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Simulation : les technologies numériques

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Nov. 5, 2019
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  1. MASTER 2 INGÉNIERIE PÉDAGOGIQUE EN FORMATION D’ADULTES ANNÉE UNIVERSITAIRE 2018-2019 INGÉNIERIE PÉDAGOGIQUE NUMÉRIQUE SIMULATION(S) : DU JEU DE RÔLE AUX TECHNOLOGIES POUR LA PÉDAGOGIE DES ADULTES Myriam BENHADRIA Janvier 2019 Sous la direction de Christophe Jeunesse
  2. Table des matières I. Qu’est-ce que la simulation ? ................................................................................................... 1 1. La simulation comme activité d’apprentissage.................................................................... 1 2. Déroulé d’une séance............................................................................................................3 3. Caractéristiques d’une simulation réussie .......................................................................... 4 4. Apports du numérique aux situations de simulation..........................................................5 5. Limites de la simulation....................................................................................................... 6 II. Domaines professionnels utilisant la simulation.................................................................... 6 1. Industrie et nucléaire........................................................................................................... 6 L’industrie : l’exemple des lamineurs de train à chaud .......................................................... 6 Le nucléaire : améliorer la sécurité grâce à la simulation .......................................................7 2. Transports............................................................................................................................. 8 3. Santé ..................................................................................................................................... 9 III. Zoom sur la simulation en santé ........................................................................................ 10 1. Un centre de simulation hospitalier................................................................................... 10 2. Un centre de simulation au sein d’un organisme de formation en santé......................... 14 IV. Quel avenir pour la simulation ?........................................................................................ 15 Bibliographie – Sitographie............................................................................................................ 18
  3. 1 Simulation : le mot résonne continuellement dans le monde de la formation d’adultes. Entendu dans beaucoup de domaines procéduraux, ce mot semble résoudre tous les problèmes de formation. Mais à quoi fait-on référence exactement lorsqu’on parle de simulation ? Quel en est son cadre théorique ? Ces concepts de base sont plus que nécessaires si l’on veut se lancer dans l’aventure. Les sirènes des supers-outils technologiques utilisés en simulation nous feraient presque oublier qu’elle ne se transforme en apprentissage que si l’on respecte ses principes pédagogiques. Afin de mieux cerner où en est la simulation en France actuellement et quels sont les apports des technologies à ce moyen pédagogique, cette synthèse proposera dans un premier temps de revenir sur les concepts fondamentaux et les limites de la simulation. Les différents secteurs d’activité utilisant ce moyen de manière significative seront ensuite mis en lumière. Un zoom sur la simulation en santé sera ensuite développé avec deux exemples de centres de simulation. Enfin, nous balaierons les pistes d’avenir qu’offriront probablement les technologies qui émergent aujourd’hui pour la simulation de demain. I. Qu’est-ce que la simulation ? 1. La simulation comme activité d’apprentissage La simulation a plusieurs définitions possibles en français. Cela peut être une imitation ou un moyen scientifique d’expérimenter et de mettre à l’épreuve des hypothèses afin de les prouver. Mais dans le domaine de la formation, la simulation consiste à modéliser « des environnements simplifiés de la réalité permettant à son utilisateur de réaliser un apprentissage, sans les risques inhérents à certaines situations réelles » (Sauvé & Kaufman, 2010). En effet, la première utilité de la simulation est de pouvoir se substituer au réel, afin de réaliser un apprentissage alors même qu’il est trop difficile ou trop dangereux d’effectuer un apprentissage pratique en situation concrète (Pastré, 2005). Hormis cet aspect logistique, économique et sécuritaire, la simulation est par ailleurs un réel levier d’apprentissage professionnel. Pierre Pastré (2005), en tant que didacticien, évoque les trois éléments en présence lors de l’activité. Il s’agit selon lui de l’opérateur, des connaissances et du milieu. La simulation permet alors de reproduire ce milieu le plus fidèlement possible afin que l’opérateur puisse mettre en œuvre l’activité telle qu’il le ferait en situation réelle. Sauvé et Kaufman (2010) expliquent que la simulation favorise l’acquisition par les apprenants de modèles cognitifs, permet la mise à l’essai de modèles utilisés dans le cadre d’un système et de découvrir les liens entre différentes variables du modèle. En effet, dans une logique dictée par Piaget et Wallon, la simulation peut s’apparenter à ce que les enfants mettent en place lors de leurs jeux d’imitation. Ces jeux leur permettent d’augmenter leur capacité à se projeter et à imaginer des situations qu’ils n’ont jamais vécues. Par extension chez l’adulte, la clinique de l’activité a démontré que « l’activité humaine n’est pas seulement liée à ce qui est en train de se faire, c’est aussi se projeter, considérer ce qu’il reste à faire, anticiper » (Oget & Audran, 2016). La simulation, même si elle n’est pas réalisée dans un milieu fidèle à la réalité permet aussi au professionnel de répéter un geste pour s’en imprégner le mieux possible. En effet, « l’apprentissage passe par l’exercice répété de la pratique ou par la résolution progressive de sous- problèmes contenus dans l’activité » (Oget & Audran, 2016). Cela permet à l’apprenant de réagir et de
