SlideShare a Scribd company logo
1 of 52
Download to read offline
Épidémie à                   Stimulation         Réforme de la
Le magazine de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale




                                                                             Escherichia coli             cérébrale           pharmacovigilance
                                                                             Une question de résistance   Succès confirmés !   Entretien avec Xavier Bertrand




                                                                             Cerveau Les secrets de
                                                                                                 l’apprentissage
Gardez le lien          avec l’Inserm




L’Inserm lance son   application iPhone





                                                                                                                                                                          médicale
                                                                                                                                                                                              Épidémie à
                                                                                                                                                                                              Escherichia                    Stimulation
© ETIENNE BEGOUEN/INSERM




                                                                                                                                                                                                          coli
                                                                                                                                                                                              Une question de                cérébrale           Réforme de




                                                                                                                                                                  de la recherche
                                                                                                                                                                                                                résistance
                                                                                                                                                                                                                             Succès confirm       pharmacovi la
                                                                                                                                                                                                                                          és !   Entretien avec gilance
                                                                                                                                                                                                                                                               Xavier Bertrand




                                                                                                                                                          de la santé et
                                             Ce mois-ci, Science & Santé            À LA UNE




                                                                                                                                              de l’Institut national
                                                                                
                                             consacre son « Grand Angle »




                                                                                                                                         Le magazine
                                                                                     4 Épidémie
                                             aux sciences cognitives et                Les bactéries font de la résistance                                                           Cerveau Les secrets de
                           Alexis Brice      montre que nos capacités                                                                                                                                      l’apprentissage

                                             cérébrales nous permettent            DÉCOUVERTES                                  
                                                                                                                                                                 
                                                                                                                                                                                     




                                                                                     6 Récepteur IRR
                                                                                                                                                                                                                                                                 




                                             d’acquérir et de sélectionner
                                                                                       Le détecteur de pH
                                             des informations, de les                9 Imagerie biphotonique
                                             stocker puis de les utiliser
© YVES DERIS/INSERM




                                                                                       Dans l’intimité de nos neurones
                                             pour prendre des décisions,            10 Cancer
                                             guider nos pensées et                     Pourquoi les cellules ont la bougeotte
                           Bernard Bioulac   nos actions. Comprendre                11 Assistance médicale à la procréation
                                                                                       Où en est la France ?
                                             les bases cérébrales des               13 Cancer
                             particularités de la cognition humaine                    Un traitement en temps et en heure
                             est un enjeu de recherche fondamentale
                             mais également un enjeu éthique et de                 TÊTES CHERCHEUSES
                             santé publique. En effet, depuis quelques              14 Atip-Avenir
                             années, on voit émerger des phénomènes                    Des jeunes qui ont le vent en poupe
                             tels que les méthodes « d’amplification
                             cognitive», qu’il s’agisse de produits                REGARDS SUR LE MONDE
                             pharmaceutiques, d’aliments ou des                     17 États-Unis Un pas contre la paralysie
                             programmes d’entraînement cérébral
                             plus ou moins rigoureux. La communauté
                                                                                   CLINIQUEMENT VÔTRE
                                                                                    18 Stimulation cérébrale profonde
                             neuroscientifique a bien évidemment                        Succès confirmés !
                             une responsabilité importante dans ce                  20 Biotechnologie
                             domaine. Nous découvrons également à                      Des globules rouges made in France
                             travers ce dossier que les compétences
                             cognitives (attention et vigilance, capacités       GRAND ANGLE
                             d’apprentissage et de mémorisation)
                             varient selon le cycle circadien, pouvant              22 Cerveau
                             parfois expliquer des dysfonctionnements                   Les secrets de l’apprentisage
                             cognitifs. Un enjeu majeur est l’éducation,
                             processus qui modifie le fonctionnement                MÉDECINE GÉNÉRALE
                             cérébral, avec le développement de la                  38 Télémédecine
                             neuro-éducation. Les neurosciences                        Une pratique médicale à part entière
                             de l’apprentissage, qui s’intéressent à                40 Stress professionnel
                                                                                       Le généraliste en première ligne
                             l’ontogenèse des systèmes de connaissance
                             (matière scolaire fondamentale mais aussi             ENTREPRENDRE
                             base du développement social et affectif               42 MicroARNs Des régulateurs pleins d’avenir
                             de l’enfant) et à leurs bases cérébrales,
                             sont appelées à jouer un rôle fondamental             STRATÉGIES
                             dans la conception de nouvelles méthodes               44 Politique du médicament
                             d’enseignement et dans le traitement de                   Xavier Bertrand : « Rebâtir un nouveau système
                             troubles cognitifs développementaux.                      de sécurité sanitaire »
                                                                                    45 Publications La qualité avant la quantité
                                            Alexis Brice et Bernard Bioulac,
                                     co-directeurs de l’Itmo Neurosciences,      46   BLOC-NOTES
                                 sciences cognitives, neurologie, psychiatrie

                                                                                                  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4                                                                                                             3
  À LA UNE • DÉCOUVERTES • TÊTES CHERCHEUSES • REGARDS SUR LE MONDE • CLINIQUEMENT VÔTRE • GRAND ANGLE • MÉDECINE GÉNÉRALE • ENTREPRENDRE • OPINIONS • STRATÉGIES • BLOC-NOTES

                                                                                                            ••
                                                                                                           ••                       ••
                                                                                                                                   ••

                                                                                                        
                                                                                                        Les bactéries
                                                                                                        font de la résistance
                                                                                                        Les bactéries semblent toujours plus nombreuses à émerger,
                                                                                                        responsables d’épidémies qui s’étendent désormais à
                                                                                                        plusieurs pays. Pour les spécialistes, ce n’est pas le rythme
                                                                                                        de leur émergence qui est en cause, mais leur résistance
                                                                                                        toujours plus large aux traitements disponibles.



                                                                                                       M
                                                                                                                 ardi 26 juillet 2011.   variabilité génétique chez E. coli est très grande, note
© EYE OF SCIENCE/PHANIE




                                                                                                                 L’épidémie, cau-        le chercheur. On sait que le pangénome, c’est-à-dire
                                                                                                                 sée par la bactérie     l’ensemble des gènes différents connus pour une espèce
                                                                                                         Escherichia coli entéro-        donnée, approche les 20 000 gènes chez E. coli. Le génome
                                                                                                         hémorragique (ECEH)             propre à chaque spécimen ne contient pourtant que 4 200
                                                                                                         et qui se répandait en          à 5 500 gènes. Parmi ceux-ci, seuls 2 000 sont communs à
                                                                                                         Europe depuis fin mai, est      toutes les souches de l’espèce, c’est le " core-genome ". Le
                                   E. Coli, bacille                     terminée. Le micro-organisme a causé la mort de 126 per-         génome de cette bactérie est donc très mobile ! »
                                   qui colonise                         sonnes. Les cas de personnes infectées, eux, s’élèvent à près    Dans des travaux publiés en mai 2006 dans Molecular
                                   naturellement                        de 8 000. L’espèce bactérienne impliquée n’est pourtant pas      Microbiology et en janvier 2009 dans PloS Genetics, le
                                   l’appareil digestif
                                   humain.
                                                                        une inconnue: dans les selles humaines, on en trouve natu-       scientifique et ses collègues avaient mis en lumière les
                                                                        rellement de 100 millions à un milliard par gramme! E. coli      mécanismes-clés de cette plasticité. « Certaines de ces
                                                                        est une bactérie commensale, inoffensive lorsqu’elle reste       bactéries sont dites mutatrices, c’est-à-dire qu’elles ont
                                                                        dans le tube digestif. Mais certaines versions modifiées de      un taux de mutation             Bactéries d’E. Coli
                                                                        celle-ci apparaissent, appelées « souches », et peuvent se       très élevé, auquel il faut      (en vert) dans l’intestin
                                                                        révéler pathogènes pour l’homme. C’est ce qui s’est passé        ajouter leur capacité de        d’un enfant
                                                                        avec la récente vague de contamination européenne : la
                                                                        souche O104:H4, dont l’origine reste à déterminer, a été
                                                                        transmise à l’homme via l’ingestion d’aliments infectés.
                                                                        À la clé, une intoxication causée par les toxines qu’elle pro-
                                                                        duit, dites de Shiga. Elle entraîne des diarrhées sanglantes
                                                                        voire, dans les configurations les plus graves, la destruc-
                                                                        tion des globules rouges et une insuffisance rénale. Souche
                                                                        O104:H4 en Europe, souche O145 découverte début juillet
                                                                        à Bordeaux, nouvelle bactérie encore non identifiée tou-
                                                                        chant l’hôpital de Rotterdam, aux Pays-Bas... Le rythme
                                                                        d’apparition de nouvelles bactéries s’accélérerait-il ?
                                                                        « Ces émergences ont toujours existé. Et ce de manière
                                                                        incessante au cours de l’histoire évolutive du genre
                                                                        Escherichia, qui a divergé des salmonelles il y a environ
                                                                                                                                                                                                        © STEPHANIE SCHULLER/SPL/PHANIE




                                                                        120 millions d’années », explique Erick Denamur YZ,
                                                                        spécialiste de l’écologie et de l’évolution des micro-
                                                                        organismes à l’université Paris-Diderot.
                           Erick Denamur : unité 722 Inserm/
                            Paris 7, Ecologie et évolution des micro-
                            organismes                                  Plasticité et variabilité d’E. Coli
                           Patrice Nordmann : unité 914 Inserm,        Derrière ces émergences, une plasticité génomique
                            Résistances émergentes aux antibiotiques,
                            Service de Bactériologie-Virologie-         remarquable, qui permet aux gènes d’entrer et sortir
                            Parasitologie de l’hôpital de Bicêtre       constamment du génome de ces bactéries. « Ainsi, la

                          4                        N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
À LA UNE




    recombinaison. Une bactérie peut ainsi recevoir des gènes
    qu’elles possèdent déjà, mais dans une version différente,
    ce qui lui confère un polymorphisme (). Des gènes, qui
    n’existent pas chez une bactérie, peuvent aussi lui être
    transférés et lui apporter ainsi une nouvelle propriété. Et
    à l’inverse, des gènes peuvent aussi être perdus », rappelle
    Erick Denamur.

