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55ème CONGRES DE L’UIA
    Miami, Fl. / États-Unis
31 octobre – 4 novembre 2011




  SERVICES FINANCIERS
Date de la séance : Mardi 1er novembre 2011




         CAS PRATIQUE
   Les « Hedge Fund » anges ou démons ?

       THE CROCODILE FUND CASE




         Silvestre Tandeau de Marsac
          Avocat au Barreau de Paris
Président de la Commission Services Financiers
1. LES FAITS :

    1.1.    LE CROCODILE FUND :

Le Crocodile Fund est un hedge fund immatriculé aux Iles Vierges Britanniques.

Ce Fonds, qui repose sur une gestion alternative sur dettes souveraines, est géré par la
banque Bank of Marigot.

La banque dépositaire est la filiale luxembourgeoise d’un groupe bancaire français, la BBCC.


   1.2.     LES PROTAGONISTES :

Différents intervenants gravitent autour du Fonds.

   1.2.1. Monsieur John TRAVERS :

Monsieur John Travers exerçait auparavant la profession d’avocat.

Aujourd’hui, Monsieur John TRAVERS voyage beaucoup et passe son temps entre l’Italie,
l’Espagne, la France et le Luxembourg.

On admettra que Monsieur John TRAVERS dispose d’une résidence dans chacun de ces
pays.

   1.2.2. La société de gestion du Fonds : la Bank of Marigot

La Bank of Marigot est un établissement de crédit ayant son siège social aux Iles Vierges
Britanniques.

La Bank of Marigot a été placée en faillite.


   1.2.3. Le dépositaire du Fonds

La banque dépositaire du fonds est une filiale luxembourgeoise d’un groupe bancaire
français, la BBCC.


   1.2.4. Le conseiller :

Le conseiller du Fonds est une société de droit américain immatriculée au Delaware.


   1.2.5. Le sous-dépositaire : la Zapata Bank

Il s’agit d’une banque qui exerce une activité de sous-dépositaire.


   1.2.6. Monsieur COOK (le liquidateur) :

Monsieur COOK est le liquidateur de la Bank of Marigot. Il est établi aux Iles Vierges
Britanniques.



                                                                                        2
1.3.        LES RELATIONS CONTRACTUELLES ENTRE LES PROTAGONISTES :


   1.3.1. La souscription au Fonds :

Monsieur John TRAVERS a été contacté par l’un de ses anciens clients qui lui a proposé
d’investir 3 millions d’euros dans un hedge fund immatriculé aux Iles Vierges Britanniques.

L’investissement global de 3 millions d’euros a été réalisé à travers quatre entités
différentes :

           1.    Une fiducie au Luxembourg ;
           2.    Une société civile de portefeuille dont le siège social est à Paris ;
           3.    Un compte bancaire au nom de Monsieur Travers ouvert dans une banque de
                 droit espagnol à Madrid ;
           4.    Un compte bancaire individuel ouvert dans une banque de droit italien à Milan.

Monsieur John TRAVERS a signé quatre formulaires de souscription au « Crocodile fund »
se décomposant comme suit :

           1.    500.000 € à partir de la fiducie de droit luxembourgeois ;
           2.    850.000 € à partir de la société civile de portefeuille de droit français ;
           3.    800.000 € à partir du compte espagnol ;
           4.    850.000 € à partir du compte italien.


   1.3.2. Les relations entre le dépositaire et le sous-dépositaire :

La banque dépositaire a conclu un contrat de sous-dépôt avec la Zapata Bank. Elle a ainsi
confié la garde d’un certain nombre d’actifs à la Zapata Bank.


   2. L’ORIGINE DU LITIGE :

Le Fonds a perdu plus de 50 % au cours de l’année 2011 et ne représente plus que
1.500.000 €.

S’inquiétant de ces pertes, Monsieur John TRAVERS a étudié en détail ses formulaires de
souscription et s’est aperçu que le Fonds qui reposait sur une gestion alternative sur dettes
souveraines était géré par la Bank of Marigot dont la banque dépositaire était la filiale
luxembourgeoise d’un groupe bancaire français, la BBCC.

Or, la banque dépositaire a sous-délégué une partie des actifs du Fonds à un sous-
dépositaire qui l’a détourné.

En outre, la Bank of Marigot a été placée en liquidation judiciaire et Monsieur COOK a été
nommé es qualité de liquidateur judiciaire.

