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1
Compte-rendu
"La co-construction de l'expérience shopping à l'ère
de l'économie collaborative et numérique"
Mercredi 5 Avril 2017
Chaire E.Leclerc /
ESCP Europe
"Prospective du
commerce dans la
société 4.0"
PETITS-DEJEUNERS DU COMMERCE 4.0.
2
"La co-construction de l'expérience shopping à
l'ère de l'économie collaborative et numérique"
Experts réunis pour en débattre :
Prof. Claire Roederer
Et Quentin Lebeau
Claire Roederer est Professeur à l’EM Strasbourg, co-auteur du livre « Le marketing
expérientiel : vers un marketing de la co-création »
Quentin Lebeau est Directeur Général de la start-up TokyWoky
En présence de Michel-Edouard Leclerc (Président des Centres E.Leclerc et Président
de la Chaire E.Leclerc/ESCP Europe) et du Pr. Olivier Badot (Doyen à la recherche à ESCP
Europe et Directeur scientifique de la Chaire) pour animer, étayer et approfondir le
débat.
3
De Petits-Déjeuners en Petits-Déjeuners, une communauté du commerce 4.0 se construit
autour de la Chaire E. Leclerc / ESCP Europe tous les 1ers mercredis du mois.
La 5e édition était consacrée au thème passionnant de « La co-construction de l'expérience
shopping à l'ère de l'économie collaborative et numérique ». Ce véritable événement
fédérateur qui a regroupé plus de 270 personnes était l'occasion également de fêter les 1 an
de la Chaire E. Leclerc / ESCP Europe, une première bougie très prometteuse !
Comme le veut la tradition, la conférence-débat commence par un mot d’accueil du
Président de la Chaire, Michel-Edouard Leclerc, qui rappelle les ambitions de celle-ci : « dans
cette Chaire on essaie d’échanger des expériences, de les confronter à des points de vue
plus analytiques, plus conceptuels, et de tirer la quintessence de tout cela pour faire avancer
les concepts, la théorie et l’analyse. Sur le plan pratique, on y insère notre ressenti, notre
intuition, notre pragmatisme, dans un mouvement qu’il nous faut déchiffrer ».
4
Dans un contexte économique de plus en plus ouvert et difficile à discerner, et face à des
marchés en mouvement, il est quasiment impossible de prédire l’avenir, assure Michel-
Edouard Leclerc. Pour autant, à défaut de le prévoir, il est nécessaire de le préparer.
Le monde académique et le monde professionnel ont donc tout intérêt à se confronter aux
réalités changeantes du terrain, afin de transformer les visions communes en actions
anticipatrices. D’où la vocation de cette Chaire et son intitulé : « Prospective du Commerce
dans la société 4.0 ».
L’expérience au carrefour des disciplines : anthropologie, sociologie, stratégie
« Les sociétés ne peuvent pas vivre sans expérience » déclare le Professeur Olivier Badot, en
se référant à l’anthropologue britannique Victor Witter Turner.
Il introduit les échanges en revenant dans un premier temps sur l’importance et la
complexité de la notion d’expérience.
5
Comme le laisserait entendre l’appellation anglo-saxonne « shopping experience »,
l’expérience est souvent réduite à un processus d’achat ou à des actes de consommation
plus ou moins ordinaires. Or cette notion trouve ses sources et s’étend à des champs bien
plus vastes, à la fois anthropologiques, sociologiques et stratégiques.
Dans une perspective anthropologique, l’expérience relève de la « magie ». En cela, « elle
nécessite des éléments spécifiques, des langages, des symboles, et tout un appareillage qui
fait croire à leur efficacité », développe le Professeur Olivier Badot. A la lumière des travaux
de Lévi-Strauss sur « l’efficacité symbolique », il affirme qu’à l’ère de la crosscanalité, de la
dilution des acteurs, de la démultiplication des parties prenantes, et face au risque de perte
de contrôle qui en émane, les rites doivent être « transgressifs et inversifs », et l’efficacité
des actes magiques « forte et immédiate ». Les représentations produites (sensorielles,
olfactives ou visuelles) comprennent de nombreux signifiants « simplifiés et acérés » ainsi
que des signifiés « intenses ». La finalité étant de développer « une foi dans l’expérience
magique et à postériori des effets de transfert psychanalytiques et symboliques », explique
le Professeur Badot.