    Les antibiotiques coupables
    L’émergence de nouvelles souches n’est donc pas nouvelle.
    Comment expliquer dès lors que l’apparition de ces
    bactéries nous semblent de plus en plus fréquente ?
    Pour le spécialiste, il faut regarder du côté du phéno-
    mène de résistance. « À la base du processus d’évolu-
    tion, il y a certes la variabilité génétique, mais modifiée
    par l’intermédiaire des antibiotiques. En effet, au fur et
    à mesure de leur utilisation, on sélectionne les variants




                                                                                                                                                                                  © CNRI/SPL/PHANIE
    génétiques résistants et ce sont ceux-là qui nous semblent
    “ émerger ” », analyse-t-il.
    Pour son collègue Patrice Nordmann YZ, chef de
    service de bactériologie-virologie-parasitologie, une
    catégorie de bactéries, à laquelle appartient E. coli, est
    tout particulièrement au cœur de l’affaire. « Les entéro-     plus cantonnées à l’hôpital, elles se développent en milieu                        Klebsiella
    bactéries () présentent des multirésistances, contre les-    urbain. Et là, leur contrôle est amplement plus compli-                            pneumoniae,
    quelles nous disposons de peu d’antibiotiques, constate       qué », pointe Patrice Nordmann. Les spécialistes sur-                              qu’on trouve
                                                                                                                                                     dans l’appareil
    le chercheur. Au cours des décennies passées, l’industrie     veillent de près trois réservoirs majeurs, le Pakistan, le
                                                                                                                                                     respiratoire, digestif
    pharmaceutique s’est focalisée sur le développement de        Maroc et la Turquie, ainsi que l’Italie et la Grèce dans                           ou urinaire.
    traitements contre les bactéries de type  Gram +. Elles     une moindre mesure. « Les conditions locales expliquent
    ne possèdent qu’une paroi cellulaire et sont donc plus        la présence de ces réservoirs, notamment en termes d’hygiène.
    faciles à attaquer que les  Gram -, qui en possèdent deux.  Dans ces pays, les antibiotiques sont employés sans
    Travailler sur celles-ci semblait aussi moins rentable. »     contrôle, les plus aisés n’hésitant pas à utiliser largement
    Résultat : ces entérobactéries continuent d’émerger, tout     tous les traitements disponibles, sans cibler la bactérie. La
    comme leurs résistances, et les antibiotiques disponibles     surpopulation est aussi un facteur essentiel de la plus
    ne sont pas assez nombreux pour en venir à bout.              rapide dissémination bactérienne », poursuit-il.
                                                                  En France, le nombre d’épidémies reste faible. Mais le                         Polymorphisme
    Une situation                                                 risque de voir se déverser dans l’Hexagone des bactéries                        Le fait qu’une espèce
                                                                                                                                                  présente des individus
    sous haute surveillance                                       multirésistantes, issues de ces réservoirs, existe bien.                        aux caractéristiques
    Parmi ces entérobactéries : les représentants du genre « Il devient urgent de dépister tous les patients transférés                           différentes au sein d’une
    Escherichia donc, mais aussi les Klebsiella, avec K. pneu- depuis un hôpital étranger. Sinon, des scénarios à la maro-                        même population.
    moniae, un bacille responsable de pneumonies noso- caine, où une large proportion de la population se trouve
    comiales. « Le problème est que ces bactéries ne restent être porteuse de bactéries multirésistantes, est tout à fait
                                                                                                      plausible », s’alarme-t-il.
                                                                                                      En ligne de mire : des
                                                                                                                                                 Entérobactéries
      Bactérie connue et reconnue                                                                     difficultés à venir pour                    Hôtes habituels de
                                                                                                                                                  l’intestin de l’homme
      La bactérie ECEH responsable de l’épidémie                                                      traiter les maladies liées                  et des animaux
      allemande de mai 2011 a été rapidement                                                          à ces bactéries multi-
      identifiée : en un week-end, les méthodes                                                       résistantes, mais aussi de
      de séquençage à haut débit ont permis                                                           sérieux problèmes dans
      de reconnaître le génome de la « bactérie                                                       le domaine préventif.
      tueuse ». Celle-ci était en fait déjà                                                           « Le jour où le médecin
      partiellement connue : dans les années                                                          n’aura plus d’antibio-
      1990, une souche partageant 93 % de ses                                                         tiques efficaces à admi-
      séquences avec elle avait été identifiée.
                                                                                                 © PHOTOTAKE/BAUMAN/BSIP




                                                                                                      nistrer à un patient en
      « Financer la recherche fondamentale est
      essentielle. Séquencer la diversité bactérienne                                                 attente de greffe, c’est
      devient plus qu’utile lors d’épidémies : si             E. Coli,                                un pan de la médecine
      on connaît déjà une souche, il est plus facile          souche                                  moderne qui s’effon-
      de l’appréhender », assure Erick Denamur.               O157:H7                                 drera », augure-t-il. I
                                                                                                                Alice Bomboy

                                                                                                                           SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4                 5
• À LA UNE  DÉCOUVERTES • TÊTES CHERCHEUSES • REGARDS SUR LE MONDE • CLINIQUEMENT VÔTRE • GRAND ANGLE • MÉDECINE GÉNÉRALE • ENTREPRENDRE • OPINIONS • STRATÉGIES • BLOC-NOTES
        ••
       ••


Le détecteur de pH
La collaboration exceptionnelle d’une équipepe
de l’Inserm avec des chercheurs russes a permis
                                             ermis
de révéler la fonction dans la régulation du pH
d’un récepteur jusqu’alors orphelin : l’IRR.



                                 L
                                                ’Insulin-receptor Related     ed
                                                Receptor (IRR) a été découvert rt
                                                voici une vingtaine d’années.   .
                                          Comme son nom l’indique, l’IRR      RR
                                          est de la même famille que le récep-cep-
                                          teur à l’insuline (IR) ou que le récepteur
                                                                              epteur
                                          aux IGFs (Insuline Growth Factor, IGF-R).
                                                                              or,
                                          Présent dans certaines cellules de l’orga-
                                          nisme (rein, pancréas ou testicules), on ne
                                                                                 s),
                                          savait pas, jusqu’à présent, à quoi il pouvait “ IRR,
                                          servir exactement.                               un récepteur au rôle
                                          L’histoire commence par un heureux enfin connu „
                                          hasard de laboratoire, en 2005. Une équipe
                                          de chercheurs russes, dirigée par Alexander Petrenko, à action. En supprimant
                                          l’Institut de chimie du vivant Shemyakin-Ovchinnikov à chez des souris le gène
                                                                              myakin-Ovchinnikov
                                          Moscou, réalise des expériences sur l’IRR en utilisant, par codant pour ce récepteur,
                                                                                 r
                                          souci d’économie, un lot périmé de milieu de culture qui les chercheurs ont montré
                                          s’est révélé être alcalin. Les chercheurs ont alors observé que leur organisme deve-
                                                                              heurs
                                          que l’IRR était activé dans ce milieu basique. Ils en ont nait incapable de s’adapter à
                                                                                ieu
                                          déduit que l’anion hydroxyl (OH-), responsable de l’alca- une charge alcaline, apportée par
                                          linité du milieu, était capable de déclencher un change- exemple par les aliments. Les rongeurs finissaient par




                                                                                                                                                                       © TEK IMAGE/SPL/PHANIE
                                          ment de conformation du récepteur. Dans l’organisme, développer une alcalose métabolique, provoquant une
                                          cette nouvelle forme d’IRR entraînerait la sécrétion de hausse toxique du pH interne. Normalement, une telle
                                          bicarbonate par les cellules rénales, jouant ainsi un rôle surcharge les aurait conduits à excréter aussitôt du bicar-
                                          essentiel dans la régulation du pH du milieu intérieur, bonate de sodium par voie urinaire, ce qui aurait évité
 Dominique Eladari :                     l’ensemble des liquides dans lequel baignent nos cellules. toute perturbation du milieu intérieur. « Ces observations
  unité 872 Inserm/Paris 6,               Forts de cette découverte et en collaboration avec donnent à penser que l’IRR participe à un mécanisme qui
  Centre de recherche des Cordeliers
 I.E. Deyev et al. Cell Metab, juin 2011 les chercheurs moscovites, l’équipe de Dominique permet de détecter les variations de pH de l’organisme afin
  8;13(6):679-89                          Eladari YZ a alors voulu préciser les mécanismes en de pouvoir adapter le transport rénal de bicarbonate et de
                                                                                                      corriger les anomalies », explique Dominique Eladari.
                                                                                                      Si une partie du voile est levée, des questions sub-
                                                                                                      sistent. Entre autres, quel est le rôle exact du récepteur
                                                                                                      IRR dans l’estomac ? « Lorsque l’on mange, l’estomac
     Un pH contrôlé pour des cellules                                                                 secrète des acides, ce qui s’accompagne d’une absorption
     en pleine santé                                                                                  de bicarbonate par les cellules. Ainsi, il est possible que
                                                                                                      ces ions alcalins en activant le récepteur IRR informent
     Le pH est un facteur important de la régulation des
                                                                                                      l’organisme… qu’il en train de manger ! », précise le
     mécanismes cellulaires. On sait en effet que les protéines
     sont sensibles aux variations de pH, leur comportement et                                        scientifique. Ces recherches devraient servir également
     leurs fonctions peuvent s’en trouver modifiés. Afin de lutter                                    à mieux comprendre les signaux à l’origine de la sensation
     contre le développement d’un milieu intérieur trop acide                                         de satiété et donc l’obésité… Mais aussi à mieux cerner
     (induit par exemple par la consommation alimentaire de                                           l’hypertension artérielle. En effet, les cellules rénales, qui
     protéines animales…) ou trop alcalin (régime végétarien…),                                       sécrètent du bicarbonate et possèdent le récepteur IRR,
     le rein est capable d’éliminer soit des protons (acides), soit                                   absorbent également le chlorure de sodium dont l’excès
     des anions bicarbonates (alcalins).                                                              favorise l’hypertension. La fructueuse et rare collabora-
                                                                                                      tion franco-russe a donc de l’avenir ! I Clara Delpas

6                 N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
   DÉCOUVERTES


                                    Troubles bipolaires                                                                                                                     Cancer
                                    L’influence des rythmes circadiens                                                                                                      Simulation en 3D
                                                                                                                                                                            Des chercheurs
                                    Psychologique, physiologique, environnementale ou génétique ? L’origine                                                                 lillois YZ ont mis
                                    des troubles bipolaires reste encore mystérieuse, ce qui rend leur approche                                                             au point un outil
                                    si difficile. Un marqueur essentiel a cependant récemment été mis en                                                                    de simulation
                                    évidence : une altération des fonctions circadiennes, autrement dit des                                                                 numérique en 3D pour
                                    rythmes veille-sommeil, se manifeste au cours des phases de manie et                                                                    estimer les risques
                                    de dépression par des changements d’humeur, d’appétit, de sommeil                                                                       de la thermothérapie
                                    ou d’énergie. Plus surprenant, ces anomalies apparaissent également                                                                     interstitielle




