Toward Unified Analysis of Electricity Day Ahead Prices in Europe (French)
1. Vers une analyse unifiée des prix de l’électricité en Europe
NICOLAS ROUVEYROLLIS, 2006
(Extrait de Etude et modélisation des prix sur les marchés de l'électricité en Europe
Nicolas Rouveyrollis-Roussel - 2006 - ENSMP-CERNA)
Introduction
«The existence of viable futures markets in live cattle and live hogs is empirical
evidence that the object of speculation does not need to be a storable commodity
or financial instrument»
ANONYME
Le cadre général dans lequel évolue notre travail de recherche est celui du marché
européen de l’électricité. Mais loin de parler d’un marché unique et d’une référence
de prix pour tous les pays, le marché européen de l’électricité reste pour le moment
un concept et c’est bien plus une réalité contrastée qui peut être observée.
L’ouverture du marché ou des marchés s’est faite à des rythmes très différents
suivant la législation de chaque état membre. A l’heure actuelle, le marché européen
de l’électricité se définit comme « un vaste ensemble de marchés hétérogènes
communicants par des contrats bilatéraux de vente en gros ». Cette hétérogénéité
peut se mesurer sur différents niveaux :
• Le degré d’ouverture
• La production d’électricité et les moyens de production
• Les flux.
Ces points de comparaisons sont assez significatifs du cadre non uniforme régissant
le commerce de l’électricité en Europe qui sera présenté dans le premier chapitre.
De part la nature physique (non stockabilité) de l’électricité et par la détermination
des prix comme l’intersection des courbes agrégées d’offre et de demande, il vient
naturellement à l’esprit que cette hétérogénéité doit se refléter dans la dynamique
des processus de prix au comptant. Cette intuition se matérialise effectivement, en
considérant quatre marchés différents même si ceux-ci affichent un positionnement
géographique assez proche. Nous pouvons observer des dynamiques de prix Day-
Ahead dissimilaires, tel est le cas pour les marchés que nous souhaitons étudier :
Powernext, EEX, APX et NordPool .
Ces dynamiques de prix hétéroclites posent en elle-même une problématique de
comparaison, et plus généralement un défi de représentation unifiée que nous
choisissons d’aborder dans le deuxième chapitre par une analyse empirique.
Gardant à l’esprit la nature « impalpable » de l’électricité en tant que bien non
stockable et directement consommé, nous faisons l’hypothèse que cette
1
2. caractéristique doit se retrouver dans la dynamique des prix Day-Ahead. D’un autre
coté, la structure du commerce de l’électricité sur un marché organisé, peut d’une
certaine manière se représenter sous un formalisme du type « traitement du signal ».
Tout nous amène alors à associer une nature de signal physique perturbé aux
processus de prix Day-Ahead et par conséquent à nous orienter vers les méthodes
dites de traitement du signal.
Dans la direction d’analyse unifiée que nous avons choisie, la méthode que nous
allons utiliser et présenter est l’analyse SSA. Cette technique qui être vue comme
une variante de l’analyse en composantes principales dans le domaine temporel,
trouve ses fondements dans la théorie des systèmes dynamiques et tente de décrire
une série temporelle à l’aide de sa structure de covariance retardée (lag-covariance).
Dans l’application de cette technique aux séries de prix Day-Ahead, notre objectif
sera double :
• Séparer le caractère physique des perturbations mesurées
• Décrire / décomposer et voir dans quelle mesure les différentes séries
de prix possèdent des caractéristiques communes
2
3. Chapitre 1 : Le marché européen de l’électricité : constat d’un
contraste
Introduction
Dans ce premier chapitre nous discutons dans sa généralité des disparités
matérialisant le commerce de l’électricité en Europe.
Le premier point de vue que nous adoptons pour illustrer cette hétérogénéité,
concerne la structure même de chaque marché. En première section (§A), après une
brève description sur l’introduction de la finance dans l’électricité (§A1), nous
proposons une description synthétique des disparités inhérentes à chaque pays
membre de l’Union européenne et nous mettons en avant que celles-ci peuvent être
observées sur trois niveaux :
• Les degrés d’ouverture (§A2), en effet les marchés n’ont pas été créés en
même temps, et par conséquent affichent des maturités d’évolution
différentes
• Le type d’électricité produite (§A3) qui va découler à la fois des ressources
naturelles de chaque pays mais aussi d’enjeux politico-économiques
• Les flux et les échanges (§A4)
De ces observations il ressort alors (§A5) qu’en conséquence, les différentes
bourses électriques vont produire des dynamiques de prix différentes.
Dans la deuxième section de ce chapitre (§B), nous nous focalisons sur quatre
marchés différents (NordPool, APX, EEX et Powernext), et nous vérifions
empiriquement par une analyse élémentaire que les prix Day-Ahead de l’électricité
qui sont construits selon un mécanisme standard ( §B1) , affichent effectivement des
dynamiques différentes qui peuvent être :
• « Lisse », tel est le cas du NordPool ( §B2), et un lien très fort avec l’évolution
du niveau d’eau dans les réservoirs est suggéré
• « A forte variabilité », les prix APX (§B3) affichent notamment une forte
instabilité et des pics exemplaires
• « Modérée » ce qui est le cas de Powernext et EEX ( §B4) et les prix peuvent
être superposés
De ces disparités à la fois dans les prix mesurés mais aussi dans la nature même
des marchés (NordPool : Hydraulique, Powernext : Nucléaire …), vient alors naître
une problématique de comparaison que nous présentons en dernière section ( §C).
3
4. A. Généralités
S’il est un vent qui souffle depuis plusieurs années sur l’Europe, c’est bien le vent de
l’unification …L’électricité n’échappe donc pas à ce courant d’air et celui-ci voudrait
bien la diriger vers un marché solide, liquide et basé sur une structure de
fonctionnement unique.
Mais avant de former une armée forte, il faut commencer par désarmer ses propres
troupes à savoir les systèmes électriques solidement implantés et les contrats de
gros qui lient les marchés entre eux. Avec la mise en place d’un processus
d’ouverture à la concurrence des marchés européens amorcé par la directive du 19
décembre 1996, les marchés ont donc commencé à se libérer … plus ou moins
progressivement en fonction des anciens systèmes précédemment installés.
Aujourd’hui l’électricité a donc pris une nouvelle dimension, avec l’apparition des
bourses électriques on parle maintenant de marché, de prix Day-Ahead et de trading
d’électricité si bien que celle-ci suscite aussi bien l’intérêt des financiers que celui
des industriels et des particuliers. Nous commençons par donner des éléments sur le
processus de dérégulation qui est à l’origine des prix que nous étudions.
A.1. Sur l’introduction de la finance dans l’électricité
En Europe, le marché de l'électricité est en voie de libéralisation. Le 25 novembre
2002, les ministres de l'énergie de l'Union européenne se sont mis d'accord pour
prévoir l'ouverture globale du marché de l'électricité en 2007. L'Angleterre et la
Norvège possèdent déjà une expérience de plusieurs années. Les Etats-Unis,
l'Amérique du Sud, l'Australie, la Nouvelle Zélande et un nombre croissant de pays
asiatiques ouvrent leurs marchés à la concurrence.
Les enjeux sont de taille, si l'on pense à l'importance que l'électricité revêt pour
l'économie et la société. Les principales questions concernent les conditions de
fourniture d'électricité à l'industrie et aux ménages, la sécurité des
approvisionnements, les conséquences environnementales, l'avenir des sociétés
d’électricité (éventuelle privatisation, fusions, internationalisation, etc.).
