénonce le système colonial, parcourt l’Europe. À partir de décembre 1930, Secrétaire internationale de la WILPF. Secrétaire générale d’avril 1937 à avril 1939 de la ‘Ligue interna- tionale des combattants de la paix’. Secrétaire des ‘Amis de Gandhi’ en 1957, fait plusieurs voyages en Inde et écrit de nombreux livres et articles sur Gandhi et son combat non-violent.
  • 10. Pierre Robert de Saint Vincent (1882-1954), général issu d'une vieille famille de la noblesse française. Élève de l'École polytechnique, Commandant de la 14e région militaire et gouverneur militaire de Lyon. Un des piliers de l’’Amitié chrétienne’, œuvre fondée dans cette ville pour aider les Juifs persécu- tés par le régime de Vichy. Fait aussi partie de l'organisation clandestine ‘Armée Secrète’ (AS). Le 29 août 1942, à la suite de la grande rafle des Juifs en zone non occupée, reçoit l'ordre de mettre des gendarmes à la disposition de l'intendant de police Lucien Marchais pour procéder au convoyage de 650 Juifs de la zone Sud vers la zone Nord. Déclare alors : « Jamais je ne prêterai ma troupe pour une opération semblable ». Le départ ne peut avoir lieu que le lendemain, et ce délai permet à un certain nombre de Juifs de s'enfuir et d’échapper à la déportation Le surlendemain, est relevé de ses fonctions par le ministre de la Guerre du gouvernement de Vichy, le général Eugène Bridoux. Son limogeage est annoncé dans la presse sans que les raisons en soient données. Poursuit son action au sein de la Résistance et se cache pendant 2 ans. Reprend son activité en août 1944 à la Libération de Lyon, à la demande du Général de Gaulle. Honoré en 1993 comme ‘Juste parmi les nations’ .
  • 11. Morihei Ueshiba (1883-1969). Japonais, maître-fondateur de l’aï-kido. Influencé par Sokaku Takeda (1859-1943), grand-maître de jujutsu, puis par Onisaburo Deguchi (1871-1948), cofondateur de la religion Omoto Kyo inspirée du shintoïsme. L'aïkido se compose de techniques avec armes et à mains nues utilisant la force de l'adversaire, ou plutôt son agressivité et sa volonté de nuire. Ces techniques visent non pas à vaincre l'adversaire, mais à réduire à néant sa tentative d'agression. L'aïkido peut être considéré comme la concrétisation du concept de légitime défense : une réaction proportionnée et immédiate à une agression. Une des grandes motivations de Ueshiba est de promouvoir la résolution non-violente des conflits en enseignant un art accessible à tous et fondé sur le refus de la violence, l’union des efforts et non leur opposition. « Une technique de défense qui ne passe pas par une attitude d’attaque, un art martial qui pratique la non-violence (…). Ce n’est pas se batte contre, mais avec l’adversaire, en profitant de l’énergie de l’autre pour le faire renoncer. L’aï-kido prouve l’inutilité de la force physique, qui ne rencontre que le vide » Jean-François Blachon
  • 12. Barthélemy de Ligt (1883-1938), penseur et militant contre le militarisme, pacifiste liber- taire néerlandais. Fils de pasteur calviniste, pasteur de 1910 à 1915, évolue du christianisme à l'athéisme, et parallèlement, du socialisme à l'anarchis- me. Sa rencontre avec Clara Wichmann (1885-1922) joue un rôle important dans cette évolution. Déploie, pendant et après la Première Guerre mondiale, une intense activité de soutien aux réfractaires et aux insoumis qui lui vaut plusieurs séjours en prison. Toute sa vie, récuse toutes les formes de guerre et de recours à la violence, qu'elle soit « horizontale » (entre les nations et les peuples) ou « verticale » (entre les classes sociales). En 1915, le co-auteur d'une brochure, De Schuld der Kerken (La dette des Églises) où il affirme que la plupart des dirigeants de l'Église et les pasteurs sont en partie responsables de la guerre en raison de leur glorification du nationalisme et du militarisme : est désavoué par sa hiérarchie de l'Église réformée néerlandaise et banni de son domicile, de sa paroisse et d'une partie du territoire des Pays-Bas. En juin 1915, prononce un sermon radicalement antimilitariste lors de l'office de la Pentecôte et est banni, sans procès, des provinces du Sud des Pays-Bas par les autorités militaires. En septembre 1915, signe le Dienstweigeringsmanifest (Manifeste contre le service militaire) en soutien aux réfractaires et aux insoumis. En mars 1916, est condamné à 15 jours de prison. Accueille avec enthousiasme la révolution russe d'octobre 1917, avant de prendre assez rapidement conscience de la brutalité et de l'oppression du nouveau pouvoir bolchevique. ../..
  • 13. Barthélemy de Ligt En 1925, quitte les Pays-Bas pour s'installer en Suisse, près de Genève. Y noue des correspondances avec Gandhi, Nehru, Einstein et Huxley.. En 1929, écrit son manuel de résistance non-violente traduit et publié en 1935 en français : Pour vaincre sans violence. De tous les penseurs antiautoritaires non-violents, il est celui qui arrive à définir et à organiser sur un plan théorique les nouvelles méthodes de lutte non violente. Son Plan de Mobilisation contre la Guerre, en 1934, développe de façon radicalement novatrice pour l’époque la « stratégie et la tactique antimilitariste », en période de paix ou de guerre. Cet ouvrage reste un guide pratique de l’action directe contre la guerre. En 1937, dans la brochure Le problème de la guerre civile, exprime publiquement ses critiques sur les choix militaires des anarcho- syndicalistes de la ‘Confédération nationale du travail’ pendant la guerre d'Espagne. « L'emploi des moyens de guerre moderne rend injuste la cause la plus juste, puisque ceux qui s'y laissent entraîner ne peuvent faire autrement que de descendre au même niveau de violence brutale que ceux qu'ils combattent. » « Plus il y a de véritable révolution, moins il y a de violence ; plus il y a de violence, moins il y a de révolution. »
  • 14. Louis Massignon (1883-1962), universitaire et islamologue français. Après une période d’athéisme et d’agnosticisme, se lie d’amitié avec Charles de Foucauld et retrouve la foi de son enfance. Entre aux côtés de Lawrence d’Arabie dans Jérusalem libérée de l’occupation ottomane. Soutient en 1922 une thèse sur le mystique et martyr soufi Mansur al-Hallaj, crucifié à Bagdad en 922. Acteur majeur de l’établissement d’un dialogue entre l’islam et l’Église catholique. S’engage à fond pour la reconnaissance de la Palestine après 1948. Président des ‘Amis de Gandhi’, dénonce pendant la guerre d’Algérie avec Lanza del Vasto, François Mauriac et l’abbé Pierre les exactions de la France envers les Algériens. Gardé à vue une nuit en 1960, à l’âge de 77 ans. “À la limite, nous ne vivons pas ici-bas pour conquérir, mais pour témoigner, et passer à de plus jeunes que nous le témoignage.” L.M. est aussi dans la trombinoscope de la non-violence
  • 15. Friedrich Siegmund-Schultze (1885-1969), théologien protestant allemand. Très engagé dans l’Église luthérienne, devient en 1908 secrétaire du ‘Comité d'Église pour l’amitié entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne’. Lors de la conférence mondiale des églises de Constance en août 1914, cofondateur du Weltbundes für Freundschaftsarbeit der Kirchen (Alliance mondiale pour le travail des Églises en faveur de l’amitié). Après l’accolade et le serment avec le pasteur anglais Henry Hodgkin (1877-1933) de rester amis malgré la guerre, prend la tête de la branche allemande du Versöhnungsbund (Association pour la Réconciliation). En 1920, participe en Suisse à une réunion avec les représen- tants protestants de 23 nations européennes plus l’Amérique, décidés à se réconcilier et à maintenir la paix en réactivant la World Alliance for International Friendship through the Churches (ou Church Peace Union) créée aux USA en 1914. En 1933, participe à la fondation d’un comité international d’aide aux réfugiés juifs allemands, est expulsé par les nazis vers la Suisse avec sa femme et ses 4 enfants. En 1957, devient le premier président de la ‘Centrale pour les droits et la protection des objecteurs de conscience’.
  • 16. Clara Wichmann Clara Meijer-Wichmann (1885-1922), avocate et philosophe germano-néerlandaise, militante anarchiste et féministe, syndicaliste. Docteure en droit. D'origine allemande, vit aux Pays-Bas. Publie (la plupart de ses écrits ont été publiés en hollandais) quantité d'articles sur l'anarchisme, le syndicalisme révolutionnaire, le féminisme, la non- violence, la critique du droit de punir, les droits des enfants, mais aussi des animaux domestiques et la philosophie de l'histoire. En 1917, sa rencontre avec le pasteur antimilitariste Barthélémy de Ligt est décisive dans son cheminement vers la non-violence. Est proba- blement l'une des toutes premières en Europe à utiliser le mot de "non- violence" en rapport avec l'idée de non-violence. Est aussi certainement parmi les penseurs et les militant-e-s de l'anarchie, celle qui a le plus clairement et le plus brillamment établi le lien entre l'anarchisme et la non- violence. Partisane d'un « socialisme éthique », pousse très loin sa réflexion sur la fin et les moyens, sur l'illégitimité de la violence dans le combat révolutionnaire et sur la force de la non-violence qu’elle nomme « vaillance de l’esprit ». Décède à 37 ans, quelques heures après la naissance de son premier enfant. « Nous ne devons pas seulement désapprouver le choix de la violence mais également la croyance en la violence ».
