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ALIMENTATION                                            Veille & innovation…                                                                   13


                   Alimentation naturelle :
                               les leçons du présent (2/3)

M. Sauveu
            r Fernande
                         z
                               L    a 1ère partie confronte à la lumière du passé les atouts de l’alimentation naturelle face aux dysfonctionnements
                                    de l’alimentation industrielle conventionnelle : malbou e, uniformisation des goûts, perte du lien social,
                                    pollution, grignotage… Ce face à face démontre que la réalité est plus complexe et pointe du doigt les vrais
                              enjeux d’une nourriture saine. Cette 2e partie cerne 8 tendances ou idées fortes d’aujourd’hui.


       1 – Introduction : 2000-2010,                                             2/2 – La nourriture identitaire : on reproche souvent à la
       les nouvelles attentes                                                    « malbou e » une certaine standardisation des plats, mais, en
                                                                                 un certain sens, les marques naturelles ne font guère mieux
       Dans les années 2000, les motivations en alimentation bio et
                                                                                 en se contentant souvent de proposer par exemple une sauce
       naturelle résidaient surtout en un triptyque solide fondé sur le
                                                                                 tomate traditionnelle ou de la moutarde de Dijon au lieu d’of-
       goût, la santé et la sécurité sanitaire. Qu’en est-il aujourd’hui ?
                                                                                 frir des recettes originales issues de régions de France, de la
       Les sondages démontrent que                                               cuisine maya, romaine, gauloise, ou d’une province reculée du
       le consommateur de la nou-                                                japon…
       velle décennie est désormais
                                                                                 2/3 – Comment faire du végétal une star désirable ?
       convaincu que les aliments
       bio ont du goût. Les médias                                               Bien que peu pratiqué dans les faits, le végétarisme devient
       l’ont durablement sensibilisé                                             progressivement un imaginaire désirable. Les fabricants in-
       aux grands enjeux environ-                                                sistent cependant trop sur les seules qualités diététiques des
       nementaux (réchau ement                                                   végétaux ou un choix éthique contraignant par essence. Les
       climatique,     pollution     de                                          marques devraient plutôt, pour se démarquer, communiquer
       l’eau…). L’éthique au sens                                                sur la notion de « force végétale », et, surtout, insister sur le
       large (bien être de l’homme),                                             goût avec la possibilité de réaliser ou de béné cier de recettes
       le concerne de plus en plus                                               savoureuses et étonnantes.
       comme le prouve le succès
       public du commerce équita-                                                3 –Slow-food et fast-food, pourquoi choisir ?
       ble. Se sentant menacé dans                                               Le combat culturel nourriture saine et familiale contre fast-
       sa vie de tous les jours par la                                           food et malbou e évolue vers un « mix » fraternel de besoins
       crise nancière globale (peur                                              contradictoires assumés : en hors foyers, l’on cherche de plus
       du chômage), il manifeste un                                              en plus une o re « street-food » sophistiquée avec des plats
       nouveau désir de lien et de                                               bio « fait maison », gastronomiques, bio et de saison, en pre-
       proximité magni é par le lm,                                              nant au besoin son temps dans une atmosphère dépaysante
       Bienvenue chez les Ch’tis. Il                                             qui incite à la rencontre.
       perçoit la nature autrement et                                            Le retour au nid familial voit alterner suivant l’humeur, les plats
       adopte de nouveaux compor-                                                familiaux faits avec amour avec des solutions alimentaires rapi-
       tements de consommation.                                                  des, saines et ultra-fraîches issues du traiteur ou d’un chef à do-
                                                                                 micile, pour manger seul, ou sur le pouce sans avoir à cuisiner.
       2 – Ma tomate est une amie qui prend soin de
       moi                                                                       4 – L’effet crise : quel impact ?