Avec le processus de libéralisation enclenché par la directive du 19 décembre 1996,
sont apparus de nouveaux acteurs: les marchés Day-Ahead organisés et les
marchés à terme. Aujourd’hui, tous les grands marchés européens sont dotés
d’une bourse. En Europe, la plus ancienne est le « Nord Pool » scandinave. Il
regroupe la Norvège, la Suède, la Finlande et le Danemark. En Espagne, une bourse
a été créée sous l’impulsion des producteurs nationaux tels que Endesa, Iberdrola et
Union Fenosa. Aux Pays-Bas, la bourse d’Amsterdam, l’APX, compte Electrabel
parmi ses fondateurs. L’Allemagne, le 26 octobre 2001, a vu la fusion de ses deux
bourses d'électricité EEX (Francfort) et LPX (Leipzig), l’entité résultante conserve le
nom de EEX, Phelix (Physical Electricity Index) est le nouveau nom du marché Day-
Ahead formé. La France, quant à elle, a franchi le pas avec le lancement de
Powernext en novembre 2001. Partout dans le monde, les bourses se multiplient :
4
5. Grande-Bretagne (UKPX), Australie, Nouvelle-Zélande, Chili, Californie, état de New-
York etc…
On retrouve sur le marché de l’électricité les mêmes acteurs principaux que sur les
autres marchés :
• Les producteurs qui réalisent la vente des excédents. Typiquement, nous
pouvons distinguer deux cas :
celui d’un producteur en surproduction
celui d’un industriel, devant recevoir (via par exemple un contrat
de livraison) plus d’électricité qui lui est nécessaire
• Les distributeurs qui réalisent les achats de quantités supplémentaires pour
effectuer un ajustement à la demande. Comme par exemple l’achat
d’électricité pour le lendemain couvrant un besoin supplémentaire
• Les transmetteurs qui réalisent l’équilibrage du réseau et qui doivent couvrir
des pertes d’électricité sur le réseau même (ex : RTE qui est une des plus
importants acteurs sur Powernext)
• Les négociants
• Les courtiers dans le rôle de l’intermédiation.
Tous les acteurs du marché doivent, bien évidemment, bénéficier d’un libre accès au
marché du trading.
Outre les producteurs et distributeurs d’électricité, sont apparus de nouveaux
participants tels que les brokers (courtiers intermédiaires entre le vendeur et
l’acheteur, rémunérés à la commission, n’intervenant pas en bourse et ne prenant
pas de risques financiers) et les traders (négociants indépendants qui achètent à
terme et revendent plus tard pour leur propre compte).
Parler d’un marché européen de l’électricité reste pour le moment un concept et on
observe plus une réalité contrastée qu’unifiée : l’ouverture du marché s’est faite à
des rythmes très différents suivant la législation de chaque état membre. A l’heure
actuelle, le marché européen de l’électricité peut se définir comme « un vaste
ensemble de marchés hétérogènes communicants par des contrats bilatéraux de
vente en gros ».
Cette hétérogénéité peut se mesurer sur différents niveaux que nous présentons
maintenant.
A.2. Sur la structure et le degré d’ouvertures des marchés
Une conséquence de la disparité de chaque pays de l’union européenne dans la
structure originelle de son système électrique avant la directive de 1996, est un
rythme d’ouverture différent d’un pays à l’autre. L’union nordique, l’Allemagne et la
Grande Bretagne sont des modèles du genre avec une ouverture complètement
5
6. accomplie. D’un autre coté la France longtemps vue comme le « mouton noir » de la
libéralisation de l’énergie est l’exemple même où le chemin vers celle-ci est long et
tortueux. En effet, depuis plusieurs années, la France a choisi d’ouvrir son marché
au minimum requis sans donner de date précise sur son ouverture totale, il aura fallu
attendre les élections 2002 pour la date cible de juillet 2004.
Il n’en reste pas moins à l’heure actuelle des degrés de libéralisation hétérogènes et
un impact certain sur le niveau des prix provenant :
• De l’intervention de l’état pour les pays à faible degré d’ouverture
• De l’offre et la demande : plus le degré est élevé, plus le prix est déterminé
par cette loi
• De la liquidité du marché et des volumes échangés et par conséquent du
nombre de participants mais aussi de leur type
D’autre part, découlant du degré d’ouverture, différents types de bourses se
distinguent et on trouve essentiellement :
Des marchés Day-Ahead : marchés au comptant dont le but est de fixer le cours et
organiser les contrats à court terme : les « Day-Aheads ». Ces types de contrats ont
été mis en place pour éviter les risques liés aux contrats à long terme. Dans le cadre
des contrats à long terme, le vendeur (producteur) met à la disposition de l’acheteur
(un autre producteur ou un client industriel) une puissance définie, avec un certain
niveau de garantie. L’acheteur prend un risque : payer des pénalités financières s’il
consomme plus ou moins que ce qui était prévu au moment du contrat. Il en est bien
sur de même pour le vendeur qui prendra des risques similaires sur la quantité livrée.
Des marchés à terme Forward / Future : où se vendent des contrats pour acheter
de l’électricité à un moment déterminé dans le futur à un prix déterminé. Le paiement
s’effectuant à la date de livraison. La différence entre ces deux types de contrat
réside dans le fait que les contrats Future prennent en compte les bénéfices et les
pertes (par l’intermédiaire des appels de marge) contrairement aux contrats Forward.
L’existence de ces deux types de bourses est aussi un facteur de maturité dans la
mesure où chronologiquement on assiste d’abord à la création des marchés Day-
Ahead organisés, puis à celle des marchés à terme structurés.
Le tableau qui suit donne un résumé de la structure des différents marchés
européens en 2003 en faisant apparaître les différents éléments que nous venons de
mentionner :
• Le degré d’ouverture tels qu’annoncé par les pouvoirs publics
• Les types de bourses : marché Day-Ahead , marchés future
• Les acteurs significatifs
6
7. Résumé de la situation 2003. (Source : Regairaz[125])
Pays Ouverture Bourse
du Particularité - Principaux acteurs
Marché
en 2002
Scandinavie 90%- NORD POOL Nord Pool (« Nordic Power Exchange »)
100% Marché d’échange - Marché Day-Ahead physique : ElDay-Ahead
international établi à (J+1), Elbas (J)
Oslo - Marchés financiers à terme : Eltrim (futures,
forwards), Eloptions (options)
Allemagne 100% EEX (Leipzig) Marché 4 grandes compagnies intégrées, 900
Day-Ahead (06/00) et distributeurs
marché à terme Pas de régulateur (le bureau fédéral des
(03/01) cartels gère la concurrence)
Espagne 55% OMEL - 4 gros Producteurs-Distributeur
Marchés journaliers et - Un GRT (REE)
infra-journalier (01/98)
Début 2003 : marché
Ibérique (SP+P)
1
France 35% Powernext (11/2001) GRT : HGRT
Marché Day-Ahead
Portugal 45% OMEL : Marchés GRT :REN
journaliers et infra-
journalier (01/98)
Début 2003 : marché
Ibérique
Royaume- 100% 3 bourses : AVANT : Pool anglo-gallois depuis le 31/03/90,
Uni UKPX (Day- Pool « obligatoire »
Ahead+futures) AUJOURD’HUI : New Electricity Trading
UK APX (Day-Ahead) Arragement (NETA) depuis le 27/03/01
IPE (futures)
Belgique 52% BPI Belgian Power GRT : ELIA
Index (Electrabel)
Electrabel en position
dominante
Pays Bas 63% APX Marché Day- Très dépendant des importations
Ahead créé en mai - Forte promotion de l’énergie « verte »
1999 - 4 gros producteurs
- GRT :TenneT
Enchères coordonnées pour les
imports/exports entre GRT TenneT, Elia, RWE
Net (D)
Italie 45% Ouverture prévue pour Production locale chère (fioul 32%), forte
janvier 2004 dépendance des imports.
- ENEL est dominant.
Nouveau décret en février 2002 pour accélérer
la déréglementation. Aucun acteur ne doit avoir
plus de 50% de pdm de production :ENEL doit
vendre 18000MW de capacités sous forme de
« Gencos ».
- GRT :GRTN
Comme l’illustre ce tableau sur la situation 20032, tant sur le degré d’ouverture que
1 Gestionnaire du Réseau de Transmission
2 La situation ayant évoluée , les commentaires que nous donnons ne s’appliquent qu’à l’année 2003
7
8. sur les marchés eux-mêmes (structure, produits vendus …) les différences sont
notoires.