  • 17. Abraham Johannes Muste (1885-1967), né en Hollande, émigre aux États-Unis avec ses parents à l’âge de 6 ans. Études de philosophie, fréquente l'Union Theological Seminary, pasteur de l'Église réformée néerlandaise à Washington et à New-York. Salarié de l’American Civil Liberties Union (ACLU), organisation d’aide juridique qui défend les opposants politiques et pacifistes, puis pasteur chez les Quakers. En 1919, anime une grève de 16 semaines dans une entreprise textile à Lawrence (Massachusetts), permet d’éviter le recours à la violence. Secrétaire du syndicat Amalgamated Textile Workers of America, leader reconnu du mouvement ouvrier américain. Dirige la grève victorieuse de Toledo Auto-Lite en 1934. De 1940 à 1953, directeur exécutif du Fellowship of Reconcilia- tion (FOR, membre de IFOR-MIR), organisation chrétienne œcuménique non-violente. Mène campagne contre l'implication des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale. Forme de futurs dirigeants du Mouvement des droits civiques, dont Bayard Rustin, proche conseiller de Martin Luther King. Membre actif du Congress of Racial Equality (CORE) et de War Resisters League. En 1945, se joint à David Dillinger et Dorothy Day pour fonder le magazine Direct Action. À la fin de sa vie, leader dans le mouvement contre la guerre du Vietnam.
  • 18. Richard Gregg Richard Bartlett Gregg (1885-1974), diplômé de Harvard, puis juriste en entreprise, philosophe états-unien. En 1925, fait un voyage en Inde pour connaître Gandhi. Propose en 1939 un programme non-violent contre la guerre et le fascisme aux États-Unis. Est le premier philosophe social à avoir développé une théorie substantielle sur la résistance par la non-violence au XXe siècle. Cette théorie exercera une influence majeure sur l’activiste des droits civils Bayard Rustin ainsi que sur Martin Luther King Jr. Suite à la rencontre de Gandhi, auteur de la phrase célèbre "Vivre simplement pour que les autres puissent simplement vivre", utilise pour la première fois en 1936 le concept de "simplicité volontaire". Dans les années 1940, s'intéresse à l'écologie et à l'agriculture biologique et passe plusieurs années dans une ferme.
  • 19. Armin Wegner (1886-1978), photographe allemand, poète, docteur en droit, écrivain. Engagé volontaire comme infirmier dans l’armée allemande, est confronté à la détresse des Arméniens dans le désert de Mésopotamie. En 1915, malgré une interdiction formelle, prend des clichés du génocide qui comptent parmi les premières sources photographiques conservées aujourd'hui. Publie en 1919 des textes qu’il a rédigés sur place et adresse au président états-unien Thomas W. Wilson une lettre appelant à la création d’un État arménien. Fonde en 1919 avec Helene Stöcker, Magnus Schwantje et d'autres le Bund der Kriegsdienstgegner (‘Union des objecteurs de conscience’). Proteste contre les persécutions à l'encontre des Juifs dans l'Allemagne hitlérienne. En avril 1933, écrit une lettre ouverte à Hitler pour protester contre la législation antisémite. Arrêté par la Gestapo, incarcéré dans plusieurs prisons et camps de concentration, parvient à s'enfuir en l'Italie.
  • 20. Georges Bernanos (1888-1948), écrivain français. Catholique fervent, monarchiste passionné, rompt ensuite avec Maurras et ‘L’Action Française’ en 1932. Fustige un patriotisme perverti qui humilie l'ennemi allemand dans la défaite, s’engage contre la dictature de Franco en Espagne. Installé au Brésil, soutient la ‘France Libre’ en 1940. Écoeuré par l’épuration. Dans les dernières années de sa vie, dénonce l'inconséquence de l'homme face aux progrès techniques effrénés qu'il ne pourra maîtriser, les perversions du capitalisme industriel, ne cesse de protester contre la bombe atomique et contre « la civilisation de la bombe atomique ». « À un monde de violence et d’injustice, au monde de la bombe atomique, on ne saurait déjà plus rien opposer que la révolte des consciences, du plus grand nombre de consciences possible .» « La barbarie polytechnique menaçante n’a plus devant elle que des consciences. » ../.. Voir aussi G.B. dans le trombinoscope des chercheurs de sens
  • 21. Georges Bernanos « Je pense depuis longtemps que si un jour les méthodes de destruction de plus en plus efficaces finissent par rayer notre espèce de la planète, ce ne sera pas la cruauté qui sera la cause de notre extinction, et moins encore, bien entendu, l'indignation qu'éveille la cruauté, ni même les représailles et la vengeance qu'elle s'attire, mais la docilité, l'absence de responsabilité de l'homme moderne, son acceptation vile et servile du moindre décret public. Les horreurs auxquelles nous avons assisté, les horreurs encore plus abominables auxquelles nous allons maintenant assister, ne signalent pas que les rebelles, les insubordonnés, les réfractaires sont de plus en plus nombreux dans le monde, mais plutôt qu'il y a de plus en plus d'hommes obéissants et dociles. »
  • 22. Toyohiko Kagawa (1888-1960), réformateur japonais, militant chrétien, social et écolo- giste. Fils d'un homme d'affaires et d'une danseuse qui meurent pendant son enfance. Se convertit au christianisme, ce qui lui vaut d’être rejeté par sa famille. Étudie au Tokyo Presbyterian College, puis au Kobe Theological Seminary. Pour épouser la pauvreté, abandonne, le jour de Noël 1909, le séminaire presbytérien pour le sordide quartier de Shenkawa à Osaka, et choisit une maison qu'un assassinat avait rendue maudite. Y agit comme missionnaire, travailleur social et sociologue. De 1914 à 1916, étudie aux États-Unis au Princeton Theological Seminary. En plus de la théologie, y étudie l'embryologie, la génétique, l'anatomie comparée et la paléontologie. Affirme que le christianisme est une éthique d’action et non l’adhésion à des doctrines. En 1916, publie Recherches sur la psychologie des pauvres, où il décrit différents aspects de la pauvreté dans la société. Arrêté en 1921 puis en 1922 pour son rôle dans l'activisme ouvrier pendant les grèves. Aide à organiser les secours à Tokyo suite au grand tremblement de terre de 1923 et lutte pour le suffrage universel masculin en 1925. ../..
  • 23. Toyohiko Kagawa Anime la ‘Fédération japonaise du travail’ ainsi que la ‘Ligue nationale anti-guerre’ en 1928, continue son travail auprès des plus pauvres, préco- nise le suffrage des femmes et appelle à une politique étrangère pacifique. Précurseur de l'agriculture forestière moderne et de la plantation d'arbres fruitiers et de noix sur les terres agricoles, convainc durant les années 1930 les fermiers japonais situés dans les hauteurs que la solution à leur problème d'érosion des sols est de planter de nombreux arbres. La plantation d'arbres fruitiers ou à coques protège le sol, procure de la nourriture aux hommes et du fourrage aux animaux, les trois "dimensions" de son système. Sa théorie économique, exposée dans son livre Économies frater- nelles, préconise l’action coordonnée de l'Église chrétienne, de l'économie sociale et du mouvement pacifiste en une « puissante synthèse de travail » pour fournir une alternative viable au capitalisme, au socialisme d'État et au fascisme. En 1940, demande pardon à la République de Chine pour l'occupation du Japon par la Chine, est de nouveau arrêté pour cet acte. Parfois appelé "le Gandhi du Japon" ou "le St François japonais", auteur de plus de 150 livres, nominé pour le prix Nobel de littérature en 1947 et 1948, et pour le prix Nobel de la paix en 1954 et 1955.