                                                                                                                                                                                                                                                                                       © GARO/CRH/PHANIE
                                                                                                                                                                            laser. Encore en
                                    lorsque le malade est serein. Des chercheurs, emmenés par Franck
                                                                                                                                                                            développement,
                                    Bellivier YZ, du Pôle de génomique médicale à Créteil, viennent de                                                                     cette méthode,
                                    montrer que cette rythmicité troublée pourrait être liée à des varia-                                                                   peu invasive,
                                    tions au niveau des gènes circadiens, ce qui influencerait l’expression                                                                 utilise un laser de
                                    des troubles, mais aussi la réponse aux traitements prodigués. A. B.                                                                    faible puissance               L’imagerie en 3D
                                    Franck Bellivier : unité 955 Inserm/Paris 12 Créteil, Institut Mondor de recherche biomédicale (IMRB)                                  afin d’induire la              permet de cibler les
                                     V. Milhiet et al. J Physiol, 13 juillet 2011                                                                                          coagulation de la              contours de la tumeur.
                                                                                                                                                                            zone nécrosée, dont
                                                                                                                                                                            le volume peut être contrôlé, ce qui réduit les risques
                                                                                                                                                                            de dommage sur les structures saines environnantes.
                                                                                                                                                                            Les résultats des simulations, visant à mesurer
                                                                                                                                                                            l’augmentation de température générée par le laser
                                                                                                                                             Image                          et le volume de dommages thermiques produits, sont
                                                                                                                                             de synthèse                    conformes à ceux obtenus lors des tests précliniques
                                                                                                                                             d’un virus                     réalisés sur des rats. Ce qui laisse augurer de
                                                                                                                                             (en violet)                    possibles simulations sur le modèle humain. A. B.
                                                                                                                                             et d’anticorps                  Unité 703 Inserm/Lille 2, Thérapies interventionnelles assistées par l’image et la simulation (Thiais)
                                                                                                                                             (en vert)                       M. Marqa et al. BioMedical Engineering, 2011; 10:45 doi:10.1186/1475-925X-10-45




                                                                                                                                                              
© SPACE IMAGING EUROPE/SPL/PHANIE




                                                                                                                                                                                  QUESACO ?
                                                                                                                                                                                comme Biocide
                                                                                                                                                              Les biocides sont des substances chimiques destinées à détruire
                                                                                                                                                              des organismes jugés nuisibles par l’homme, en particulier des
                                                                                                                                                              micro-organismes pathogènes et les insectes ravageurs des
                                                                                                                                                              cultures. Pesticides et antibiotiques en sont les représentants
                                                                                                                                                              les plus connus. Mais leurs effets potentiels sur la reproduction
                                    Immunologie                                                                                                               sont une préoccupation pour les pouvoirs publics. L’expertise
                                                                                                                                                              collective de l’Inserm, Reproduction et environnement, fait
                                    Les immunoglobulines                                                                                                      le point sur leur action de perturbateurs endocriniens. J. C.

                                    sous influence
                                    Des chercheurs de l’Institut de génétique et de biologie
                                                                                                                                                                         w ww.inserm.fr

                                    moléculaire et cellulaire YZ viennent d’éclairer
                                    les mécanismes à l’origine de la diversification des
                                    anticorps, pilier de l’efficacité du système immunitaire.                                                           G GÉNÉTIQUE : ÉPISSAGE À GÉOMÉTRIE VARIABLE
                                    Dans le Journal of Experimental Medicine du 11 juillet,                                                             Comment un gène code-t-il pour plusieurs protéines ? Pour répondre,
                                    ils expliquent que l’enzyme AID (cytidine désaminase                                                                Cameron Mackereth (Institut européen de chimie et biologie) et des collègues
                                    induite par activation) s’associe avec d’autres                                                                     allemands et espagnols se sont intéressés au fonctionnement de la protéine
                                    protéines pour agir sans risques sur les gènes des                                                                  U2AF65. Ce facteur d’épissage permet de couper certains segments de
                                                                                                                                                        l’ARN avant qu’il ne soit transcrit : selon les excisions effectuées, un gène
                                    immunoglobulines et contribuer à leur adaptation.                                                                   peut ainsi coder pour plusieurs protéines. Les chercheurs, dont les résultats
                                    Ce mécanisme pourrait être imité artificiellement pour                                                              sont publiés dans Nature, ont montré que les variations d’épissage étaient
                                    développer des vaccins plus efficaces et de nouvelles                                                               liées à une oscillation de la conformation de U2AF65 : fermée, elle est
                                    thérapies anti-cancéreuses. A. B.                                                                                   inactive, alors qu’elle passe en forme ouverte quand elle est en contact
                                     Unité 964/Université de Strasbourg, Institut de génétique et de biologie moléculaire
                                                                                                                                                        avec les segments à exciser. Des mutations affectant cette protéine sont
                                      et cellulaire (IGBMC)                                                                                             susceptibles de modifier la synthèse protéique. A. B.
                                     B. P. Jeevan Raj, et al. J Exp Med, 11 juillet 2011; en ligne : jem.20110118.                                      C. D. Mackereth et al. Nature, 21 juillet 2011; 475 : 408–411,


                                                                                                                                                                                          SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4                                                     7
   DÉCOUVERTES


    Vision                                                                                                                                                                         Cognition
    Sous les feux des LED                                                                                                                                                          Le frein de l’anxiété
                                                                                                                                                                                   Pour comprendre les bases neurales des
                                                                                                                                                                                   interactions entre l’anxiété et le contrôle cognitif,




                                                                                                                                       © NATIONAL PHYSICAL LABORATORY/SPL/PHANIE
                                                                                                                                                                                   des chercheurs de l’université Pierre-et-Marie-
                                                                                                                                                                                   Curie YZ ont comparé sous IRM fonctionnelle
                                                                                                                                                                                   les réponses cérébrales de participants en bonne
                                                                                                                                                                                   santé et de patients présentant des troubles de
                                                                                                                                                                                   l’anxiété. Le but ? Déterminer l’impact du stress
                                                                                                                                                                                   sur le réseau cérébral impliqué dans le contrôle
                                                                                                                                                                                   cognitif. Les scientifiques ont ainsi remarqué que,
                                                                                                                                                                                   face à une tâche stressante, le premier groupe,
                                                                                                            Laboratoire                                                            sain, se caractérisait par une activation accrue
                                                                                                           de recherche                                                            dans une région impliquée dans le contrôle cognitif
                                                                                                            sur les LED                                                            (le cortex gauche préfrontal dorsolatéral), ainsi
                                                                                                                                                                                   que par une diminution de l’activation dans une
Les diodes électro-luminescentes sont en passe de devenir la principale                                                                                                            zone liée à l’anxiété (le cortex droit préfrontal
source d’éclairage domestique. Des chercheurs de l’Inserm YZ ont été                                                                                                              ventrolatéral). Chez les patients anxieux, cette
missionnés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation,                                                                                                         modulation différenciée entre cortex n’apparaît pas,
de l’environnement et du travail (Anses) pour estimer les risques que leur                                                                                                         ce qui expliquerait les difficultés éprouvées par ces
utilisation comporte pour la rétine. Conclusions : les données manquent sur                                                                                                        personnes à s’adapter à des tâches cognitives. A. B.
leur toxicité et des évaluations doivent être rapidement menées, notamment                                                                                                          Unité 975 Inserm/Paris 6, Centre de recherches en neurosciences de la Pitié-Salpétrière
afin d’étudier les conséquences d’une exposition à vie à cette nouvelle                                                                                                             L. Koric et al., Hum Brain Mapp, 18 juillet 2011; doi: 10.1002/hbm.21340
lumière sur les photorécepteurs rétiniens. A. B.
 Unité 872 Inserm/Paris 6 , Physiopathologie des maladies oculaires, Centre de recherche des Cordeliers
 F. Behar-Cohen, et al. Progress in Retinal and Eye Research, juillet 2011; 30(4) : 239-257


                                                                                                           1,1 an
                                                                                                           C’est le temps travaillé en moins par
                                                                                                                                                                                                                                        G CANCER : LES
                                                                                                                                                                                                                                           TUMEURS PRÉCOCES
Neurosciences                                                                                              les personnes diabétiques au cours
                                                                                                                                                                                                                                           DÉBUSQUÉES
                                                                                                                                                                                                                                        Ces tumeurs restent
                                                                                                           de leur vie professionnelle. Retraite
Un cerveau modèle                                                                                          anticipée plus fréquente et mise en
                                                                                                                                                                                                                                        souvent indétectables par
                                                                                                                                                                                                                                        l’imagerie médicale, mais
                                                                                                           invalidité accrue seraient responsables                                                                                      des recherches menées
Créer un modèle du cerveau humain et de son activité                                                                                                                                                                                    sur les petits animaux
en 2023, c’est l’objectif que se sont fixé les chercheurs                                                  de cette diminution du temps de
                                                                                                                                                                                                                                        pourraient changer la
européens du Human Brain Project (HBP), sous la                                                            carrière. Des résultats tirés de l’étude                                                                                     donne. Des appareils
direction du neurobiologiste Henry Markram YZ.                                                            menée par une équipe Inserm YZ                                                                                              miniatures, fondés sur la
À partir de cette simulation informatique, les spécia-                                                     sur la cohorte de salariés d’EDF-GDF,                                                                                        stimulation par une source
                                                                                                           Gazel, entre 1989 et 2007. J. C.                                                                                             infrarouge de colorants
listes espèrent mieux comprendre le cerveau humain                                                                                                                                                                                      fluorescents préalablement
et en tirer de nouvelles pistes thérapeutiques, contre                                                      Unité 1018 Inserm/Paris 11, Centre de recherche en épidémiologie
                                                                                                             et santé des populations                                                                                                   injectés, ont été mis au
le vieillissement par exemple. Cela permettrait égale-                                                      E. Herquelot et al, Diabetes care, juin 2011; 34(6) : 1344-1349
                                                                                                                                                                                                                                        point pour étudier rats
ment l’élaboration de nouvelles méthodes d’appren-                                                                                                                                                                                      et souris. Adaptés à
                                                                                                                                                                                                                                        l’homme, ils pourraient
tissage. Dirigé par l’École polytechnique fédérale de                                                                                                                                                                                   révéler des mini-structures
Lausanne, le projet rassemble déjà treize universités                                                                                                                                                                                   dans les tissus, comme
ou institutions de recherche, dont l’unité de                                                                                                                                                                                           la formation de petits
neuroimagerie cognitive CEA-Inserm de                                                                                                                                                                                                   vaisseaux sanguins
NeuroSpin à Gif-sur-Yvette YZ. Le HBP a                                                                                                                                                                                                (angiogenèse) autour de
                                                                                                                                                                                                                                        tumeurs de moins d’un
été présélectionné parmi cinq autres projets                                                                                                                                                                                            millimètre, espèrent Alain
par l’Union européenne. S’il est retenu, il bé-                                                                                                                                                                                         Le Pape, chercheur, et ses
néficiera d’un budget de 100 millions d’euros                                                                                                                                                                                           collègues tourangeaux YZ.
annuels pendant dix ans. Alors que les États-                                                                                                                                                                                           Dans le cas du cancer
                                                                                                                                                                                                                                        du sein, par exemple, les
Unis se lancent dans un projet similaire, la                                                                                                                                                                                            mammographies peinent
conquête du cerveau humain se révèle                                                                                                                                                                                                    à différencier ce marqueur
désormais le nouveau défi à relever. M.L. L.                                                                                                                                                                                            d’un simple kyste ou d’une
 Henry Markram : directeur de HBP à l’École polytechnique fédérale                                                                                                                                                                     calcification. A. B.
                                                                                                                                                                                                                     © BLUE BRAIN/HBP




  de Lausanne (EPFL)                                                                                                                                                                                                                     Unité 618 Inserm/Université
Unité 992 Inserm-CEA/Paris 11, Neuroimagerie cognitive                                                                                                                                                                                   de Tours-François-Rabelais, Protéases
                                                                                                                                                                                         Modélisation


                                                                                                                                                                                                                                          et vectorisation pulmonaires
                                                                                                                                                                                         d’un neurone                                    S. Pesnel et al. Eur J Nucl Med Mol
             www.humanbrainproject.eu                                                                                                                                                                                                     Imaging; DOI 10.1007/s00259-011-1857-2


8                          N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  DÉCOUVERTES


 
 Dans l’intimité
 de nos neurones
 Plonger au cœur de notre cerveau et voir
 in vivo son fonctionnement, c’est désormais
 possible grâce à l’imagerie biphotonique.
 Une technique qui va permettre de




                                                                                                                                                                                 © INSERM, S. CHARPAK
 mieux connaître notre encéphale.