Nous pouvons relever les groupements suivants :
• Marchés à haut degré d’ouverture (90-100%) : Scandinavie, Allemagne,
Royaume Unis, qui sont caractérisés à la fois par de nombreux acteurs mais
aussi par des offres produits diversifiées. En particulier sur ces marchés ,outre
le produit de base Day-Ahead, des produits comme les futures et des options
vanilles sont généralement disponibles.
• Marchés à degré d’ouverture non affirmé (Espagne, Portugal, Pays Bas) ,
proposant seulement un produit Day-Ahead Day-Ahead, dont le réseau est
contrôlé par un gestionnaire (GRT), et dont la production d’électricité est
généralement répartie entre un faible nombre de gros producteurs.
• Marchés en voie d’ouverture ou faiblement ouvert (France, Belgique,
Italie), dont l’activité doit se confirmer dans l’avenir avec le développement
d’un marché Day-Ahead. Nous notons que dans ces configurations, excepté
pour l’Italie, un producteur est généralement dominant : EDF pour la France,
Electrabel pour la Belgique.
Nous pouvons remarquer d’autre part, que les chiffres donnés dans ce tableau sont
théoriques (tel qu’annoncés par les pouvoirs publics) et que les degrés d’ouverture
réels peuvent être inférieurs. A titre d’exemple, le tableau suivant (source : La
Tribune, mercredi 13 mars 2002), donne une comparaison sur l’année 2002 et
illustre le fait que la différence entre le degré d’ouverture réel et théorique pouvait
être flagrante pour certains pays (ex : Allemagne, Italie).
Degrés d’ouverture théoriques et réels
Pays Degré d'ouverture théorique Degré d'ouverture réel
Allemagne 100 % 10 à 20 %
Belgique 35 % 5 à 10 %
Espagne 45 % 5%
France 30 % 5 à 10 %
Italie 45 % 5%
Royaume-Uni 100 % 80 %
Suède 100 % 100 %
Nous allons maintenant donner quelques éléments sur un autre aspect de la
disparité des marchés électriques européens : la production d’électricité.
A.3. Sur la production d’électricité
Il n’existe pas un moyen universel de produire de l’électricité mais des moyens, et il
est commun de distinguer trois types d’électricité :
L’électricité nucléaire : La production d’électricité par le nucléaire consiste à
extraire l’énergie de la fission de noyaux fissiles. C’est une énergie très concentrée
qui fournit, à masse égale, plus d’un million de fois d’énergie qu’un combustible
fossile. Ce choix de moyen de production peut être vu comme issu du désir des
services publics d'électricité d'être autonomes en termes d'approvisionnement pour
8
9. la demande de base. Lorsque le prix du charbon était relativement élevé dans les
années 1960 et 1970 l'option nucléaire était attrayante du point de vue financier.
Mais la production d’électricité par le nucléaire souffre d’un sérieux défaut : celui de
l’inflexibilité due au temps de déchargement et rechargement des réacteurs qui est
de l’ordre de la journée. Enfin le climat peut influencer la production pendant l’été
quand des températures relativement élevées tendent à ralentir le processus de
refroidissement des réacteurs.
L’électricité hydraulique : une énergie souple et modulable. L’hydroélectricité
possède plusieurs atouts de taille : elle est renouvelable, stockable, l’eau est une
ressource naturelle gratuite et enfin elle est facile à mobiliser. Grâce à son haut
degré d’automatisation elle peut jouer le rôle de régulateur en permettant d’ajuster
rapidement (de l’ordre de la minute) la production aux brusques variations de la
demande. Ce moyen de production est enfin dépendant des conditions climatiques et
des saisons puisque ces facteurs influent directement le niveau d’eau dans les
barrages.
L’électricité conventionnelle : cette terminologie regroupe les techniques de
production d’électricité à partir de centrales thermiques en brûlant du gaz naturel, du
charbon ou bien du pétrole pour faire tourner des turbines. Ce moyen de production
reste assez flexible avec un temps de rechargement de l’ordre de l’heure. Les
conditions climatiques n’ont à priori pas d’effet perturbateur, par contre les cours du
gaz, du charbon ou du pétrole vont avoir un impact certain sur les coûts de
production.
Comme nous l’avons fait apparaître dans cette description, il va exister un lien très
fort entre le type d’électricité produite, les ressources naturelles d’un pays (ex :
hydrologie) et les enjeux politico-économique d’un pays (ex : pour le nucléaire).
Cependant, il n’en reste par moins que la production d’électricité se définit donc
comme une combinaison linéaire de trois types d’électricités et c’est une
représentation contrastée que l’on observe sur la carte européenne qui suit.
Figure 1: Production nette d'électricité en 2002 (source www.ucte.org )
Cette carte dresse un portrait de la production d’électricité en Europe en distinguant pour chaque pays
trois types d’électricités : hydraulique (bleue), nucléaire (jaune) et conventionnelle (rouge).
9
10. Sur cette carte on peut voir apparaître que dans chaque pays un type de production
est prédominant : par exemple, la production d’électricité au Portugal est définie à
environ 80% par l‘électricité conventionnelle, en comparaison ce type de production
représente 15% dans l’électricité française qui concède 80% au nucléaire. Par
ailleurs, certains pays comme la Suisse ou l’Union nordique (qui n’apparaît pas sur
cette carte) ont choisi de privilégier l’hydroélectricité en raison de leur géographie et
de leurs ressources naturelles.
Enfin l’électricité conventionnelle est très représentative sur plus de la moitié de
production totale d’électricité en Europe. L’économie européenne repose pour
l’essentiel sur les combustibles fossiles et notamment le pétrole et le gaz naturel dont
près des 2/3 des besoins sont importés. Ces combustibles représentent 80% de la
consommation énergétique de l’Union européenne. Les risques liés à cette très
grande dépendance énergétique structurelle de l’Union sont encore exacerbés par
l’instabilité politique qui règne dans de nombreux pays producteurs, qui peuvent
soumettre le marché énergétique à de fortes pressions.
Comme nous le verrons plus tard, les prix de l’électricité sur le marché au comptant
sont construits à partir des courbes agrégées de l’offre et de la demande. Par
conséquent, dans le processus de construction des prix au comptant peuvent être
considérés :
• Les coûts marginaux de production dépendant des moyens de génération,
malheureusement de part leur nature, ces derniers sont difficilement
observables ;
• La flexibilité des moyens de production pour répondre à un pic de demande,
cette flexibilité va déterminer en effet le temps de réponse à ce type
d’événement et il est naturel de concevoir que la persistance d’un pic de
demande va entraîner des prix élevés ;
• La dynamique des volumes d’électricité générée qui peut être partiellement
reflétée par les volumes disponibles sur le marché
A.4. Sur les flux
L’Europe a toujours été un théâtre d’échanges entre ses participants, l’électricité
bouge, son réseau se développe, et la balance des importations / exportations est
différente d’un état à l’autre. A titre d’exemple, en France, l'énergie est abondante,
fiable et très peu chère. Les clients d'Electricité de France (EDF) paient l'électricité
15 % de moins que les Allemands, 18 % de moins que les Britanniques et 26 % de
moins que les Espagnols. D'ailleurs ses tarifs sont tels qu'elle s'exporte partout en
Europe. A l’opposé de la France, L’Italie peut être vue comme une péninsule
électrique où s’engorgent les exportations. Dans cet état les moyens de productions
sont insuffisants pour couvrir la totalité des besoins, si bien que l’électricité peut être
considérée comme étant en déficit. A titre d’exemple, les importations représentaient
environ 16.6% des besoins en 2002. La Suisse et la France sont les principaux
partenaires de l’Italie, et 85% des importations sont venues de ces deux états en
2002.