Le courant postmoderne tente d’analyser l’évolution de la question d’expérience au travers
du basculement d’un « salut par les institutions » vers « un salut par la société », pour
résulter aujourd’hui à « un salut par soi-même ». Le Professeur Olivier Badot résume ces
évolutions en ces mots, et par le schéma ci-dessous : « l’échec des institutions religieuses,
des partis politiques et des experts à remplir leurs rôles, s’est soldé par une perte de
confiance des occidentaux avec comme conséquences un « powershift » du rôle de
résolution des « drames sociaux » vers les acteurs de la consommation. Les occidentaux ne
croient plus en un lendemain meilleur […] ils sont aujourd’hui dans une logique où il faut
jouir tout de suite. Cette efficacité immédiate de l’expérience, le bonheur collectif et le salut
différé sont remplacés par une succession d’expériences qui modifient très fortement les
états émotionnels. Puis il y’a surtout une confiance centrée sur le moi-moi, sur l’individu, ses
groupes, ses tribus, ses réseaux sociaux ».
6
Résumé de la pensée sociologique postmoderne
– Extrait de la présentation du Prof. Olivier Badot
Dans la perspective stratégique, il s’agit de créer des avantages concurrentiels au travers de
la « shopping expérience ». Le modèle de Pine et Gilmore (1988) fait ressortir la variabilité
des principaux avantages : se différencier et vendre plus cher en perturbant les « référentiels
cognitifs » des clients.
7
Extrait de la présentation du Prof. Olivier Badot
Consommateur rationnel vs « héros romantique » : une approche holistique
de l’expérience
Le Professeur Claire Roederer rappelle que si la notion d’expérience n’est pas nouvelle, il
aura fallu attendre plusieurs années avant que celle-ci ne se positionne au cœur des
stratégies marketing, avec comme marqueur initiateur les travaux de Holbrook et Hirschman
(1982). Ces auteurs la définissent comme « un état subjectif de conscience accompagné par
un ensemble de significations symboliques, de sens, de réponses hédoniques et de critères
esthétiques ».
Loin des premiers modèles issus de la micro-économie, postulant un consommateur très
rationnel, « l’expérience est aujourd’hui, une clé fructueuse de compréhension du
consommateur et un concept de plus en plus mobilisé par les marques », affirme le
Professeur Claire Roederer.
8
Elle mobilise plusieurs références théoriques, agrémentées d’exemples concrets pour
représenter ces évolutions. Ainsi, la roue expérientielle d’Hetzel (2002) et ses composantes
(surprendre, stimuler les 5 sens, utiliser la marque, proposer de l’extraordinaire et créer du
lien) s’applique à l’enseigne Lush, qui présente ses cosmétiques comme des produits
alimentaires vendus dans une épicerie et y intègre des séances de méditation, ou encore Lidl
qui a créé des restaurants gastronomiques avec des chefs étoilés. En invitant les femmes à
revoir leur estime de soi, la campagne marketing « Dove’s Real Beauty » mobilise les
« Strategic Experiential Modules : Sense, Feel, Relate, Think and Act ». L’exemple d’Ikea se
prête à la « métaphore dramaturgique » (Filser, 2002) qui décompose l’habillage expérientiel
en trois éléments : décor, intrigue et action, grâce à une promenade expérientielle dans ses
magasins, invitant ses clients à faire des enfants et à co-créer la vie qui va avec.
9
Le Professeur Badot évoque à son tour l’enseigne Victoria’s Secret, qui « vend du rêve »,
notamment en créant des expériences immersives dans ses magasins grâce à l’atmosphère
boudoir du 19e siècle. « Il s’agit d’une projection hédoniste du chaland dans un imaginaire
réenchantant qui modifie ses états émotionnels et ses perceptions, en vue d’améliorer des
indicateurs marketing, commerciaux et financiers ».
Ces éléments combinés perturbent les « heuristiques d’achat » du consommateur. En
conséquence, « on passe d’un consommateur penseur rationnel à presque un héros
romantique qui veut être porté par ses émotions », renchérit le Professeur Claire Roederer.
Exit le marketing de la création d’offre, vive la co-création avec le client ?