       2/1 – Les nouveaux imaginaires : les ingrédients alimentaires             Les dernières études (Agence Bio, ethicity…) démontrent que
       cessent d‘être des matières premières inertes qu’il faut protéger         l’alimentation bio résiste bien à la crise actuelle. Cette dernière
       de toute pollution, pour devenir progressivement des aliments             incite même à consommer autrement avec des achats ré é-
       vivants et sensibles avec qui l’on se sent proche, car issus d‘une        chis et utiles, et favorise les produits d’origine locale, généra-
       variété identi ée cultivée dans le potager du coin que l’on va            teurs d’emploi.
       chercher ou cultiver soi-même.                                            Le sentiment d’insécurité qui découle de cette période d’incer-
       Consommés directement sans transformation industrielle, les               titude accentue cependant le sentiment de tarifs élevés de la
       fruits, légumes et autres aliments basiques font aussi concur-            part des produits alimentaires certi és, et augmente le besoin
       rence aux probiotiques, oméga 3 et autres compléments ali-                de réassurance avec des demandes de garanties sur la qualité
       mentaires industriels, dans le rôle d’alicaments simples mais             supérieure des produits bio, et de béné ces produits ration-
       performants capables de nous soigner.                                     nels (plus de vitamines, plus de goût, plus d’éthique…).
       Le consommateur se sent aussi plus proche des cycles naturels             Les marques alimentaires, surtout celles en positionnement «
       de la nature et recherche des aliments ou recettes de saison.             premium » doivent donc insister dans leur communication sur
       Ces nouvelles attitudes amènent chacun à se soucier d’infor-              leurs promesses qualitatives (pour le pain, fournisseur de farine
       mations diététiques poussées, de modes de cuissons doux, et               inférieur à 50 km, pétrin à bras plongeant au lieu de rotatif…).
       d’aliments bruts à préparer soi-même ou faits maisons par le              Des gammes low-cost peuvent aussi conjointement être enri-
       restaurateur.                                                             chies ou créées.


                                                                                                                         Mai / Juin 2010
ALIMENTATION                                         Veille & innovation…                                                                  15




 5 – L’effet label : lequel adopter ?                                    contrairement au commerce équitable (qui reste légitime pour
 Une date importante : depuis le 1er janvier 2009 le label o ciel AB     les denrées ne pouvant être cultivées en Europe), répond aux
 ne propose pas plus de garanties réglementaires que le label bio        tendances sociétales suivantes :
 de l’Union européenne (EU), dont l’a chage produit deviendra            7/1 – Je connais mon paysan : la reconnaissance et la défense
 obligatoire le 1er juillet 2010.                                        d’une agriculture paysanne de proximité devient de plus en
 Quels enseignements en tirer ? Cette banalisation des normes            plus l’a aire du français moyen, comme le prouve le succès
 françaises risque de pro ter à terme aux marques de distributeurs       des Amap.
 (MDD), et d’induire en erreur le consommateur bio qui se voit dé-       7/2 – Je maintien mon emploi : exacerbé par la crise et l’édu-
 sormais proposer un même type de produit labellisé AB et EU à           cation des médias, le consommateur établit un lien de plus en
 tous les prix…                                                          plus évident entre l’achat de produits de proximité et la relo-
 Les sociétés certi ées qui font le choix d’une éthique renforcée        calisation de l’emploi.
 et de normes qualitatives accrues peuvent apposer en sus du             7/3 – Quelle est l’empreinte carbone de mon poireau ? 2011
 label EU une ou plusieurs garanties supplémentaires reconnues,          verra apparaître la généralisation de l’étiquetage carbone sur
 comme cela se fait ailleurs en Europe sous forme de labels o ciels      les produits de grande consommation, déjà expérimenté par
 ou privés : AOC, AOP Label rouge, BIO Cohérence, (Alternative Bio
                         ,                                               certaines enseignes de la grande distribution. Cette avancée
 2009), Biosolidaire, Max Havelaar, Déméter, Nature et Progrès, ou       est importante pour la sensibilisation à la consommation de
 des marques régionales comme BioBreizh…                                 produits de saison et locaux, moins gourmands en C02.