10
11. Les graphiques suivants se proposent de comparer les flux de volumes et les prix
indicatifs pour l’électricité en 2001 (source www.deriwatt.com ) :
Prix indicatifs (€) Total des volumes échangés (TWh)
Figure 2a et 2b: Niveaux de prix et volumes échangés en 2001
Dans le graphique de gauche sont représentés par pays les niveau indicatifs des prix de l’électricité
consommée. Le graphique de droite qui représente le total – toujours par pays – des volumes échangés, suggère
un lien « prix élevé » / « faible volume »
Une simple analyse de ces graphiques permet de distinguer trois groupes
différents
• Italie / Péninsule ibérique / Grande Bretagne / Pays Bas : faibles flux de
volumes et prix élevés, tout laisse à penser que le niveau relativement élevé
des prix doit prendre en compte les coûts d’importation ;
• Union Scandinave / Balkans : faibles flux de volumes et prix moyens. Ceci
suggère une autosuffisance en électricité (volumes échangés faibles) et par
conséquent des niveaux de prix reflétant les coûts de production.
• Europe Continentale : grand flux de volumes et prix moyens. Il est clair que
les grands flux de volumes signifient une surproduction d’électricité, celle-ci
peut se matérialiser par des exportations dont les bénéfices auront tendance à
faire baisser les niveaux de prix.
A.5. Sur le lien avec les prix
Nous venons de présenter des éléments essentiels permettant de mesurer
l’hétérogénéité dans laquelle vivent les bourses de l’électricité en Europe : les degrés
d’ouverture, les moyens de production et les échanges.
Certes, cette première liste est loin d’être exhaustive mais est à mettre en parallèle
avec le processus d’ouverture à la concurrence.
Il est naturel de lier les moyens de production et les degrés d’ouverture avec les prix
mesurés. En effet, selon la théorie économique, un marché concurrentiel « parfait » a
le mérite de faire « émerger » un prix égal aux coûts marginaux de production des
producteurs les plus efficaces. D’autre part, dans ce type de configuration, les
11
12. acteurs étant suffisamment nombreux, tous ont accès à la même information
« parfaite » et aucun d’entre eux n’a d’influence sur le prix
Enfin, l’existence d’échanges est primordiale dans le processus d’ouverture. A titre
d’exemple, comme le mentionne le rapport d'enquête sur les prix de l'électricité
diffusé par le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, si la France était
un marché fermé, EDF, qui y détient 88% de la capacité de production et 75% du
marché de fourniture d’électricité, serait en situation de quasi-monopole en dépit de
l’ouverture du marché, avec une capacité importante de déterminer les prix. Les
échanges et les interconnexions jouent donc un rôle fondamental dans la mesure de
la concurrence entrante sur un marché donné. Enfin, les échanges peuvent
témoigner des opportunités d’arbitrage pouvant survenir entre deux marchés très
interconnectés (ex : Allemagne / Pays-Bas).
Conséquences des remarques que nous venons de faire, dans la section qui suit
nous allons illustrer différents cas de Figure de prix mesurés.
B Différents marchés différents prix
Dans la section précédente, nous avons présenté des éléments significatifs de
l’hétérogénéité baignant le ou les marchés de l’électricité en Europe. Cette diversité
peut s’observer sur les marchés Day-Ahead qui exhibent des dynamiques de prix
bien distinctes, nous nous focalisons sur quatre exemples représentatifs :
• Le marché nordique (NordPool)
• Le marché hollandais (Apx)
• Les marchés français (Powernext) et Allemand (EEX)
Ci-dessous nous avons mis en parallèle les prix Day-Ahead observés sur ces quatre
marchés durant la période allant du 1er janvier 2002 au 1er aout 2005.
3 0 0 .0 0 0
E E X : P h e lix
APX
2 5 0 .0 0 0
N o rd P o o l
P o w e rN e x t
2 0 0 .0 0 0
1 5 0 .0 0 0
1 0 0 .0 0 0
5 0 .0 0 0
0 .0 0 0
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
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01
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3
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2
2
2
2
2
2
3
3
3
3
3
3
4
4
4
4
4
4
5
5
5
5
Figure 3 : Quatre dynamique de prix Day-Ahead baseload
entre le 1er janvier 2002 et le 1er août 2005
Le graphique suivant met en parallèle les prix baseload sur les marchés APX (bleu), EEX (noir), Powernext
(Orange) et NordPool (Vert). Visuellement il est clair que trois dynamiques totalement différentes
ressortent, et que les prix EEX et Powernext semblent confondus
12
13. Ce graphique illustre en fait trois types de dynamiques de prix Day-Ahead associées à
ces quatre marchés, ici les prix EEX et Powernext apparaissent quasiment confondus.
Mais avant de rentrer plus en détail dans ces séries de prix, intéressons-nous tout
d’abord à un point commun qu’elles partagent : le mécanisme de construction.
B.1. Sur le processus de construction des prix Day-Ahead.
Un point commun à tous les marchés européens d’électricité est qu’ils possèdent des
règles. Au cœur de ces règles, le mécanisme de formation des prix Day-Ahead est
primordial et reste directement lié aux échanges. Nous allons nous focaliser sur le
mécanisme défini par les enchères par tranches horaires lancées par les acteurs du
marché. La description que nous allons donner est relativement synthétique et
générale mais certaines nuances doivent être faites en fonction des marchés. A titre
d’exemple sur le marché britannique UKPX, les enchères sont posées pour des
tranches demi-horaires.
D’une manière générale, sur une période définie par les règles du marché, les
participants tant sur le coté de l’offre que de la demande vont émettre des souhaits
d’achat ou vente au moyen d’enchères pour chaque tranche horaire du lendemain.
Ces enchères qui peuvent être différentes pour un même participant, sont transmises
aux gérants du marché sous la forme d’un triplet (volume, prix, type = vente ou achat).
La Figure suivante donne un exemple d’enchères pour une heure H donnée dans le
cas d’un acheteur et dans le cas d’un vendeur.
41
30
26
22
18
15
100MWh 200MWh 300MWh 200MWh 250MWh 300MWh
Acheteur A Vendeur V
Figure 4a et 4b: Exemples d'enchère Acheteur / Vendeur
Deux exemple d’enchères transmise à l’opérateur du marché, du coté
Acheteur (gauche) et du coté vendeur (droite)
Dans cet exemple, l’acheteur A et le vendeur V ont lancé chacun trois enchères. De
son coté, l’acheteur A propose une offre d’achat portant sur un volume de 100MWh à
un prix maximum de 30€, puis une offre pour un volume supplémentaire de 100 MWh
à 22€ et enfin une dernière offre pour un dernier volume supplémentaire de 100MWh à
un prix maximum de 18€. Du coté du vendeur, l’offre de départ porte sur un volume de
200 MWh au prix minimum de 15€, puis un volume supplémentaire de 50MWh à 26€
et enfin un dernier volume de 50MW à un prix de 41€ minimum.
13
14. Ces enchères peuvent être regroupées dans le tableau suivant :
Acteur Heure Type Volume Prix
Acheteur A H Achat 100 MWh 30 €
Acheteur A H Achat 100 MWh 22 €
Acheteur A H Achat 100 MWh 18 €
Vendeur V H Vente 200 MWh 15 €
Vendeur V H Vente 50 MWh 26 €
Vendeur V H Vente 50 MWh 41 €
A partir de l’ensemble de ces enchères qui leur sont transmises, les gérants de
marché vont dans un premier temps construire les courbes agrégées de l’offre et de
la demande. Un point essentiel à remarquer, est que dans tous les cas pour des
raisons de transparence, les enchères sont placées de manière anonyme. La Figure
suivante, représente un exemple simple d’agrégation pour la construction de la
courbe d’offre résultante de deux enchères de vente.