Face à un consommateur de plus en plus suspicieux et à l’usure des contextes expérientiels,
« la figure du consommateur passif (Me myself and I des années 90 et hédonique des années
2000) a progressivement cédé la place à celle d’un consommateur actif, créatif et
collaboratif », synthétise le Professeur Claire Roederer.
Du consommateur passif au consommateur collaboratif
– Extrait de la présentation du Prof. Claire Roeder
10
« La seule production d’expérience par l’entreprise ne suffit plus », assure le Professeur
Olivier Badot. Cette vision plus « holistique » fait émerger un marketing expérientiel
« nouvelle génération » où l’entreprise génère des expériences avec la participation active
de ses clients. « On assiste aujourd’hui à l’émergence d’un marketing de la co-création sous
forme d’expériences participatives et collaboratives », appuie le Professeur Claire Roederer.
Elle interpelle l’audience en posant plusieurs questions : « Que fait le client pendant
l’expérience ? Et pour qui ? Pour l’entreprise ? Pour lui-même ? Ce qu’il fait ou ce que l’on lui
fait faire est-il plaisant, créatif ou au contraire le fait-on simplement travailler pour le
compte de l’entreprise ? ».
Pour mieux appréhender la prise en compte de la co-création et le rôle actif du
consommateur dans la production de l’expérience, un retour sur les différentes typologies et
formes de l’expérience s’avère judicieux.
Les formes de participation au processus de l’expérience
Si les typologies des expériences varient entre celles guidées par le client, celles pilotées par
l’entreprise, et celles co-driven (Carù et Cova, 2007), cette dernière configuration prend
toute sa place à l’ère de l’économie collaborative et de l’empowerment du client.
Typologie des expériences
– Extrait de la présentation du Prof. Claire Roederer
11
En plus de la collaboration interprétative qui est le fondement de tout processus
expérientiel, la participation du client peut être envisagée selon 4 niveaux d’implication,
ajoute le Professeur Claire Roederer :
 résistance et refus de l’expérience ;
 déviance : le client refuse l’expérience mais l’exécute quand même ;
 autoproduction dirigée : le client accepte le scenario et l’exécute ;
 coproduction créative : le client accepte l’expérience et développe des schémas créatifs.
« Le nouveau consommateur est tout sauf passif », affirme le Professeur Roederer. Elle cite
l’expérience de la « gare remix » à Lyon Saint-Paul qui invite ses usagers pendant 3 jours à
réinventer la gare de demain dans un esprit de créativité collective en est une illustration.
Expérience sociale et reconnaissance : principaux leviers d’engagement des
clients collaboratifs
Le consommateur collaboratif et créatif est une opportunité que certaines entreprises
réussissent à mettre à profit, soutient le Professeur Claire Roederer.
Créée en 2014, la start-up française Tokywoky fait partie des précurseurs à avoir saisi cette
dynamique innovante, en fondant leur business model sur le principe de la cocréation. Ce
chat collaboratif intégré aux sites des marques, permet aux visiteurs d’un même site de
communiquer et de s’entraider en temps réel, par le biais d'une petite fenêtre qui s'ouvre
dans le coin inférieur droit du navigateur. L’entreprise compte une soixantaine de clients
dont Promod, Jennyfer, Leroy Merlin, … dans 7 pays.
« Certains clients-contributeurs de Tokywoky passent plusieurs heures par jour à répondre
aux questions des autres visiteurs du site et à les conseiller », raconte son co-fondateur
Quentin Lebeau. Sur le site de l’Oréal Paris par exemple, une communauté de 1 500
ambassadeurs s’est constituée en l’espace d’un an, et les TOP 3 contributeurs aident plus de
12 000 visiteurs à eux seuls.
12
Se pose alors la question : qu’est-ce qui pousse ces clients, non rémunérés, à collaborer ?
La réponse est simple selon Quentin Lebeau : « ce que cherchent ces ambassadeurs, c’est la
reconnaissance sociale de leurs pairs, les likes, les followers, le nombre de vues, tout ce qui
est le moteur d’Internet depuis 10 à 15 ans, de Facebook à Instagram en passant par
Snapchat ou Youtube ».
Tokywoky a mis en place un système de rétribution où les répondants cumulent des « mercis
» de la part des visiteurs.