                                     C
                                                       omprendre le fonctionnement du cerveau est le
Capillaires                                           Graal de la physiologie moderne. Or, pour mieux
                                                       déchiffrer cet organe vital, il faut pouvoir l’obser-
 Ce sont les vaisseaux
 sanguins les plus petits                       ver in vivo par des moyens non invasifs. Un véritable défi
 et les plus fins. Déployés                     que des chercheurs Inserm YZ viennent de relever. Dans                                              Cartographie
 en arborescence, ils                                                                                                                      de la pression partielle
 relient les veinules et les                    la revue Nature Medicine de juin, ils détaillent comment               en oxygène dans les vaisseaux du cerveau.
 artérioles, et ferment                         ils sont parvenus à mesurer, de manière non invasive, le              Les couleurs indiquent des taux en oxygène
 ainsi la boucle du                             flux sanguin et la pression d’oxygène dans le bulbe olfac-                          différents dans les vaisseaux.
 réseau de la circulation                       tif d’un rat, cette région du cerveau où sont traitées les
 sanguine. Les capillaires
 fournissent aux cellules
                                                informations liées au sens de l’odorat. Pour cela, ils ont
 les nutriments et le                           eu recours à une technologie de microscopie en plein             le flux sanguin dans les capillaires () du cerveau, ainsi
 dioxygène.                                     développement : l’imagerie biphotonique qui permet de            que la pression d’oxygène à une profondeur de 300 à
                                                pallier les problèmes de la microscopie traditionnelle,          400 micromètres. Le tout avec une précision spatiale de
                                                monophotonique, inefficace au cœur des tissus. En effet,         l’ordre du micron et une résolution temporelle inférieure
                                                au delà d’une centaine de microns de profondeur, les             à une seconde. La mesure simultanée de ces deux para-
                                                tissus biologiques diffractent fortement la lumière et les       mètres a permis de montrer que la concentration de l’oxy-
                                                images obtenues sont floues.                                     gène, tant dans les vaisseaux que dans le tissu cérébral,
                                                Combinée à l’emploi de marqueurs moléculaires                    fluctuait au cours d’une activation sensorielle. Quant à la
                                                fluorescents, l’imagerie biphotonique permet, elle, de           mesure de la pression en oxygène, elle s’effectuait, aupara-
  Unité 603 Inserm/Paris 5, Neurophysiologie
   et nouvelles microscopies
                                                plonger jusqu’à 1 mm à l’intérieur des organes sans les          vant, via des électrodes de Clark. Ce système très invasif,
  J. Lecoq et al. Nature Medicine, juin 2011 ; endommager. «Au lieu d’exciter les marqueurs fluorescents                                    puisque les électrodes devaient
   17 (7) : 893-898                             avec un seul photon de forte énergie, nous utilisons deux pho-   “ Une plongée               être plantées dans le cerveau,
                                                                        tons d’énergie moitié moindre mais       sans dommage                permettait uniquement de
                                                                        appliqués simultanément, précise         dans les organes „ mesurer l’oxygène dans le tissu
                                                                        Serge Charpak, directeur du labo-                                    cérébral. L’étude a également
      Comment                                                           ratoire. Cela présente un double
                                                                        avantage, d’une part, nous pouvons
                                                                                                                 apporté la preuve de ce que des modèles théoriques
                                                                                                                 laissaient supposer: dans les capillaires du cerveau, le sang
      ça marche ?                                                       travailler avec des longueurs d’onde     n’est pas oxygéné de manière homogène, les régions
      Les techniques d’imagerie                                         de 800 à 1 000 nm qui pénètrent          entourant les globules rouges sont plus oxygénées que le
      biphotonique consistent à envoyer                                 plus profondément les tissus et,         reste du plasma sanguin. Et grâce à l’imagerie biphoto-
      deux photons sur les tissus                                       d’autre part, l’excitation du mar-       nique, ce phénomène peut être observé directement.
      observés au moyen de lasers à                                     queur fluorescent et son émission        Par ailleurs, l’imagerie biphotonique devrait permettre
      impulsions ultracourtes. Lorsque                                  lumineuse se font sur un point           à terme d’explorer plus facilement les affections neuro-
      la molécule ciblée absorbe
      simultanément deux photons
                                                                        focal extrêmement précis, environ        logiques qui se traduisent par une modification des
      infrarouges, elle passe de son état                               1 micromètre cube. » Résultat, la        apports en oxygène des tissus cérébraux, tels que les
      de repos à un état excité. Lors                                   phototoxicité et les interférences       accidents vasculaires cérébraux ou encore les maladies
      de son retour à l’état de repos,                                  lumineuses qui parasitaient              neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer. I
      la molécule émet un signal de                                     l’image en microscopie de fluores-                                                Erwan Lecomte
      fluorescence, soit un seul photon                                 cence traditionnelle sont réduites.
      d’une longueur d’onde visible.                                    Grâce à ce procédé, l’équipe a
                                                                        réussi à mesurer simultanément                  Nouvelle technique d’exploration fine du cerveau
                                                                                                                         www.inserm.fr/Actualités Recherche

                                                                                                                      SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4                     9
➜  DÉCOUVERTES


                   CANCER
                   Pourquoi les cellules
                   ont la bougeotte




                                                                                                                                                                                                     © INSERM/CEA/DANIELLE GULINO-DEBRAC
                   L’équipe Inserm de Jacques Camonis, à l’Institut
                   Curie, vient de faire un pas en avant dans la
                   compréhension des mécanismes de la migration
                   des cellules. Impliquée dans les cancers,
                   c’est une cible thérapeutique prometteuse.
                                                                                                                       Cellules endothéliales humaines mises en culture. En



                                                     N
                                                                        os cellules bougent, que ce soit lors du déve-         vert, la VE-cadhérine, qui souligne les jonctions entre les
                                                                                                                               cellules, en bleu, les noyaux des cellules, en rouge, les
                                                                        loppement de l’embryon, ou de la réponse               filaments d’actine qui maintiennent la forme des cellules.
                                                                        immunitaire. Mais aussi dans d’autres
                                                                situations plus inquiétantes comme les cancers, lorsque c’est-à-dire se désolidarisent les unes des autres et sont
                                                                des cellules malignes parviennent à migrer et à former des                                                              résume
                                                                métastases. Cette aptitude à se déplacer, ou motilité, repose Maria-Carla Parrini             dans la revue Molecular Cell.
                                                                sur la formation d’un réseau de laments d’actine, une pro- La motilité est contrôlée par de nombreuses voies de
                        Front
                         de migration
                                                                téine indispensable à l’architecture et aux mouvements des
                                                                cellules, au niveau du front de migration(). Comment cette en cascade qui permettent aux éléments d’une cellule
                   Partie avant de la                                                                                               de détecter les signaux externes et d’y répondre. L’une
                   membranaire cellulaire
                   lorsque la cellule se                        recherche. Car, si toutes les cellules de notre corps peuvent
                   déplace.                                     produire de l’actine, toutes ne sont pas mobiles en temps la littérature médicale depuis 20 ans, on sait qu’elle
                                                                                                                                    déclenche la formation des laments d’actine.
                                                                la peau, des intestins et des seins. Et pourtant, ces tissus sont L’équipe de Jacques Camonis            a simulé une blessure
                   ☛ Maria-Carla Parrini,                       le siège des cancers les plus répan-                                                      dans une monocouche de cellules
                     Jacques Camonis : unité 830 Inserm/
                     Paris 5, Génétique et biologie des cancers
                                                                dus.
                   � M.-C. Parrini et al. Molecular Cell 42,    dans le corps parce que ces cellules les cellules se désolidarisent et                    y plantant une pipette. Les cher-
                     650–661, June 10, 2011                     deviennent mésenchymateuses,                                                              cheurs ont ensuite observé que les
                                                                                                                                                          cellules du voisinage commençaient
                                                                                                                                    à migrer pour assurer la cicatrisation de la blessure. Ils ont
                                                                                                                                    ainsi montré qu’une protéine, SH3BP1, était essentielle à
                      SH3BP1, une molécule essentielle                                                                              la migration des cellules réparatrices. En e et, les cellules
                      Légendes                                                                                                      chez qui les chercheurs avaient bloqué l’expression du gène
                      infographieIque                                                                                               codant pour cette protéine migraient moins bien. En temps
                      nonseruptio                                                                                                   normal, SH3BP1 inactive Rac, la protéine clé de la voie
                      quamenimi,
                      sim imilit ullo
                      ea pe accum,                                                                                           d’un réseau d’actine mal organisé, et par conséquent d’avoir
                      quia voluptaquis                                                                                       du mal à avancer dans la bonne direction.
                      moluptae dis                                                                                           Par ailleurs, il existe un lien entre la voie Rac et une autre voie,
                      moluptaquiam                                                                                           dont on connaît depuis une dizaine d’années le rôle dans le
                      rectem quia                                                                                            tra c de vésicules de sécrétion vers la membrane cellulaire
                      illab ipiendam,
                      sitatur, assinul                                                                                       complexe protéique de cette voie, l’exocyste, interagit direc-
                      liquaeprovid ea                                                                                        tement avec SH3BP1.
                      que con cullab                                                                                         transporte SH3BP1 jusqu’au front de migration, schématise
                      id mincturepro
                      coressinti omnis
                                                                                                                             Maria-Carla Parrini. Là, SH3BP1 agit sur la voie Rac et la
                      es simporeseque                                                                                        formation du réseau d’actine, permettant ainsi une migration
© SYLVIE DESSERT




                      laborru ptasimint                                                                                      e cace. » Ces découvertes sont précieuses. En e et, cette
                      eatur mo voloris                                                                                       connexion entre ces deux voies que sont Ral et Rac permet
                      aut laboris no                                                                                         d’ores et déjà d’envisager de nouvelles stratégies pour inhiber
                                                                                                                             la migration des cellules cancéreuses.          Clara Delpas