Vendeur
A
Agrégation vendeurs
A et B
Vendeur
B
Figure 5: Procédure d'agrégation
des courbes d'offre
Exemple d’agrégation de deux courbes d’enchères de vente,
l’agrégation s’effectue en mettant en continu les quantités
égales de volumes par prix croissants
Une fois ces courbes construites, les prix et les volumes correspondants, sont
déterminés à partir du point d’intersection comme indiqué ci-dessous :
Prix
Volume
Figure 6: Construction des prix et volumes
Une fois les courbes agrégées de l’offre et la demande construites à partir des enchères Acheteur / Vendeur
pour une heure donnée, le prix et le volume pour sont déterminés par le point d’intersection
14
15. La description du mécanisme de formation des prix que nous venons de donner à
été simplifiée et dans le cas général, pour construire l’intersection des courbes
agrégées des méthodes du type interpolation peuvent être employées. Nous notons
d’autre part, qu’une partie de la littérature sur la modélisation des prix Day-Ahead de
l’électricité, utilise comme point de départ ce mécanisme. A titre d’exemple plus loin
dans notre étude nous présenterons le modèle développé par Barlow[27] dont
l’essence réside dans la modélisation mathématique des courbes agrégées d’offre et
de demande.
Nous allons maintenant nous focaliser sur les processus de prix des quatre marchés
que nous avons mentionnés dans l’introduction de cette partie.
B.2. Le marché nordique NordPool
Dans l’histoire de la dérégulation des marchés de l’électricité en Europe, le marché
nordique avec le marché anglais font Figure de référence par leur ancienneté.
Suivant la politique de dérégulation lancée en 1991 en Norvège, le Nordpool
commença son activité à partir de 1993 et fut défini comme le marché norvégien
d’électricité. En 1996, la Suède suivie de la Finlande en 1998 sont venues s’intégrer3
et depuis 1999 le NordPool comprend le Danemark. Actuellement comme le
mentionnent Karesen et Husby[104], le NordPool est considéré comme un marché
Day-Ahead (indice elDay-Ahead) des plus liquides, et en parallèle avec ce marché
au comptant coexiste un marché à terme (Elbas) où sont négociés des contrats
future standardisés en fonction de leur support de livraison.
Chaque jour, sur le NordPool sont calculés des prix Day-Ahead concernant la
livraison d’électricité pour chaque heure donnée pour le jour suivant en toute
généralité nous disposons de 24 processus de prix « différents ». Le graphique ci-
dessous représente les prix moyens sur la période allant du 01-01-2000 au 01-01-
2005.
P r ix m o y e n s D K K / M W h
900
800
700
600
500
400
300
200
100
0
01/01/2000
01/04/2000
01/07/2000
01/10/2000
01/01/2001
01/04/2001
01/07/2001
01/10/2001
01/01/2002
01/04/2002
01/07/2002
01/10/2002
01/01/2003
01/04/2003
01/07/2003
01/10/2003
01/01/2004
01/04/2004
01/07/2004
01/10/2004
01/01/2005
Figure 7: Dynamique des prix Day-Ahead Nordpool
Prix Day-Ahead entre le 1er janvier 2000 et le 1er Janvier 2005, dynamique lisse, pics de prix rares,
faible variabilité et renversements de tendance fréquents
3 I.e. : coordination selon un fonctionnement uniforme, construction d’indices régionaux et d’un indice global
15
16. Une simple analyse graphique de cette série de données, met en évidence que le
terme représentatif de l’évolution moyenne du processus est largement prépondérant
dans la dynamique de ce dernier. Additionnellement, nous pouvons observer des
pics de prix et une variabilité non constante.
Concernant ce marché, il est à noter que l’électricité hydraulique représente une part
très significative: à titre d’exemple en 2001 la production de celle-ci s’élevait à un
total de 212.5 TWh contre 91 TWh pour l’électricité nucléaire. D’autre part, l’évolution
du niveau d’eau dans les réservoirs est un facteur privilégié pour décrire l’évolution
de la production de ce type d’électricité et nous pouvons mettre cette variable en
parallèle avec les prix mesurés.
Les graphes suivants illustrent sur chaque semaine de l’année 2002 et 2003, les
évolutions du niveau d’eau dans les barrages ainsi que celle de la moyenne
hebdomadaire des prix sur le marché Day-Ahead.
Moyennes hebdomadaires de prix Niveaux de l’eau dans les réservoirs
120.00 90
2002 80 2003
100.00
2003 70 2002
80.00 60
60.00 50
40
40.00
30
20.00 20
0.00 10
0
1
6
11
16
21
26
31
36
41
46
51
1
5
9
13
17
21
25
29
33
37
41
45
49
Figure 8a et 8b: Moyenne hebdomadaire des prix NordPool
et capacités des réservoirs
Dans les graphiques suivant nous avons mis en parallèle les moyennes 2002 et 2003 des prix NordPool
(gauche) et des niveaux de l’eau dans les réservoirs (droite), un phénomène de convergence est observable
Si l’on compare par semaine l’évolution moyenne des prix et le niveau d’eau retenue
dans les barrages, une certaine corrélation semble apparaître :
• En 2002, les semaines 16 et 17 sont significatives du plus bas niveau d’eau
dans les réservoirs, dans la même période, les prix passent d’une moyenne
hebdomadaire de 17,75€ (semaine 15) à 28.36€ (semaine 16) et 28.85€
(semaine 17)
• Sur l’année 2003, entre les semaines 1 et 36, le niveau d’eau dans les
réservoirs est inférieur d’environ 20% par rapport à celui observé en 2002 sur
la même période, les prix en 2003 sur cet intervalle de temps sont supérieurs
au prix 2002. A noter le phénomène de convergence qui apparaît des deux
cotés à partir de la semaine 41.
• A partir de la semaine 36, l’augmentation des prix va de pair avec la
diminution du niveau d’eau
16
17. Au regard de ces remarques, le marché Nordique doit pouvoir être vu dans une
certaine mesure comme fondamentaliste4, en se sens que la moyenne des prix
semble exhiber une certaine corrélation avec le niveau d’eau que l’on peut mesurer
dans les barrages hydroélectriques. Mais encore faut-il sans doute la combiner avec
les phénomènes climatiques (précipitation, sécheresse, gel …) En effet, si la
différence 2002-2003 que l’on peut observer dans le cas du niveau de l’eau dans les
barrages peut sembler constante entre les semaines 1 à 36, les prix ne varient pas
uniformément et présentent des retournements de tendance haussière / baissière.
B.3. Le marché hollandais APX
Le marché d’échanges énergétiques d’Amsterdam est sans doute « le phénomène
californien » de l’Europe. Créé en 1999, il a montré rapidement une très forte
volatilité et des pics de prix phénoménaux, comme on peut le constater sur le
graphe qui suit (les prix sont coupé à 250€ pour la clarté de la représentation) , cette
dynamique semble se poursuivre…
250
200
150
100
50
0
01
01 /01
01 /01
01 /01
01 01
01 /01
01 /01
01 /01
01 /01
01 /01
01 /01
01 01
01 /01
01 /02
01 /02
01 /02
01 02
01 /02
01 /02
01 /02
01 /02
01 /02
01 /02
01 02
01 /02
01 /03
01 /03
01 /03
01 03
01 /03
01 /03
01 /03
01 /03
/0
/0
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/0
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/0
/0
/0
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/0
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3
4/
5
6
7
8
9
0
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2
1
2
3
4/
5
6
7
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9
0
1/
2
1
2
3
4/
5
6
7
8
9/
03
Figure 9: Dynamique des prix Day-Ahead APX
Prix Day-Ahead baseload sur APX mesurés entre le 1er janvier 2001 et le 1er janvier 2004, forte variabilité,
pics de prix fréquents et périodes de stabilité
Le marché hollandais est très vulnérable, la courte période du 25 juin au 5 juillet
2001 montre l’occurrence de pics réguliers et la présence d’une certaine « panique »
En effet, en parallèle avec ce court laps de temps, des problèmes de production
survenaient en Belgique, très interconnectée avec les Pays-Bas à ce moment là.