  4. 2 réajuster ses comportements en cas d’erreur, ce qui consolide ses connaissances et cela sans conséquence matérielle ou humaine. De plus, la complexité peut être augmentée au fur et à mesure, dans un cadre s’approchant largement de la réalité. Cela permet d’atteindre des objectifs de plus en plus complexes mais réalistes au regard de la situation simulée (Sauvé & Kaufman, 2010). L’une des premières activités de simulation lors d’activités d’apprentissage reste les jeux de rôles. Faciles à mettre en place, ils permettent aux apprenants de se projeter dans une situation qu’ils pourraient vivre dans leur activité professionnelle. Mais ils restent limités car l’absence d’éléments provenant de la réalité réduit la projection des apprenants et leur apprentissage. Les simulateurs interviennent alors, plus ou moins sophistiqués, afin de reproduire tout ou partie de la réalité et ainsi favoriser l’apprentissage. On parle alors de simulateur basse, moyenne ou haute- fidélité selon le degré de correspondance avec la réalité. Le terme « pleine-échelle » est également utilisé pour définir un simulateur correspondant le plus possible à la réalité. Seulement le milieu, représenté par le simulateur, ne suffit pas pour qu’une situation simulée soit de bonne qualité et permette un apprentissage. Pastré évoque l’importance du choix de la simulation en fonction des problèmes rencontrés en situation de travail. Selon lui (2005), il est nécessaire d’identifier un problème rencontré dans une situation de travail, de l’analyser pour comprendre en quoi il consiste exactement, afin de le reconstruire pour en faire un moyen d’apprentissage. Cela dans le but d’ensuite mettre en scène une classe de situations qui comportent toutes le même problème mais avec certaines variations qui vont « amener le sujet à transformer les ressources qu’il aura mobilisées dans un premier temps. » Ce que dit Pierre Pastré, c’est qu’ « il y a apprentissage quand un sujet est confronté à une situation qui lui pose problème et que pour maîtriser la situation il est obligé de mobiliser des connaissances qui lui permettront de donner une solution satisfaisante au problème ». En dehors de l’avantage didactique de la simulation, il existe d’autres avantages eux aussi leviers de l’apprentissage. En effet, en mettant leurs connaissances en pratique, les apprenants atteignent des degrés de satisfaction et de participation élevés. Sauvé & Kaufman (2010) identifient plusieurs avantages à la mise en œuvre d’activités de simulation : - Elles favorisent la participation des apprenants en offrant des expériences motivantes, captivantes, interactives et collaboratives maintenant leur attention. - Elles augmentent l’expérience grâce à l’apprentissage de concepts et comportements complexes. - Elles multiplient la capacité d’intégration de la théorie, de l’expérience et des meilleures pratiques. - Enfin, elles décuplent les résultats d’apprentissage. En effet, « certaines études ont démontré l’efficacité des simulations pour l’apprentissage d’ordre cognitif, émotionnel et psychomoteur […]. Selon ces études, les simulations stimulent l’apprentissage, offrent une rétroaction immédiate, consolident les connaissances, favorisent l’acquisition et la mise en application de compétences, contribuent au transfert du savoir et influent sur l’adoption de nouveaux comportements et de nouvelles attitudes. » Néanmoins, le passage sur simulateur n’est pas suffisant pour que l’opérateur intègre ce qu’il a vécu. La phase de débriefing est primordiale car c’est là que se réalisent la majorité des apprentissages. Les
  5. 3 discussions qui y ont lieu permettent en effet à l’apprenant de confronter ses connaissances avec celles du reste du groupe et de les valider (Sauvé & Kaufman, 2010). Si la phase de débriefing est importante, la phase de briefing et la phase de simulation sont tout aussi primordiales à structurer. Nous allons voir un peu plus en détails comment se déroule une séance de simulation. 2. Déroulé d’une séance Avant même de commencer une séance de simulation, il est nécessaire d’établir un certain nombre de scénarios à exploiter lors de la séance. Ces scénarios doivent être situés, contextualisés et doivent correspondre à ce que le ou les opérateur(s) sont capables de mobiliser (Pastré, 2005). Un simulateur de pleine échelle doit permettre de reproduire l’activité humaine sous ses trois dimensions : cognitive, procédurale et d’habileté. On peut y ajouter « la dimension collective, dans la mesure où le simulateur de pleine échelle peut être utilisé pour l’apprentissage de la coopération communication entre opérateur multiples » (Pastré, 2005). Il est nécessaire d’avoir ces éléments théoriques en tête lorsque l’on réfléchit à ce que l’on souhaite faire mobiliser par les opérateurs lors de la situation simulée. En présence des apprenants présents pour la situation de simulation, il est nécessaire de respecter les trois phases suivantes : briefing, mise en situation et débriefing. Tout d’abord, la phase de briefing permet de poser le cadre, de définir les objectifs et de répondre aux interrogations des participants. C’est un moment préparatoire important qui « définit la situation et ses enjeux, permet le repérage des tâches à réaliser, et laisse un temps d’échange nécessaire à l’éclaircissement éventuel de points problématiques » (Oget & Audran, 2016). Les rôles sont définis à ce moment-là pour éviter la confusion lors de la situation simulée. Le briefing est voué également à montrer le simulateur et son fonctionnement pour éviter les moments de flottement lors de la simulation. Les observateurs peuvent également se voir donner des missions particulières ou des points de vigilance à observer, ce qui enrichira le débriefing ultérieur. Ensuite vient la phase de simulation elle-même. Il est parfois préférable de travailler en binôme de formateurs. En effet, l’activité peut être intense, avec plusieurs protagonistes à observer et la double observation revêt des avantages non négligeables pour assurer un débriefing de qualité. Ainsi certains points qui auraient pu être occultés pourront être exploités. Lors de la phase de simulation, « le formateur procède à un ajustement permanent de la situation de simulation aux stagiaires » (Fauquet-Alekhine et al., 2011) pour leur permettre de rester dans leur zone de développement proximal qu’a décrite Vygotski. Le guidage effectué par le formateur peut revêtir plusieurs formes. Il peut être plus ou moins actif selon les situations. La question d’intervenir en cas d’erreur se pose souvent. Cela peut être délétère pour le sentiment d’efficacité personnelle ou collective si la situation n’est pas maîtrisée. Dans des domaines où la sécurité est un critère de réussite (aviation, santé), l’erreur n’est pas tolérée et le fait d’échouer en simulation peut fortement diminuer la confiance en soi (Fauquet-Alekhine et al., 2011). Il est nécessaire de peser chaque situation en fonction de ses différents paramètres pour savoir s’il est préférable d’aider ou non en cas de prises de décisions allant vers l’échec. Vient enfin le débriefing, phase la plus importante pour assurer les apprentissages. Cette dernière phase « permet d’évaluer l’écart entre ce qui était prévu et ce qui a été réalisé. Ce débriefing