  • 24. Carl von Ossietzky (1889-1938), journaliste, écrivain et intellectuel pacifiste allemand. allemand. Fondateur de la ‘Ligue des droits de l’homme’ dans son pays, élu au comité directeur de la Deutsche Friedensgesellschaft (Association allemande pour la paix) Militant anti-nazi, publie en 1929 un article sur les centres d’essais clandestins de l’aviation militaire allemande. En tant qu'éditeur du magazine Die Weltbühne (La scène mondiale), est condamné en 1931 avec l'ingénieur aéronautique Walter Kreiser à 18 mois de prison pour haute trahison, pour avoir publié des informations sur le réarmement clandestin de l'Allemagne. Libéré en déc. 132, réincarcéré en fév. 1933 à la prison de Spandau suite à l’arrivée au pouvoir de Hitler. Prix Nobel de la Paix en 1935, mais le gouverne- ment nazi lui interdit de se rendre en Norvège. Mort des suites de sa détention. Le 11 juillet 1991, la Cour d’appel de Berlin refuse la révision du procès demandée par sa famille. L’arrêt est signé du juge Egbert Weiss, le même qui, en 1968, avait acquitté un membre du « tribunal populaire" nazi responsable en 1944 de 231 condamnations à mort…
  • 25. Jamnalal Bajaj (1889-1942), industriel et philanthrope indien. À sa majorité, sous la tutelle de Seth Bachhraj, s’implique dans l'entreprise familiale de sa famille adoptive, acquiert les compétences d’un chef d’entreprise (commerce, gestion, management). Après la mort de Seth Bachhraj, fonde en 1926 ce qui va devenir le groupe d'industries Bajaj : le groupe compte aujourd'hui 24 sociétés, dont 6 sont cotées en Bourse. Renonce au titre de Rai Bahadur que lui confère le gouvernement britannique et rejoint le mouvement gandhien de non-coopération en 1921. En 1923, défie une interdiction de faire flotter le drapeau du mouvement Satyagraha à Nagpur, est détenu par les Britanniques. Enthousiasmé par la vie menée par Gandhi à l'ashram de Sabarmati, proche du Mahatma, qui déclare à plusieurs reprises que Jamnalal est son cinquième fils. Crée en 1923 le Gandhi Seva Sangha (photo du haut) pour promouvoir les idées et les programmes de Gandhi. Membre du Comité de travail de l’Indian National Congress et trésorier du parti en 1933. Le ‘prix Jamnalal Bajaj’, créé en 1978 par la Fondation Jamnalal Bajaj, est décerné chaque année à l'occasion de l’anniversaire de sa naissance. ../..
  • 26. Jamnalal Bajaj et les prix décernés par sa Fondation Les divers prix (Awards) décernés chaque année par la Fondation Jamnanal Bajaj sont : - le prix ​​Jamnalal Bajaj pour le travail constructif en Inde selon les valeurs gandhiennes, - le prix ​​Jamnalal Bajaj pour l'application de la science et de la technologie au développement rural, - le prix ​​Jamnalal Bajaj pour le développement et le bien-être des femmes et des enfants, - le prix Jamnalal Bajaj pour la promotion des valeurs gandhiennes en dehors de l’Inde (depuis 1988).* * Le Jamnalal Bajaj Award for Promoting Gandhian Values Outside India est décerné à Pierre Parodi (France, 1988), Danilo Dolci (Sicile-Italie, 1989), A.T. Ariyaratne (Sri-Lanka, 1990), Charles Walker (États-Unis, 1991), Homer A. Jack (États-Unis, 1992), Johan Galtung (Norvège, 1993), Gedong Bagoes Oka (Bali-Indonésie, 1994), Srimati Kamala (États-Unis, 1995), Adolfo de Obieta (Argentine, 1996), Young Seek Choue (Corée du Sud,1997), Jharna Dhara Chowdhury (Bangladesh, 1998), Joseph Rotblat (États-Unis,1999), Desmond Tutu (Afrique du Sud, 2000), Satish Kumar (Grande-Bretagne, 2001), George W. Willoughby (États- Unis, 2002), Mary King (États-Unis, 2003), Marie Thoeger (Danemark, 2004), Daisaku Ikeda (Japon, 2005), Ismail Serageldin (Égypte, 2006), Michael Nagler (États-Unis, 2007), Louis Campana (France, 2008), Charles Peter Dougherty (2009), Lia Diskin (Brésil, 2010), Agus Indra Udayana (Indonésie, 2011), Glenn D. Paige (États-Unis, 2012), Jean-Marie Muller (France, 2013), Sulak Sivaraksa (Thaïlande, 2014), Minoru Kasai (Japon, 2015), Cheikh Rached Ghannouchi (Tunisie, 2016), Ziad Medouk (Palestine-Gaza, 2017), Clayborne Carson (États-Unis, 2018), Sonia Deotto (Inde et Mexique, 2019), David H. Albert (États-Unis, 2021), Ogarit Younan et Walid Slaybi (Liban, 2022)
  • 27. Bhimrao Ramji Ambedkar (1891-1956, surnommé Babasaheb Ambedkar), juriste et homme politique indien, originaire du groupe des Intouchables mahars. Doctorat d'économie à la Columbia University, aux États-Unis. En désaccord avec Gandhi sur la question d'une assemblée séparée pour les Dalits ou Intouchables et sur le principe d'une loi électorale de discrimination positive les favorisant. Pour faire valoir les droits des Intouchables, lance des mouve- ments de désobéissance civile, consistant notamment à leur permettre de rentrer dans des temples ou boire de l'eau dans les fontaines, ce qui leur est interdit par les Brahmanes. Ministre de la Justice dans le premier gouvernement de l'Inde indépendante, chargé par Nehru de rédiger la constitution du pays. Convaincu que l‘Intouchabilité, liée au système des castes, est consubstantielle à l'hindouisme, organise, peu avant son décès, la première conversion en masse de ses compagnons au bouddhisme en présence de 380 000 intouchables rassemblés à Nagpur. Rédige 22 vœux à prononcer par les convertis.
  • 28. Martin Niemöller (1892-1984), pasteur luthérien et théologien allemand. Officier sous-marinier pendant la 1ère Guerre mondiale, torpille en 1917 un navire de transport* et en 1918 trois navires alliés. Ordonné pasteur en 1924. En 1933, appelle les pasteurs hostiles aux mesures antisémites à s'unir au sein d'une nouvelle organisation, le Pfarrernotbund, ("Alliance d’urgence des pasteurs") respectueuse des principes de tolérance énoncés par la Bible. À la fin de l'année 1933, 6 000 pasteurs, soit plus d’1/3 des pasteurs protestants, ont rejoint ce groupe dissident. Déchu de ses fonctions de pasteur en novembre 1933. En automne 1934, rejoint Karl Barth, Dietrich Bonhoeffer, etc. pour fonder ‘l'Église confessante’ (Bekennende Kirche), groupe protestant opposé à l’idéologie nazie. * « Ce 25 janvier 1917 a marqué un point de non-retour dans ma vie, car il m'a ouvert les yeux sur l'impossibilité absolue d'un univers moral. » Photos : - Niemöller en officier sous-marinier - Évêques catholiques lors d’une rencontre de jeunes organisée par le parti nazi au stade de Berlin-Neukölln en août 1933 ../..
  • 29. Martin Niemöller Arrêté en 1937, envoyé au camp de concentration de Sachsenhausen, puis de Dachau et du Sud Tyrol. Libéré par les Américains en juin 1945 après une grève de la faim de 44 jours, se consacre à la reconstruction de l'Église protestante d'Allemagne. Prêche que toute renaissance allemande exige au préalable que les Allemands reconnaissent leur culpabilité. Président en 1961 du Conseil Œcuménique des Églises. Milite pour le désarmement nucléaire et contre la guerre du Vietnam. « Lorsqu'ils sont venus chercher les communistes, je n'ai rien dit, je n'étais pas communiste. Lorsqu'ils sont venus chercher les syndicalistes, je n'ai rien dit, je n'étais pas syndicaliste. Lorsqu'ils sont venus chercher les Juifs, je n'ai rien dit, je n'étais pas Juif. Puis ils sont venus me chercher, et il ne restait plus personne pour protester ». (1942) Carte de membre de la Bekennende Kirche (Église confessante)
  • 30. Joseph Cornelius Kumarappa (1892-1960), économiste indien chrétien, ami et disciple de Gandhi. Études d’économie aux États-Unis. Présenté par l’historien Ramachandra Guha comme "le Gandhi vert", fondateur de l'écologie moderne en Inde. Son ouvrage The economy of permanence : A quest for a social order based on non-violence a été écrit en prison pendant le mouvement Quit India. Identifie cinq types d’économies de nature différente : parasitaire, prédatrice, d’entreprise, grégaire et de service. L’économie de service est la plus haute forme d’économie. Selon lui, l’économie actuelle, dominée par sa quête infinie de croissance, génératrice de dégradation de l’environnement et de troubles sociaux, est transitoire et sans avenir. ../..
  • 31. Joseph Cornelius Kumarappa Voyage en Chine, en Europe orientale et au Japon et étudie les systèmes économiques ruraux. Cofondateur en 1935 de la All India Village Industries Association. Le Kumarappa Institute of Gram Swaraj ou KIGS (‘Institut Kumarappa pour l’autonomie des villages’) est créé après sa mort, en 1967, à Jaïpur. Il élabore et fait évoluer des méthodes pour un développement autonome et équilibré. Il vise particulièrement les femmes, les Intouchables et les populations tribales, les paysans pauvres et marginalisés. Les projets de micro-développement reposent sur les besoins basiques des populations (agriculture et élevage, artisanat, énergie, adduction d’eau, petite industrie, hygiène) et la création de conseils de villages.