Date Hour APX Day-AheadPrice (€/MWh)
25-juin-01 17 350
26-juin-01 15 300
02-juil-01 11 600
03-juil-01 12 1 000
04-juil-01 12 1 201
05-juil-01 12 495
06-juil-01 12 1 200
4 i.e. : les mouvements des prix vont être expliqués en grande partie par des facteurs physiques ou socio-économiques : variables
explicatives. En ce sens la dynamique des prix « peut être expliquée »
17
18. Le risque de prix très élevé est donc très présent même si le marché exhibe de par
les volumes échangés ( plus du double par rapport au marché français) une certaine
liquidité.
Comment expliquer alors une telle dynamique sur certains mois, et sur de courtes
périodes ? Manipulations, contagion, influence climatique…. ? Nombreux sont les
facteurs présents qui peuvent influencer les prix
Figure 10: Dynamique des prix APX et événements
Ce graphique suggère un lien très fort entre la variabilité extrême des prix et l’occurrence
d’événement hétérogènes et divers. Source : « Libéralisation de l’énergie – Les bourses de
l’électricité », François Regairaz, RTE, SEE 21/11/02
Un phénomène remarquable dans ce dernier graphique concerne la transition dans la
dynamique survenue à partir du 1er janvier 2001. Cette date dénote en fait la fin d’un
contrat (protocole producteurs / distributeurs) instauré entre les quatre plus importants
producteurs hollandais d’électricité et les distributeurs. Comme le fait remarquer
Boisseleau[43], ce protocole impliquait une contrainte réglementaire relativement
critique puisqu’il était alors impossible aux quatre plus importants producteurs des
Pays Bas de vendre le moindre MWh sur APX. En fait cette bourse devenait
quasiment un marché « sans offre » et le protocole instauré avant janvier 2001 était un
frein dramatique à la concurrence tout en mettant en doute la crédibilité de l’indice de
prix produit. Nous notons d’autre part que toujours durant cette période, seuls les
producteurs étrangers étaient autorisés à entrer sur APX, si bien que cette bourse
devenait fortement dépendante de ces capacités d’interconnexion import / export.
Comme le mentionne Boisseleau[43], APX est une bourse très interconnectée avec la
Belgique et l’Allemagne, et de manière générale, les acteurs étrangers vendent de
l’électricité sur APX quand les prix sont élevés comparativement à leurs coûts de
production, bref essentiellement pour des raisons d’arbitrage.
18
19. B.4. Les marchés français (Powernext) et allemand (EEX)
Nous groupons ici la présentation des marchés organisés Powernext et EEX.
Powernext a débuté ses opérations le 27 novembre 2001. Le nombre de participants
augmente à l’instar des volumes échangés. A titre d’exemple par rapport à 2003, les
volumes 2004 affichaient une hausse de plus de 89% pour s’établir à un plafond de
14.18TWh et comme le mentionne le bilan annuel 2004, en parallèle avec cet
accroissement des volumes le nombre de membres agréés est passé de 39 à 49
contre 18 en avril 2002.
La bourse allemande EEX est bien plus ancienne, et découle de la fusion entre les
marchés d’échange de Leipzig (LPX) et Frankfort (EEX) effectuée en 2001.
Essentiellement, le système d’enchère utilisé par EEX correspond plus ou moins à
celui initié par l’ancienne bourse LPX. En comparaison au marché français, le
nombre de participants et les volumes sont supérieurs, le marché EEX reste après le
NordPool la deuxième plus grande place d’échange en Europe avec 128 participants
(août 2005). Une enquête menée par le VIK (Verband der Industriellen Energie- und
Kraftwirtschaft , association allemande des gros consommateurs d'électricité)
montre que la bourse est considérée en Allemagne comme instrument
incontournable de formation des prix, sur lequel s’alignent toutes les offres des
fournisseurs. Outre les produits Day-Ahead et à terme, EEX propose également un
service de clearing OTC qui permet aux acteurs du marché de gré à gré de se
couvrir contre le risque de contrepartie, en faisant supporter ce risque par la bourse.
Les produits disponibles sur le marché Day-Ahead EEX sont similaires à ceux
échangés sur la bourse française Powernext : l’électricité peut être achetée heure
par heure ou par blocs pour une livraison physique le lendemain. En revanche, deux
modes de cotation coexistent sur EEX :
• Une cotation par enchères fermées / fixing pour la plupart des produits
standards, celle-ci reprend le principe du mécanisme d’enchères et de
construction des prix à partir des courbes agrégées de l’offre et la demande
que nous avons décrit en aval (§B1).
• Une cotation en « continu » pour les blocs de base, de pic et les blocs de
base pour le week-end. Ce mécanisme de cotation repose sur une
confrontation de l’offre et la demande en continu, se découpe en trois
étapes définies sur des périodes horaires déterminées:
Pré négociation : préparation des ordres
Négociation : confrontation des ordres de façons continue
Post-négociation : dénouement des positions
19
20. Bien que les bourses Powernext et EEX n’aient pas la même ancienneté, ces
dernières exhibent des dynamiques de prix très similaires tant en terme de tendance,
que de saisonnalité hebdomadaire que de variabilité.
1 5 0 .0 0 0
1 3 0 .0 0 0 E E X : P h e lix
P o w e rN e x t
1 1 0 .0 0 0
9 0 .0 0 0
7 0 .0 0 0
5 0 .0 0 0
3 0 .0 0 0
1 0 .0 0 0
-1 0 .0 0 0
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
01
/0
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/0
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/0
/0
/0
1/
3/
5/
7/
9/
1/
1/
3/
5/
7/
9/
1/
1/
3/
5/
7/
9/
1/
1/
3/
5/
7/
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
02
02
02
02
02
02
03
03
03
03
03
03
04
04
04
04
04
04
05
05
05
05
Figure 11: Dynamique des prix Day-Ahead EEX et Powernext
Prix Day-Ahead baseload relevés sur EEX et Powernext entre le 21 novembre 2001 et le 1er août 2005. Les
dynamiques sont quasiment confondues, Powernext reste cependant légèrement plus volatile.
Dans la Figure précédente, nous pouvons constater que les deux dynamiques de
prix sont quasiment superposées. La seule différence concerne la variabilité, en effet
sur certaines périodes (ex : été 2003 hiver 2003) les prix français ont exhibé un
caractère plus erratique.
Par rapport aux autres bourses, la dynamique affichée par EEX et Powernext semble
intermédiaire en terme d’évolution et de variabilité. Le graphique précédent suggère
que les caractères dominants dans la dynamique sont la variabilité hebdomadaire et la
tendance, additionnellement des agrégats de variabilité peuvent s’observer.
C. Vers un cadre d’étude général
Dans les deux parties précédentes, nous avons présenté les diversités des systèmes
électriques européens et des marchés d’échange. Cette diversité se reflète
graphiquement dans la dynamique des prix au comptant, trois cas de Figure peuvent
s’observer :
• Le marché hollandais : variabilité prononcée et occurrence de valeurs
extrêmes, effet de retour vers une moyenne
• Le marché nordique : faible variabilité sur le court terme, évolution sur le long /
moyen terme affichant des retournements de tendance
• Les marchés allemand et français : variabilité moyenne, possibilité d’occurrence
de valeurs extrêmes, effet de retour vers une moyenne
Dans le processus de modélisation des prix au comptant, une première problématique
vient se présenter. En effet, la première étape dans la modélisation consiste à
inventorier les caractéristiques de l’information que l’on souhaite modéliser. D’un autre
coté, les diversités apparentes des dynamiques de prix suggèrent des caractéristiques
communes mais quantifiées de manière différente.
20
21. A titre d’exemples :
• Le marché APX présente une volatilité amplifiée par rapport aux marchés tels
que Powernext ou EEX.
• Le marché NordPool affiche une variabilité sur le court terme amoindrie par
rapport à EEX et Powernext. En contre partie, toujours sur cette même place
d’échange, le terme de tendance est prédominant dans la dynamique des prix.
En conséquence, il peut être naturel de traiter chaque marché comme un cas
particulier, ce qui va se traduire par des techniques d’analyse différentes.