 6 – Lien social, le nouveau Graal                                       8 – Alimentation 2.0, à la sauce web
 Notons depuis les années 1950 une montée puissante d’un                 Depuis 2004, Internet vit un changement majeur dans ses usa-
 besoin de lien social de proximité qui contrebalance le règne           ges, en devenant 2.0. Dorénavant l’internaute ne se contente
 actuel de l’individu roi. La mère de famille moderne veut aussi         plus de sites de marques statiques avec une information à sens
 nourrir la « panse psychique » de sa petite famille dans le but         unique, mais veut aussi donner son avis (Blogs, commentaires
 plus ou moins inconscient de recréer de la parenté et du lien           de produits ou d’articles, Twitter), être inséré dans une commu-
 amical par les repas. On s’alimente de plus en plus avec et pour        nauté (Facebook…), montrer ou lire des photos (Youtube…),
 l’autre.                                                                recevoir des conseils adaptés sur son smartphone, acheter
 Les marques alimentaires bio, encore trop concentrées sur les           directement au fabricant, et, même participer aux créations
 seules notions de goût et de qualité & équilibre alimentaire            alimentaires des marques !
 (sans pesticide, sans OGM, plat équilibré), insistent plutôt dans       Les acteurs de la lière alimentation naturelle s’engagent à
 le domaine relationnel sur un lien social élargi avec le produc-        peine sur cette tendance de fond, alors qu’elle est la promesse
 teur (commerce équitable et solidaire), en négligeant cepen-            d’un lien numérique plus étroit avec son client, et de services
 dant la « fabrique familiale ».                                         personnalisés à réelle valeur ajoutée.
 Elles peuvent pour cela aller au-delà de la mise en scène
 conventionnelle d’une famille réunie autour d‘un bon plat, en                             Suite au prochain article : les leçons du futur
 racontant une histoire humaine et chaleureuse qui mettrait en
 contact direct le consommateur, l’entreprise et les pays pro-
 ducteurs.
 La distribution hors foyer, quand à elle, devrait veiller à créer cet
 imaginaire de reliance par un décor chaleureux et des grandes
 tablées qui incitent les clients à manger ensemble.
 On peut aussi dans tous les cas utiliser les grandes dates festi-          M. Sauveur Fernandez est consultant expert en marketing
 ves inscrites dans l’imaginaire collectif (Pâques, Ramadan, fêter          vert et innovation responsable. Fondateur de l’Éconovateur
 le retour du printemps, de l’été avec la Saint-Jean…).                     en 2001, pionnier français des principes de la communication
                                                                            responsable, il décrypte les tendances à venir, et aide les
                                                                            entreprises à la création de produits et services éthiques.
 7 – Le local, recette gagnante
                                                                            4 rue de Chaffoy - 30 000 Nîmes
 Le local à la cote. Cette tendance profonde est le signe que               Tél. : 06 11 40 19 91
 le consommateur veut se sentir d’une façon ou d’une autre                  Mail : fsauveur@econovateur.com
 relié intimement à la vie de son assiette. Ce désir de proximité           www.econovateur.com
 prédit une montée certaine du commerce solidaire local qui,


                                                                                                                Mai / Juin 2010

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  • 1. ALIMENTATION Veille & innovation… 13 Alimentation naturelle : les leçons du présent (2/3) M. Sauveu r Fernande z L a 1ère partie confronte à la lumière du passé les atouts de l’alimentation naturelle face aux dysfonctionnements de l’alimentation industrielle conventionnelle : malbou e, uniformisation des goûts, perte du lien social, pollution, grignotage… Ce face à face démontre que la réalité est plus complexe et pointe du doigt les vrais enjeux d’une nourriture saine. Cette 2e partie cerne 8 tendances ou idées fortes d’aujourd’hui. 1 – Introduction : 2000-2010, 2/2 – La nourriture identitaire : on reproche souvent à la les nouvelles attentes « malbou e » une certaine standardisation des plats, mais, en un certain sens, les marques naturelles ne font guère mieux Dans les années 2000, les motivations en alimentation bio et en se contentant