C’est dans ces conditions que Monsieur John TRAVERS est venu nous consulter.




                                                                                               3
3. LES SOLUTIONS ENVISAGEABLES :

L’une des solutions envisageable serait de demander la nullité de la souscription au motif
que le Fonds, à défaut d’être coordonné, n’a pas fait l’objet d’une autorisation par l’Autorité
des Marchés Financiers (3.1).

Il serait également possible d’engager la responsabilité de la banque dépositaire (3.2).


   3.1.          Sur la nullité de la souscription au Fonds :

   3.1.1.        EN DROIT :

   3.1.1.1.      L’obligation d’obtenir une autorisation de l’AMF pour les fonds non
                 coordonnés :

Les règles de droit français relatives à la commercialisation en France de fonds étrangers
restreignent considérablement les possibilités de commercialisation sur le territoire national.


    (i)       Une autorisation nécessaire pour une commercialisation active :

L’article L.214-1 du Code monétaire et financier prévoit que « tout organisme de placement
collectif ou fonds d'investissement constitué sur le fondement d'un droit étranger autre que de type
fermé et qui n'est pas agréé conformément à la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du
Conseil du 13 juillet 2009 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et
administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières doit,
préalablement à la commercialisation de ses parts ou actions sur le territoire de la République
française, faire l'objet d'une autorisation délivrée par l'Autorité des marchés financiers. Un décret
définit les conditions de délivrance de cette autorisation ».

L’article D.214-1 du même Code précise clairement qu’un fonds étranger non coordonné ne
peut faire l’objet d’aucune commercialisation sur le territoire français s’il n’a pas obtenu
l’autorisation de l’AMF :

                 « Lorsqu'un organisme de placement collectif ou un fonds d'investissement constitué
                 sur le fondement d'un droit étranger, autre que de type fermé, n'est pas agréé
                 conformément à la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13
                 juillet 2009, l'Autorité des marchés financiers ne délivre l'autorisation de
                 commercialisation mentionnée au II de l'article L. 214-1 qu'à la condition que cet
                 organisme ou ce fonds soit soumis à des règles de sécurité et de transparence
                 équivalentes aux règles françaises et qu'un instrument d'échange d'information et
                 d'assistance mutuelle dans le domaine de la gestion d'actifs pour le compte de tiers ait
                 été mis en place entre l'Autorité des marchés financiers et l'autorité de surveillance de
                 cet organisme ou de ce fonds ».


Ainsi, l’autorisation n’est délivrée que sous certaines conditions :

    -     l’organisme est soumis à des règles de sécurité et de transparence équivalentes aux
          règles françaises ;

    -     un instrument d'échange d'information et d'assistance mutuelle dans le domaine de la
          gestion d'actifs pour le compte de tiers a été mis en place entre l'Autorité des
          marchés financiers et l'autorité de surveillance de ce fonds ;




                                                                                                     4
L’article 411-60 du règlement général de l’AMF précise, en outre, qu’en vue de la
commercialisation soit d’OPCVM originaires d’un État non membre de la Communauté
européenne ou d’un État non partie à l’accord sur l’Espace économique européen, un
dossier est soumis pour autorisation préalable à l’AMF, dans les conditions fixées par
l’instruction n°2005-01 du 25 janvier 2005.

Ces conditions restreignent la commercialisation de fonds étrangers non coordonnés en
France. En effet, si tant est qu’un tel accord d’échange existe, la condition d’équivalence
imposée par le texte laisse une large latitude au régulateur français pour refuser de délivrer
cette autorisation.

Par commercialisation, l’AMF entend sa présentation par différentes voies en vue
d’inciter un investisseur potentiel, y compris un gérant pour compte de tiers, à la
souscription de parts (publicité, démarchage ou placement par un prestataire
d’investissement).

A ce titre, constitue un acte de commercialisation toute proposition d’acquisition ou de
souscription d’un fonds faite à un souscripteur potentiel»1.


    (ii)       L’absence d’autorisation pour une commercialisation passive :

Les autorités de marché françaises ont assoupli leur position en indiquant que :

                       « La commercialisation « passive » (sans publicité ni démarchage, c'est-à-dire
                       sur demande de l’investisseur) n’aura pas à être autorisée »2.