  6. 4 est aussi un moment didactique et réflexif indispensable à tout processus de formation. Conduit par le formateur, il engage les personnes en formation à exprimer leur expérience » (Oget & Audran, 2016). En effet, vivre l’expérience ne suffit pas à l’apprentissage. Le débriefing permet cette distanciation par rapport à l’action qui est nécessaire pour analyser et mettre en œuvre des processus cognitifs qui pourront être remobilisés en situation réelle. La clinique de l’activité apporte des clés pour comprendre l’importance de cette phase. En effet, l’action des acteurs doit être mise en discussion par eux-mêmes. Ils expliquent alors ce qu’ils font « au- delà de ce qui est a priori convenu, à le reformuler […] mais aussi à comprendre la façon dont chacun d’eux appréhende la situation au-delà de ce qui est a priori convenu et peut rester implicite » (Fauquet- Alekhine et al., 2011). Le rôle du formateur est de faire ressortir grâce à la parole ce qui est important, même au travers de certains mots qui peuvent paraître anodins mais qui traduisent des choses parfois plus complexes et sous-jacentes. Le fait de questionner le « comment » est très important : il permet d’explorer tout ce dont les acteurs n’ont pas conscience, dans l’action ou l’absence d’action, les pratiques implicites ou convenues (Fauquet-Alekhine et al., 2011). S’il y a des conflits, il est nécessaire de prendre du temps pour les résoudre au risque de voir les participants en incapacité de se rendre disponibles cognitivement pour l’apprentissage. Le temps alloué à la phase de débriefing doit être au moins égal à la phase de simulation en elle-même mais elle peut parfois durer le double ou le triple. Maintenant que nous avons défini les étapes d’une séance de simulation après avoir décrit les processus psychopédagogiques qui s’y jouent, voyons quels sont les vecteurs d’une simulation réussie dans la pratique. 3. Caractéristiques d’une simulation réussie Pour résumer, une simulation doit comporter plusieurs caractéristiques pour être réussie. Selon Sauvé & Kaufman (2010) : - Elles doivent répondre à des besoins réels, ce qui nécessite d’analyser les besoins de manière exhaustive avant de débuter la démarche de simulation. - Le degré de fidélité doit être suffisant pour que les apprenants se projettent. - Les scénarios doivent être présentés d’une manière progressive et en plusieurs étapes. - Il faut transférer l’apprentissage dans des contextes authentiques. Par exemple la durée de la simulation doit être similaire à la durée réelle. Il faut ajouter à cela plusieurs choses que nous avons vu plus haut. Tout d’abord le choix du scénario doit se porter sur un problème rencontré en situation réelle comme le souligne Pierre Pastré. Ensuite, les trois étapes doivent être respectées et le formateur devra faciliter la compréhension, l’action et le retour sur l’action. Enfin, une attention particulière doit être portée sur le débriefing afin de favoriser l’apprentissage par l’expérience. Cela n’a pas été encore évoqué, mais les formateurs doivent de préférence être formés à la simulation. Ils peuvent être issus de l’opérationnel ou bien partager leur temps entre opérationnel et formation. Il est cependant souhaitable que ces formateurs soient formés eux-mêmes à la pédagogie. En effet leur expertise du métier ne suffit pas, quoiqu’elle assoit une certaine légitimité par rapport aux formés (Fauquet-Alekhine et al., 2011). En France, il existe diverses formations, allant de celles dispensées par des organismes de formation à des diplômes universitaires.
  7. 5 La formation à la simulation est nécessaire d’une part pour comprendre les mécanismes d’apprentissages qui ont lieu en situation mais elle devient de plus en plus nécessaire aussi pour maîtriser les simulateurs. Ceux-ci sont en effet de plus en plus complexes et font appel à de nombreux outils numériques. 4. Apports du numérique aux situations de simulation Aujourd’hui et depuis une dizaine d’années déjà, le numérique permet de rendre les environnements de simulation plus réels. Les technologies existantes sont à prendre en compte dans l’équation lorsque l’on souhaite monter un projet de simulation. Nous verrons dans divers exemples l’usage de technologies parfois avancées dans les univers simulés. Ils permettent aux apprenants de s’immerger encore mieux dans le contexte que l’on a souhaité reproduire et ainsi que ce qu’ils vivent soit plus proche de leur réalité de terrain. L’utilisation de ces environnements dits « haute-fidélité » a développé cette activité d’apprentissage qui existait pourtant déjà depuis des décennies sous une forme plus rudimentaire. En Amérique du Nord, ce moyen pédagogique est très utilisé, particulièrement en santé, où le nombre de centres de simulation est bien supérieur à l’Europe toute entière (Granry & Moll, 2012). Les mannequins se mettent à parler, à réagir en fonction des actions des opérateurs. Cela augmente le réalisme, entraînant un ajustement des gestes effectués par les apprenants en fonction des réactions observées. La vidéo et l’amélioration de sa qualité a aussi beaucoup changé la donne. La plupart des centres de simulation sont dotés de caméra ultrasophistiquées, ce qui permet de revoir certaines phases lors du débriefing ou bien aux observateurs de regarder ce qui se passe en temps réel dans la salle de simulation. Les capacités de zoom et de netteté d’image facilitent énormément l’exploitation de ces vidéos. Par ailleurs, la simulation sur écran se développe de plus en plus avec l’arrivée de logiciels permettant de simuler des situations qui ne nécessitent pas la maîtrise de gestes techniques. C’est le cas par exemple d’IFSIMULATION© destiné aux étudiants en soins infirmiers. Il s’agit d’un logiciel de simulation où l’étudiant évolue dans un environnement proche de celui qu’il connaît à l’hôpital. Cela peut ressembler à un jeu sérieux (ou serious game) mais ce n’en est pas un. En effet, le but n’est pas de faire apprendre en jouant comme prétend le faire un jeu sérieux mais bien de reproduire un milieu réel sous forme 2D afin de pouvoir y évoluer comme dans la réalité. Il n’y a pas de compétition ou même de victoire dans cette simulation. Un rapport de fin de simulation est même envoyé au participant et à son formateur afin qu’ils puissent débriefer comme dans le cadre d’une simulation physique. Ce logiciel a été développé très récemment puisque la mise sur le marché a été effectuée en 2018. Néanmoins, la simulation, et même si elle se targue d’outils de plus en plus sophistiqués, peut revêtir des inconvénients et des limites à son utilisation. Image 1 – Capture d’écran du logiciel IFSIMULATION©
  8. 6 5. Limites de la simulation Évidemment, lorsqu’il s’agit de simulation haute-fidélité employant des ressources techniques évoluées ou un simulateur sophistiqué, la principale limite reste le coût. Les ressources humaines ont également un coût et cela peut s’avérer un frein pour travailler dans de bonnes conditions. Nous verrons dans l’un des exemples plus bas qu’il est parfois nécessaire d’être trois personnes pour pouvoir réaliser des séances de simulation de bonne qualité. Par ailleurs, les situations peuvent être difficiles et longues à créer selon la situation de travail que l’on souhaite imiter. D’autre part, si le contenu change souvent, l’utilité peut être rapidement perdue ou bien il sera nécessaire de recréer du contenu supplémentaire pour pallier aux manques. Parfois l’apprenant ne trouve pas la simulation vraisemblable ou il peut avoir besoin d’un temps de réflexion trop long, ce qui réduit son apprentissage (Sauvé & Kaufman, 2010). De plus, il peut y avoir un effet délétère qui est appelé « effet simu » (Fauquet-Alekhine et al., 2011). Cela peut s’observer lorsqu’il y a un manque de réalisme, si les opérateurs ont l’impression d’être évalués ou mis à défaut par rapport à leur champ habituel de compétences. Le professionnel est alors mis en difficulté