13
Tokywoky : système de rétribution en « mercis »
– Extrait de la présentation de Quentin Lebeau
Poussant cette logique de rétention et de reconnaissance sociale à l’extrême, une
« plateforme de coachs » dédiée aux contributeurs les plus engagés a vu le jour. Celle-ci
prévoit un système de gamification, des badges, … pour tirer le meilleur parti de cette
précieuse petite communauté.
Univers collaboratif et gamifié de l’interface Tokywoky
– Extrait de la présentation de Quentin Lebeau
14
La cocréation : atout majeur des stratégies expérientielles ?
Sous l’impulsion des réseaux sociaux et de la digitalisation croissante, force est de constater
que le consommateur devient de plus en plus influent, autonome et participatif.
Selon le Professeur Claire Roederer, cette nouvelle configuration doit se refléter dans les
stratégies de marque, et constitue un excellent moyen de les développer. Le Professeur
Olivier Badot dit à ce sujet que l’expérience co-créative permet à une marque
d’ « évangéliser » ses clients qui deviennent ses meilleurs ambassadeurs, voire des « soi
étendus ».
D’après son retour d’expérience, Quentin Lebeau confirme ces tendances. Il rajoute «
qu’avant d’acheter en ligne, 80% des internautes consultent l'avis de leurs pairs, tandis
qu’en moyenne, ils font 12 fois plus confiance aux autres acheteurs plutôt qu'aux vendeurs
». D’où l’intérêt pour les entreprises d’intégrer le collaboratif dans leur business model et
leurs stratégies, afin d’assurer une meilleure logique servicielle, mais aussi pour booster leur
chiffre d’affaire.
Toujours selon Quentin Lebeau, Tokywoky permet aux marques de capitaliser sur des actifs
dont ils ignorent souvent la portée, les communautés de marques étant à leur tête. « Les
clients qui collaborent sont de vrais médias ». Ils génèrent des ventes (25% de plus en
moyenne), communiquent entre eux ouvertement, diminuent les coûts (désengorgement du
service client), et créent du contenu. Ces datas sont d’autant plus précieuses pour les
marques qui les exploitent grâce aux différents outils du crowd marketing.
On retrouve plusieurs exemples de réussite de ces stratégies de collaboration
communautaires. « Ask » de Amazon qui recense les acheteurs sur les fiches produits ou
encore « The Beauty Talk » de Sephora avec sa communauté d’“experts“ et de “Powers
Users“, sont des références en la matière.
15
Pour le Professeur Claire Roederer : « l’intelligence des mécanismes de collaboration
proposés par l’entreprise sont une condition sine qua non au succès des stratégies mises en
œuvre ».
Et le Professeur Adeline Ochs, coordinatrice de la Chaire Prospective du commerce dans la
société 4.0, de conclure les débats : « Tous ces travaux et nos exemples montrent combien
l’expérience est génératrice d’émotions, de sensations et combien, face à un consommateur
de plus en plus actif, le marketing expérientiel n’en est encore qu’à ses balbutiements ».
16
Les prochains « Petits Déjeuners du Commerce 4.0 »
A l’aune de ces mutations sans précédent, il est plus que jamais nécessaire d’en considérer
l’ampleur, la portée et la complexité, comme le rappelle souvent Michel Edouard Leclerc. Les
prochains rendez-vous s’inscrivent dans la même lignée et tentent d’apporter une vision
transversale et prospective dans des domaines clés du commerce de demain.
Après une pause estivale, les Petits Déjeuners du Commerce 4.0 reprendront tous les
premiers mercredis du mois dès le 4 octobre. Ces rencontres sont gratuites et ouvertes à
tout public sur inscription. Vous êtes cordialement invités à y assister. Alors à vos agendas !
17
Vous pouvez suivre l'actualité du commerce 4.0 sur nos différents supports de
communication.
Contact : chaire.leclerc@escpeurope.eu
Page Web : http://www.escpeurope.eu/fr/faculte-recherche/chaires-et-instituts-
escp-europe/chaire-prospective-du-commerce-dans-la-societe-40-escp-europe/
LinkedIn : https://www.linkedin.com/company-beta/11143410
Facebook : Chaire Prospective du Commerce 4.0.