La commercialisation passive se caractérise par le fait qu’elle :

                       «Répond à une demande de l’investisseur portant sur un fonds précisément
                       désigné»3.


A défaut d’autorisation, aucun acte de commercialisation active ne pourra être réalisé.


    3.1.1.2.       Les sanctions de l’absence d’autorisation de l’AMF :

Aux termes de l’article 1128 du Code civil, « il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui
puissent être l’objet des conventions ».

A défaut d’autorisation préalable, les fonds non coordonnés sont hors commerce.

La jurisprudence sanctionne les conventions portant sur une chose hors commerce par la
nullité de la convention4.

Par ailleurs, la jurisprudence reconnait le caractère manifestement d’ordre public de
l’obligation de solliciter l’agrément de l’AMF.
La Cour de cassation considère qu’un contrat ayant pour objet l’exercice d’une activité non
agréée est nul en raison du caractère illicite de son objet5.


1
  Bulletin mensuel COB, avril 2003, n° 378, « La régulation de la multigestion alternative », p. 21
2
  Bulletin COB, n° 332, février 1999, p. 40
3
  Bulletin mensuel COB, avril 2003, n° 378, « La régulation de la multigestion alternative », p. 21
4
  Cour d’appel de Paris, 27 mars 1992, Jurisdata 1992-021239 ; Com, 24 septembre 2003, n°01-11504
5
  Cass. com, 4 nov. 2008, n°07-19805, Cass. Com., 19 nov. 1991, n°90-10270



                                                                                                      5
Toute commercialisation en France en violation de cette procédure de demande
d’autorisation préalable est sanctionnée par l’AMF.

Ainsi, outre les sanctions disciplinaires qui peuvent être prononcées par l’AMF, le
souscripteur pourrait solliciter son annulation pour illicéité de son objet.


  3.1.2.      EN FAIT :

Aucune convention n’est à ce jour en vigueur entre la France et les Iles Vierges
Britanniques.

La commercialisation active par une société de gestion ayant son siège social aux Iles
Vierges Britanniques d’un fonds en France est interdite à défaut d’autorisation
préalable par l’AMF.

En l’espèce, et après vérification auprès des autorités compétentes, aucune autorisation n’a
été demandée et donc obtenue pour la commercialisation de ce Fonds en France.

En outre, la commercialisation était active dès lors que Monsieur John TRAVERS a été
sollicité par téléphone : il n’a donc pas demandé de lui-même à souscrire des parts à ce
Fonds.

La commercialisation ne peut donc être effectuée en France.

Monsieur John TRAVERS peut donc soulever la nullité de la souscription au Fonds pour non
respect de l’autorisation préalable de l’AMF, à tout le moins pour les parts souscrites en
France.

La résolution du contrat entrainera l’obligation de restituer à Monsieur John TRAVERS les
sommes versées pour acquérir une part du Fonds.

Il conviendra d’assigner le liquidateur, Monsieur COOK, en nullité de la souscription et en
restitution des sommes versées.


   3.2.       Sur la responsabilité du dépositaire du Fonds :

    3.2.1.    EN DROIT :

La réglementation applicable à l’époque des faits exige que le règlement de tout fonds
commun de placement prévoit obligatoirement que ses actifs sont conservés par un
dépositaire unique distinct de la société de gestion du fonds, lequel doit s’assurer de la
régularité des décisions de cette société.

Le dépositaire d’un fonds assure les fonctions de tenue de compte-conservation des
instruments financiers du fonds.

Il pèse en outre sur ce dépositaire une obligation de restitution des instruments financiers
dont il assure la conservation quand bien même aurait-il confié à un tiers délégataire tout ou
partie des actifs dont il a la garde.




                                                                                         6
Il en est ainsi qu’il s’agisse de titres français ou détenus à l’étranger dans la mesure où le
législateur assimile aux titres émis en France « tous les instruments équivalents ou droits
représentatifs d’un placement financier dans un entité émis sur le fondement de droit étranger »6.

L’obligation de conservation et de restitution pesant sur les teneurs de comptes-
conservateurs est donc identique pour un titre étranger alors même que ce titre serait en
réalité conservé à l’étranger par le seul sous-dépositaire.