lorsqu’il se retrouve en simulation. Il faut donc bien faire attention à la préparation des séances lors du briefing notamment en pensant à toutes les questions que pourraient se poser les stagiaires pendant leur passage. Enfin, Oget et Audran (2016) souhaitent nous alerter sur la part trop importante que peuvent prendre les simulateurs technologiquement sophistiqués, qui pourraient nous faire oublier l’importance des principes énoncés jusqu’ici. Ils émettent même un doute sur le fait de développer toujours plus des simulateurs très fidèles au réel, invoquant la capacité de l’imaginaire de l’être humain qui parviendrait ainsi à inventer des situations inédites. Restons donc vigilants à ne pas « surutiliser » les technologies au détriment des apprentissages à réaliser. Après avoir exploré les aspects théoriques de la simulation et ce qu’ils impliquent, voyons maintenant ses aspects pratiques en balayant les différents domaines professionnels ayant recours à ce moyen pédagogique. II. Domaines professionnels utilisant la simulation Comme nous l’avons expliqué plus haut, la simulation est particulièrement utilisée dans des domaines où la sécurité nécessite de s’exercer dans des conditions simulées. Elle l’est également dans des situations où le coût ou la logistique pour s’exercer en situation réelle seraient trop importants. C’est le cas dans le domaine de l’industrie et du nucléaire, des transports et de la santé. Ce dernier point fera l’objet d’un chapitre à part entière afin de donner des exemples. 1. Industrie et nucléaire L’industrie : l’exemple des lamineurs de train à chaud L’industrie utilise depuis longtemps la simulation pour améliorer la qualité de ses productions et de ses process. Cela a encore plus d’intérêt depuis que les machines sont devenues très élaborées. En effet, les ouvriers ne travaillent plus eux-mêmes sur les chaînes de production. En revanche ils doivent savoir ajuster les machines et veiller à ce que la production ne soit pas enrayée. Dans l’ouvrage
  9. 7 dirigé par Fauquet-Alekhine (2011), Gérard Bonavia rapporte une expérience de simulateur conçu pour les lamineurs de train à chaud, métier de la sidérurgie. Un simulateur a été imaginé pour ces ouvriers car malgré les progrès sur l’automatisation, « la stabilité et la performance [des] résultats industriels dépendent [des] opérateurs expérimentés ». La formation a été fortement mutée car il a fallu passer de l’apprentissage d’un geste à la compréhension du système de production. Bonavia explique en effet que l’action ou la non-action des ouvriers sont primordiales pour anticiper ou réagir selon les circonstances. Le simulateur permet ainsi de comprendre ce qui pousse l’opérateur à prendre telle ou telle décision et de l’analyser en vue d’améliorer les pratiques de chacun. De plus, le compagnonnage largement utilisé dans la formation initiale pouvait s’avérer parfois approximatif. Le simulateur permet de pallier un certain nombre de manques de la formation initiale. La photo ci-dessous montre la taille importante du train à chaud qu’il semble difficile et coûteux à reproduire. C’est pourquoi le simulateur dont Bonavia parle a été modélisé informatiquement. Les ouvriers travaillent face à plusieurs écrans qui leurs donnent des informations selon lesquelles ils prennent des décisions. De plus, il est quasiment impossible de stopper ou freiner la production dans un but de formation. Le numérique apporte ici un gain de temps, de coût et certainement une amélioration de la qualité des pièces laminées. Par ailleurs, il est maintenant possible de faire appel à un organisme de formation spécialisé dans la création de simulateurs pour l’industrie1 . La création du simulateur s’inscrit dans une démarche globale de formation continue. Ces simulateurs sont construits en fonction de la réalité de l’entreprise commanditaire. Le domaine de l’industrie se robotisant de plus en plus, les simulateurs y ont toutes leurs chances de se développer encore dans les prochaines années, notamment grâce à l’amélioration des fonctionnalités offertes par le numérique. Le nucléaire : améliorer la sécurité grâce à la simulation La France se targue de disposer du deuxième parc électronucléaire du monde, technologie qu’elle développe depuis plus de cinquante ans (Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, 2018). Cela implique des enjeux de santé, de sécurité et de préservation de l’environnement importants. La simulation est un moyen de formation continue primordial afin d’améliorer et garantir le niveau de sécurité. En effet, ce secteur de pointe est le lieu d’actualisations fréquentes et il est nécessaire qu’elles soient transmises aux opérateurs des centrales nucléaires. 1 Par exemple, le groupe SPC propose ce type de prestations : https://groupe-spc.com/spc-formation/spc- formation-prestation/simulateurs-pour-la-formation/ Image 2 – Exemple de train à chaud
  10. 8 Philippe Fauquet-Alekhine et Carole Maridonneau, dans le même ouvrage cité ci-dessus évoquent leur retour d’expérience sur l’utilisation d’un simulateur pour le pilotage des centrales nucléaires. En effet, Electricité de France (EDF) en tant que principal exploitant des centrales françaises dispose de plusieurs simulateurs disséminés à travers la France. Il s’agit principalement de reproductions de la console de contrôle du réacteur, disposant d’une régie à l’arrière et de caméras afin de filmer les stagiaires. Les objectifs pour ce type de simulation peuvent être de différents types : professionnalisation initiale, formation continue, application de procédures accidentelles, développement des savoir-faire… Une méthode apparentée à l’analyse des pratiques est utilisée lors du débriefing afin de comprendre les prises de décisions et actions qui ont été réalisée lors de la séance. Nous l’aurons compris, des domaines aussi lourds que l’industrie et le nucléaire se prêtent bien à la formation par la simulation. Cela devrait se développer encore dans les prochaines années dans les domaines de l’énergie, avec le développement important de certains procédés comme le solaire, l’éolien et l’hydraulique. 2. Transports Le secteur des transports et notamment l’aéronautique a été précurseur dans l’utilisation de simulateurs dans la formation. En aéronautique, les premiers simulateurs ont fait leur apparition à la fin de la première guerre mondiale, face au nombre trop important de destruction d’aéronefs par des pilotes novices. Leur utilisation a été généralisée aux autres transports comme la marine, le train et la route. Auparavant moyens de formation uniquement, ils sont aujourd’hui utilisés pour satisfaire les exigences réglementaires, notamment dans l’aviation et dans la marine. En effet, ces moyens de transport lourds sont coûteux, encombrants et complexes à manier, surtout pour un débutant. C’est pourquoi en école de pilote de ligne les premières heures de vol sont réalisées en simulateur. Il en existe deux types (Fauquet-Alekhine et al., 2011) : - Le « Fixed Base Simulator » qui est une reconstitution exacte du cockpit mais n’a pas de mouvement ou de visualisation de l’environnement extérieur. Il sert surtout à comprendre le fonctionnement général de l’avion et les pannes. - Le « Full Flight Simulator » est lui monté sur vérins, ce qui permet de reproduire les mouvements. Le pare-brise montre un environnement simulé proche de la réalité afin que le pilote se sente complètement immergé. Image 3 - Simulateur du réacteur nucléaire de Civaux