Slideshare : https://www.slideshare.net/Chaire_Leclerc

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Compte-rendu - " La co-construction de l'expérience shopping à l'ère de l'économie collaborative et numérique"

  • 1. 1 Compte-rendu "La co-construction de l'expérience shopping à l'ère de l'économie collaborative et numérique" Mercredi 5 Avril 2017 Chaire E.Leclerc / ESCP Europe "Prospective du commerce dans la société 4.0" PETITS-DEJEUNERS DU COMMERCE 4.0.
  • 2. 2 "La co-construction de l'expérience shopping à l'ère de l'économie collaborative et numérique" Experts réunis pour en débattre : Prof. Claire Roederer Et Quentin Lebeau Claire Roederer est Professeur à l’EM Strasbourg, co-auteur du livre « Le marketing expérientiel : vers un marketing de la co-création » Quentin Lebeau est Directeur Général de la start-up TokyWoky En présence de Michel-Edouard Leclerc (Président des Centres E.Leclerc et Président de la Chaire E.Leclerc/ESCP Europe) et du Pr. Olivier Badot (Doyen à la recherche à ESCP Europe et Directeur scientifique de la Chaire) pour animer, étayer et approfondir le débat.
  • 3. 3 De Petits-Déjeuners en Petits-Déjeuners, une communauté du commerce 4.0 se construit autour de la Chaire E. Leclerc / ESCP Europe tous les 1ers mercredis du mois. La 5e édition était consacrée au thème passionnant de « La co-construction de l'expérience shopping à l'ère de l'économie collaborative et numérique ». Ce véritable événement fédérateur qui a regroupé plus de 270 personnes était l'occasion également de fêter les 1 an de la Chaire E. Leclerc / ESCP Europe, une première bougie très prometteuse ! Comme le veut la tradition, la conférence-débat commence par un mot d’accueil du Président de la Chaire, Michel-Edouard Leclerc, qui rappelle les ambitions de celle-ci : « dans cette Chaire on essaie d’échanger des expériences, de les confronter à des points de vue plus analytiques, plus conceptuels, et de tirer la quintessence de tout cela pour faire avancer les concepts, la théorie et l’analyse. Sur le plan pratique, on y insère notre ressenti, notre intuition, notre pragmatisme, dans un mouvement qu’il nous faut déchiffrer ».
  • 4. 4 Dans un contexte économique de plus en plus ouvert et difficile à discerner, et face à des marchés en mouvement, il est quasiment impossible de prédire l’avenir, assure Michel- Edouard Leclerc. Pour autant, à défaut de le prévoir, il est nécessaire de le préparer. Le monde académique et le monde professionnel ont donc tout intérêt à se confronter aux réalités changeantes du terrain, afin de transformer les visions communes en actions anticipatrices. D’où la vocation de cette Chaire et son intitulé : « Prospective du Commerce dans la société 4.0 ». L’expérience au carrefour des disciplines : anthropologie, sociologie, stratégie « Les sociétés ne peuvent pas vivre sans expérience » déclare le Professeur Olivier Badot, en se référant à l’anthropologue britannique Victor Witter Turner. Il introduit les échanges en revenant dans un premier temps sur l’importance et la complexité de la notion d’expérience.