L’obligation de restitution, qui est de l’essence du contrat de dépôt, est rappelée très
clairement par l’article 322-4 du Règlement général de l’AMF selon lequel :

                    « Le teneur de compte conservateur respecte, en toute circonstance, les obligations
                    suivantes :
                    ....
                    3° Le teneur de compte conservateur a l’obligation de restituer les instruments
                    financiers inscrits en compte, dans ses livres.
                    Si ces instruments n’ont pas d’autre support que scriptural, le teneur de compte
                    conservateur responsable de leur inscription en compte les vire au teneur de compte
                    conservateur que le titulaire désigne. Ce virement est effectué dans les meilleurs
                    délais, sous réserve que le titulaire du compte ait rempli ses propres obligations.
                    Sans préjudice des dispositions comptables prévues à l’article 322-17, le teneur de
                    compte conservateur s’assure que sont distingués, dans les livres du dépositaire
                    central ou des dépositaires centraux auxquels il adhère, les avoirs de ses clients, y
                    compris ceux des OPCVM dont il est dépositaire, et ses avoirs propres.
                    Lorsque le teneur de compte conservateur recourt aux services d’un mandataire
                    mentionné à l’article 322-39, il s’assure de la mise en œuvre dans les livres du
                    mandataire de la même distinction.... »


L’article L.214-10 du Code monétaire et financier dispose :

                    « I. - Les actifs d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières sont
                    conservés par un dépositaire.

                    II. - La responsabilité du dépositaire n'est pas affectée par le fait qu'il confie à un tiers
                    tout ou partie des actifs dont il a la garde ».

Les règles relatives aux teneurs de comptes conservateurs en général, et les articles L. 214-
10 du Code monétaire et financier et 322-4 du Règlement général de l’AMF en particulier,
sont d’ordre public puisqu’elles organisent l’activité et définissent les règles de bonne
conduite et autres obligations professionnelles des prestataires de services
d’investissement7.

Ni la société de gestion, ni le dépositaire d’un fonds commun de droit français ou de droit
étranger ne peuvent y renoncer, ni même y déroger.

La Cour de cassation, dans deux arrêts, en date du 4 mai 20108 a jugé que le dépositaire,
qui a reçu pour mission, d’assurer la conservation des actifs de l’OPCVM dont il a la garde,
est tenu en toutes circonstances, même s’il en a confié la sous-conservation à un tiers, d’une
obligation de restitution immédiate de ces actifs en vertu de dispositions d’ordre public
destinées à assurer la protection de l’épargne et le bon fonctionnement des marchés
financiers.

6
  Article L.211-41 du Code monétaire et financier
7                                       ème
  Cass. Com. 26 fév. 2008, CA Paris, 15     ch., sect. A, 18 mars 2003, Vincent
8
  Com, 4 mai 2010, n°09-14187 et 09-14975



                                                                                                            7
La Cour de cassation vient donc confirmer l’arrêt de la Cour d’appel du 8 avril 20099.

Dans ces arrêts, RBC Dexia Investors et Société Générale Securities Services avaient
délégué à Lehman Brothers la conservation de leurs titres. Après la faillite de la banque
américaine, trois fonds avaient demandé à leurs dépositaires de leur restituer leurs actifs,
comme l’impose la loi.

La Cour d’appel avait considéré que le dépositaire qui a reçu pour mission d’assurer la
conservation des actifs de l’OPCVM était tenu à une obligation de restitution.


        3.2.2.       EN FAIT :

On supposera que la société civile de portefeuille a ouvert un compte-titre dans une agence
parisienne du groupe bancaire français, la BBCC, sur lequel ont été inscrits les parts du
Fonds. On admettra donc que le dépositaire est une banque de droit français.

En l’espèce, le dépositaire du Fonds a confié à un sous-dépositaire une partie des actifs du
Fonds qui a été détournée.

Conformément aux articles L214-10 du Code monétaire et financier et 322-4 du Règlement
général de l’AMF et à la jurisprudence précitée, l’agence parisienne du groupe bancaire
français est tenue à une obligation de restitution.

Dès lors, Monsieur John TRAVERS peut engager la responsabilité du dépositaire du Fonds,
alors même qu’il a confié à un sous-dépositaire une partie des actifs du Fonds.

La banque dépositaire ayant son siège social en France, Monsieur John TRAVERS pourra
l’assigner en France.