                   10 ●               ● N° 4 ● SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  DÉCOUVERTES
                                                            ••
                                                           ••                                                                     ••
                                                                                                                                   ••                                             ••
                                                                                                                                                                                 ••


Où en est la France ?
Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire vient de publier un numéro
sur l’assistance médicale à la procréation. Premier constat : en 2009,
les techniques d’AMP ont permis la naissance de 21 759 enfants,
soit 2,6 % des naissances en France. Un chiffre
                                                                                                                                                                               19 dons d'embryons
assez stable depuis 2005. Quelles en sont les raisons ?
                                                  ons                                                                                                                          190 dons d'ovocytes 
                                                                                                                                                                                                      
Et quelles perspectives pour ces techniques ?                                                                                                                                  1110 dons de
                                                                                                                                                                                   spermatozoïdes
                                                                                                                                                           2416
                                                                                                                                                        TEC (transfert
                                                                                                                                                         d’embryons



L
                                                                                                                                                          congelés)
      e 7 juillet dernier, la loi de bioéthique a été publiée
      au Journal Officiel. Le cadre médical de l’assistance
      médicale à la procréation (AMP) y a été réaffirmé :
                                                                            FIV                                                                                               5400
                                                                                                La fécondation                                                              inséminations
                                                                                                                                                                           intraconjugales
elle reste limitée aux couples en âge de procréer et qui                                        in vitro                                Répartition des actes
souffrent d’infertilité. « Cette stricte réglementation peut                                    repose                                 d’assistance médicale
                                                                                                                 FIV
                                                                                                sur deux                8160 à la procréation en 2009
expliquer que le nombre de tentatives d’AMP reste stable                                        techniques :          FIV avec ICSI
en France, mais aussi que des personnes recherchent dans                                        la FIV
d’autres pays des solutions à leur attente », explique Pierre                                   classique (les                                                                                 Dans 95 %
Jouannet YZ qui a coordonné le numéro du Bulletin                                              spermatozoïdes                                                                                des cas,
épidémiologique hebdomadaire du 14 juin dédié à l’AMP.                                          rencontrent les                                                                              les enfants
                                                                                                ovocytes dans un                                          4464                              sont issus
Couples homosexuels, femmes seules ou ménopausées                                               milieu de culture) et                                  FIV classique                      des gamètes
n’y ont pas accès en France, contrairement à d’autres pays                                      l’ICSI. Cette technique                                                                  du couple.
comme la Belgique, l’Espagne ou la Grèce. Et les patientes                                      consiste en l’injection
                                                                                                                                                                                  © CAROLE FUMAT
françaises qui s’y rendent ont surtout recours aux dons de                                      intra-cytoplasmique                                                               SOURCE : AGENCE DE LA BIOMÉDECINE
                                                                                                                                                                                                        BI
                                                                                                                          
                                                                                                d’un spermatozoïde
sperme ou d’ovocyte, ou encore à la gestation pour autrui.                                      dans l’ovocyte.
                                    Mais certaines pourraient                                                                                 scientifique de l’ABM, souligne cependant les efforts dans
                                    en toute légitimité bénéfi-                                                                               ce sens : « En 2004, nous étions en moyenne à une réim-
70 %
c’est le pourcentage des
                                    cier d’une AMP dans notre
                                    pays, notamment pour les
                                                                                                                                              plantation de 2,15 embryons, aujourd’hui nous sommes
                                                                                                                                              à 1,8. D’ailleurs, le taux moyen d’accouchements gémel-
couples qui deviennent              dons d’ovocyte. Alors pour-                                                                               laires en FIV en 2009 est de 18 %. » Pour améliorer encore
parents en commençant               quoi traverser les frontières?                                                                            ces chiffres, Pierre Jouannet prône, chez les femmes les
un parcours de FIV :                                                                             Pierre Jouannet : Centre de recherche
41 % lors d’une des
                                    Parce que les délais d’attente                                Sens, éthique, société (CNRS/Université     plus jeunes et les plus fertiles, le transfert sélectif d’un
                                                                                                  Paris -Descartes), ancien président de la
4 tentatives de FIV, 11 % vont parfois jusqu’à 5 ans…                                             fédération des Cecos
                                                                                                                                              embryon, celui doté des meilleures chances de s’implanter.
par adoption, 11 % par              Dans son rapport d’activité                                  BEH, 4 juin 2011; 23-24
                                                                                                                                              « Les recherches actuellement menées sur les premiers stades
conception naturelle et             de 2010, l’Agence de la bio-                                 Revue adsp, juin 2011; 75                   de développement devraient nous permettre de définir des
7 % grâce à de nouveaux médecine (ABM) le recon-                                                                                                              critères rigoureux de sélection et privilégier
traitements.                        naît : « La situation du don                                                                                              le transfert d’un seul embryon », confirme
                                    d’ovocytes en France est pré-                                                                                             Françoise Merlet.
occupante. » En 2009, seules 328 femmes ont fait des dons,                                                                                                    Autre perspective de l’AMP : la cryoconser-
                                                                     © AFP PHOTO/JEFF PACHOUD




ce qui a permis 933 FIV () et 190 naissances. « Ce nombre                                                                                                    vation des gamètes et des tissus germinaux
est très largement insuffisant car, à raison de deux couples rece-                                                                                            (ovaires et testicules), notamment pour
veurs pouvant bénéficier des ovocytes issus d’une donneuse, il                                                                                                contrer les effets destructeurs d’une chimio-
aurait fallu 800 donneuses supplémentaires. » Résultat : plus                                                                                                 thérapie sur les organes reproducteurs.
de 1 600 couples étaient en attente d’un don fin 2009.                                                                                                        « Avec l’Institut national du cancer et les pro-
Pour Pierre Jouannet, l’AMP dans notre pays est aussi                                                                                                         fessionnels, nous travaillons sur les possibilités
confrontée à une « épidémie de grossesses multiples »,                                                 Ysaline,                                               de préserver la fertilité, notamment lorsque le
conséquence du transfert de plusieurs embryons au                                                      une première                           traitement anticancéreux intervient avant la puberté», assure
cours des FIV. « En 2006, le taux de naissances multiples                                              en France !                            Françoise Merlet. Pour les femmes, le tissu ovarien serait
en France était de 20,6 % contre 5,8 % en Suède. Or ces                                                                                       prélevé, conservé, puis regreffé après le traitement. Une
grossesses multiples comportent des risques non négligeables                                                                                  possibilité qui a déjà fait ses preuves : en 2009, Ysaline est le
de complications pour les femmes et les enfants. » Françoise
Merlet, médecin référent AMP à la Direction médicale et                                                    www.agence-
                                                                                                             biomedecine.fr
                                                                                                                                              premier bébé français né suite à une autogreffe ovarienne.
                                                                                                                                              Une naissance naturelle. I                   Gaëlle Lahoreau

                                                                                                                                                   SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4                          11
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version
Science sante derniere_version

More Related Content

More from IFIC performance et management intelligence collective

More from IFIC performance et management intelligence collective (20)

Coaching politique
Coaching politiqueCoaching politique
Coaching politique
 
6 postures de l'aglité
6 postures de l'aglité6 postures de l'aglité
6 postures de l'aglité
 
Mind mapping-et-efficacite-cognitive
Mind mapping-et-efficacite-cognitiveMind mapping-et-efficacite-cognitive
Mind mapping-et-efficacite-cognitive
 
Www.caissedesdepots.fr fileadmin pdf_06._solutionsdurables_tv_em02-proches_de...
Www.caissedesdepots.fr fileadmin pdf_06._solutionsdurables_tv_em02-proches_de...Www.caissedesdepots.fr fileadmin pdf_06._solutionsdurables_tv_em02-proches_de...
Www.caissedesdepots.fr fileadmin pdf_06._solutionsdurables_tv_em02-proches_de...
 
Doc 83
Doc 83Doc 83
Doc 83
 
Guide du-routard-de-l-intelligence-economique-2012
Guide du-routard-de-l-intelligence-economique-2012Guide du-routard-de-l-intelligence-economique-2012
Guide du-routard-de-l-intelligence-economique-2012
 
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
 
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
Les profils de_leadership_evaluation_pdf_3
 
01 amendements au glossaire des qualificatifs de l intelligence 3
01   amendements au glossaire des qualificatifs de l intelligence 301   amendements au glossaire des qualificatifs de l intelligence 3
01 amendements au glossaire des qualificatifs de l intelligence 3
 
Accomex100
Accomex100Accomex100
Accomex100
 
Art d eposer des questions
Art d eposer des questionsArt d eposer des questions
Art d eposer des questions
 
Taxonomie bloom aquops2010_final
Taxonomie bloom aquops2010_finalTaxonomie bloom aquops2010_final
Taxonomie bloom aquops2010_final
 
Tic participation citoyenne
Tic participation citoyenneTic participation citoyenne
Tic participation citoyenne
 
Pablo -audeladuvotedemocratique
Pablo  -audeladuvotedemocratiquePablo  -audeladuvotedemocratique
Pablo -audeladuvotedemocratique
 
Jmm exercer-soi-autrui
Jmm exercer-soi-autruiJmm exercer-soi-autrui
Jmm exercer-soi-autrui
 
2314,strategie de-la-bienveillance-docum
2314,strategie de-la-bienveillance-docum2314,strategie de-la-bienveillance-docum
2314,strategie de-la-bienveillance-docum
 
Conscience l2
Conscience l2Conscience l2
Conscience l2
 
Co devprof
Co devprofCo devprof
Co devprof
 
Groupes de codéveloppement (2)
Groupes de codéveloppement (2)Groupes de codéveloppement (2)
Groupes de codéveloppement (2)
 