A titre d’exemple, de part ce qui précède, une approche prometteuse pour analyser
les prix sur le marché nordique, peut consister à utiliser les mesures du niveau d’eau
dans les réservoirs afin d’extraire la dynamique sur le long / moyen terme du
processus mesuré. D’un autre coté utiliser ce type de données pour traiter du cas
allemand n’est pas des plus pertinent étant donné que dans ce pays plus de 50% de
la production d’électricité est obtenue à partir de charbon et rend de fait l’électricité
germanique très dépendante de l’évolution de ce cours. En effet, pendant l’année
2003, le cours du charbon a enregistré une hausse de près de 44% en Europe.
L’augmentation des cours de l’électricité en Allemagne telle qu’appréhendée à partir
des chiffres d’EEX montre que la hausse du cours du charbon a été suivie d’une
hausse de près de 30% du ruban de base annuel.
Nous sommes donc tentés de mener des analyses différentes en fonction des
marchés concernés. Cette démarche peut s’avérer fastidieuse dans certains cas tels
qu’APX où la dynamique des prix pouvant exhiber un comportement extrême
(conséquence d’événements multiples qui ne sont pas forcément observables
publiquement) peut rendre trompeuse certaines statistiques simples telles que l’écart
type. Pour illustrer cet aspect, nous avons calculé cette statistique sur des sous-
échantillons de prix inférieurs à un seuil donné.
Calcul d’écart type et seuil
Seuil % de points Ecart Seuil % de points Ecart Seuil % de points Ecart
utilisés Type utilisés Type utilisés Type
10 0.61 0.99 60 91.60 10.19 250 99.77 22.32
12 1.60 1.52 70 94.42 11.56 300 99.77 22.32
15 4.13 2.13 80 96.26 12.86 350 99.77 22.32
20 12.91 3.03 100 97.48 14.33 400 99.85 24.13
25 26.89 3.96 120 98.09 15.49 500 99.85 24.13
30 44.84 5.08 140 98.70 17.12 600 99.85 24.13
35 64.02 6.18 160 99.16 18.71 700 100.00 33.98
40 75.02 7.09 180 99.39 19.73
50 86.86 8.87 200 99.54 20.57
Nous rappelons que l’écart type est une mesure de la variabilité d’un échantillon de
points par rapport à sa moyenne arithmétique. Dans le tableau précédent :
• Avec un seuil de 120€, 98.09% des points de l’échantillon initial sont utilisés et
l’écart type est de l’ordre de 15.
21
22. • Avec un seuil de 600€, 99.85% des points de l’échantillon initial sont utilisés et
l’écart type est de l’ordre de 24.
• Avec un seuil de 700€, 100% des points de l’échantillon initial sont utilisés et
l’écart type est de l’ordre de 33.
Il en découle alors que ce simple calcul donne des résultats dramatiquement
différents pour de très faibles variations sur la taille de l’échantillon initial. Ce
phénomène ne se limite pas au marché APX, et pose la problématique de la mesure
pertinente de la volatilité des prix.
D’un autre coté, opter pour une méthode d’analyse uniforme de ces quatre marchés
va nous permettre de les mettre sur un même plan de comparaison. Les prix
mesurés exhibent des caractéristiques similaires : saisonnalités, forte volatilité,
occurrence de valeurs extrêmes. Cet aspect est effectivement bien présent dans la
littérature (voir par exemple Lucia & Schwartz[113], Barone a Gigli[33], Geman &
Roncoroni[79] … ) et c’est généralement le fait que ces caractéristiques soient
quantifiées de manières différentes qui conduit à des modélisation différentes, nous
reviendrons en temps voulu sur ce point.
Suivant cette remarque, l’axe de comparaison que nous souhaitons suivre et
développer dans le chapitre suivant concerne l’extraction de ces caractéristiques et
la quantification de celles-ci. En fait ceci nous emmène à faire l’hypothèse suivante :
Hypothèse 1 :
Un prix d’électricité (Day-Ahead) se définit comme la combinaison (additive ou
multiplicative) de composantes de natures similaires mais quantifiées de manières
différentes dans la dynamique
Dans cette formulation, de par les observations précédentes (§A et §B) la
terminologie de « composantes de natures similaires » est en fait bien précise , nous
distinguons des composantes du type :
• Tendance : évolution long-terme
• Retournements de tendance : cycles d’évolution moyen-terme
• Saisonnalité hebdomadaire : associé à l’effet des week-end
• Variabilité court-terme ou composante aléatoire
Par conséquent à elle-seule, cette hypothèse synthétise bien des descriptions
présentes dans la littérature (voir par exemple Lucia & Schwartz[113], Barone a
Gigli[33], Geman & Roncoroni[79] … ), cependant une information supplémentaire
est apportée dans la mesure où nous introduisons la notion de « composantes
quantifiée ».
En particulier pouvoir extraire et quantifier le caractère aléatoire (mesure de la
volatilité) d’un processus de prix mesuré est fondamental en modélisation financière
22
23. et valorisation de produits dérivés. La dynamique des prix de l’électricité, telle que
présentée dans les graphiques précédents, exhibe effectivement une telle
caractéristique mais aussi une certaine stabilité. En conséquence, une
problématique sous-jacente à l’analyse des prix au comptant va consister à séparer
le « déterministe » du stochastique
23
24. Chapitre 2 : La méthode SSA pour une étude unifiée
Introduction
Le chapitre précédent s’était terminé par une réflexion sur l’existence d’une
représentation unifiée des prix Day-Ahead de l’électricité : Hypothèse 1.
Nous souhaitons maintenant vérifier empiriquement (i.e. par une analyse des
données), cette hypothèse en adoptant une démarche unifiée. Dans cette direction,
l’objectif sera double :
• Extraire les « composantes de même nature »
• Mesurer la contribution de ces composantes dans la dynamique des séries de
prix mesurées
Une idée intéressante consiste à s’orienter vers des techniques de traitement du
signal et la première section (§A) de ce chapitre est consacrée à la description de la
méthode que nous allons utiliser.
Comme nous le présentons dans un premier temps (§A1), les techniques du
traitement du signal sont effectivement utiles et largement utilisées pour atteindre le
première objectif d’extraction que nous avons mentionné plus haut. En particulier il
est intéressant de noter que s’orienter vers ces méthodes d’analyse, conduit à
associer aux prix Day-Ahead mesurés sur les marchés une nature de « signal réel »
(§A.1.2). Nous donnons dans un second temps (§A.2) une présentation de la
méthode SSA qui d’une part fournira une décomposition détaillée des séries de prix
et d’autre part permettra d’évaluer les différentes contributions présentes dans la
décomposition obtenue. Par conséquent, les deux objectifs mentionnés ci-dessus
seront atteints.
Dans la seconde section de ce chapitre (§B), après avoir donné des éléments
récapitulatifs sur la méthode SSA (§B1) et après avoir défini la procédure utilisée
(§B.2.), nous passons à l’analyse des marchés APX ( §B.3.), Powernext (§B.4.),
EEX( §B.5.) et NordPool ( §B.6.). Ceci nous permet alors de vérifier empiriquement
l’hypothese 1 et par conséquent l’existence d’une représentation unifiée des prix
Day-Ahead de l’électricité (§B7).
Comme première application des résultats issus de cette représentation unifiée, il est
alors possible de comparer et discuter des propriétés de la dynamique des prix sur
les marchés considérés , ceci fait l’objet de la dernière section ( §C).
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25. A. Traitement du signal et méthode SSA
Issue de la branche mathématique du traitement du signal, la méthode SSA que
nous allons présenter dans cette section, va nous permettre de vérifier
empiriquement sur les données APX, EEX, NordPool et Powernext l’hypothèse que
nous avons faite dans le chapitre précédent :
Hypothèse 1 :
Un prix d’électricité (Day-Ahead) se définit comme la combinaison (additive ou
multiplicative) de composantes de natures similaires mais quantifiées de manières
différentes dans la dynamique
Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction, la vérification de cette hypothèse
repose sur deux objectifs :
• Un objectif d’extraction
• Un objectif de contribution
Dans cette direction, parmi les méthodes d’analyse de données existantes, les
techniques de traitement du signal sont de bons candidats, autrement dit, nous
allons associer les prix Day-Ahead que nous pouvons mesurer sur les marchés à des
« signaux » résultant du commerce de l’électricité.