9
    Cour d’appel de Paris, 8 avril 2009, RG 2008/22106



                                                                                         8
THE CROCODILE FUND CASE
                                                       Schéma

                 Autorité des Marchés Financiers

                                                          Bank of Marigot
                                                          Banque of Marigot
                                                           (gestionnaire du fonds)
                                                          (gestionnaire du fonds)




Monsieur                                                  Filiale
John                          Crocodile Fund              Luxembourgeoise            Zapata Bank
TRAVERS                       (Hedge Fund)                (dépositaire du            (sous-dépositaire)
(investisseur)                                            fonds)




                  Société de droit américain            Groupe bancaire français
                  (conseiller du fonds)                 BBCC
                                                                                                          9

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  • 1. 55ème CONGRES DE L’UIA Miami, Fl. / États-Unis 31 octobre – 4 novembre 2011 SERVICES FINANCIERS Date de la séance : Mardi 1er novembre 2011 CAS PRATIQUE Les « Hedge Fund » anges ou démons ? THE CROCODILE FUND CASE Silvestre Tandeau de Marsac Avocat au Barreau de Paris Président de la Commission Services Financiers
  • 2. 1. LES FAITS : 1.1. LE CROCODILE FUND : Le Crocodile Fund est un hedge fund immatriculé aux Iles Vierges Britanniques. Ce Fonds, qui repose sur une gestion alternative sur dettes souveraines, est géré par la banque Bank of Marigot. La banque dépositaire est la filiale luxembourgeoise d’un groupe bancaire français, la BBCC. 1.2. LES PROTAGONISTES : Différents intervenants gravitent autour du Fonds. 1.2.1. Monsieur John TRAVERS : Monsieur John Travers exerçait auparavant la profession d’avocat. Aujourd’hui, Monsieur John TRAVERS voyage beaucoup et passe son temps entre l’Italie, l’Espagne, la France et le Luxembourg. On admettra que Monsieur John TRAVERS dispose d’une résidence dans chacun de ces pays. 1.2.2. La société de gestion du Fonds : la Bank of Marigot La Bank of Marigot est un établissement de crédit ayant son siège social aux Iles Vierges Britanniques. La Bank of Marigot a été placée en faillite. 1.2.3. Le dépositaire du Fonds La banque dépositaire du fonds est une filiale luxembourgeoise d’un groupe bancaire français, la BBCC. 1.2.4. Le conseiller : Le conseiller du Fonds est une société de droit américain immatriculée au Delaware. 1.2.5. Le sous-dépositaire : la Zapata Bank Il s’agit d’une banque qui exerce une activité de sous-dépositaire. 1.2.6. Monsieur COOK (le liquidateur) : Monsieur COOK est le liquidateur de la Bank of Marigot. Il est établi aux Iles Vierges Britanniques. 2
  • 3. 1.3. LES RELATIONS CONTRACTUELLES ENTRE LES PROTAGONISTES : 1.3.1. La souscription au Fonds : Monsieur John TRAVERS a été contacté par l’un de ses anciens clients qui lui a proposé d’investir 3 millions d’euros dans un hedge fund immatriculé aux Iles Vierges Britanniques. L’investissement global de 3 millions d’euros a été réalisé à travers quatre entités différentes : 1. Une fiducie au Luxembourg ; 2. Une société civile de portefeuille dont le siège social est à Paris ; 3. Un compte bancaire au nom de Monsieur Travers ouvert dans une banque de droit espagnol à Madrid ; 4. Un compte bancaire individuel ouvert dans une banque de droit italien à Milan. Monsieur John TRAVERS a signé quatre formulaires de souscription au « Crocodile fund » se décomposant comme suit : 1. 500.000 € à partir de la fiducie de droit luxembourgeois ; 2. 850.000 € à partir de la société civile de portefeuille de droit français ; 3. 800.000 € à partir du compte espagnol ; 4. 850.000 € à partir du compte italien. 1.3.2. Les relations entre le dépositaire et le sous-dépositaire : La banque dépositaire a conclu un contrat de sous-dépôt avec la Zapata Bank. Elle a ainsi confié la garde d’un certain nombre d’actifs à la Zapata Bank. 2. L’ORIGINE DU LITIGE : Le Fonds a perdu plus de 50 % au cours de l’année 2011 et ne représente plus que 1.500.000 €. S’inquiétant de ces pertes, Monsieur John TRAVERS a étudié en détail ses formulaires de souscription et s’est aperçu que le Fonds qui reposait sur une gestion alternative sur dettes souveraines était géré par la Bank of Marigot dont la banque dépositaire était la filiale luxembourgeoise d’un groupe bancaire français, la BBCC. Or, la banque dépositaire a sous-délégué une partie des actifs du Fonds à un sous- dépositaire qui l’a détourné. En outre, la Bank of Marigot a été placée en liquidation judiciaire et Monsieur COOK a été nommé es qualité de liquidateur judiciaire. C’est dans ces conditions que Monsieur John TRAVERS est venu nous consulter. 3