  • 32. Mahadev Desai (1892-1942), militant indien pendant dans le mouvement pour l'indépendance de l'Inde. Est jeune avocat à Ahmedabad quand il décide de rejoindre Gandhi avec Narhari Parikh, Mohanlal Pandya et Ravi Shankar Vyas. Secrétaire dévoué de Gandhi pendant plus de 25 années, de 1917 à sa mort en 1942. En 1920, Motilal Nehru, père de Jawaharlal Nehru, demande à Gandhi les services de Mahadev pour éditer le quotidien d'Allahabad, Independant. Mahadev sort un journal manuscrit polycopié, car les machines à écrire et le matériel d’imprimerie a été confisqué par les Anglais. Condamné à un an de prison ferme pour ses écrits. En prison, constate que les autorités pénitentiaires maltraitent les prisonniers, les flagellant fréquemment. Son rapport décrivant la vie à l'intérieur d'une prison indienne, publié dans Young India et Navajivan, force les britanniques à réformer drastiquement le système pénitentiaire. Arrêté à nouveau avec le Mahatma pendant l'ensemble des campagnes non-violentes. Auteur de plusieurs livres sur les luttes sociales des Indiens contre le colonisateur britannique, et d'un journal intime Jour après jour, en 9 volumes, sur son activité avec le Mahatma. Contribue aussi régulièrement à Young India et Navajivan, deux journaux dont Gandhi est rédacteur en chef. Pendant l'incarcération de Gandhi, Mahadev prend son relais à la direction du Navajivan.
  • 33. Madeleine Slade (1892-1982), militante britannique de la non-violence, plus connue ensuite sous le nom de Mirabehn ou Meera Behn. Passionnée de Beethoven, lit les ouvrages de Romain Rolland sur le musicien, puis rencontre l’auteur, qui lui parle alors de Gandhi. Écrit au Mahatma pour lui demander si elle peut devenir sa disciple et vivre avec lui à l'ashram de Sabarmati. Arrive en Inde en nov. 1925, y passe 34 ans, participe aux luttes gandhiennes. Accompagne Gandhi et d'autres à la conférence de la table ronde à Londres en 1931, rend visite avec lui à Romain Rolland en Suisse. Après la reprise du mouvement de non-coopération, est empri- sonnée en 1932-1933. Se rend à l'étranger pour rencontrer David Lloyd George, le général Smuts et Winston Churchill, Eleanore Roosevelt. Participe à la création de l'ashram de Sevagram. Arrêtée et détenue avec Gandhi au palais de l'Aga Khan, à Puna, d'août 1942 à mai 1944. Après l'indépendance, fonde des ashram, où elle se lance dans des expériences laitières et agricoles, passe aussi un certain temps au Cachemire. Revient en Angleterre en 1959, déménage en Autriche en 1960 et passe 22 ans dans des petits villages du massif du Wienewald.
  • 34. Abdul Ghaffar Khan (1892-1988). Personnage central de la vie politique en Inde, puis au Pakistan. Chef d’une peuple de tradition guerrière, les Patchouns, présents en Afghanistan et au Pakistan. Connu comme Badshah Khan, « Le roi des chefs », ou « le Gandhi de la frontière ». Un des plus proches compagnons de Gandhi dès 1919, probablement le plus précieux pour réunir Musulmans et Hindous dans les campagnes de non-coopération. En 1929, fonde le Khudai Khidmatgar (litt. ‘Serviteurs de Dieu’), mouvement de résistance anti- coloniale non-violent qui rassemble jusqu'à 100 000 satyagrahis, hommes et femmes et fait respecter sa charte. À son exemple, des milliers de guerriers acceptent d’abandonner le fusil pour la chemise rouge, signe distinctif de son armée pacifique. Les "soldats non- violents" prêtent serment, portent des galons, ont un drapeau, une fanfare, évoluent dans les grades, marchent en rythme entre les collines et les montagnes en chantant leur ‘Hymne de la non- violence’. ../..
  • 35. Abdul Ghaffar Khan L’organisation subit de la part des Britanniques l'une des répressions les plus sévères de tout le mouvement d'indépendance indien : les colonisateurs pensent à juste titre qu’un Pachtoun non- violent est plus dangereux pour le système colonial qu’un Pachtoun violent. Se préoccupe en fait moins de l’oppression britannique que de la violence qui hante le Pachtoun et l’esprit de vengeance qui l’habite. « La non-violence est devenue un remède à tout mal qui habite mon entourage. » Subit 15 années d’emprisonnement par les colonisateurs anglais. Opposé à la partition souhaitée par la ‘Ligue musulmane’ de Muhammad Ali Jinnah. Choisit de vivre au Pakistan, où il continue à se battre pour les droits bafoués de la minorité pachtoune et pour un Pushtunistan autonome. Subit au Pakistan 16 nouvelles années d’incarcération entre 1947 et 1976. Se réfugie en 1976 en Afghanistan, mais l’occupation soviétique ne lui permet pas de repos. Mort en résidence surveillée. « Je suis né soldat et je mourrai soldat »
  • 36. Stephen King Hall (1893-1966), Britannique, officier de marine pendant 20 années de sa vie. Contre-torpillage des sous-marins allemands pendant la 1ère Guerre mondiale. Siège à la Chambre des Communes de 1939 à 1945. Auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont 3 de stratégie. Dans son ouvrage Defence in the nuclear age (1959), estime que l’arme nucléaire ouvre une ère nouvelle, et qu’il faut repenser totalement la défense. Critique la stratégie de dissuasion nucléaire, préconise un désarmement unilatéral de son pays et un système de résistance civile non-violente. « Il ne faut pas assimiler l’aspect psychologique de notre défense civile à de la résistance passive, mais le penser plutôt en tant que véritable offensive lancée contre les esprits des forces d’occupation. »
  • 37. Basil Liddell Hart (1895-1970), historien anglais, théoricien de la pensée militaire, considéré par Raymond Aron comme "le plus grand écrivain militaire de notre temps". Blessé 2 fois en 1916-1917. Quitte l'armée en 1927 et travaille comme spécialiste des questions militaires pour le Daily Telegraph et le Times. Développe sa théorie de l'approche indirecte, qui privilégie le harcèlement des lignes de ravitaillement et le contournement plutôt qu'une attaque frontale des positions ennemies. Après la 2ème Guerre mondiale, peut interroger, pendant leur captivité, plus de 100 généraux ou officiers allemands qui avaient commandé des troupes d’occupation en Europe, sur les diverses formes de résistance qu’ils avaient rencontrées. ../..
  • 38. Basil Liddell Hart En 1967, apporte à un ouvrage collectif dirigé par Adam Roberts une contribution essentielle : "Les déclarations de ces généraux révélaient l'efficacité de la résistance non-violente.(...) D'après leur propres déclarations, ils avaient été incapables d'y faire face. Ils étaient experts en violence, et avaient été entraînés à affronter des adversaires qui employaient des méthodes violentes. Mais d'autres formes de résistance les déconcertaient, et cela d'autant plus que les moyens employés étaient subtils et secrets. lls étaient soulagés quand la résistance devenait violente et quand, aux méthodes non-violentes, venaient se joindre des actions de guérilla. Car il était plus facile d'appliquer des mesures sévères de répression contre les deux formes de résistance à la fois."
  • 39. Acharya Vinoba Bhave (1895-1982). Militant indien, fils d'une pieuse famille de brahmanes, un des proches et des héritiers de Gandhi, soucieux de mettre en place une société fondée sur le sarvodaya (bien-être de tous, promotion des plus pauvres). Crée en 1951 le mouvement Boodhan ("don de la terre") qui organise la redistribution des terres entre riches et pauvres. À la suite de marches et d’exhortations dans les villages, 5 millions d’hectares de terre sont donnés aux plus pauvres. Crée en 1952 le mouvement Gramdan ("don du village") qui organise les villages au niveau économique (coopérative), politique (conseil de village) et culturel. Décide de décéder selon les règles de la mort par inanition, se privant de nourriture pendant de nombreux jours, à l'âge de 87 ans, suivant une pratique sacrée commune aux ascètes hindous et jaïns, auto-sacrifice couronnant une vie pieuse en Inde.
  • 40. Morarji Desai (1896-1995), homme politique indien. Participe au mouvement de désobéissance civile contre les Britanniques pendant la lutte pour l'indépendance, passe près de 10 ans en prison. Devient un membre influent du parti du Congrès au sein de son État du Gujerat. Ses idées politiques sont un mélange de libéralisme et d'idéaux gandhiens. Prêche la vie simple, porte le vêtement en textile naturel qu'il tisse lui-même à la main (le khadi), suit un régime strictement végétarien. Ministre entre 1956 et 1963. Candidat malheureux face à Indira Gandhi (fille de Nehru) en janvier 1966, devient néanmoins l'année suivante son vice-Premier ministre, entre en conflit avec elle. Réélu député en 1971, il rejoint le mouvement de protestation de J.P. Narayan. Est arrêté lors de la proclamation de l'état d'urgence en 1975 par Indira Gandhi. Relâché en janvier 1977, est membre avec le Congrès de la coalition du Janata Party lors du retour des élections libres. Premier ministre de l'Union indienne de mars 1977 à 15 juillet 1979, dirige le premier gouvernement non congressiste de l'histoire de l'Inde et succède à Indira Gandhi après la fin de l'état d'urgence.