  • 5. 5 Comme le laisserait entendre l’appellation anglo-saxonne « shopping experience », l’expérience est souvent réduite à un processus d’achat ou à des actes de consommation plus ou moins ordinaires. Or cette notion trouve ses sources et s’étend à des champs bien plus vastes, à la fois anthropologiques, sociologiques et stratégiques. Dans une perspective anthropologique, l’expérience relève de la « magie ». En cela, « elle nécessite des éléments spécifiques, des langages, des symboles, et tout un appareillage qui fait croire à leur efficacité », développe le Professeur Olivier Badot. A la lumière des travaux de Lévi-Strauss sur « l’efficacité symbolique », il affirme qu’à l’ère de la crosscanalité, de la dilution des acteurs, de la démultiplication des parties prenantes, et face au risque de perte de contrôle qui en émane, les rites doivent être « transgressifs et inversifs », et l’efficacité des actes magiques « forte et immédiate ». Les représentations produites (sensorielles, olfactives ou visuelles) comprennent de nombreux signifiants « simplifiés et acérés » ainsi que des signifiés « intenses ». La finalité étant de développer « une foi dans l’expérience magique et à postériori des effets de transfert psychanalytiques et symboliques », explique le Professeur Badot. Le courant postmoderne tente d’analyser l’évolution de la question d’expérience au travers du basculement d’un « salut par les institutions » vers « un salut par la société », pour résulter aujourd’hui à « un salut par soi-même ». Le Professeur Olivier Badot résume ces évolutions en ces mots, et par le schéma ci-dessous : « l’échec des institutions religieuses, des partis politiques et des experts à remplir leurs rôles, s’est soldé par une perte de confiance des occidentaux avec comme conséquences un « powershift » du rôle de résolution des « drames sociaux » vers les acteurs de la consommation. Les occidentaux ne croient plus en un lendemain meilleur […] ils sont aujourd’hui dans une logique où il faut jouir tout de suite. Cette efficacité immédiate de l’expérience, le bonheur collectif et le salut différé sont remplacés par une succession d’expériences qui modifient très fortement les états émotionnels. Puis il y’a surtout une confiance centrée sur le moi-moi, sur l’individu, ses groupes, ses tribus, ses réseaux sociaux ».
  • 6. 6 Résumé de la pensée sociologique postmoderne – Extrait de la présentation du Prof. Olivier Badot Dans la perspective stratégique, il s’agit de créer des avantages concurrentiels au travers de la « shopping expérience ». Le modèle de Pine et Gilmore (1988) fait ressortir la variabilité des principaux avantages : se différencier et vendre plus cher en perturbant les « référentiels cognitifs » des clients.
  • 7. 7 Extrait de la présentation du Prof. Olivier Badot Consommateur rationnel vs « héros romantique » : une approche holistique de l’expérience Le Professeur Claire Roederer rappelle que si la notion d’expérience n’est pas nouvelle, il aura fallu attendre plusieurs années avant que celle-ci ne se positionne au cœur des stratégies marketing, avec comme marqueur initiateur les travaux de Holbrook et Hirschman (1982). Ces auteurs la définissent comme « un état subjectif de conscience accompagné par un ensemble de significations symboliques, de sens, de réponses hédoniques et de critères esthétiques ». Loin des premiers modèles issus de la micro-économie, postulant un consommateur très rationnel, « l’expérience est aujourd’hui, une clé fructueuse de compréhension du consommateur et un concept de plus en plus mobilisé par les marques », affirme le Professeur Claire Roederer.
  • 8. 8 Elle mobilise plusieurs références théoriques, agrémentées d’exemples concrets pour représenter ces évolutions. Ainsi, la roue expérientielle d’Hetzel (2002) et ses composantes (surprendre, stimuler les 5 sens, utiliser la marque, proposer de l’extraordinaire et créer du lien) s’applique à l’enseigne Lush, qui présente ses cosmétiques comme des produits alimentaires vendus dans une épicerie et y intègre des séances de méditation, ou encore Lidl qui a créé des restaurants gastronomiques avec des chefs étoilés. En invitant les femmes à revoir leur estime de soi, la campagne marketing « Dove’s Real Beauty » mobilise les « Strategic Experiential Modules : Sense, Feel, Relate, Think and Act ». L’exemple d’Ikea se prête à la « métaphore dramaturgique » (Filser, 2002) qui décompose l’habillage expérientiel en trois éléments : décor, intrigue et action, grâce à une promenade expérientielle dans ses magasins, invitant ses clients à faire des enfants et à co-créer la vie qui va avec.