  • 4. 3. LES SOLUTIONS ENVISAGEABLES : L’une des solutions envisageable serait de demander la nullité de la souscription au motif que le Fonds, à défaut d’être coordonné, n’a pas fait l’objet d’une autorisation par l’Autorité des Marchés Financiers (3.1). Il serait également possible d’engager la responsabilité de la banque dépositaire (3.2). 3.1. Sur la nullité de la souscription au Fonds : 3.1.1. EN DROIT : 3.1.1.1. L’obligation d’obtenir une autorisation de l’AMF pour les fonds non coordonnés : Les règles de droit français relatives à la commercialisation en France de fonds étrangers restreignent considérablement les possibilités de commercialisation sur le territoire national. (i) Une autorisation nécessaire pour une commercialisation active : L’article L.214-1 du Code monétaire et financier prévoit que « tout organisme de placement collectif ou fonds d'investissement constitué sur le fondement d'un droit étranger autre que de type fermé et qui n'est pas agréé conformément à la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières doit, préalablement à la commercialisation de ses parts ou actions sur le territoire de la République française, faire l'objet d'une autorisation délivrée par l'Autorité des marchés financiers. Un décret définit les conditions de délivrance de cette autorisation ». L’article D.214-1 du même Code précise clairement qu’un fonds étranger non coordonné ne peut faire l’objet d’aucune commercialisation sur le territoire français s’il n’a pas obtenu l’autorisation de l’AMF : « Lorsqu'un organisme de placement collectif ou un fonds d'investissement constitué sur le fondement d'un droit étranger, autre que de type fermé, n'est pas agréé conformément à la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009, l'Autorité des marchés financiers ne délivre l'autorisation de commercialisation mentionnée au II de l'article L. 214-1 qu'à la condition que cet organisme ou ce fonds soit soumis à des règles de sécurité et de transparence équivalentes aux règles françaises et qu'un instrument d'échange d'information et d'assistance mutuelle dans le domaine de la gestion d'actifs pour le compte de tiers ait été mis en place entre l'Autorité des marchés financiers et l'autorité de surveillance de cet organisme ou de ce fonds ». Ainsi, l’autorisation n’est délivrée que sous certaines conditions : - l’organisme est soumis à des règles de sécurité et de transparence équivalentes aux règles françaises ; - un instrument d'échange d'information et d'assistance mutuelle dans le domaine de la gestion d'actifs pour le compte de tiers a été mis en place entre l'Autorité des marchés financiers et l'autorité de surveillance de ce fonds ; 4
  • 5. L’article 411-60 du règlement général de l’AMF précise, en outre, qu’en vue de la commercialisation soit d’OPCVM originaires d’un État non membre de la Communauté européenne ou d’un État non partie à l’accord sur l’Espace économique européen, un dossier est soumis pour autorisation préalable à l’AMF, dans les conditions fixées par l’instruction n°2005-01 du 25 janvier 2005. Ces conditions restreignent la commercialisation de fonds étrangers non coordonnés en France. En effet, si tant est qu’un tel accord d’échange existe, la condition d’équivalence imposée par le texte laisse une large latitude au régulateur français pour refuser de délivrer cette autorisation. Par commercialisation, l’AMF entend sa présentation par différentes voies en vue d’inciter un investisseur potentiel, y compris un gérant pour compte de tiers, à la souscription de parts (publicité, démarchage ou placement par un prestataire d’investissement). A ce titre, constitue un acte de commercialisation toute proposition d’acquisition ou de souscription d’un fonds faite à un souscripteur potentiel»1. (ii) L’absence d’autorisation pour une commercialisation passive : Les autorités de marché françaises ont assoupli leur position en indiquant que : « La commercialisation « passive » (sans publicité ni démarchage, c'est-à-dire sur demande de l’investisseur) n’aura pas à être autorisée »2. La commercialisation passive se caractérise par le fait qu’elle : «Répond à une demande de l’investisseur portant sur un fonds précisément désigné»3. A défaut d’autorisation, aucun acte de commercialisation active ne pourra être réalisé. 