  11. 9 L’utilisation du simulateur de vol a bien entendu un intérêt écologique mais il possède également des intérêts pédagogiques non négligeables. En effet, l’instructeur est situé juste derrière les apprentis pilotes dans le simulateur et peut intervenir à tout moment. Il peut choisir de « geler » l’avion afin de prendre le temps nécessaire pour donner des explications aux stagiaires. Il peut également repositionner l’avion à un moment antérieur ou à un moment voulu, changer certains paramètres de l’avion à volonté, visualiser a posteriori les paramètres de vol etc. La simulation a de plus un effet sur le stress des pilotes, qu’ils ressentent de la même manière que s’ils étaient en situation réelle. Cela leur permet ainsi de s’accoutumer au stress et d’apprendre à le gérer. Aujourd’hui, la majorité des compagnies aériennes imposent à leurs pilotes, en plus des obligations réglementaires, des séances de simulation régulières qui portent sur les incidents constatés au cours de l’année. 3. Santé L’autre domaine majeur où la simulation s’est développée de manière fulgurante ces dernières années est la santé. Ce développement a débuté en Amérique du Nord dans les années 1960 et n’a cessé de croître pour répondre à des enjeux de sécurité des patients toujours plus importants. Il a été tel qu’aujourd’hui certaines professions de santé sont accréditées par ce moyen en Amérique du Nord (Galland, 2018). Le large champ de la médecine est un terrain expérimental sans commune mesure pour l’apprentissage par la simulation. Les spécialités médicales, chirurgicales et paramédicales nécessitent une connaissance approfondie des techniques de soin bien sûr mais aussi des compétences relationnelles non négligeables, que ce soit avec les patients ou lors de situations critiques gérées en équipe. Une phrase revient souvent lorsqu’on lit ou discute de la simulation en santé : « jamais la première fois sur le patient ». Elle montre à quel point l’apprentissage de la médecine a changé. Autrefois les médecins n’avaient d’autre choix que d’effectuer leurs premiers soins sur de « vrais » malades, et cela parfois au risque de commettre une erreur plus ou moins grave pour la santé du patient. Depuis quelques années, la qualité des soins est devenue une préoccupation générale. L’erreur n’est plus admise lorsqu’il s’agit de vies humaines. Et bien que l’on sache que la médecine n’est pas une science exacte, l’exactitude est pourtant de plus en plus demandée. La simulation peut permettre de répondre en partie à ces enjeux. En effet, elle permet de « diminuer l’anxiété des étudiants confrontés à leur « première fois » et d’apaiser les patients qui ne se sentiraient Image 5 – Intérieur d’un Full Flight SimulatorImage 4 – Extérieur d’un Full Flight Simulator
  12. 10 plus « cobaye » (Galland, 2018). Elle augmente le sentiment d’efficacité personnelle de l’étudiant ou du professionnel qui se sent compétent dans ce qu’il entreprend et ainsi rassure le patient (Secheresse et al., 2016). Attention toutefois, la simulation en santé est très coûteuse, les mannequins les plus sophistiqués qui coûtent déjà très cher nécessitent parfois l’achat de consommables au prix fort. De plus, il y aura toujours une première fois avec le patient. Même si s’être exercé sur simulateur auparavant évite un trop grand stress, la réalité est parfois impressionnante. Il faut donc penser la formation par la simulation comme un « outil complémentaire pour l’apprentissage sémiologique, diagnostique et thérapeutique » (Galland, 2018). Nous allons voir au travers de deux exemples de centres de simulation en santé quels sont les matériels utilisés, les ressources humaines mobilisées et les types de situations scénarisées afin de mieux comprendre en pratique ce qu’est la simulation en santé. III. Zoom sur la simulation en santé Il se trouve qu’en tant qu’infirmière, mon réseau m’a permis de visiter deux centres de simulation : l’un dans un hôpital de la région parisienne, ouvert depuis 2015, l’autre dans un organisme de formation en santé, récemment installé dans ses nouveaux locaux. Nous verrons que les deux ont des fonctionnements différents, notamment du fait de leurs vocations assez différentes l’une de l’autre mais que globalement, l’intérêt didactique et professionnalisant est assez commun. Je choisis de ne pas nommer les deux organismes de formation afin de respecter une certaine discrétion qui m’a été demandée. En revanche, j’ai été autorisée à utiliser des photographies à condition de respecter l’anonymat des personnes photographiées. 1. Un centre de simulation hospitalier Ce centre de simulation fait partie d’un organisme de formation (OF) créé par la fondation administrant l’hôpital. Cet hôpital universitaire accueille en stage bon nombre d’étudiants en médecine, en maïeutique, en soins infirmiers et autres professions de santé. Il draine les deux écoles qui lui sont accolées (école de sages-femmes et Institut de Formation en Soins Infirmiers) mais également les étudiants en médecine de l’université dont ils sont partenaires. La volonté de l’hôpital de se positionner comme un acteur majeur de la simulation en santé l’a poussé à créer l’OF puis le centre de simulation. Celui-ci occupe 600 m² de surface entre plateaux techniques et salles de formation ou débriefing. Le public accueilli est varié : il s’agit d’étudiants et de professionnels des métiers médicaux et paramédicaux. Environ 1200 personnes passent par le centre de simulation chaque année. Différentes thématiques de formation y sont proposées : l’anesthésie-réanimation, la chirurgie de pointe, l’obstétrique, les urgences, la préparation des anti-cancéreux. Tous ces domaines font appel à des mannequins ou des simulateurs de pointe. Mais d’autres thématiques nécessitent l’intervention de patients standardisés ou d’acteurs qui jouent le rôle de la famille. C’est le cas pour les formations sur la communication, les greffes et même parfois pour les thématiques citées précédemment. L’un des scénarii consiste à faire mourir sciemment le mannequin, sans que cela soit dû à une erreur d’un participant et ainsi permettre de passer ensuite en salle des familles pour annoncer le décès. Le débriefing sera focalisé sur la phase d’annonce, le briefing ayant permis en amont de désamorcer ce