souvent de proposer par exemple une sauce naturelle résidaient surtout en un triptyque solide fondé sur le tomate traditionnelle ou de la moutarde de Dijon au lieu d’of- goût, la santé et la sécurité sanitaire. Qu’en est-il aujourd’hui ? frir des recettes originales issues de régions de France, de la Les sondages démontrent que cuisine maya, romaine, gauloise, ou d’une province reculée du le consommateur de la nou- japon… velle décennie est désormais 2/3 – Comment faire du végétal une star désirable ? convaincu que les aliments bio ont du goût. Les médias Bien que peu pratiqué dans les faits, le végétarisme devient l’ont durablement sensibilisé progressivement un imaginaire désirable. Les fabricants in- aux grands enjeux environ- sistent cependant trop sur les seules qualités diététiques des nementaux (réchau ement végétaux ou un choix éthique contraignant par essence. Les climatique, pollution de marques devraient plutôt, pour se démarquer, communiquer l’eau…). L’éthique au sens sur la notion de « force végétale », et, surtout, insister sur le large (bien être de l’homme), goût avec la possibilité de réaliser ou de béné cier de recettes le concerne de plus en plus savoureuses et étonnantes. comme le prouve le succès public du commerce équita- 3 –Slow-food et fast-food, pourquoi choisir ? ble. Se sentant menacé dans Le combat culturel nourriture saine et familiale contre fast- sa vie de tous les jours par la food et malbou e évolue vers un « mix » fraternel de besoins crise nancière globale (peur contradictoires assumés : en hors foyers, l’on cherche de plus du chômage), il manifeste un en plus une o re « street-food » sophistiquée avec des plats nouveau désir de lien et de bio « fait maison », gastronomiques, bio et de saison, en pre- proximité magni é par le lm, nant au besoin son temps dans une atmosphère dépaysante Bienvenue chez les Ch’tis. Il qui incite à la rencontre. perçoit la nature autrement et Le retour au nid familial voit alterner suivant l’humeur, les plats adopte de nouveaux compor- familiaux faits avec amour avec des solutions alimentaires rapi- tements de consommation. des, saines et ultra-fraîches issues du traiteur ou d’un chef à do- micile, pour manger seul, ou sur le pouce sans avoir à cuisiner. 2 – Ma tomate est une amie qui prend soin de moi 4 – L’effet crise : quel impact ? 2/1 – Les nouveaux imaginaires : les ingrédients alimentaires Les dernières études (Agence Bio, ethicity…) démontrent que cessent d‘être des matières premières inertes qu’il faut protéger l’alimentation bio résiste bien à la crise actuelle. Cette dernière de toute pollution, pour devenir progressivement des aliments incite même à consommer autrement avec des achats ré é- vivants et sensibles avec qui l’on se sent proche, car issus d‘une chis et utiles, et favorise les produits d’origine locale, généra- variété identi ée cultivée dans le potager du coin que l’on va teurs d’emploi. chercher ou cultiver soi-même. Le sentiment d’insécurité qui découle de cette période d’incer- Consommés directement sans transformation industrielle, les titude accentue cependant le sentiment de tarifs élevés de la fruits, légumes et autres aliments basiques font aussi concur- part des produits alimentaires certi és, et augmente le besoin rence aux probiotiques, oméga 3 et autres compléments ali- de réassurance avec des demandes de garanties sur la qualité mentaires industriels, dans le rôle d’alicaments simples mais supérieure des produits bio, et de béné ces produits ration- performants capables de nous soigner. nels (plus de vitamines, plus de goût, plus d’éthique…). Le consommateur se sent aussi plus proche des cycles naturels Les marques alimentaires, surtout celles en positionnement « de la nature et recherche des aliments ou recettes de saison. premium » doivent donc insister dans leur communication sur Ces nouvelles attitudes amènent chacun à se soucier d’infor- leurs promesses qualitatives (pour le pain, fournisseur de farine mations diététiques poussées, de modes de cuissons doux, et inférieur à 50 km, pétrin à bras plongeant au lieu de rotatif…). d’aliments bruts à préparer soi-même ou faits maisons par le Des gammes low-cost peuvent aussi conjointement être enri- restaurateur. chies ou créées. Mai / Juin 2010