  • 41. Dorothy Day (1897-1980), journaliste et militante états-unienne. Dès 1917, demande que les femmes incarcérées à la suite d’actions en faveur du suffrage féminin aient le statut de prisonnières politiques. Arrêtée à son tour, fait une grève de la faim de 10 jours dans sa prison. En 1933, crée avec Peter Maurin le Catholic Worker Movement, qui rassemble les aspirations du christianisme social, du radicalisme militant et de l’anarchisme non-violent, promeut l’aide mutuelle directe, la solidarité avec les plus pauvres. Plaide avec force pour le droit à l’objection de conscience, contre la guerre du Vietnam et les essais nucléaires. Invite ses concitoyens à la non-coopération et au refus de l’impôt. À 75 ans, passe 12 jours en prison pour avoir participé à un piquet de boycott avec Cesar Chavez et les Farm-Workers.
  • 42. Otto et Elise Hampel O. H. (1897-1943), ouvrier d'usine allemand. Épouse en 1935 Elise Lemme (1903-1943), domestique. Après avoir appris que le frère d’Elise a été tué sur le front en France en 1940, encouragent la résistance contre le Troisième Reich. De septembre 1940 à leur arrestation à l'automne 1942, écrivent plus de 230 cartes postales, les déposent dans les boîtes aux lettres, dans les cages d' escalier. Les cartes incitent les Allemands à refuser de coopérer avec les nazis, à s'abstenir de donner de l'argent, à refuser le service militaire et à renverser Hitler. Bien que beaucoup de cartes aient été immédiate- ment portées à la Gestapo, ne sont identifiés qu’au bout de 2 ans. Jugés coupables de ‟haute trahison”, décapités le 8 avril 1943 à la prison de Plötzensee à Berlin. « Que sommes-nous devenus ? Un troupeau de moutons ! Nous devons nous libérer des nos chaînes, sinon il sera trop tard ! »
  • 43. Albert Luthuli (1897-1867). Homme politique sud-africain, professeur de littérature zoulou, puis chef de tribu. Devint en 1952 président de l’African National Congress, organisation qui avait adopté une stratégie non-violente depuis sa fondation en 1912. Emprisonné une année, en 1956. Boycott des autobus en 1957, grève générale en 1958, longue lutte après 1959 contre le port obligatoire d’un pass (laisser passer). Prix Nobel de la paix en 1960, année du massacre de Sharpeville par la police (68 morts, 118 blessés). Écrasé "accidentellement" ? par un train en 1967. « Le boycott économique de l’Afrique du Sud entraînera sans aucun doute une période d’épreuves pour nous. Mais si cette méthode doit abréger le temps du massacre, notre souffrance est un prix que nous sommes disposés à payer. »
  • 44. Henri Roser (1899-1981), pasteur protestant français. En janvier 1923, tandis que l’armée française occupe la Ruhr, renvoie ses papiers militaires au nom de l'Évangile. Révoqué de sa charge d'officier, se déclare objecteur de conscience. En 1925, année de son mariage, devient secrétaire du ‘Mouvement International de la Réconciliation’ (MIR) pour la France, puis pour l'Europe. En 1939, opposé à la guerre, condamné à 4 ans de prison pour refus d'obéissance et insoumission, en sort après la défaite 1940. Sauvetage d’enfants juifs d’Aubervilliers, contact avec les émissaires du général de Gaulle. Prend position contre la répression à Madagascar en 1947, contre la guerre d’Indochine, contre la guerre d’Algérie et la torture, contre le réarmement de l’Europe et les essais nucléaires. Préside pendant 25 ans La Croix Bleue, une association nationale consacrée à l’aide et à la guérison des alcooliques.
  • 45. Howard Thurman (1899-1981), pasteur baptiste, philosophe, théologien, enseignant états-unien, auteur de 21 livres. Le premier Afro-étatsunien à rencontrer Gandhi en février 1936 à Bartoli, près de Bombay. Dès cette époque, tente de traduire, en pensée et en actes, la philosophie du Satyagraha dans le contexte du christianisme noir étatsunien. Premier afro-étatsunien à occuper la charge de doyen de l'univer- sité de Boston (pendant plus de deux décennies). Condisciple et ami du père de Martin Luther Jr. Sa théologie marque énormément le futur leader de la lutte non-violente pour les droits civiques.. Contribue en 1944 à fonder à San Francisco, avec l’International Fellowship of Reconciliation (IFOR-MIR), la première communauté ecclésiale multiraciale et multiculturelle des États-Unis, la Church for the Fellowship of All Peoples . Leader dans la lutte pour les droits civiques, conseiller et ami des pasteurs Martin Luther King senior et junior. « Ne vous demandez pas ce dont le monde a besoin. Demandez- vous ce qui vous éveille à la vie. Puis faites-le. Car ce dont le monde a besoin, c’est d’êtres qui s’éveillent à la vie. » Cette citation de Howard Thurman est souvent attribuée à tort à un certain Harold Whitman, nom fictif.
  • 46. Aldo Capitini (1899 -1968). Philosophe italien, éducateur, poète, militant politique, emprisonné à 2 reprises pour ses activités anti-fascistes en 1942 et 1943. Maître de conférence en philosophie morale à Pise, et en pédagogie aux universités de Cagliari et Pérouse. Dans le même temps, met en place des Centres d'Orientation Sociale (COS), sortes d'assemblées populaires de discussion et d'autoédu-cation pour contrebalancer le pouvoir central et promouvoir la démocratie. Parfois appelé le "Gandhi italien", car l’un des premiers Italiens à prendre au sérieux et à faire connaître la pensée et l’action de Gandhi. Défend une spiritualité laïque. Dès 1952, propose une vision claire de la non-violence. Fait le choix, très vite, d'écrire le mot "nonviolence" en un seul mot (au lieu du terme "non-violence" retenu en France par ex.) car il considère qu'on doit l'entendre comme une proposition active. ../..
  • 47. Aldo Capitini En 1952, organise une conférence internationale pour la non- violence à Pérouse et crée un ‘Centre international de coordination pour la non-violence’. La même année, tient une autre conférence à Pérouse pour étudier la non-violence à l'égard de la vie végétale et animale. En septembre 1961, initiateur de la ‘Marche pour la paix entre les peuples’ de Pérouse à Assise qui réunit des dizaines de milliers de personnes. Contribue ainsi à la fondation du mouvement non- violent italien en 1962 à travers le "Conseil italien de la paix" dont il est le président jusqu'à sa mort. Fondateur du Movimento Nonviolento et de la revue mensuelle Azione Nonviolenta, auteur de nombreux ouvrages. Propose une définition simple de la nonviolence : « Elle est le choix d'une manière de penser et d'agir qui n'opprime et ne détruit aucun être animé, et surtout aucun être humain ». Cette définition sera souvent reprise en français, notamment par Lanza del Vasto, sous la traduction suivante : « La non-violence est une manière de faire qui résulte d'une manière d'être ».
  • 48. Pie Raymond Régamey (1900-1996), prêtre dominicain français, historien de l'art et écrivain spirituel. Engagement volontaire puis démobilisation en 1919, licence d'histoire et de géographie en 1921. Abandonne ses cours de l‘’École du Louvre’ avant la thèse car devient soutien de famille. Engagé avec le frère Marie-Alain Couturier dans l'aventure de ‘L'Art sacré’ aux ‘Éditions du Cerf’. Rejoint le ‘Comité des Amis de Gandhi’, se lie avec Lanza del Vasto, Danilo Dolci, Jean Goss. S’intéresse au jeûne, à l’objection de conscience, à l’arme atomique. Soutient le combat de l’’Action civique non-violente’ contre la torture en Algérie et les arrestations et détentions arbitraires en France dans les années 1954-1962 : la télévision retransmet l’épisode d’une manifestation où il est ramassé sur le trottoir par les agents de police en 1960. Auteur d’un numéro des ‘Cahiers St Jacques’ sur La conscience chrétienne et la guerre, en 1958 du livre Non-violence et conscience chrétienne et en 1962 des livres Face à la violence : Pour un statut des objecteurs de conscience et Non-violence et objection de conscience. Préfacier du livre de Camille Drevet Gandhi interpelle les chrétiens (1965). Aumônier de congrégations de religieuses après 1957. « Nous sommes certainement à un de ces moments où la conscience chrétienne met en cause des conduites qu’elle considérait jusque là comme normales. »
  • 49. Lanza del Vasto Giuseppe Lanza di Trabia-Branciforte (1901-1981). Écrivain, poète, artiste, philosophe et militant, de père sicilien et de mère flamande. En 1936, passe plusieurs mois près de Gandhi qui l'appelle Shantidas ("serviteur de paix"). En juin 1937, en pèlerinage aux sources du Gange dans l'Himalaya, reçoit une vision qui lui dit « Rentre et fonde ! » En 1954, participe à la campagne de Vinoba Bhave pour la redistribution des terres. Fonde en 1948 en France un ordre spirituel, laborieux et non- violent,’ L’Arche’, dont les grands axes sont : respect de la nature, refondation sociale (autonomie économique maximale), résolution non-violente des conflits, conversion spirituelle, dialogue interreligieux. L’Arche mène des luttes non-violentes (pendant la guerre d’Algérie, contre l’armement nucléaire, aux côtés des paysans du Larzac, contre les OGM, etc.) et s’est développée dans plusieurs pays. ../..