  13. 11 qui allait se passer avec le patient. Cela permet de rendre la situation plus réaliste pour que les participants s’investissent pleinement dans leur rôle. Les formateurs sont pour la plupart des médecins de l’hôpital ayant suivi une formation de formateur en simulation. Mais l’OF fait appel à des prestataires qui mettent en œuvre les simulations et gèrent l’aspect technique (caméras, mannequins, régie…). Les thématiques développées correspondent aux spécialités de l’hôpital. L’un des acteurs majeurs présent depuis la création du centre de simulation est un médecin anesthésiste. C’est pourquoi tout naturellement les simulations en anesthésie ont été développées de manière plus importante et sont aujourd’hui rodées. Par ailleurs, la neurochirurgie y est un domaine d’excellence, l’un des chirurgiens exerçant au sein de l’hôpital ayant développé une technique chirurgicale utilisée aujourd’hui dans le monde entier. Elle consiste à réaliser l’ablation de l’hypophyse, petite glande intracrânienne accessible par robot par voie nasale. Plusieurs simulateurs ont été acquis par l’OF afin de former des neurochirurgiens du monde entier à cette technique. Le simulateur permet de visualiser ce que l’opérateur fait sur une tête en silicone à usage unique. C’est le neurochirurgien de l’hôpital, lui-même formé à la simulation qui dirige les séances de simulation. Cette partie du centre de simulation a coûté très cher, le matériel étant similaire à celui retrouvé au bloc opératoire. Les têtes siliconées ont également un coût élevé et ne sont pas réutilisables une fois percées lors de la séance. Le centre de simulation dispose de différents mannequins de simulation très sophistiqués : un homme adulte, une femme adulte enceinte avec bassin obstétrique, un bébé de 10 jours et un prématuré. Ces mannequins peuvent parler grâce à l’intervention du régisseur, on peut les ausculter car ils « respirent » et on peut ressentir un pouls. Deux salles sont dédiées à leur manipulation lors de différents scénarii en haute-fidélité. Des caméras permettent d’observer tous les acteurs et leurs actions. Les étudiant(e)s et professionnel(le)s sages-femmes et médecins obstétriques peuvent ainsi s’exercer sur des situations critiques en obstétrique. Image 7 – Simulateur d’ablation de l’hypophyse par voie endo-nasale Image 6 – Simulation en anesthésie
  14. 12 Pour les personnels paramédicaux, une « chambre des erreurs » peut être mise en place dans un but d’amélioration de la qualité des soins et de gestion des risques. Cela consiste à reproduire une chambre de patient et d’y incorporer des « erreurs » que les participants doivent identifier. Le centre dispose également de plusieurs bras de simulation utilisés pour que les étudiants s’entrainent à perfuser, geste douloureux et assez compliqué lorsqu’on ne l’a jamais pratiqué. Ces bras sont assez réalistes et sont l’interface idéale pour comprendre le déroulement de la technique de soin, appliquer les principes d’hygiène et effectuer les gestes. Cependant l’étudiant ne ressentira pas exactement ce qu’il vivra en situation réelle : les veines qui roulent, la peau plus ou moins fine, la peur ou non de l’aiguille de la part du patient etc. Enfin, l’une des dernières particularités de ce centre de simulation est leur simulateur d’isolateur pour la préparation des chimiothérapies. Ces molécules détruisent les cellules cancéreuses mais sont un danger pour les personnes en bonne santé qui les manipulent. Depuis une dizaine d’années, les chimiothérapies sont préparées par des préparateurs en pharmacie dans une unité spécifique distincte du service de soins. Ces préparations sont effectuées dans un isolateur stérile limitant la dissémination des molécules cytotoxiques mais aussi la contamination des poches ainsi préparées. Le circuit des Image 8 - Mannequin de simulation en obstétrique Image 9 - Bras de simulation pour perfusion Image 10 - Simulateur d'isolateur pour préparation de cytotoxiques
  15. 13 cytotoxiques est complexe et nécessite une vigilance accrue. Afin d’assimiler tous ces processus, le simulateur apporte une aide non négligeable. Les préparateurs et pharmaciens viennent s’y exercer et mettre à jour leurs connaissances car de nouvelles molécules apparaissent sur le marché régulièrement. Une caméra située à l’intérieur de l’isolateur permet au formateur de scruter les moindres gestes effectués et notamment de vérifier la dilution effectuée. Le centre convie également les infirmières de cancérologie à des séances de formation pour prendre conscience de la dangerosité parfois sous-estimée de ces molécules. Cela permet de changer leurs habitudes de manipulation des poches au lit du patient. Pour résumer, ce centre de simulation a une grande variété de scenarii possibles issu des spécialités de l’hôpital dans lequel il a été développé. Depuis peu, il fait appel à des prestataires en mesure d’incorporer de la réalité virtuelle pour certaines séances de simulation, notamment en chirurgie. Nous verrons que ces technologies sont l’avenir de la simulation. Quatre questions à Sophie Prissette2 sur la simulation pour les paramédicaux Quelle est la plus-value de la simulation pour les paramédicaux ? SP : La particularité de l’utilisation de la simulation en formation initiale comme nous le faisons est de rendre plus réalistes les situations que les étudiants risquent de rencontrer lors de leurs stages. Cela augmente leur capacité à se projeter dans l’exercice de la fonction qu’ils occuperont. Je pense également que cela a un impact certain sur le sentiment d’efficacité personnelle des étudiants. On constate une prise de confiance en soi plus importante. L’autre avantage est le développement de l’analyse clinique. On demande aux étudiants dès le début de leur formation de savoir observer et d’analyser ce qu’ils voient. La simulation permet de passer à la pratique rapidement. Quels scenarii déroulez-vous dans vos sessions de simulation ? SP : Alors pour commencer, avec les étudiant(e)s auxiliaires de puériculture (EAP), nous avons l’accueil en crèche, les conseils à l’allaitement maternel et la prise en charge de l’enfant. Avec les étudiant(e)s aide- soignant(e)s (EAS), nous avons l’accueil en EHPAD, en orthopédie et en rhumatologie. La plupart de ces simulations se font avec des patients standardisés puisqu’il s’agit plutôt de soins relationnels. Enfin, avec les étudiants en soins infirmiers (ESI), en 1ère année nous leur proposons les différents scenarii d’accueil utilisés avec les EAS, en 2ème année les situations dysfonctionnelles en transfusion sanguine et enfin en 3ème année les situations d’urgence et le travail collaboratif avec EAS et EAP, ce qui est assez spécifique. Que vous permet de mettre en exergue le débriefing ? SP : C’est selon la situation et surtout selon les objectifs du scenario. En général les objectifs sont respectés grâce aux scenarii qui sont assez bien ficelés. Evidemment s’il y a des aléas c’est sur cela qu’on va débriefer le plus. Le but c’est d’amener les étudiants à évaluer les écarts entre ce qui a été fait et les attendus. Pour certains étudiants, ils vont eux-mêmes mener le débriefing et dans ces cas-là nous les aidons à analyser leur pratique. 2 Cadre formatrice à l’IFSI Saint-Joseph à Paris, elle a co-écrit avec Catherine Dupuy-Maribas le premier ouvrage français sur la simulation à destination des paramédicaux : Formation par la simulation et soins infirmiers, paru en 2016 aux éditions Lamarre. L’IFSI Saint-Joseph utilise la simulation pour ses étudiants en soins infirmiers, auxiliaires de puériculture et aide-soignant(e)s depuis 2012. Ils disposent de deux centres de simulation : l’un est dans les locaux de l’IFSI, l’autre dépend de l’hôpital Saint-Joseph attenant.