A.1. Sur l’apport du traitement du signal
Avant de faire un lien entre les données de prix Day-Ahead, l’hypothese 1 et les
techniques de traitement du signal, commençons par une digression sur celles-ci.
A.1.1 Généralités sur le traitement du signal
La théorie du traitement du signal (TS) regroupe essentiellement des techniques
(analogiques, numériques) visant à traiter, analyser, exploiter, interpréter, décrire et
modéliser tout type d’information ou « signal ».
En référence à Vaseghi[21], dans sa généralité, la notion de « signal » peut
s’interpréter comme la forme physique d’une information véhiculée par un système
(ex : entre un émetteur et un récepteur) , analytiquement un signal peut être
représenté par un échantillon de mesures réalisées au cours du temps (série
temporelle). Généralement les praticiens TS distinguent deux types de signaux :
• Les signaux déterministes pouvant être décrits par des relations
mathématiques explicites, ces signaux présentent une dynamique «stable ou
un comportement physique pouvant être prédit avec rigueur sur un horizon
« long-terme »
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26. • Les signaux aléatoires (bruits) qui dénotent d’une dynamique imprévisible
régie par une loi de probabilité
Du point de vue traitement du signal, un signal aléatoire est généralement associé à
un bruit perturbateur, et le praticien va plus orienter ses objectifs dans l’élimination
de ce dernier des données mesurées ce qui donne naissance à la famille des
techniques TS dites « de filtrage » et à la définition des signaux réels comme étant
des signaux déterministes perturbés par des signaux aléatoires.
Comme cela est présenté par Vaseghi[21], ces techniques de filtrage peuvent être
classées en plusieurs catégories dont notamment:
• Des méthodes paramétriques qui dépendent du signal étudié par
l’utilisation d’un modèle bien défini correspondant à la structure
« prévisible » du signal en question. L’utilisation de cette catégorie de
méthodes présuppose une analyse préliminaire ou une connaissance
approfondie des données.
• Des méthodes non paramétriques, indépendantes du signal étudiés, à la
base de celles-ci est présente une volonté de décomposer les séries
temporelles selon par exemple des bases orthogonales (ex :
transformation de Fourrier, ondelettes) et ceci conduit à associer les
signaux déterministes à des sommes finies de séries de fonctions et les
signaux aléatoires à des « sommes infinies »
Revenons maintenant dans le cadre des marchés de l’électricité, il est clair que dans
la recherche d’une représentation unifiée des prix Day-Ahead (cf Hypothèse 1), nous
devons nous orienter vers des méthodes TS non paramétrique, mais avant cela,
nous devons mettre en concordance la nature de ces prix avec la notion de signal
réel.
A.1.2. Prix Day-Ahead et signal réel
Précédemment (Chapitre 1, §B) , nous avions donné des exemples de prix mesurés ,
graphiquement ces derniers affichent une certaine stabilité (tendance et saisonnalité
hebdomadaire … ), tout tend alors à les associer à des signaux réels (cf plus haut)
plutôt qu’à des signaux purement déterministes ou aléatoires.
Une première justification concerne la structure même du commerce de l’électricité
Day-Ahead que nous pouvons décrire synthétiquement à partir d’une terminologie
TS faisant intervenir : des sources émettrices d’information, des sources réceptrices
et des flux d’informations circulant dans ce système / canal d’information.
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27. Une représentation simplifiée de ce système est résumée par le schéma suivant :
Emetteurs Récepteurs / Emetteurs Récepteurs / Emetteurs
F1 : F2 :
Besoins Offre /
Sources primaires Bien-être Acteurs demande Marché organisé
Rentabilité …..
Sources physiques ….. Traders Ex : Powernext
Broker
Sources Consommateurs
socioéconomiques Producteurs
… F4 :
Sources financières Prix Day-
Ahead
F3 : Prix historiques …
Figure 12 : Représentation simplifié d’un commerce d’électricité
La structure du commerce de l’électricité peut être représentée en adoptant une terminologie TS, les prix
Day-Ahead (Flux F4) sont des signaux résultants de ce système
Remarques :
• Dans cette représentation, nous n’avons pas représenté les flux physiques
(ex : électricité) et à ce titre les sources primaires d’information sont seulement
considérées comme émettrices.
• Les diversités propres à chaque marché peuvent être introduites à différents
niveaux
Dans ce système, l’information qui suscite notre intérêt est celle des prix Day-Ahead
(flux F4) et cette information résulte des flux F1, F2 et F3 :
• Le flux F1 peut avoir des connotations « physiques » (ex : température, niveau
d’eau dans les réservoirs, activité jours ouvrés / week-ends …) et afficher un
comportement rationnel (périodicité annuelle dans l’évolution des température,
niveau d’eau des réservoirs …),
• Le flux F2 est canalisé selon une structure fixe bien définie (enchères offre /
demande)
• Enfin le flux F3 peut être utilisé par les acteurs du marché comme une base
de référence, en ce sens ceci peut induire un comportement rationnel.
Maintenant, il est bon de noter que l’électricité « du lendemain » en tant que telle,
n’est pas physiquement stockable, en se sens et comme le mentionne Pirrong[118],
des comportement spéculatifs sont difficilement concevables. Ceci implique donc
que le flux F4 ne peut qu’être difficilement soumis à des chocs stochastiques
découlant du comportement spéculatifs des acteurs du marchés comme cela est le
cas par exemple pour les cours d’action (ref Bachelier, 1900).
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28. La deuxième justification que nous donnons concerne les travaux de modélisation
présents dans la littérature. En effet l’idée d’accorder une nature de signaux réels
aux prix Day-Ahead et en fait belle et bien suggérée dans ceux-ci, notamment :
• Directement par Lucia & Schwartz[113] qui mentionnent que la première étape
de la modélisation de ces prix consiste à séparer « le déterministe » de
« l’aléatoire », et
• Indirectement par Gibson et Schwartz[81] qui cherchent à représenter les prix
de commodités à partir d’un facteur d’évolution « long terme » et d’un facteur
d’évolution « court terme ».
Dans ces deux exemples de travaux parmi d’autres, les auteurs n’ont pas mené
d’analyse approfondie sur les données de prix, et la séparation « long-terme » /
« court-terme », « déterministe » / « aléatoire », n’est matérialisée que dans les
modèles qu’ils proposent si bien que les démarches adoptées peuvent s’apparenter
à du filtrage paramétrique.
Les justifications que nous venons de donner, nous emmène donc à faire l’hypothèse
que dans le cas des prix Day-Ahead de l’électricité, nous sommes en présence d’un
signal réel (cf §A1), et en regard de l’hypothèse 1, nous allons supposer que ces
prix se décomposent comme une somme (resp. produit) faisant intervenir une
composante stable et une composante aléatoire. En particulier, la composante stable
s’exprimera à l’aide de signaux déterministes de même nature :
Hypothèse 2 (cas additif)
Prix Day - Ahead = Signal réel = Composante Signal + Composante Aléatoire
N M
= ∑ CSi + ∑ CA j
i=1 j=1
Il est alors clair maintenant que la vérification de cette nouvelle hypothèse impliquera
la vérification de notre hypothèse 1 initiale.
A.1.3. Apport des techniques TS
Nous venons donc d’associer la nature des prix Day-Ahead à celle d’un signal réel,
ceci nous a conduit à l’hypothèse 2 qui généralise celle que nous souhaitons vérifier.
Dans cette direction, l’idée est maintenant d’appliquer des techniques TS, qui vont
permettre :
• De disséquer les processus de prix, en séparant la composante stable de la
composante aléatoire
• D’obtenir une décomposition de la composante stable et notamment d’extraire
par exemple la périodicité hebdomadaire et plus généralement des cycles.
Cet aspect méthodologique de décomposition est en fait concrètement présent dans
la littérature.
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