  • 50. Lanza del Vasto Pour lui, dans l’homme, entre sensibilité et intelligence, il y a un équilibre, une harmonie à trouver, grâce à une troisième faculté qui fait leur unité : la volonté. C’est la "trinité spirituelle". Dénonce les "quatre fléaux" de l'humanité contemporaine (guerre, sédition, misère, servitude) qui reposent sur l’avidité. L’asservissement de l’homme à l’économique et à la technique, séparées de la sagesse, se manifeste dans l’abrutissement du travail à la chaîne et culmine dans la bombe atomique. « Les exemples historiques d’action non-violente enseignent que le recours à la violence, douteux en tout temps, aujourd’hui désastreux, est désormais inutile.» «Avec la bombe atomique, la non-violence est la découverte capitale du XXème siècle, l’une répondant à l’autre et obligeant l’humanité à choisir entre la mort et la vie. » ../..
  • 51. Lanza del Vasto « Pensez que ces gens qui préparent la bombe nous parlent de tous les moyens de sécurité qu’ils ont mis en œuvre pour éviter les accidents, et qu’ils n’ont même pas pensé à ce que donnerait un bombardement sur leurs installations ! (…) L’autre année, je me trouvais à New York, à Wall Street, là où il y a toutes les banques, toutes les tours pleines de dollars, de belle tours, hein, luisantes et noires ! Je me disais : une simple bombe arrivant là où j’ai mis les pieds, vous voyez ce que ça donnera ? (…) Naturellement, si nous avons la bombe, nous sommes à l’abri de tout ça ! » (interview en 1978) « Moi, je vois le jour où les non-violents devront cacher les techniciens, les ingénieurs et les savants que le peuple accusera de nous avoir mis dans des catastrophes, s’apercevant enfin d’où viennent les périls mortels. »
  • 52. Lanza del Vasto « Regardez le laboureur penché et songez aux grappes humaines pendues à ses membres, à la pyramide bâtie sur son échine : car il laboure pour le marchand, le gendarme, pour le contrôleur, pour le percepteur, pour le soldat, pour le gratte-papier, pour le banquier, pour celui qui tourne des discours et pour celle qui vend son corps, pour celui qui avale des petits fours et débite des fadaises de salons, pour le filou et le ministre, pour la danseuse et pour le président; il porte leurs châteaux, leurs hôtels, leurs casinos, leurs laquais, leurs espions et leurs officiers, leurs trains et leurs canons. »
  • 53. André et Magda Trocmé (1901-1971), Pasteur français et théologien protestant, un des fondateurs du ‘Collège Cévenol’. Affecté en 1934 au village du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire). Pendant la 2ème guerre mondiale, appelle la population à la résistance active sans violence et l’organise à sa mesure. Avec son épouse Magda, la communauté protestante, le Service Civil International (SCI), l’Armée du Salut, les Quakers, la CIMADE, etc., fait du Chambon une cité d’accueil et de sauvegarde de réfugiés juifs, allemands anti-nazis, français échappant au STO : recherche de fonds, fabrication de faux papiers, réseau d’alerte, mise au point de filières d’évasion, ouverture d’une école. On estime à 5 000 le nombre de Juifs sauvés. ../..
  • 54. André Trocmé Après la guerre, secrétaire itinérant du ‘Mouvement international de la Réconciliation’ (MIR) pour l’Europe. « La non-violence comporte dans la vie de tous les jours un choix entre deux alternatives dont l’une est plus proche que l’autre de l’obéissance à Jésus-Christ. C’est celle qu’il faut adopter coûte que coûte, même si elle est contraire aux exigences de l’État. Aucun gouvernement ne peut nous obliger à tuer. Il faut trouver le moyen de résister au nazisme sans tuer des hommes.» Photos : - André Trocmé - Le film de Jean-Louis Lorenzi (1994) inspiré de l’expérience du Chambon-sur-Lignon
  • 55. Théodore Monod (1902-2000). Philosophe français, naturaliste, professeur et chercheur au ‘Muséum national d’histoire naturelle’. Parcourt à pied les déserts africains à la recherche de météorites, fossiles, squelettes, plantes et minéraux. Recueille, répertorie et analyse plus de 20 000 échantillons. Militant non-violent, prend part aux mouvements contre la guerre d’Algérie, l’apartheid, l’exclusion. Végétarien, engagé contre la corrida, la chasse à courre, la vivisection, l’égorgement à vif des animaux et toutes les formes de maltraitance animale. Théologien de tradition protestante, président de l’’Assemblée Fraternelle des Chrétiens Unitariens’ (AFCU). Membre du ‘Mouvement International de la Réconciliation’ (MIR), estime que l’ "ère chrétienne", ou définie comme telle, s’est achevée le 5 août 1945 avec le bombardement d’Hiroshima. ../..
  • 56. Théodore Monod Jeûne contre l’arme nucléaire chaque année du 6 au 9 août près du PC de déclenchement de l’arme nucléaire de Taverny, près de Paris, avec une pancarte « La préparation d’un crime est un crime ». « Toutes les bombes sont naturellement répréhensibles et doivent être supprimées, mais la bombe atomique, c’est diabolique, inexpiable… » « Le christianisme n’a pas échoué : il n’a pas encore été essayé ! Si l’on appliquait l’Évangile, ce serait une révolution extraordinaire.» Voir aussi T.M. dans le trombinoscope des chercheurs de sens
  • 57. Jayaprakash Narajan (1902-1979), connu sous le nom de "JP" (prononcer JiPi). Militant gandhien et responsable politique indien. Études en Indes et aux États-Unis (Patna; Wisconsin, Iowa, Ohio, Berkeley). En 1932, condamné à un an de prison pour sa participation au mouvement de désobéissance civile contre la domination britan- nique. À sa libération, joue un rôle de premier plan dans la formation du Congress Socialist Party, un groupe de gauche au sein du Con- gress Party, l'organisation mène la campagne pour l'indépendance de l'Inde. De nouveau emprisonné par les Britanniques en 1939 pour son opposition à la participation indienne à la Seconde Guerre mondiale aux côtés de la Grande-Bretagne. Voyant que le Congrès s’écarte des idées de Gandhi dès 1948, fonde le parti socialiste Praja puis s’engage quelques temps aux côtés de Vinoba Bhave dans le mouvement de redistribution des terres. En 1959, plaidé pour une « reconstruction de la politique indienne » au moyen d'une hiérarchie à quatre niveaux de conseils de village, de district, d'État et d'union. ../..
  • 58. Jayaprakash Narajan Alors de Nehru ne reconnaît pas la souveraineté du Tibet ni le gouvernement du Dalaï-lama en exil, entraîne les socialistes du Lok Sabha ("Chambre du peuple") dans un groupe de pression pro-tibétain. Fonde dans les années 1970 les mouvements Citizens for Democracy et Peoples Unions for Civil Liberties. Plaide pour un programme de transformation sociale conforme aux orientations gandhiennes, qu’il appelle sampurna kranti (« révolution totale »), et devient la véritable conscience politique de l’Inde. Lorsqu’ Indira Gandhi décrète l’état d’urgence, organise en juin 1975 une manifestation de 100 000 personnes à Patna. Est emprisonné quelques mois. Fonde ensuite le Janata Party, qui fera chuter Indira Gandhi aux élections de 1977. « Une des conséquences négatives de la révolution violente, c’est que le pouvoir finit par être usurpé le plus souvent par d’anciens révolutionnaires. Ceci est inévitable quand le pouvoir vient des fusils, car les fusils ne sont pas dans les mains des couches moyennes. C’est pourquoi une révolution violente a toujours apporté une dictature d’une espèce ou d’une autre. »
  • 59. Isaac Bashevis Singer (1902-1991), écrivain juif polonais. Pour fuir l'antisémitisme, quitte la Pologne pour les États-Unis en 1935 avec son frère Joshua et devient citoyen américain en 1943. Dans les années 1970, établit des liens entre le comportement humain envers le monde animal et celui des nazis envers les Juifs durant le second conflit mondial, et devient un végétarien militant. Prix Nobel de littérature en 1978. Une femme lui demande s’il évite de manger du poulet "pour des raisons de santé". " - Oui, pour la santé des poulets !" « Tout ce que les nazis ont fait aux Juifs, nous le pratiquons aujourd’hui sur les animaux. Un jour, nos petits-enfants nous demanderont :« Où étais-tu pendant l’holocauste des animaux ? Qu’as-tu fait contre ces crimes terrifiants ? » « Il n’y a pas de meilleur moyen de servir le créateur que d’être bon pour ses créatures (…) Le végétarisme est ma religion, ma protestation. »
  • 60. Bruno Bettelheim (1903-1990). Psychanalyste et pédagogue états-unien d’origine autrichienne et juive. Directeur pendant 30 ans de l’école d’orthogénie de l’université de Chicago. À la suite de son expérience en camp de concentration, écrit sur les phénomène psychologiques à l’oeuvre entre les prisonniers et leurs tortionnaires. « L’État SS n’aurait jamais pu fonctionner sans la coopération des victimes. Plus spécifiquement, les SS auraient été incapables de tenir les camps sans la collaboration de nombreux prisonniers, en général involontaire, dans certains cas accordée avec répugnance, mais beaucoup trop souvent empressée. (…) Rétrospectivement, il apparaît très clairement que seul un refus total de collaboration de la part des Juifs aurait pu offrir une petite chance de contraindre Hitler à une solution différente.»