  16. 14 Pour vous, quel est l’avenir de la simulation pour les paramédicaux ? SP : Si je devais imaginer la simulation en 2025, j’imaginerais des grands espaces comme il en existe déjà à Amiens, Angers et Vannes où il serait possible de faire de la simulation 24/24h. Un vrai service de soins reproduit serait un vrai plus pour les étudiants en formation initiale. Mais c’est un peu utopique parce que le coût en serait beaucoup trop important et le retour sur investissement assez faible. Les serious game ou du moins les logiciels de simulation ont en revanche un bel avenir devant eux. IFSIMULATION© par exemple répond parfaitement à nos attentes de formateurs. En revanche, cela reste quand même du « jeu » et on ne vit pas la situation aussi pleinement qu’une vraie séance de simulation. 2. Un centre de simulation au sein d’un organisme de formation en santé Le deuxième centre de simulation que j’ai eu la chance de visiter se situe dans un organisme de formation privé en santé. Acteur important des OF en santé, il a fait des formations en présentiel une force et se déplace au sein des établissements de santé clients afin de dispenser les formations. L’un de ses membres fondateurs est un médecin urgentiste encore en exercice au SAMU. La simulation est très appréciée en médecine d’urgence car elle permet de s’exercer sur des situations critiques sans mettre en danger le patient. Cet OF propose dans certaines de ses formations des séances de simulation en plus de l’aspect théorique. L’équipe a aussi pris le parti de proposer des formations basées uniquement sur la simulation. J’ai ainsi pu assister à une séance de simulation de situation critique en anesthésie. La séance de simulation nécessite une logistique importante et mobilise trois personnes indispensables à la bonne réalisation de la séquence. Le formateur observe ce que font les opérateurs et donne les instructions pour adapter le scénario au fur et à mesure au régisseur. Celui-ci doit assurer le réalisme de la séquence en amont et pendant la mise en situation. A ce moment-là, il fait parler le mannequin grâce à un micro, applique ce que lui demande le formateur et ajuste les caméras si besoin pour que les observateurs restés dans la salle de débriefing voient tous les éléments. Cela demande de la réactivité et une dextérité importante. Le dernier intervenant est celui qu’on peut appeler le facilitateur. Il connaît le simulateur et où se trouve le matériel et peut aider les apprenants pendant la mise en situation. Lors de la séquence que j’ai pu observer, le facilitateur a endossé le rôle de l’aide- soignant de bloc opératoire pour que cela puisse paraître plus crédible. J’ai pu remarquer que le débriefing était particulièrement bien construit, partant de l’expérience vécue pour généraliser avec des apports théoriques. Le formateur a pu, grâce à la verbalisation du ressenti des participants et de ce qu’avaient pu remarquer les observateurs, mettre en avant l’organisation, la technique et les décisions qui avaient été prises. Un échange sur les pratiques de chaque membre du groupe issus de différents hôpitaux a été possible. Finalement, le formateur a fait une sorte d’entonnoir, partant de la situation et de l’expérience vécue pour arriver à un apport théorique sur la gestion de la pression artérielle lors de l’induction en anesthésie, ce qui était l’objectif de son scénario. J’ai pu observer une deuxième séance sur le thème de la situation critique en réanimation cette fois- ci, avec une équipe d’infirmiers et une aide-soignante, ce qui permet de mettre en avant la communication dans l’équipe et l’enchaînement des actions effectuées par chacun.
  17. 15 Cet exemple de centre de simulation est intéressant car les formations peuvent s’adresser à des équipes constituées ou bien à des personnes qui ne se connaissent pas, provenant d’établissements différents. Cela se rencontre de plus en plus dans la réalité chez les infirmiers anesthésistes qui font de plus en plus de missions d’intérim et qui peuvent se retrouver avec des personnes dont elles ne connaissent pas les méthodes de travail. L’OF propose par ailleurs de se déplacer « in situ » au sein des établissements qui en font la demande avec leur matériel et formateurs. Cela a un réel intérêt pour s’adapter au matériel et aux manières de faire de l’établissement. Pour conclure, ce centre de simulation est bien différent du premier, notamment à cause de la vocation des entreprises dans lesquelles ils ont été créés. Ils touchent tous les deux à des domaines bien différents mais apportent au domaine de la santé de réels bénéfices en termes de formation initiale et continue. Après ces exemples tirés du terrain de la simulation telle qu’elle existe aujourd’hui, voyons quelles sont ses perspectives d’avenir, notamment avec l’adjonction de nouvelles technologies. IV. Quel avenir pour la simulation ? La simulation, nous l’avons vu, se dote de plus en plus de technologies. Beaucoup de choses peuvent encore lui permettre de se développer. En ce qui concerne la simulation en santé, nous avons vu que les mannequins sont de plus en plus sophistiqués et le digital aide beaucoup à rendre les situations réalistes. En revanche, il leur manque encore de pouvoir changer de couleur, de matérialiser un changement au niveau cutané, la sudation, la chaleur ou la froideur etc. Peut-être un jour aurons- nous des « robots-mannequins » ayant ces capacités. Cela serait d’une grande aide pour le jugement clinique, base des métiers de la santé. L’autre avancée majeure déjà en cours est le développement des logiciels de simulation. Il y a un réel potentiel et ceci dans tous les domaines pour ces modes d’apprentissage. Attention toutefois à ne pas oublier la pédagogie, notamment grâce à une forme de débriefing après le passage sur simulateur. En effet, l’interface fait beaucoup penser à un jeu vidéo et on pourrait se « prendre au jeu » et oublier que la première vocation de ces logiciels est l’apprentissage. Image 11 - Séance de simulation de situation critique en réanimation