3.1.1.2. Les sanctions de l’absence d’autorisation de l’AMF : Aux termes de l’article 1128 du Code civil, « il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet des conventions ». A défaut d’autorisation préalable, les fonds non coordonnés sont hors commerce. La jurisprudence sanctionne les conventions portant sur une chose hors commerce par la nullité de la convention4. Par ailleurs, la jurisprudence reconnait le caractère manifestement d’ordre public de l’obligation de solliciter l’agrément de l’AMF. La Cour de cassation considère qu’un contrat ayant pour objet l’exercice d’une activité non agréée est nul en raison du caractère illicite de son objet5. 1 Bulletin mensuel COB, avril 2003, n° 378, « La régulation de la multigestion alternative », p. 21 2 Bulletin COB, n° 332, février 1999, p. 40 3 Bulletin mensuel COB, avril 2003, n° 378, « La régulation de la multigestion alternative », p. 21 4 Cour d’appel de Paris, 27 mars 1992, Jurisdata 1992-021239 ; Com, 24 septembre 2003, n°01-11504 5 Cass. com, 4 nov. 2008, n°07-19805, Cass. Com., 19 nov. 1991, n°90-10270 5
  • 6. Toute commercialisation en France en violation de cette procédure de demande d’autorisation préalable est sanctionnée par l’AMF. Ainsi, outre les sanctions disciplinaires qui peuvent être prononcées par l’AMF, le souscripteur pourrait solliciter son annulation pour illicéité de son objet. 3.1.2. EN FAIT : Aucune convention n’est à ce jour en vigueur entre la France et les Iles Vierges Britanniques. La commercialisation active par une société de gestion ayant son siège social aux Iles Vierges Britanniques d’un fonds en France est interdite à défaut d’autorisation préalable par l’AMF. En l’espèce, et après vérification auprès des autorités compétentes, aucune autorisation n’a été demandée et donc obtenue pour la commercialisation de ce Fonds en France. En outre, la commercialisation était active dès lors que Monsieur John TRAVERS a été sollicité par téléphone : il n’a donc pas demandé de lui-même à souscrire des parts à ce Fonds. La commercialisation ne peut donc être effectuée en France. Monsieur John TRAVERS peut donc soulever la nullité de la souscription au Fonds pour non respect de l’autorisation préalable de l’AMF, à tout le moins pour les parts souscrites en France. La résolution du contrat entrainera l’obligation de restituer à Monsieur John TRAVERS les sommes versées pour acquérir une part du Fonds. Il conviendra d’assigner le liquidateur, Monsieur COOK, en nullité de la souscription et en restitution des sommes versées. 3.2. Sur la responsabilité du dépositaire du Fonds : 3.2.1. EN DROIT : La réglementation applicable à l’époque des faits exige que le règlement de tout fonds commun de placement prévoit obligatoirement que ses actifs sont conservés par un dépositaire unique distinct de la société de gestion du fonds, lequel doit s’assurer de la régularité des décisions de cette société. Le dépositaire d’un fonds assure les fonctions de tenue de compte-conservation des instruments financiers du fonds. Il pèse en outre sur ce dépositaire une obligation de restitution des instruments financiers dont il assure la conservation quand bien même aurait-il confié à un tiers délégataire tout ou partie des actifs dont il a la garde. 6
  • 7. Il en est ainsi qu’il s’agisse de titres français ou détenus à l’étranger dans la mesure où le législateur assimile aux titres émis en France « tous les instruments équivalents ou droits représentatifs d’un placement financier dans un entité émis sur le fondement de droit étranger »6. L’obligation de conservation et de restitution pesant sur les teneurs de comptes- conservateurs est donc identique pour un titre étranger alors même que ce titre serait en réalité conservé à l’étranger par le seul sous-dépositaire. L’obligation de restitution, qui est de l’essence du contrat de dépôt, est rappelée très clairement par l’article 322-4 du Règlement général de l’AMF selon lequel : « Le teneur de compte conservateur respecte, en toute circonstance, les obligations suivantes : .... 