  • 61. Matěj Šindelář (1903-1939), footballeur morave, austro-hongrois puis autrichien. Attaquant dans l’équipe nationale d’Autriche. Fait les beaux jours de la Wunderteam autrichienne, une des meilleures équipes du monde. Envahie par l'Allemagne nazie en mars 1938, l'Autriche devient allemande, la Wunderteam n'a plus d'existence légale. Les autorités nazies décident de marquer l'intégration forcée par un match de football amical. Le 3 avril 1938, ce match doit sceller "les retrouvailles" des deux peuples en faisant se rencontrer la Mannschaft allemande et la Wunderteam dans la fraternité du football sous les yeux d'Hitler et des dignitaires nazis. Sindelar marque un premier but à la 70ème minute. Un second but est marqué peu après par le défenseur Karl Szestak. Cette victoire sportive est souvent présentée comme une opposition politique de Sindelar à l'Anschluss, le transformant en un symbole d'opposition au pouvoir nazi. Plusieurs joueurs autrichiens intègrent la Mannschaft, mais Sindelar refuse, prétextant soit son âge avancé, soit une blessure ancienne de 15 ans. Traqué par la Gestapo pendant 8 mois, retrouvé mort sur son lit à Vienne à côté de sa compagne italienne juive, officiellement asphyxiés à la suite d’une intoxication au monoxyde de carbone due à une cheminée défectueuse. Plus de 15 000 personnes accompagnent sa dépouille dans les rues de Vienne, « le premier et le dernier rassemblement de Vienne contre les nazis », selon le journaliste anglo-autrichien Robin Stummer. Matthias Sindelar
  • 62. Éric Weil (1904-1977), philosophe français d’origine allemande et juive, ayant fui le nazisme en 1933. Fonde la revue Critique avec Georges Bataille. Professeur à la faculté de lettres de Lille puis de Nice. Fidèle à la conception kantienne du devoir et de la morale, son œuvre tout entière est fondée sur une réflexion sur la violence et la non-violence, mais « son erreur décisive et de ne pas avoir distingué la force et la violence » (Jean-Marie Muller). « Le philosophe veut que la violence disparaisse du monde. » « La philosophie se réalise et se termine dans l’action. (…) Toute fuite est interdite. » « La non-violence est le point de départ comme le but final de la philosophie. » « Le progrès vers la non-violence définit pour la politique le sens de l’histoire. »
  • 63. Emmanuel Mounier (1905-1950), un des premiers philosophes français à avoir intégré la non-violence dans ses réflexions. Fondateur en 1932 la revue Esprit, qui se présente comme troisième force entre le capitalisme et le marxisme et développe la conception du "personnalisme". Participe pendant la guerre au journal Combat, puis à la réconciliation franco-allemande. Avec son maître spirituel Jacques Maritain, s’intéresse à la philosophie et à l’action politique de Gandhi. Définit la non-violence comme « politique de la vertu de force qui rejette toute alliance avec la peur et la faiblesse », revendique « un droit insurrectionnel non-violent contre les lois injustes. » « Il arrive que l'histoire récompense ceux qui s'obstinent et qu'un rocher bien placé corrige le cours d'un fleuve. » ../..
  • 64. Emmanuel Mounier “La non-violence n’est pas un état de tranquillité que l’on atteint en deçà de la violence, elle est un état de maîtrise et de tension que l’on conquiert par-delà la violence. Seul celui qui est capable de violence, et, par dessus le marché, de réfréner sa violence, est capable de non-violence” Il importe “d’étudier et d’éprouver tout le champ encore inexploré des méthodes non-violentes, sans jamais perdre de vue leur efficacité et en tâchant de rattraper le temps perdu” N’écarte pas la possibilité de la contre-violence, mais “nous aurons auparavant essayé héroïquement tous les moyens non- violents qui sont à notre disposition, et n’accepterons la violence que comme un dernier pis-aller.” «Nous savons lutter contre l’incendie, contre la peste, contre le vol, nous ne savons pas encore lutter à armes égales contre la guerre.»
  • 65. Hannah Arendt (1906-1975). Philosophe, journaliste et militante politique allemande puis états-unienne, issue d’une famille juive. Fuit le régime nazi, connaît l’exil à Paris puis à New-York. Travaille sur les thèmes de la révolution, du totalitarisme, de la culture, de la modernité et de la tradition, de la liberté, de la vie active (travail – œuvre – création). À l’occasion du procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem, analyse ce qui a rendu possible la shoah, l’obéissance servile de fonctionnaires, "la banalité du mal", et aussi la collaboration de certains Conseils juifs. Une de ses affirmations principales est que la violence est impropre à fonder le politique. Dénonce aussi les excès de l’automatisation et de la production de masse, la prédominance de l’économique sur le politique. Dans Du mensonge à la violence (1972), plaide pour que la désobéissance civile à des ordres inhumains ou des lois scélérates soit reconnue comme un droit dans les constitutions des pays démocrati- ques.
  • 66. Dietrich Bonhoeffer (1906-1945), pasteur luthérien évangélique, théologien, écrivain allemand. Assistant à l’université de Berlin, puis une année à New-York, une à Londres. En 1935, rejoint l’’Église confessante’ (Bekennende Kirche), opposée au nazisme, dissoute en 1937. Interdit d’enseigner, dirige un séminaire pastoral clandestin. À Stockholm, donne aux Britanniques des preuves de l’extermination des Juifs et leur demande de l’aide pour éliminer Hitler. Arrêté le 5 avril 1943 sous l'inculpation d’ "affaiblissement du potentiel de guerre de l'Allemagne", emprisonné à la prison militaire de Tegel à Berlin puis à Buchenwald. Condamné à mort par la Cour martiale, comme l'amiral Wilhelm Canaris (1887-1945) et le général Hans Oster (1887-1945), pendu dans le camp de Flossenburg le 9 avril 1945. ../..
  • 67. Dietrich Bonhoeffer « La bêtise est une ennemie du bien plus dangereuse que la méchanceté. On peut protester contre le mal, le mettre à nu, l’empêcher par la force. Nous sommes impuissants contre la bêtise. (…). N’importe quel déploiement de puissance extérieure, politique ou religieuse, frappe de bêtise une grande partie de l’humanité. La puissance des uns a besoin de la bêtise des autres » 1er janvier 1943 « En s’en tenant au seul devoir, on ne court jamais le risque d’une action responsable qui seule peut atteindre le mal en son centre et le vaincre. (…) Une notion fondamentale nous manquait : celle de la nécessité d’une action libre et responsable, même en opposition à la mission et à l’ordre qu’on nous dictait. (…) Le courage civique ne peut naître que de la libre responsa- bilité d’un homme libre. » Photo du bas : Statue de bronze de Bonhoeffer à Hamburg
  • 68. Franz Jägerstätter (1907-1943) Agriculteur et objecteur de conscience autrichien. En 1938, après que les troupes d'Hitler ont pénétré en Autriche, seul de son village à voter contre l'Anschluss. Alors père de trois filles, est appelé au service actif en février 1943. Refuse de combattre pour le IIIème Reich. Emprisonné à Linz, puis à Berlin, condamné à mort par un tribunal militaire, décapité le 9 août 1943 à la prison de Brandenburg. Béatifié par le pape Benoît XVI à la cathédrale de Linz le 26 octobre 2007, jour de la fête nationale autrichienne. « Si Dieu ne m'avait pas accordé sa grâce et la force de mourir, si nécessaire, pour défendre ma foi, je ferais peut-être simplement ce que fait la majorité des gens ». Photo du bas : Plaque à son hommage à Berlin
  • 69. Jacques de Bollardière (1907-1986). Général français. Campagne de Norvège. Condamné à mort par un tribunal militaire du régime de Vichy. Batailles en Égypte, en Érythrée, en Lybie, dans maquis des Ardennes, en Hollande. Compagnon de la Libération. En Indochine, prend conscience qu’il participe à une guerre coloniale. Colonel pendant la guerre d’Algérie, créé une ‘Section adminis- trative spéciale’ (SAS) pour remplacer dans les zones inaccessibles une administration défaillante, met sur pied des "commandos noirs", formés de 7 ou 8 volontaires qui partagent la vie des populations. En opposition avec le général Jacques Massu, s’oppose à la torture. Condamné à 60 jours de forteresse pour avoir confirmé les récits de Jean-Jacques Servan-Schreiber sur la torture dans L’Express. Démissionne de l’armée après le putsch des généraux. Cadre d’entreprise et animateur social en Bretagne. ../..