63 211-1-pb
63 211-1-pb63 211-1-pb
63 211-1-pb
 

Science sante derniere_version

  • 1. Épidémie à Stimulation Réforme de la Le magazine de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale Escherichia coli cérébrale pharmacovigilance Une question de résistance Succès confirmés ! Entretien avec Xavier Bertrand Cerveau Les secrets de l’apprentissage
  • 2. Gardez le lien avec l’Inserm L’Inserm lance son application iPhone
  • 3.  médicale Épidémie à Escherichia Stimulation © ETIENNE BEGOUEN/INSERM coli Une question de cérébrale Réforme de de la recherche résistance Succès confirm pharmacovi la és ! Entretien avec gilance Xavier Bertrand de la santé et Ce mois-ci, Science & Santé À LA UNE de l’Institut national  consacre son « Grand Angle » Le magazine 4 Épidémie aux sciences cognitives et Les bactéries font de la résistance Cerveau Les secrets de Alexis Brice montre que nos capacités l’apprentissage cérébrales nous permettent  DÉCOUVERTES    6 Récepteur IRR  d’acquérir et de sélectionner Le détecteur de pH des informations, de les 9 Imagerie biphotonique stocker puis de les utiliser © YVES DERIS/INSERM Dans l’intimité de nos neurones pour prendre des décisions, 10 Cancer guider nos pensées et Pourquoi les cellules ont la bougeotte Bernard Bioulac nos actions. Comprendre 11 Assistance médicale à la procréation Où en est la France ? les bases cérébrales des 13 Cancer particularités de la cognition humaine Un traitement en temps et en heure est un enjeu de recherche fondamentale mais également un enjeu éthique et de  TÊTES CHERCHEUSES santé publique. En effet, depuis quelques 14 Atip-Avenir années, on voit émerger des phénomènes Des jeunes qui ont le vent en poupe tels que les méthodes « d’amplification cognitive», qu’il s’agisse de produits  REGARDS SUR LE MONDE pharmaceutiques, d’aliments ou des 17 États-Unis Un pas contre la paralysie programmes d’entraînement cérébral plus ou moins rigoureux. La communauté  CLINIQUEMENT VÔTRE 18 Stimulation cérébrale profonde neuroscientifique a bien évidemment Succès confirmés ! une responsabilité importante dans ce 20 Biotechnologie domaine. Nous découvrons également à Des globules rouges made in France travers ce dossier que les compétences cognitives (attention et vigilance, capacités  GRAND ANGLE d’apprentissage et de mémorisation) varient selon le cycle circadien, pouvant 22 Cerveau parfois expliquer des dysfonctionnements Les secrets de l’apprentisage cognitifs. Un enjeu majeur est l’éducation, processus qui modifie le fonctionnement  MÉDECINE GÉNÉRALE cérébral, avec le développement de la 38 Télémédecine neuro-éducation. Les neurosciences Une pratique médicale à part entière de l’apprentissage, qui s’intéressent à 40 Stress professionnel Le généraliste en première ligne l’ontogenèse des systèmes de connaissance (matière scolaire fondamentale mais aussi  ENTREPRENDRE base du développement social et affectif 42 MicroARNs Des régulateurs pleins d’avenir de l’enfant) et à leurs bases cérébrales, sont appelées à jouer un rôle fondamental  STRATÉGIES dans la conception de nouvelles méthodes 44 Politique du médicament d’enseignement et dans le traitement de Xavier Bertrand : « Rebâtir un nouveau système troubles cognitifs développementaux. de sécurité sanitaire » 45 Publications La qualité avant la quantité Alexis Brice et Bernard Bioulac, co-directeurs de l’Itmo Neurosciences,  46 BLOC-NOTES sciences cognitives, neurologie, psychiatrie SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4   3
  • 4.  À LA UNE • DÉCOUVERTES • TÊTES CHERCHEUSES • REGARDS SUR LE MONDE • CLINIQUEMENT VÔTRE • GRAND ANGLE • MÉDECINE GÉNÉRALE • ENTREPRENDRE • OPINIONS • STRATÉGIES • BLOC-NOTES •• •• •• ••  Les bactéries font de la résistance Les bactéries semblent toujours plus nombreuses à émerger, responsables d’épidémies qui s’étendent désormais à plusieurs pays. Pour les spécialistes, ce n’est pas le rythme de leur émergence qui est en cause, mais leur résistance toujours plus large aux traitements disponibles. M ardi 26 juillet 2011. variabilité génétique chez E. coli est très grande, note © EYE OF SCIENCE/PHANIE L’épidémie, cau- le chercheur. On sait que le pangénome, c’est-à-dire sée par la bactérie l’ensemble des gènes différents connus pour une espèce Escherichia coli entéro- donnée, approche les 20 000 gènes chez E. coli. Le génome hémorragique (ECEH) propre à chaque spécimen ne contient pourtant que 4 200 et qui se répandait en à 5 500 gènes. Parmi ceux-ci, seuls 2 000 sont communs à Europe depuis fin mai, est toutes les souches de l’espèce, c’est le " core-genome ". Le E. Coli, bacille terminée. Le micro-organisme a causé la mort de 126 per- génome de cette bactérie est donc très mobile ! » qui colonise sonnes. Les cas de personnes infectées, eux, s’élèvent à près Dans des travaux publiés en mai 2006 dans Molecular naturellement de 8 000. L’espèce bactérienne impliquée n’est pourtant pas Microbiology et en janvier 2009 dans PloS Genetics, le l’appareil digestif humain. une inconnue: dans les selles humaines, on en trouve natu- scientifique et ses collègues avaient mis en lumière les rellement de 100 millions à un milliard par gramme! E. coli mécanismes-clés de cette plasticité. « Certaines de ces est une bactérie commensale, inoffensive lorsqu’elle reste bactéries sont dites mutatrices, c’est-à-dire qu’elles ont dans le tube digestif. Mais certaines versions modifiées de un taux de mutation Bactéries d’E. Coli celle-ci apparaissent, appelées « souches », et peuvent se très élevé, auquel il faut (en vert) dans l’intestin révéler pathogènes pour l’homme. C’est ce qui s’est passé ajouter leur capacité de d’un enfant avec la récente vague de contamination européenne : la souche O104:H4, dont l’origine reste à déterminer, a été transmise à l’homme via l’ingestion d’aliments infectés. À la clé, une intoxication causée par les toxines qu’elle pro- duit, dites de Shiga. Elle entraîne des diarrhées sanglantes voire, dans les configurations les plus graves, la destruc- tion des globules rouges et une insuffisance rénale. Souche O104:H4 en Europe, souche O145 découverte début juillet à Bordeaux, nouvelle bactérie encore non identifiée tou- chant l’hôpital de Rotterdam, aux Pays-Bas... Le rythme d’apparition de nouvelles bactéries s’accélérerait-il ? « Ces émergences ont toujours existé. Et ce de manière incessante au cours de l’histoire évolutive du genre Escherichia, qui a divergé des salmonelles il y a environ © STEPHANIE SCHULLER/SPL/PHANIE 120 millions d’années », explique Erick Denamur YZ, spécialiste de l’écologie et de l’évolution des micro- organismes à l’université Paris-Diderot.  Erick Denamur : unité 722 Inserm/ Paris 7, Ecologie et évolution des micro- organismes Plasticité et variabilité d’E. Coli  Patrice Nordmann : unité 914 Inserm, Derrière ces émergences, une plasticité génomique Résistances émergentes aux antibiotiques, Service de Bactériologie-Virologie- remarquable, qui permet aux gènes d’entrer et sortir Parasitologie de l’hôpital de Bicêtre constamment du génome de ces bactéries. « Ainsi, la 4 N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  • 5. À LA UNE  recombinaison. Une bactérie peut ainsi recevoir des gènes qu’elles possèdent déjà, mais dans une version différente, ce qui lui confère un polymorphisme (). Des gènes, qui n’existent pas chez une bactérie, peuvent aussi lui être transférés et lui apporter ainsi une nouvelle propriété. Et à l’inverse, des gènes peuvent aussi être perdus », rappelle Erick Denamur. Les antibiotiques coupables L’émergence de nouvelles souches n’est donc pas nouvelle. Comment expliquer dès lors que l’apparition de ces bactéries nous semblent de plus en plus fréquente ? Pour le spécialiste, il faut regarder du côté du phéno- mène de résistance. « À la base du processus d’évolu- tion, il y a certes la variabilité génétique, mais modifiée par l’intermédiaire des antibiotiques. En effet, au fur et à mesure de leur utilisation, on sélectionne les variants © CNRI/SPL/PHANIE génétiques résistants et ce sont ceux-là qui nous semblent “ émerger ” », analyse-t-il. Pour son collègue Patrice Nordmann YZ, chef de service de bactériologie-virologie-parasitologie, une catégorie de bactéries, à laquelle appartient E. coli, est tout particulièrement au cœur de l’affaire. « Les entéro- plus cantonnées à l’hôpital, elles se développent en milieu Klebsiella bactéries () présentent des multirésistances, contre les- urbain. Et là, leur contrôle est amplement plus compli- pneumoniae, quelles nous disposons de peu d’antibiotiques, constate qué », pointe Patrice Nordmann. Les spécialistes sur- qu’on trouve dans l’appareil le chercheur. Au cours des décennies passées, l’industrie veillent de près trois réservoirs majeurs, le Pakistan, le respiratoire, digestif pharmaceutique s’est focalisée sur le développement de Maroc et la Turquie, ainsi que l’Italie et la Grèce dans ou urinaire. traitements contre les bactéries de type Gram +. Elles une moindre mesure. « Les conditions locales expliquent ne possèdent qu’une paroi cellulaire et sont donc plus la présence de ces réservoirs, notamment en termes d’hygiène. faciles à attaquer que les Gram -, qui en possèdent deux. Dans ces pays, les antibiotiques sont employés sans Travailler sur celles-ci semblait aussi moins rentable. » contrôle, les plus aisés n’hésitant pas à utiliser largement Résultat : ces entérobactéries continuent d’émerger, tout tous les traitements disponibles, sans cibler la bactérie. La comme leurs résistances, et les antibiotiques disponibles surpopulation est aussi un facteur essentiel de la plus ne sont pas assez nombreux pour en venir à bout. rapide dissémination bactérienne », poursuit-il. En France, le nombre d’épidémies reste faible. Mais le Polymorphisme Une situation risque de voir se déverser dans l’Hexagone des bactéries Le fait qu’une espèce présente des individus sous haute surveillance multirésistantes, issues de ces réservoirs, existe bien. aux caractéristiques Parmi ces entérobactéries : les représentants du genre « Il devient urgent de dépister tous les patients transférés différentes au sein d’une Escherichia donc, mais aussi les Klebsiella, avec K. pneu- depuis un hôpital étranger. Sinon, des scénarios à la maro- même population. moniae, un bacille responsable de pneumonies noso- caine, où une large proportion de la population se trouve comiales. « Le problème est que ces bactéries ne restent être porteuse de bactéries multirésistantes, est tout à fait plausible », s’alarme-t-il. En ligne de mire : des Entérobactéries Bactérie connue et reconnue difficultés à venir pour Hôtes habituels de l’intestin de l’homme La bactérie ECEH responsable de l’épidémie traiter les maladies liées et des animaux allemande de mai 2011 a été rapidement à ces bactéries multi- identifiée : en un week-end, les méthodes résistantes, mais aussi de de séquençage à haut débit ont permis sérieux problèmes dans de reconnaître le génome de la « bactérie le domaine préventif. tueuse ». Celle-ci était en fait déjà « Le jour où le médecin partiellement connue : dans les années n’aura plus d’antibio- 1990, une souche partageant 93 % de ses tiques efficaces à admi- séquences avec elle avait été identifiée. © PHOTOTAKE/BAUMAN/BSIP nistrer à un patient en « Financer la recherche fondamentale est essentielle. Séquencer la diversité bactérienne attente de greffe, c’est devient plus qu’utile lors d’épidémies : si E. Coli, un pan de la médecine on connaît déjà une souche, il est plus facile souche moderne qui s’effon- de l’appréhender », assure Erick Denamur. O157:H7 drera », augure-t-il. I Alice Bomboy SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4   5