  • 9. 9 Le Professeur Badot évoque à son tour l’enseigne Victoria’s Secret, qui « vend du rêve », notamment en créant des expériences immersives dans ses magasins grâce à l’atmosphère boudoir du 19e siècle. « Il s’agit d’une projection hédoniste du chaland dans un imaginaire réenchantant qui modifie ses états émotionnels et ses perceptions, en vue d’améliorer des indicateurs marketing, commerciaux et financiers ». Ces éléments combinés perturbent les « heuristiques d’achat » du consommateur. En conséquence, « on passe d’un consommateur penseur rationnel à presque un héros romantique qui veut être porté par ses émotions », renchérit le Professeur Claire Roederer. Exit le marketing de la création d’offre, vive la co-création avec le client ? Face à un consommateur de plus en plus suspicieux et à l’usure des contextes expérientiels, « la figure du consommateur passif (Me myself and I des années 90 et hédonique des années 2000) a progressivement cédé la place à celle d’un consommateur actif, créatif et collaboratif », synthétise le Professeur Claire Roederer. Du consommateur passif au consommateur collaboratif – Extrait de la présentation du Prof. Claire Roeder
  • 10. 10 « La seule production d’expérience par l’entreprise ne suffit plus », assure le Professeur Olivier Badot. Cette vision plus « holistique » fait émerger un marketing expérientiel « nouvelle génération » où l’entreprise génère des expériences avec la participation active de ses clients. « On assiste aujourd’hui à l’émergence d’un marketing de la co-création sous forme d’expériences participatives et collaboratives », appuie le Professeur Claire Roederer. Elle interpelle l’audience en posant plusieurs questions : « Que fait le client pendant l’expérience ? Et pour qui ? Pour l’entreprise ? Pour lui-même ? Ce qu’il fait ou ce que l’on lui fait faire est-il plaisant, créatif ou au contraire le fait-on simplement travailler pour le compte de l’entreprise ? ». Pour mieux appréhender la prise en compte de la co-création et le rôle actif du consommateur dans la production de l’expérience, un retour sur les différentes typologies et formes de l’expérience s’avère judicieux. Les formes de participation au processus de l’expérience Si les typologies des expériences varient entre celles guidées par le client, celles pilotées par l’entreprise, et celles co-driven (Carù et Cova, 2007), cette dernière configuration prend toute sa place à l’ère de l’économie collaborative et de l’empowerment du client. Typologie des expériences – Extrait de la présentation du Prof. Claire Roederer
  • 11. 11 En plus de la collaboration interprétative qui est le fondement de tout processus expérientiel, la participation du client peut être envisagée selon 4 niveaux d’implication, ajoute le Professeur Claire Roederer :  résistance et refus de l’expérience ;  déviance : le client refuse l’expérience mais l’exécute quand même ;  autoproduction dirigée : le client accepte le scenario et l’exécute ;  coproduction créative : le client accepte l’expérience et développe des schémas créatifs. « Le nouveau consommateur est tout sauf passif », affirme le Professeur Roederer. Elle cite l’expérience de la « gare remix » à Lyon Saint-Paul qui invite ses usagers pendant 3 jours à réinventer la gare de demain dans un esprit de créativité collective en est une illustration. Expérience sociale et reconnaissance : principaux leviers d’engagement des clients collaboratifs Le consommateur collaboratif et créatif est une opportunité que certaines entreprises réussissent à mettre à profit, soutient le Professeur Claire Roederer. Créée en 2014, la start-up française Tokywoky fait partie des précurseurs à avoir saisi cette dynamique innovante, en fondant leur business model sur le principe de la cocréation. Ce chat collaboratif intégré aux sites des marques, permet aux visiteurs d’un même site de communiquer et de s’entraider en temps réel, par le biais d'une petite fenêtre qui s'ouvre dans le coin inférieur droit du navigateur. L’entreprise compte une soixantaine de clients dont Promod, Jennyfer, Leroy Merlin, … dans 7 pays. « Certains clients-contributeurs de Tokywoky passent plusieurs heures par jour à répondre aux questions des autres visiteurs du site et à les conseiller », raconte son co-fondateur Quentin Lebeau. Sur le site de l’Oréal Paris par exemple, une communauté de 1 500 ambassadeurs s’est constituée en l’espace d’un an, et les TOP 3 contributeurs aident plus de 12 000 visiteurs à eux seuls.
  • 12. 12 Se pose alors la question : qu’est-ce qui pousse ces clients, non rémunérés, à collaborer ? La réponse est simple selon Quentin Lebeau : « ce que cherchent ces ambassadeurs, c’est la reconnaissance sociale de leurs pairs, les likes, les followers, le nombre de vues, tout ce qui est le moteur d’Internet depuis 10 à 15 ans, de Facebook à Instagram en passant par Snapchat ou Youtube ». Tokywoky a mis en place un système de rétribution où les répondants cumulent des « mercis » de la part des visiteurs.