  18. 16 Par ailleurs, la réalité virtuelle (VR) permet déjà de réaliser des séances de simulation lorsque l’environnement ne le permet pas. L’apprenant est plongé dans un monde virtuel semblable à son lieu d’exercice où il va pouvoir développer des compétences non-techniques. En effet, il est impossible avec le seul casque de VR de réaliser des gestes et des procédures techniques (Barre et al., 2017). Une agence a d’ailleurs développé des modules de simulation en réalité virtuelle pour des commerciaux3 . Le gant haptique, qui permet de prendre la composante gestuelle est encore perfectible mais est déjà utilisé dans certains domaines comme la chirurgie pour s’entraîner sur des protocoles complexes. D’autre part, la réalité augmentée est également en plein essor et fera sûrement partie des situations simulées des prochaines années. Les lunettes Hololens4 ont déjà été utilisées lors d’interventions chirurgicales complexes où les imageries téléchargées au préalable permettait au chirurgien de visualiser ce qui se situait en dessous de ce qu’il voyait réellement. Cela pourra certainement être utilisé en pédagogie pour l’apprentissage de certaines techniques complexes. Un logiciel de simulation pour le « damage control » En secourisme, les formations s’appuient beaucoup sur les jeux de rôle pour mettre en situation les apprenants. Le maquillage et les instructions données à la victime simulée sont la base de la simulation. Aujourd’hui, cela s’avère insuffisant, notamment au vu des événements terroristes qui touchent la France depuis quelques années. La médecine d’urgence se voit confrontée à des situations où les victimes sont nombreuses et dont le pronostic vital est très rapidement dégradé par des hémorragies et des atteintes traumatiques importantes. Cela est nouveau et nécessite l’adaptation de la médecine d’urgence mais il est difficile de disposer d’un nombre suffisant de victimes simulées pour que cela soit crédible. Une société qui développe des logiciels de simulation a créé une simulation pour le « damage control5 », technique de gestion d’un nombre important de victimes en préhospitalier. Il propose différents scenarii et la possibilité de paramétrer le nombre de victimes et les moyens sur place. Ainsi, différents professionnels peuvent s’exercer sur ce simulateur : secouristes, médecins, infirmiers… La prise en charge est adaptée à chaque contexte. Cela s’avère très intéressant pour former rapidement les acteurs de l’urgence au damage control qui est un procédé nouveau pour les acteurs du secourisme français. 3 Développé par l’agence Jin, le Pitchboy vise à améliorer les résultats de ventes des commerciaux : https://www.usine-digitale.fr/article/le-pitchboy-un-simulateur-de-vente-pour-former-les-commerciaux-en- realite-virtuelle.N757534 4 Lunettes de réalité augmentée de Microsoft : https://experiences.microsoft.fr/business/new-culture-of-work- business/chirurgie-assistee-avec-hololens/ 5 Logiciel développé par la société Medusims : http://www.medusims.com/traumasims/ Image 12 - Capture d'écran Traumasims
  19. 17 Reste à imaginer ce que l’intelligence artificielle pourra apporter aux situations simulées. Peut-être anticiper ou analyser les réactions et décisions prises et adapter le scenario en temps réel ? Dans ce cas, plus besoin de trois personnes pour gérer le temps de simulation… Ou bien imaginer des scenarii instantanément selon les objectifs que se fixent les apprenants eux-mêmes ? Ce qui est sûr, c’est que la simulation va voir émerger de nouveaux métiers ou spécialités en pédagogie et il faudra parvenir à développer les compétences des professionnels qui choisiront cette voie. En conclusion, nous avons vu que la simulation possède un réel attrait pédagogique lorsqu’il s’agit de former à la maîtrise du geste, aux procédures et au travail pluriprofessionnel. Les technologies numériques sont une réelle plus-value pour améliorer le réalisme des séances de simulation. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue les principes clés de la simulation, issus de la didactique professionnelle. A chaque situation, il faut pouvoir se poser la question de la pertinence de choisir la simulation comme levier d’apprentissage.
  20. 18 Bibliographie – Sitographie Audran, J. (2016). Se former par la simulation, une pratique qui joue avec la réalité. Recherche & formation, (82), 9-16. Barre, J., Benabbou, A., Corneloup, V., Bourrier, Y., & Job, A. (2017). Simulation et Réalité Virtuelle pour l’apprentissage des Compétences Non-Techniques en conduite et en médecine des situations d’urgence. In Journées J-RV (journées de l’AFRV). Rennes, France. Consulté à l’adresse https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01681378 Chirurgie assistée par HoloLens. (2018, février 23). Consulté 14 janvier 2019, à l’adresse https://experiences.microsoft.fr/business/new-culture-of-work-business/chirurgie-assistee- avec-hololens/ Fauquet-Alekhine, P., Pehuet, N., & Amalberti, R. (2011). Améliorer la pratique professionnelle par la simulation. Toulouse (24 rue Nazareth, 31000): Octarès. Fleck, S., & Audran, J. (2016). Réalité augmentée et interfaces tangibles, quels liens avec la formation par simulation ? Recherche & formation, n° 82(2), 85-90. Formation | IESA Group. (s. d.). Consulté 14 octobre 2018, à l’adresse https://www.iesa- group.com/expertises/simulateur/formation/ Galland, J. (2018). Développement de la simulation en santé : ne pas confondre vitesse et précipitation. La Revue de Médecine Interne, 39(7), 543-545. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.02.025 Gobert, T. (2016). Simulation immersive de drones aériens en écoles de télépilotage professionnelles. Recherche & formation, (82), 61-74. Granry, J.-C., & Moll, M.-C. (2012). État de l’art (national et international) en matière de pratiques de simulation dans le domaine de la santé (Rapport de mission) (p. 110). HAS. Consulté à l’adresse https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2012-01/simulation_en_sante_- _rapport.pdf IFSImulation - Une simulation APM en 3D pour les étudiants infirmiers. (s. d.). Consulté 29 décembre 2018, à l’adresse https://www.ifsimulation.fr/ Jaffrelot, M., & Pelaccia, T. (2016). La simulation en santé : principes, outils, impacts et implications pour la formation des enseignants. Recherche & formation, (82), 17-30. Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. (2018). Nucléaire civil. Consulté 27 décembre 2018, à l’adresse https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/diplomatie- economique-et-commerce-exterieur/soutenir-les-entreprises-francaises-a-l-etranger/les- secteurs-economiques-de-pointe-un-atout-pour-la-france-soutien-aux- secteurs/article/nucleaire-civil Oget, D., & Audran, J. (2016). Simulation. Recherche & formation, n° 82(2), 75-84. Pastré, P. (2005). Apprendre par la simulation - De l’analyse du travail aux apprentissages professionnels. Toulouse: Octarès éditions. Pastré, P., Mayen, P., & Vergnaud, G. (2006). La didactique professionnelle. Revue française de pédagogie, (154), 145-198. https://doi.org/10.4000/rfp.157 Poplimont, C. (2016). Recours à la simulation dans un dispositif de formation de formateurs à la prévention des risques routiers auprès de salariés. Recherche & formation, (82), 47-60.
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