  • 6. • À LA UNE  DÉCOUVERTES • TÊTES CHERCHEUSES • REGARDS SUR LE MONDE • CLINIQUEMENT VÔTRE • GRAND ANGLE • MÉDECINE GÉNÉRALE • ENTREPRENDRE • OPINIONS • STRATÉGIES • BLOC-NOTES •• ••  Le détecteur de pH La collaboration exceptionnelle d’une équipepe de l’Inserm avec des chercheurs russes a permis ermis de révéler la fonction dans la régulation du pH d’un récepteur jusqu’alors orphelin : l’IRR. L ’Insulin-receptor Related ed Receptor (IRR) a été découvert rt voici une vingtaine d’années. . Comme son nom l’indique, l’IRR RR est de la même famille que le récep-cep- teur à l’insuline (IR) ou que le récepteur epteur aux IGFs (Insuline Growth Factor, IGF-R). or, Présent dans certaines cellules de l’orga- nisme (rein, pancréas ou testicules), on ne s), savait pas, jusqu’à présent, à quoi il pouvait “ IRR, servir exactement. un récepteur au rôle L’histoire commence par un heureux enfin connu „ hasard de laboratoire, en 2005. Une équipe de chercheurs russes, dirigée par Alexander Petrenko, à action. En supprimant l’Institut de chimie du vivant Shemyakin-Ovchinnikov à chez des souris le gène myakin-Ovchinnikov Moscou, réalise des expériences sur l’IRR en utilisant, par codant pour ce récepteur, r souci d’économie, un lot périmé de milieu de culture qui les chercheurs ont montré s’est révélé être alcalin. Les chercheurs ont alors observé que leur organisme deve- heurs que l’IRR était activé dans ce milieu basique. Ils en ont nait incapable de s’adapter à ieu déduit que l’anion hydroxyl (OH-), responsable de l’alca- une charge alcaline, apportée par linité du milieu, était capable de déclencher un change- exemple par les aliments. Les rongeurs finissaient par © TEK IMAGE/SPL/PHANIE ment de conformation du récepteur. Dans l’organisme, développer une alcalose métabolique, provoquant une cette nouvelle forme d’IRR entraînerait la sécrétion de hausse toxique du pH interne. Normalement, une telle bicarbonate par les cellules rénales, jouant ainsi un rôle surcharge les aurait conduits à excréter aussitôt du bicar- essentiel dans la régulation du pH du milieu intérieur, bonate de sodium par voie urinaire, ce qui aurait évité  Dominique Eladari : l’ensemble des liquides dans lequel baignent nos cellules. toute perturbation du milieu intérieur. « Ces observations unité 872 Inserm/Paris 6, Forts de cette découverte et en collaboration avec donnent à penser que l’IRR participe à un mécanisme qui Centre de recherche des Cordeliers  I.E. Deyev et al. Cell Metab, juin 2011 les chercheurs moscovites, l’équipe de Dominique permet de détecter les variations de pH de l’organisme afin 8;13(6):679-89 Eladari YZ a alors voulu préciser les mécanismes en de pouvoir adapter le transport rénal de bicarbonate et de corriger les anomalies », explique Dominique Eladari. Si une partie du voile est levée, des questions sub- sistent. Entre autres, quel est le rôle exact du récepteur IRR dans l’estomac ? « Lorsque l’on mange, l’estomac Un pH contrôlé pour des cellules secrète des acides, ce qui s’accompagne d’une absorption en pleine santé de bicarbonate par les cellules. Ainsi, il est possible que ces ions alcalins en activant le récepteur IRR informent Le pH est un facteur important de la régulation des l’organisme… qu’il en train de manger ! », précise le mécanismes cellulaires. On sait en effet que les protéines sont sensibles aux variations de pH, leur comportement et scientifique. Ces recherches devraient servir également leurs fonctions peuvent s’en trouver modifiés. Afin de lutter à mieux comprendre les signaux à l’origine de la sensation contre le développement d’un milieu intérieur trop acide de satiété et donc l’obésité… Mais aussi à mieux cerner (induit par exemple par la consommation alimentaire de l’hypertension artérielle. En effet, les cellules rénales, qui protéines animales…) ou trop alcalin (régime végétarien…), sécrètent du bicarbonate et possèdent le récepteur IRR, le rein est capable d’éliminer soit des protons (acides), soit absorbent également le chlorure de sodium dont l’excès des anions bicarbonates (alcalins). favorise l’hypertension. La fructueuse et rare collabora- tion franco-russe a donc de l’avenir ! I Clara Delpas 6 N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  • 7. DÉCOUVERTES Troubles bipolaires Cancer L’influence des rythmes circadiens Simulation en 3D Des chercheurs Psychologique, physiologique, environnementale ou génétique ? L’origine lillois YZ ont mis des troubles bipolaires reste encore mystérieuse, ce qui rend leur approche au point un outil si difficile. Un marqueur essentiel a cependant récemment été mis en de simulation évidence : une altération des fonctions circadiennes, autrement dit des numérique en 3D pour rythmes veille-sommeil, se manifeste au cours des phases de manie et estimer les risques de dépression par des changements d’humeur, d’appétit, de sommeil de la thermothérapie ou d’énergie. Plus surprenant, ces anomalies apparaissent également interstitielle © GARO/CRH/PHANIE laser. Encore en lorsque le malade est serein. Des chercheurs, emmenés par Franck développement, Bellivier YZ, du Pôle de génomique médicale à Créteil, viennent de cette méthode, montrer que cette rythmicité troublée pourrait être liée à des varia- peu invasive, tions au niveau des gènes circadiens, ce qui influencerait l’expression utilise un laser de des troubles, mais aussi la réponse aux traitements prodigués. A. B. faible puissance L’imagerie en 3D Franck Bellivier : unité 955 Inserm/Paris 12 Créteil, Institut Mondor de recherche biomédicale (IMRB) afin d’induire la permet de cibler les  V. Milhiet et al. J Physiol, 13 juillet 2011 coagulation de la contours de la tumeur. zone nécrosée, dont le volume peut être contrôlé, ce qui réduit les risques de dommage sur les structures saines environnantes. Les résultats des simulations, visant à mesurer l’augmentation de température générée par le laser Image et le volume de dommages thermiques produits, sont de synthèse conformes à ceux obtenus lors des tests précliniques d’un virus réalisés sur des rats. Ce qui laisse augurer de (en violet) possibles simulations sur le modèle humain. A. B. et d’anticorps  Unité 703 Inserm/Lille 2, Thérapies interventionnelles assistées par l’image et la simulation (Thiais) (en vert)  M. Marqa et al. BioMedical Engineering, 2011; 10:45 doi:10.1186/1475-925X-10-45  © SPACE IMAGING EUROPE/SPL/PHANIE QUESACO ? comme Biocide Les biocides sont des substances chimiques destinées à détruire des organismes jugés nuisibles par l’homme, en particulier des micro-organismes pathogènes et les insectes ravageurs des cultures. Pesticides et antibiotiques en sont les représentants les plus connus. Mais leurs effets potentiels sur la reproduction Immunologie sont une préoccupation pour les pouvoirs publics. L’expertise collective de l’Inserm, Reproduction et environnement, fait Les immunoglobulines le point sur leur action de perturbateurs endocriniens. J. C. sous influence Des chercheurs de l’Institut de génétique et de biologie  w ww.inserm.fr moléculaire et cellulaire YZ viennent d’éclairer les mécanismes à l’origine de la diversification des anticorps, pilier de l’efficacité du système immunitaire. G GÉNÉTIQUE : ÉPISSAGE À GÉOMÉTRIE VARIABLE Dans le Journal of Experimental Medicine du 11 juillet, Comment un gène code-t-il pour plusieurs protéines ? Pour répondre, ils expliquent que l’enzyme AID (cytidine désaminase Cameron Mackereth (Institut européen de chimie et biologie) et des collègues induite par activation) s’associe avec d’autres allemands et espagnols se sont intéressés au fonctionnement de la protéine protéines pour agir sans risques sur les gènes des U2AF65. Ce facteur d’épissage permet de couper certains segments de l’ARN avant qu’il ne soit transcrit : selon les excisions effectuées, un gène immunoglobulines et contribuer à leur adaptation. peut ainsi coder pour plusieurs protéines. Les chercheurs, dont les résultats Ce mécanisme pourrait être imité artificiellement pour sont publiés dans Nature, ont montré que les variations d’épissage étaient développer des vaccins plus efficaces et de nouvelles liées à une oscillation de la conformation de U2AF65 : fermée, elle est thérapies anti-cancéreuses. A. B. inactive, alors qu’elle passe en forme ouverte quand elle est en contact  Unité 964/Université de Strasbourg, Institut de génétique et de biologie moléculaire avec les segments à exciser. Des mutations affectant cette protéine sont et cellulaire (IGBMC) susceptibles de modifier la synthèse protéique. A. B.  B. P. Jeevan Raj, et al. J Exp Med, 11 juillet 2011; en ligne : jem.20110118.  C. D. Mackereth et al. Nature, 21 juillet 2011; 475 : 408–411, SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4   7