  • 2. ALIMENTATION Veille & innovation… 15 5 – L’effet label : lequel adopter ? contrairement au commerce équitable (qui reste légitime pour Une date importante : depuis le 1er janvier 2009 le label o ciel AB les denrées ne pouvant être cultivées en Europe), répond aux ne propose pas plus de garanties réglementaires que le label bio tendances sociétales suivantes : de l’Union européenne (EU), dont l’a chage produit deviendra 7/1 – Je connais mon paysan : la reconnaissance et la défense obligatoire le 1er juillet 2010. d’une agriculture paysanne de proximité devient de plus en Quels enseignements en tirer ? Cette banalisation des normes plus l’a aire du français moyen, comme le prouve le succès françaises risque de pro ter à terme aux marques de distributeurs des Amap. (MDD), et d’induire en erreur le consommateur bio qui se voit dé- 7/2 – Je maintien mon emploi : exacerbé par la crise et l’édu- sormais proposer un même type de produit labellisé AB et EU à cation des médias, le consommateur établit un lien de plus en tous les prix… plus évident entre l’achat de produits de proximité et la relo- Les sociétés certi ées qui font le choix d’une éthique renforcée calisation de l’emploi. et de normes qualitatives accrues peuvent apposer en sus du 7/3 – Quelle est l’empreinte carbone de mon poireau ? 2011 label EU une ou plusieurs garanties supplémentaires reconnues, verra apparaître la généralisation de l’étiquetage carbone sur comme cela se fait ailleurs en Europe sous forme de labels o ciels les produits de grande consommation, déjà expérimenté par ou privés : AOC, AOP Label rouge, BIO Cohérence, (Alternative Bio , certaines enseignes de la grande distribution. Cette avancée 2009), Biosolidaire, Max Havelaar, Déméter, Nature et Progrès, ou est importante pour la sensibilisation à la consommation de des marques régionales comme BioBreizh… produits de saison et locaux, moins gourmands en C02. 6 – Lien social, le nouveau Graal 8 – Alimentation 2.0, à la sauce web Notons depuis les années 1950 une montée puissante d’un Depuis 2004, Internet vit un changement majeur dans ses usa- besoin de lien social de proximité qui contrebalance le règne ges, en devenant 2.0. Dorénavant l’internaute ne se contente actuel de l’individu roi. La mère de famille moderne veut aussi plus de sites de marques statiques avec une information à sens nourrir la « panse psychique » de sa petite famille dans le but unique, mais veut aussi donner son avis (Blogs, commentaires plus ou moins inconscient de recréer de la parenté et du lien de produits ou d’articles, Twitter), être inséré dans une commu- amical par les repas. On s’alimente de plus en plus avec et pour nauté (Facebook…), montrer ou lire des photos (Youtube…), l’autre. recevoir des conseils adaptés sur son smartphone, acheter Les marques alimentaires bio, encore trop concentrées sur les directement au fabricant, et, même participer aux créations seules notions de goût et de qualité & équilibre alimentaire alimentaires des marques ! (sans pesticide, sans OGM, plat équilibré), insistent plutôt dans Les acteurs de la lière alimentation naturelle s’engagent à le domaine relationnel sur un lien social élargi avec le produc- peine sur cette tendance de fond, alors qu’elle est la promesse teur (commerce équitable et solidaire), en négligeant cepen- d’un lien numérique plus étroit avec son client, et de services dant la « fabrique familiale ». personnalisés à réelle valeur ajoutée. Elles peuvent pour cela aller au-delà de la mise en scène conventionnelle d’une famille réunie autour d‘un bon plat, en Suite au prochain article : les leçons du futur racontant une histoire humaine et chaleureuse qui mettrait en contact direct le consommateur, l’entreprise et les pays pro- ducteurs. La distribution hors foyer, quand à elle, devrait veiller à créer cet imaginaire de reliance par un décor chaleureux et des grandes tablées qui incitent les clients à manger ensemble. On peut aussi dans tous les cas utiliser les grandes dates festi- M. Sauveur Fernandez est consultant expert en marketing ves inscrites dans l’imaginaire collectif (Pâques, Ramadan, fêter vert et innovation responsable. Fondateur de l’Éconovateur le retour du printemps, de l’été avec la Saint-Jean…). en 2001, pionnier français des principes de la communication responsable, il décrypte les tendances à venir, et aide les entreprises à la création de produits et services éthiques. 7 – Le local, recette gagnante 4 rue de Chaffoy - 30 000 Nîmes Le local à la cote. Cette tendance profonde est le signe que Tél. : 06 11 40 19 91 le consommateur veut se sentir d’une façon ou d’une autre Mail : fsauveur@econovateur.com relié intimement à la vie de son assiette. Ce désir de proximité www.econovateur.com prédit une montée certaine du commerce solidaire local qui, Mai / Juin 2010