  • 70. Jacques de Bollardière Découvre la non-violence en 1970 lors d’une conférence de Jean-Marie Muller où l’emmène son épouse Simone. Manifeste à Mururoa son opposition aux essais nucléaires français en 1973, renvoie sa plaque de Grand Officier de la Légion d’Honneur. Co-fondateur du ‘Mouvement pour une Alternative Non-violente’ (MAN) en 1974. Préconise une défense civile non-violente, soutient les paysans du Larzac menacés d’expropriation par l’armée, s’investit dans les luttes écologiques. Rongé par le cancer, défend au tribunal en 1985 Jean-Louis Cahu, officier de tir de missiles nucléaires déserteur du plateau d’Albion. « Je suis scandalisé que ces méthodes (de résistance civile non- violente) ne soient pas ouvertement exposées dans les différentes instances où s’élabore la pensée militaire française. » Photo du bas : Inauguration du carrefour Général Jacques Pâris de Bollardière à Paris par Bertrand Delanoé, Maire, en présence de Simone de Bollardière
  • 71. Piotr Grigorenko (1907-1987), Ukrainien, vétéran de la 2ème guerre mondiale, général de division dans l’armée soviétique. En 1961, critique la politique de Khrouchtchev, est muté à titre de punition dans l’extrême Est du pays. Devient membre du Helsinki Watch Group à Moscou . Condamné à l’emprisonnement psychiatrique en 1964-1965, déchu de ses grade militaire, médailles, et prestations de retraite. Figure de proue dans le mouvement de défense des droits de l'homme. Arrêté en mai 1969 et interné pendant cinq ans pour "schizophrénie paranoïde" à l'hôpital de la prison de Chernyakhovsk. En 1977, après un traitement médical aux États-Unis, est déchu de la nationalité soviétique. « Les convictions ne sont pas comme des gants, on ne peut pas facilement les retourner ».
  • 72. Jean Lasserre (1908-1983), Français, pasteur de l’Église réformée de France. Lors de ses études de théologie à New York, rencontre et influence Dietrich Bonhoeffer. Pasteur dans diverses villes de 1953-1961, puis secrétaire itinérant du ‘Mouvement international de la réconciliation’, et rédacteur de son journal Les Cahiers de la réconciliation durant de nombreuses années. Milite contre l'alcoolisme, la prostitution, le racisme. Participe à de très nombreuses actions non-violentes, fait partie de l'équipe recevant Martin Luther King à Lyon en 1966. Anime de nombreux groupes et donne des conférences dans les pays francophones (France, Belgique, Suisse) sur les thèmes lui tenant à cœur : déshonorer la guerre, la violence et l'exploitation sous toutes les formes, favoriser l'objection de conscience et la non- violence évangélique active, l'entraide et la solidarité.
  • 73. Mahmoud Muhammad Taha (1908-1985), ingénieur hydraulicien, parfois surnommé "le Gandhi soudanais". Condamné à deux ans de prison en 1946 pour s’être opposé aux Anglais durant la colonisation du Soudan. Crée des communautés d’homme et de femmes, ‘Les Frères républicains’, sous le signe du partage des biens, de la prière, de la réflexion, du débat d’idées. Propose d’abandonner la charia du Mahomet de Médine (guerre contre les infidèles) pour établir la vraie charia de la Mecque (combat non-violent contre l’égoïsme et la violence). Affirme que la constitution soudanaise doit être réformée pour réconcilier « le besoin individuel de liberté absolue et le besoin commun de justice sociale totale ». Condamné dès 1968 comme hérétique par les responsables religieux. S’oppose au général Gaafar Nimeiry après la promulgation d’un code pénal conforme à la charia. Condamné à mort pour « hérésie, opposition à l’application de la loi islamique, trouble à la sécurité publi- que, incitation à s’opposer au gouvernement, et reconstitution d’un parti politique interdit.» Pendu en janvier 1985 dans sa prison à Khartoum.
  • 74. Simone Weil (1909-1943), philosophe et écrivaine française née dans une famille juive mais agnostique. ‘École Normale Supérieure’, agrégée de philosophie puis ouvrière à la chaîne. Résistante au franquisme et au nazisme. Séjour aux États-Unis. Rédactrice dans les services de ‘La France Libre’ à Londres en 1942 . Dénonce la violence dans le système industriel, dans les mécanismes de la vie collective (partis politiques, système pénal, etc.), dans le nationalisme et le miltarisme, et même dans les luttes de libération. Son expérience de la guerre civile espagnole lui montre la perversité de l’utilisation de moyens en contradiction avec la fin recherchée. S’indigne surtout de la collusion du christianisme avec la violence, au point de refuser le baptême après sa conversion. ../..
  • 75. Simone Weil Qu’on exerce la violence ou qu’on la subisse, « de toutes manière son contact pétrifie et transforme un homme en chose. » « Frapper ou être frappé, c’est une seule et même souillure. Le froid de l’acier est pareillement mortel à la poignée et à la pointe. » Nous tuons « pour nous venger d’être mortels. » « S’efforcer de devenir tel qu’on puisse être non-violent .(…) S'efforcer de substituer de plus en plus, dans le monde, la non-violence efficace à la violence." « L’amour fait la guerre aussi bien que la paix. Amour va à la guerre plus naturellement qu’à la paix, par ce fanatisme qui fonde la tyrannie (…) La paix ne sera pas fondée par l’amour, mais par la pensée. » « La plénitude de l'amour du prochain, c'est simplement d'être capable de lui demander : "Quel est ton tourment ?" » « La religion en tant que source de consolation est un obstacle à la véritable foi, et en ce sens l'athéisme est une purification.» S.W. figure aussi dans le trombinoscope de la non-violence
  • 76. Saul Alinsky (1909 -1972). Sociologue, homme d’action et stratège états- unien, fils de parents juifs immigrés de Russie. Se consacre à l’organisation des habitants dans les quartiers les plus pauvres de Chicago, puis dans diverses régions des États- Unis. Père du Community organizing, précurseur des méthodes d’empowerment (confiance en soi), processus qui permet à chacun de prendre conscience de ses problèmes et lui donne accès aux instruments qui permettent de faire des choix, d’avoir une conscience politique et d’agir. Son manuel d’action non-violente apprend à affaiblir l’adversaire en désorganisant son pouvoir pour le conduire à la négociation, dans la démocratie et dans le pragmatisme. « Il faut être politiquement insensé pour dire que le pouvoir est au bout du fusil quand c’est l’adversaire qui possède tous les fusils. » ../..
  • 77. Saul Alinsky Quelques règles d’or d’Alinsky dans l’éducation, le travail social, la politique de la ville : - Le point de départ est le système, la réalité ; - La boussole de toute action est la dignité humaine. « Ne demande pas tes droits, prends-les ! » ; - Ne jamais faire à la place de quelqu’un ce qu’il peut faire lui-même ; - Processus et objectif sont indissociables ; - Imagination, créativité, humour, solidarité, alliances ponctuelles. Agir pour le plaisir d’être ensemble, pour mener sa vie, pas pour voir l’adversaire à terre. Fêter les victoires. « S’il y a un au-delà, j’irai en enfer, mais en arrivant, je commencerai à organiser les plus démunis que je trouverai ! Ce sont mes frères !»
  • 78. Helder Camara (1909-1999). Brésilien, évêque catholique d’Olinda et Recife de 1964 à 1985. Quitte son palais épiscopal et s’installe dans une modeste maison au cœur d’un bidonville. Défenseur des droits humains, figure de la ‘théologie de la libération’, s’engage au côté des plus pauvres. Marginalisé dans l’épiscopat brésilien et opposant à la dictature des généraux entre 1964 et 1985, fait une tournée de conférences en Europe, dénonce la torture, la dictature, la misère, la guerre du Vietnam, les ventes d’armes. Se référant à Gandhi et à Martin Luther King, met en place une pastorale dirigée vers le service des pauvres, souhaite que les prêtres soient formés à l’action sociale comme à la théologie. Don H.C. figure aussi dans le trombinoscope des spirituels ../..
  • 79. Dom Helder Camara Son successeur nommé par Jean-Paul II, Jose Cardoso Sobrinho, fera table rase de toute l’action de son prédécesseur. « Quand je donne à manger aux pauvres, on m’appelle un saint. Quand je demande pourquoi il y a des pauvres, on me traite de communiste » « Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations.La seconde est la violence révolutionnaire qui naît de la volonté d’abolir la première. La troisième est la violence répressive qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres. Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. » ../..
  • 80. Dom Helder Camara La violence institutionnelle est « celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’êtres humains dans ses rouages silencieux et bien huilés. » « Les religions doivent dialoguer et marcher ensemble pour être la conscience éthique de l'humanité et le cri pacifique des pauvres. » « Être une simple flaque d'eau reflétant le ciel. » Photos du bas : avec l’abbé Pierre avec Desmond Tutu
  • 81. Kwame Nkrumah (1909-1972), homme politique indépendantiste et panafrica- niste ghanéen (ex-Côte de l’Or). Études en Angleterre et aux États- Unis. Secrétaire général du parti indépendantiste UGCC (United Gold Coast Convention), qu'il quitte pour fonder un parti de masse, le Convention People's Party (CPP). Appelle au boycott et à la désobéissance civile. Emprisonné par les autorités britanniques jusqu'en 1951. Premier ministre du Ghana indépendant (1957-1960), puis président (1960-1966). Devient dictateur après 1961, s’abîme dans la contemplation de sa grandeur, se fait appeler l’Osagyefo ("le rédempteur"). Proie facile d’un coup d’État militaire, exilé dans la Guinée de son ami Ahmed Sékou Touré (1922-1984), autre dictateur. ■