Le Président de la République veut réformer notre organisation territoriale, un projet de loi est en cours d’examen au Parlement. Ambition légitime que de vouloir améliorer notre démocratie, moderniser nos institutions, renforcer nos collectivités. Ce débat, qui engage notre pays pour des décennies, ne peut se faire en catimini, sans les citoyens ni les élus. Voici un dossier spécial pour ouvrir le débat.
Dossier sur la réforme territoriale dans le Jura - Juramag n°20 - juillet 2014
1. DOSSIER :
Pour une "vraie" réforme !
> Aéroport,
les nouvelles destinations
> Vivez le Tour de France
dans le Jura !
juin 2014 - n°20
www.jura.fr
L e m a g a z i n e d e s J u r a s s i e n s
2. 3
La Décentralisation,
une idée moderne !
Le Président de la République veut réformer notre
organisation territoriale, un projet de loi est en cours
d’examen au Parlement. Ambition légitime que de
vouloir améliorer notre démocratie, moderniser nos
institutions, renforcer nos collectivités. Ce débat, qui
engage notre pays pour des décennies, ne peut se
faire en catimini, sans les citoyens ni les élus.
OUI, il faut simplifier notre organisation, en premier lieu celle de l’État
sur nos territoires et clarifier les compétences des collectivités.
NON, cette réforme ne sera pas source d’économie, mais au contraire
de surcoût.
OUI, nous pouvons travailler entre collectivités, et il existe d’ailleurs des
dizaines de coopérations entre Bourgogne et Franche-Comté depuis des
années sans qu’une fusion ne les ait facilitées.
NON, les élus ne sont pas un poids pour notre démocratie, mais bien une
force enviée dans le monde entier.
OUI, le département est un échelon indispensable à notre organisation
territoriale.
Le Président de la République avec cette réforme joue contre son camp :
• celui de la République, on ne renforce pas la République en s’attaquant
aux élus et aux institutions. Les conseillers généraux représentent
1 % des élus en France ! Quelles économies allons-nous faire ?
Par ailleurs, éloigner le centre de décisions des citoyens aura comme
effet de continuer à développer l’abstention et le vote extrême.
• celui de l’efficacité économique : les collectivités sont un
moteur déterminant de notre économie, cette réforme ralentit
l’investissement et l’économie française va en pâtir.
• celui de la Gauche : son engagement 54 affirmait le maintien
des départements et une volonté de proximité. Par ailleurs, la
Décentralisation portée par François MITTERRAND, Pierre MAUROY
ou Gaston DEFFERRE est très éloignée de cette recentralisation
ancrée dans la réforme proposée.
Je reste avant tout au service des Jurassiens et demeure incapable
de renier mes engagements. Je suis contre une démarche qui se fait
sans les élus que nous sommes et les citoyens que vous êtes. Je vous
proposerai de vous exprimer sur la fusion des régions car si certains
bassins de vie jurassiens, comme celui de Dole ou du Nord Jura sont
tournés vers la Franche-Comté et la Bourgogne, d’autres comme
Saint-Amour, la Petite Montagne ou le Haut Jura, sont résolument tournés
vers Rhône-Alpes. N’est-ce pas à vous de choisir, pourquoi pas lors d’une
consultation ou d’un référendum ?
Je serai le porte-parole du choix des Jurassiens.
É d i t o
NON
à la fermeture
du lycée
Le Corbusier !
Dans un monde où l’économie est
en crise, l’éducation est une force,
un investissement pour l’avenir.
C’est pourquoi la nouvelle venant
de Besançon visant à réduire
la carte des lycées dans notre
département, en commençant par
le lycée Le Corbusier, a suscité
une vive réaction du monde de
l’éducation et des Jurassiens.
Cette décision n’est pas la bonne,
surtout à un moment où certains
nous expliquent qu’il faudrait
réfléchir à l’échelle d’une grande
région. Nous devons aussi
réfléchir en termes de potentiel
sur cette grande région. Je suis
aux côtés des Jurassiens pour ce
combat.