3° Le teneur de compte conservateur a l’obligation de restituer les instruments financiers inscrits en compte, dans ses livres. Si ces instruments n’ont pas d’autre support que scriptural, le teneur de compte conservateur responsable de leur inscription en compte les vire au teneur de compte conservateur que le titulaire désigne. Ce virement est effectué dans les meilleurs délais, sous réserve que le titulaire du compte ait rempli ses propres obligations. Sans préjudice des dispositions comptables prévues à l’article 322-17, le teneur de compte conservateur s’assure que sont distingués, dans les livres du dépositaire central ou des dépositaires centraux auxquels il adhère, les avoirs de ses clients, y compris ceux des OPCVM dont il est dépositaire, et ses avoirs propres. Lorsque le teneur de compte conservateur recourt aux services d’un mandataire mentionné à l’article 322-39, il s’assure de la mise en œuvre dans les livres du mandataire de la même distinction.... » L’article L.214-10 du Code monétaire et financier dispose : « I. - Les actifs d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières sont conservés par un dépositaire. II. - La responsabilité du dépositaire n'est pas affectée par le fait qu'il confie à un tiers tout ou partie des actifs dont il a la garde ». Les règles relatives aux teneurs de comptes conservateurs en général, et les articles L. 214- 10 du Code monétaire et financier et 322-4 du Règlement général de l’AMF en particulier, sont d’ordre public puisqu’elles organisent l’activité et définissent les règles de bonne conduite et autres obligations professionnelles des prestataires de services d’investissement7. Ni la société de gestion, ni le dépositaire d’un fonds commun de droit français ou de droit étranger ne peuvent y renoncer, ni même y déroger. La Cour de cassation, dans deux arrêts, en date du 4 mai 20108 a jugé que le dépositaire, qui a reçu pour mission, d’assurer la conservation des actifs de l’OPCVM dont il a la garde, est tenu en toutes circonstances, même s’il en a confié la sous-conservation à un tiers, d’une obligation de restitution immédiate de ces actifs en vertu de dispositions d’ordre public destinées à assurer la protection de l’épargne et le bon fonctionnement des marchés financiers. 6 Article L.211-41 du Code monétaire et financier 7 ème Cass. Com. 26 fév. 2008, CA Paris, 15 ch., sect. A, 18 mars 2003, Vincent 8 Com, 4 mai 2010, n°09-14187 et 09-14975 7
  • 8. La Cour de cassation vient donc confirmer l’arrêt de la Cour d’appel du 8 avril 20099. Dans ces arrêts, RBC Dexia Investors et Société Générale Securities Services avaient délégué à Lehman Brothers la conservation de leurs titres. Après la faillite de la banque américaine, trois fonds avaient demandé à leurs dépositaires de leur restituer leurs actifs, comme l’impose la loi. La Cour d’appel avait considéré que le dépositaire qui a reçu pour mission d’assurer la conservation des actifs de l’OPCVM était tenu à une obligation de restitution. 3.2.2. EN FAIT : On supposera que la société civile de portefeuille a ouvert un compte-titre dans une agence parisienne du groupe bancaire français, la BBCC, sur lequel ont été inscrits les parts du Fonds. On admettra donc que le dépositaire est une banque de droit français. En l’espèce, le dépositaire du Fonds a confié à un sous-dépositaire une partie des actifs du Fonds qui a été détournée. Conformément aux articles L214-10 du Code monétaire et financier et 322-4 du Règlement général de l’AMF et à la jurisprudence précitée, l’agence parisienne du groupe bancaire français est tenue à une obligation de restitution. Dès lors, Monsieur John TRAVERS peut engager la responsabilité du dépositaire du Fonds, alors même qu’il a confié à un sous-dépositaire une partie des actifs du Fonds. La banque dépositaire ayant son siège social en France, Monsieur John TRAVERS pourra l’assigner en France. 9 Cour d’appel de Paris, 8 avril 2009, RG 2008/22106 8
  • 9. THE CROCODILE FUND CASE Schéma Autorité des Marchés Financiers Bank of Marigot Banque of Marigot (gestionnaire du fonds) (gestionnaire du fonds) Monsieur Filiale John Crocodile Fund Luxembourgeoise Zapata Bank TRAVERS (Hedge Fund) (dépositaire du (sous-dépositaire) (investisseur) fonds) Société de droit américain Groupe bancaire français (conseiller du fonds) BBCC 9