  • 13. 13 Tokywoky : système de rétribution en « mercis » – Extrait de la présentation de Quentin Lebeau Poussant cette logique de rétention et de reconnaissance sociale à l’extrême, une « plateforme de coachs » dédiée aux contributeurs les plus engagés a vu le jour. Celle-ci prévoit un système de gamification, des badges, … pour tirer le meilleur parti de cette précieuse petite communauté. Univers collaboratif et gamifié de l’interface Tokywoky – Extrait de la présentation de Quentin Lebeau
  • 14. 14 La cocréation : atout majeur des stratégies expérientielles ? Sous l’impulsion des réseaux sociaux et de la digitalisation croissante, force est de constater que le consommateur devient de plus en plus influent, autonome et participatif. Selon le Professeur Claire Roederer, cette nouvelle configuration doit se refléter dans les stratégies de marque, et constitue un excellent moyen de les développer. Le Professeur Olivier Badot dit à ce sujet que l’expérience co-créative permet à une marque d’ « évangéliser » ses clients qui deviennent ses meilleurs ambassadeurs, voire des « soi étendus ». D’après son retour d’expérience, Quentin Lebeau confirme ces tendances. Il rajoute « qu’avant d’acheter en ligne, 80% des internautes consultent l'avis de leurs pairs, tandis qu’en moyenne, ils font 12 fois plus confiance aux autres acheteurs plutôt qu'aux vendeurs ». D’où l’intérêt pour les entreprises d’intégrer le collaboratif dans leur business model et leurs stratégies, afin d’assurer une meilleure logique servicielle, mais aussi pour booster leur chiffre d’affaire. Toujours selon Quentin Lebeau, Tokywoky permet aux marques de capitaliser sur des actifs dont ils ignorent souvent la portée, les communautés de marques étant à leur tête. « Les clients qui collaborent sont de vrais médias ». Ils génèrent des ventes (25% de plus en moyenne), communiquent entre eux ouvertement, diminuent les coûts (désengorgement du service client), et créent du contenu. Ces datas sont d’autant plus précieuses pour les marques qui les exploitent grâce aux différents outils du crowd marketing. On retrouve plusieurs exemples de réussite de ces stratégies de collaboration communautaires. « Ask » de Amazon qui recense les acheteurs sur les fiches produits ou encore « The Beauty Talk » de Sephora avec sa communauté d’“experts“ et de “Powers Users“, sont des références en la matière.
  • 15. 15 Pour le Professeur Claire Roederer : « l’intelligence des mécanismes de collaboration proposés par l’entreprise sont une condition sine qua non au succès des stratégies mises en œuvre ». Et le Professeur Adeline Ochs, coordinatrice de la Chaire Prospective du commerce dans la société 4.0, de conclure les débats : « Tous ces travaux et nos exemples montrent combien l’expérience est génératrice d’émotions, de sensations et combien, face à un consommateur de plus en plus actif, le marketing expérientiel n’en est encore qu’à ses balbutiements ».
  • 16. 16 Les prochains « Petits Déjeuners du Commerce 4.0 » A l’aune de ces mutations sans précédent, il est plus que jamais nécessaire d’en considérer l’ampleur, la portée et la complexité, comme le rappelle souvent Michel Edouard Leclerc. Les prochains rendez-vous s’inscrivent dans la même lignée et tentent d’apporter une vision transversale et prospective dans des domaines clés du commerce de demain. Après une pause estivale, les Petits Déjeuners du Commerce 4.0 reprendront tous les premiers mercredis du mois dès le 4 octobre. Ces rencontres sont gratuites et ouvertes à tout public sur inscription. Vous êtes cordialement invités à y assister. Alors à vos agendas !
  • 17. 17 Vous pouvez suivre l'actualité du commerce 4.0 sur nos différents supports de communication. Contact : chaire.leclerc@escpeurope.eu Page Web : http://www.escpeurope.eu/fr/faculte-recherche/chaires-et-instituts- escp-europe/chaire-prospective-du-commerce-dans-la-societe-40-escp-europe/ LinkedIn : https://www.linkedin.com/company-beta/11143410 Facebook : Chaire Prospective du Commerce 4.0. Slideshare : https://www.slideshare.net/Chaire_Leclerc