Christophe Perny, Président du Conseil général du Jura
Une motion votée à l'unanimité (moins 2 voix) est en ligne sur www.jura.fr
3. D o s s i e r
« Nos services
publics
départementaux
ont apporté la
preuve de leur
efficacité dans
le Jura comme
partout en
France. »
Claudy Lebreton
Président de l'Assemblée
des Départements de France
15
Interview du Président de l’Assemblée des
Départements de France, à propos du projet de
réforme territoriale du gouvernement.
Quelle est votre réaction face à l'annonce de la réforme territoriale ?
Un rendez-vous raté avec la démocratie. C’est le mouvement historique de
décentralisation enclenché par Gaston Defferre en 1982 qui est stoppé.
Il s’agirait plutôt aujourd’hui de transférer de nouvelles compétences,
assumées jusque-là par l’État, aux collectivités, car nos services publics
départementaux ont apporté la preuve de leur efficacité dans le Jura
comme partout en France et ceci dans de nombreux domaines de la
vie de tous les jours : solidarités, emploi, éducation, culture, logement,
transport, sport…
Pour vous, quel est le principal atout du Département ?
Sa capacité historique à agir sur les êtres humains et leurs espaces, à
aménager le territoire tout en assurant la mise en œuvre de politiques
sociales indispensables pour nos concitoyens les plus fragiles. C’est la
collectivité de proximité par excellence et à taille humaine.
Les conseils généraux sont de formidables laboratoires d’innovation
en matière de politiques publiques. J’ai déjà visité le Jura en été, j’y ai
découvert des trésors d’inventivité mis en place par les élus et les services
publics avec le concours des habitants de votre beau département.
Si vous deviez retenir un chiffre significatif dans ce débat, quel serait-il ?
47 milliards d’euros. Ce sont les économies réalisées depuis 2002
par l’ensemble des départements pour financer les trois allocations
individuelles de solidarité (APA, PCH, RSA) dont l’État n’assume pas la
charge comme il le devrait.
Cela représente un effort de gestion colossal de la part des départements,
qu’aucun autre niveau de collectivité n’a pour l’instant réalisé. C’est pour
cela que j’ai du mal à entendre les leçons de bonne gestion de la dépense
publique formulées par certains.
Claudy
Lebreton :
« Le département est la
collectivité de proximité
par excellence »
4. ,
,
D o s s i e r
16
Le Conseil général entretient
et aménage l’ensemble
des 3 500 km de routes
départementales. Entretien
des chaussées, déneigement
(4,5 M€), construction ou
consolidation d’ouvrages et
d’aménagements de sécurité…
Et surtout, réalisation
du contournement de
Lons-le-Saunier !
L’entretien et la restructuration
des collèges, l’informatisation
et le câblage pour l’accès au
très haut débit sont financés
par le Conseil général.
Le Conseil général prend en charge
le transport scolaire des 21 000
élèves jurassiens. Leurs parents
n’ont ainsi rien à débourser.
L’aéroport, qui a transporté
80 000 passagers en 2013, est financé
par le Département.
L’action
du Conseil général
en chiffres
Les élus du Conseil général du Jura ne sont pas
contre une réforme territoriale, bien au contraire.
Mais celle-ci doit se faire dans la réflexion et la
concertation. Zoom sur l’action du Département
en 2014, ou quand les dépenses sont aussi des
investissements !
C’est la somme investie en 2013 par le
Conseil général sur le territoire jurassien
C’est ce que
reprsésentent
les conseillers
généraux en France sur le
nombre total d’élus.
Si l’estimation
d’économies
de 15 milliards
d’euros au niveau
national « grâce » à cette
réforme s’avérait crédible, le
Conseil général du Jura devrait
contribuer à cette économie à
hauteur de 60 millions d’euros.
A compétences égales, qu’elles
soient ou non données à d’autres,
c’est impossible.
C’est la somme
assumée chaque
année par les
Départements pour l’État en
matière sociale. Un crédit gratuit,
qui pourra l’assumer à l’avenir ?
Millions d'euros
%
Millions
d'euros
Millions
d'euros
Millions
d'euros
Milliards
d'euros
Millions
d'euros
Millions
d'euros
C’est la somme dédiée cette année à l’aide
aux plus « fragiles ».
Soutien aux personnes handicapées et leurs
familles : 34 M€
Prise en charge des personnes âgées : 29 M€
Insertion (versement du RSA, contrats aidés,
programme d’insertion) : 19 M€
Protéger les enfants en difficulté : 18 M€
L’aide aux entreprises (investissements, production, implantation),
le développement du territoire (habitat) : 5,2 M€
Le soutien aux agriculteurs : 1,7 M€
Le service d’incendie et de secours (sapeurs-pompiers) : 8,2 M€
Le développement du tourisme : 2,7 M€, etc.
Solidarités
Transports
Et aussi…
Routes
Éducation
& Collèges
Chiffres
vérité !
,
5. Ce qu'ils en disent…
Ce qu'ils en disent…
Ce qu'ils en disent…
Ce qu'ils en disent…
17
D O S S I E R
« Je ne suis pas favorable à la
suppression pure et simple des
départements comme certains
le réclament. Des territoires
ruraux perdraient en qualité de vie sans
d’ailleurs générer d’économies supplémentaires »
« Où sont les citoyens
dans tout ça ? Tout est
imaginé au plus haut niveau
sans aucune consultation ! C'est
vraiment la “politique à papa”
du XXe
siècle »
« (…) C’est une réforme à marche forcée, où
l’on fusionne des régions qui n’ont aucune histoire
ni tradition en commun, et où l’on signe l’arrêt de mort
du département qui constitue pourtant une collectivité
territoriale de proximité. Tout cela dans la précipitation. »
« Certains continuent de
croire que moderniser
la vie politique locale,
c’est supprimer un échelon. On
n’améliore pas l’efficacité des politiques
publiques en éloignant les citoyens
des décisions. Le département est un
échelon de proximité essentiel, un
échelon républicain par excellence. À ce
titre, il conserve toute sa pertinence. »
« Arrêtons de
chiffonner notre millefeuille
et de vouloir supprimer des
feuilles par hasard, c’est un
raisonnement simpliste.
Les départements sont un pilier
de l’organisation territoriale »
François Hollande,
Président de la République
Edouard Balladur,
ancien Premier ministre et député
(UMP), président du Comité pour
la réforme des collectivités
locales (2009)
Jean-Philippe Magnen,
Vice-Président de la région
Pays de la Loire (EE-LV)
Jean-Michel Baylet,
Sénateur, Président du Conseil Général
de Tarn-et-Garonne et Président
du Parti Radical de Gauche
Alain Rousset,
Président d'Aquitaine et Président de
l'Association des régions de France (PS)
Marylise Lebranchu
Ministre
de la Décentralisation et
de la Fonction publique
de France (PS)
Manuel Valls,
Premier Ministre
Engagement 54 du projet présidentiel – 2012
Rapport Balladur – 2009
Communiqué de presse de JM Baylet, Jacques Mézard, chef de file PRG au
Sénat et Roger-Gérard Schwartzenberg, chef de file PRG
à l’Assemblée nationale – juin 2014
Au Sénat - 15 janvier 2013
21 janvier 2014
mercredi 4 juin 2014
jeudi 3 juin 2014
« Il n’est pas question
de toucher ni aux communes, ni aux
départements, ni aux régions. On ne
va toucher à rien… Ce que propose
le comité Balladur aux régions qui
le souhaitent, c’est de se marier.
Mariage de raison, d’amour mais pas
un mariage forcé » « La fusion des régions ne
sera pas source d'économies.
Au contraire, il faudra
égaliser vers le haut les salaires
des fonctionnaires territoriaux et cela
entraînera un coût supplémentaire en
fonctionnement. »
6. • Oui à la fusion des Régions, mais
en associant les élus et les citoyens
au découpage.
• Réduction du nombre des
communes, des syndicats,
suppression des « Pays »…
• Mise en place d’un statut de l’élu
qui garantisse une diversité du
monde politique.
• Limitation à 65 ans du droit à se
présenter en tant qu'élu pour
assurer un renouvellement des
générations.
• Réduction du nombre de députés.
• Suppression des sous-préfectures
dans toute la France.
• Chaque année, réunion du
Parlement pour une session de la
simplification, qui supprimerait des
centaines de normes.
• Faire du Sénat la vraie « Assemblée
des territoires », en y faisant
siéger les Présidents des Régions,
des Départements et des grandes
agglomérations, sans indemnité
supplémentaire.
• Rendre le vote obligatoire.
Toutes ces propositions, avec d’autres
encore à imaginer ou existantes,
transformeraient nos institutions.
Peut-être arriverons-nous à cette
6e
République souhaitée depuis si
longtemps ?
C’est de la société que la modernité
viendra. La France a toujours
été à l’avant-garde des avancées
démocratiques.
Le débat c’est maintenant !
D o s s i e r
18
Chrsitophe Perny avec
Patrice Joly, Président du
Conseil général de la Nièvre
et André Vallini, secrétaire
d'État à la réforme
territoriale
Entretien avec Christophe Perny,
Président du Conseil général du Jura.
Êtes-vous contre toute réforme territoriale ou contre cette réforme
précisément ?
Jenesuispascontreuneréformequipermettraituneaméliorationdel'efficacité
des services publiques. Mais une telle démarche doit s’appuyer sur les élus
locaux, les citoyens et dans un calendrier respectueux. Or la réforme que l’on
veut nous imposer aujourd’hui est conduite sans aucune concertation, aucun
débat, et dans la précipitation, avec des annonces qui changent au fil des jours.
Ce n’est pas sérieux.
Mais ce sont vos « amis » politiques qui conduisent cette réforme ?
Effectivement, mais elle va à l’encontre des engagements du candidat
Hollande et même des déclarations récentes du Président de la République
et du Premier Ministre. La grandeur de la Gauche est d’avoir initiée la
Décentralisation, avec la loi Defferre, et non une recentralisation comme
veut l’imposer le projet de loi proposé.
Certains disent : « Il veut garder son poste » ?
On construit un modèle territorial pour des générations, pas pour un destin
personnel. Le département est un échelon indispensable, pas parce que je
le préside mais parce que tout le prouve : efficacité, proximité, simplicité
d’action. Le Conseil général est la collectivité qui possède le budget le plus
conséquent, très loin devant les agglomérations. Pourquoi supprimer cet
échelon que l’État a tant renforcé ces dernières années ?
Et la fusion des Régions ?
Ce n’est pas une priorité pour nos concitoyens, c’est une idée « parisienne »,
loin de la réalité de la France. Et puis, on le voit, le découpage proposé
dans la hâte ne satisfait personne. Nous pouvons y réfléchir, mais là
aussi avec les citoyens. Ce sont les Jurassiens qui doivent choisir entre la
Franche-Comté et Rhône-Alpes par exemple.
Les 15 milliards d’économies annoncés, c’est un enjeu ?
Ce chiffre est fantaisiste et irréaliste. Pour atteindre ce chiffre, il faudrait
que le Jura « contribue » à hauteur de 60 millions d’€, soit le budget
« Ressources Humaines » du Conseil général ! La réforme proposée ne sera
source d’aucune économie. Par contre si l’État simplifiait ses procédures,
tout serait bien plus simple, sans parler de ses engagements financiers non
respectés.
Les collectivités territoriales sont une force pour notre pays, pas un problème.
Au final c’est surtout un ralentissement à venir des investissements des
collectivités.
« Pour une réforme
pensée, réfléchie »
Moderniser,
réformer…
Des idées
existent !