  • 8. DÉCOUVERTES Vision Cognition Sous les feux des LED Le frein de l’anxiété Pour comprendre les bases neurales des interactions entre l’anxiété et le contrôle cognitif, © NATIONAL PHYSICAL LABORATORY/SPL/PHANIE des chercheurs de l’université Pierre-et-Marie- Curie YZ ont comparé sous IRM fonctionnelle les réponses cérébrales de participants en bonne santé et de patients présentant des troubles de l’anxiété. Le but ? Déterminer l’impact du stress sur le réseau cérébral impliqué dans le contrôle cognitif. Les scientifiques ont ainsi remarqué que, face à une tâche stressante, le premier groupe, Laboratoire sain, se caractérisait par une activation accrue de recherche dans une région impliquée dans le contrôle cognitif sur les LED (le cortex gauche préfrontal dorsolatéral), ainsi que par une diminution de l’activation dans une Les diodes électro-luminescentes sont en passe de devenir la principale zone liée à l’anxiété (le cortex droit préfrontal source d’éclairage domestique. Des chercheurs de l’Inserm YZ ont été ventrolatéral). Chez les patients anxieux, cette missionnés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, modulation différenciée entre cortex n’apparaît pas, de l’environnement et du travail (Anses) pour estimer les risques que leur ce qui expliquerait les difficultés éprouvées par ces utilisation comporte pour la rétine. Conclusions : les données manquent sur personnes à s’adapter à des tâches cognitives. A. B. leur toxicité et des évaluations doivent être rapidement menées, notamment  Unité 975 Inserm/Paris 6, Centre de recherches en neurosciences de la Pitié-Salpétrière afin d’étudier les conséquences d’une exposition à vie à cette nouvelle  L. Koric et al., Hum Brain Mapp, 18 juillet 2011; doi: 10.1002/hbm.21340 lumière sur les photorécepteurs rétiniens. A. B.  Unité 872 Inserm/Paris 6 , Physiopathologie des maladies oculaires, Centre de recherche des Cordeliers  F. Behar-Cohen, et al. Progress in Retinal and Eye Research, juillet 2011; 30(4) : 239-257 1,1 an C’est le temps travaillé en moins par G CANCER : LES TUMEURS PRÉCOCES Neurosciences les personnes diabétiques au cours DÉBUSQUÉES Ces tumeurs restent de leur vie professionnelle. Retraite Un cerveau modèle anticipée plus fréquente et mise en souvent indétectables par l’imagerie médicale, mais invalidité accrue seraient responsables des recherches menées Créer un modèle du cerveau humain et de son activité sur les petits animaux en 2023, c’est l’objectif que se sont fixé les chercheurs de cette diminution du temps de pourraient changer la européens du Human Brain Project (HBP), sous la carrière. Des résultats tirés de l’étude donne. Des appareils direction du neurobiologiste Henry Markram YZ. menée par une équipe Inserm YZ miniatures, fondés sur la À partir de cette simulation informatique, les spécia- sur la cohorte de salariés d’EDF-GDF, stimulation par une source Gazel, entre 1989 et 2007. J. C. infrarouge de colorants listes espèrent mieux comprendre le cerveau humain fluorescents préalablement et en tirer de nouvelles pistes thérapeutiques, contre  Unité 1018 Inserm/Paris 11, Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations injectés, ont été mis au le vieillissement par exemple. Cela permettrait égale-  E. Herquelot et al, Diabetes care, juin 2011; 34(6) : 1344-1349 point pour étudier rats ment l’élaboration de nouvelles méthodes d’appren- et souris. Adaptés à l’homme, ils pourraient tissage. Dirigé par l’École polytechnique fédérale de révéler des mini-structures Lausanne, le projet rassemble déjà treize universités dans les tissus, comme ou institutions de recherche, dont l’unité de la formation de petits neuroimagerie cognitive CEA-Inserm de vaisseaux sanguins NeuroSpin à Gif-sur-Yvette YZ. Le HBP a (angiogenèse) autour de tumeurs de moins d’un été présélectionné parmi cinq autres projets millimètre, espèrent Alain par l’Union européenne. S’il est retenu, il bé- Le Pape, chercheur, et ses néficiera d’un budget de 100 millions d’euros collègues tourangeaux YZ. annuels pendant dix ans. Alors que les États- Dans le cas du cancer du sein, par exemple, les Unis se lancent dans un projet similaire, la mammographies peinent conquête du cerveau humain se révèle à différencier ce marqueur désormais le nouveau défi à relever. M.L. L. d’un simple kyste ou d’une  Henry Markram : directeur de HBP à l’École polytechnique fédérale calcification. A. B. © BLUE BRAIN/HBP de Lausanne (EPFL)  Unité 618 Inserm/Université Unité 992 Inserm-CEA/Paris 11, Neuroimagerie cognitive de Tours-François-Rabelais, Protéases Modélisation  et vectorisation pulmonaires d’un neurone  S. Pesnel et al. Eur J Nucl Med Mol www.humanbrainproject.eu Imaging; DOI 10.1007/s00259-011-1857-2 8 N° 4  SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  • 9.  DÉCOUVERTES  Dans l’intimité de nos neurones Plonger au cœur de notre cerveau et voir in vivo son fonctionnement, c’est désormais possible grâce à l’imagerie biphotonique. Une technique qui va permettre de © INSERM, S. CHARPAK mieux connaître notre encéphale. C omprendre le fonctionnement du cerveau est le Capillaires Graal de la physiologie moderne. Or, pour mieux déchiffrer cet organe vital, il faut pouvoir l’obser- Ce sont les vaisseaux sanguins les plus petits ver in vivo par des moyens non invasifs. Un véritable défi et les plus fins. Déployés que des chercheurs Inserm YZ viennent de relever. Dans Cartographie en arborescence, ils de la pression partielle relient les veinules et les la revue Nature Medicine de juin, ils détaillent comment en oxygène dans les vaisseaux du cerveau. artérioles, et ferment ils sont parvenus à mesurer, de manière non invasive, le Les couleurs indiquent des taux en oxygène ainsi la boucle du flux sanguin et la pression d’oxygène dans le bulbe olfac- différents dans les vaisseaux. réseau de la circulation tif d’un rat, cette région du cerveau où sont traitées les sanguine. Les capillaires fournissent aux cellules informations liées au sens de l’odorat. Pour cela, ils ont les nutriments et le eu recours à une technologie de microscopie en plein le flux sanguin dans les capillaires () du cerveau, ainsi dioxygène. développement : l’imagerie biphotonique qui permet de que la pression d’oxygène à une profondeur de 300 à pallier les problèmes de la microscopie traditionnelle, 400 micromètres. Le tout avec une précision spatiale de monophotonique, inefficace au cœur des tissus. En effet, l’ordre du micron et une résolution temporelle inférieure au delà d’une centaine de microns de profondeur, les à une seconde. La mesure simultanée de ces deux para- tissus biologiques diffractent fortement la lumière et les mètres a permis de montrer que la concentration de l’oxy- images obtenues sont floues. gène, tant dans les vaisseaux que dans le tissu cérébral, Combinée à l’emploi de marqueurs moléculaires fluctuait au cours d’une activation sensorielle. Quant à la fluorescents, l’imagerie biphotonique permet, elle, de mesure de la pression en oxygène, elle s’effectuait, aupara-  Unité 603 Inserm/Paris 5, Neurophysiologie et nouvelles microscopies plonger jusqu’à 1 mm à l’intérieur des organes sans les vant, via des électrodes de Clark. Ce système très invasif,  J. Lecoq et al. Nature Medicine, juin 2011 ; endommager. «Au lieu d’exciter les marqueurs fluorescents puisque les électrodes devaient 17 (7) : 893-898 avec un seul photon de forte énergie, nous utilisons deux pho- “ Une plongée être plantées dans le cerveau, tons d’énergie moitié moindre mais sans dommage permettait uniquement de appliqués simultanément, précise dans les organes „ mesurer l’oxygène dans le tissu Serge Charpak, directeur du labo- cérébral. L’étude a également Comment ratoire. Cela présente un double avantage, d’une part, nous pouvons apporté la preuve de ce que des modèles théoriques laissaient supposer: dans les capillaires du cerveau, le sang ça marche ? travailler avec des longueurs d’onde n’est pas oxygéné de manière homogène, les régions Les techniques d’imagerie de 800 à 1 000 nm qui pénètrent entourant les globules rouges sont plus oxygénées que le biphotonique consistent à envoyer plus profondément les tissus et, reste du plasma sanguin. Et grâce à l’imagerie biphoto- deux photons sur les tissus d’autre part, l’excitation du mar- nique, ce phénomène peut être observé directement. observés au moyen de lasers à queur fluorescent et son émission Par ailleurs, l’imagerie biphotonique devrait permettre impulsions ultracourtes. Lorsque lumineuse se font sur un point à terme d’explorer plus facilement les affections neuro- la molécule ciblée absorbe simultanément deux photons focal extrêmement précis, environ logiques qui se traduisent par une modification des infrarouges, elle passe de son état 1 micromètre cube. » Résultat, la apports en oxygène des tissus cérébraux, tels que les de repos à un état excité. Lors phototoxicité et les interférences accidents vasculaires cérébraux ou encore les maladies de son retour à l’état de repos, lumineuses qui parasitaient neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer. I la molécule émet un signal de l’image en microscopie de fluores- Erwan Lecomte fluorescence, soit un seul photon cence traditionnelle sont réduites. d’une longueur d’onde visible. Grâce à ce procédé, l’équipe a réussi à mesurer simultanément  Nouvelle technique d’exploration fine du cerveau www.inserm.fr/Actualités Recherche SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4   9
  • 10. ➜ DÉCOUVERTES CANCER Pourquoi les cellules ont la bougeotte © INSERM/CEA/DANIELLE GULINO-DEBRAC L’équipe Inserm de Jacques Camonis, à l’Institut Curie, vient de faire un pas en avant dans la compréhension des mécanismes de la migration des cellules. Impliquée dans les cancers, c’est une cible thérapeutique prometteuse. Cellules endothéliales humaines mises en culture. En N os cellules bougent, que ce soit lors du déve- vert, la VE-cadhérine, qui souligne les jonctions entre les cellules, en bleu, les noyaux des cellules, en rouge, les loppement de l’embryon, ou de la réponse filaments d’actine qui maintiennent la forme des cellules. immunitaire. Mais aussi dans d’autres situations plus inquiétantes comme les cancers, lorsque c’est-à-dire se désolidarisent les unes des autres et sont des cellules malignes parviennent à migrer et à former des résume métastases. Cette aptitude à se déplacer, ou motilité, repose Maria-Carla Parrini dans la revue Molecular Cell. sur la formation d’un réseau de laments d’actine, une pro- La motilité est contrôlée par de nombreuses voies de  Front de migration téine indispensable à l’architecture et aux mouvements des cellules, au niveau du front de migration(). Comment cette en cascade qui permettent aux éléments d’une cellule Partie avant de la de détecter les signaux externes et d’y répondre. L’une membranaire cellulaire lorsque la cellule se recherche. Car, si toutes les cellules de notre corps peuvent déplace. produire de l’actine, toutes ne sont pas mobiles en temps la littérature médicale depuis 20 ans, on sait qu’elle déclenche la formation des laments d’actine. la peau, des intestins et des seins. Et pourtant, ces tissus sont L’équipe de Jacques Camonis a simulé une blessure ☛ Maria-Carla Parrini, le siège des cancers les plus répan- dans une monocouche de cellules Jacques Camonis : unité 830 Inserm/ Paris 5, Génétique et biologie des cancers dus. � M.-C. Parrini et al. Molecular Cell 42, dans le corps parce que ces cellules les cellules se désolidarisent et y plantant une pipette. Les cher- 650–661, June 10, 2011 deviennent mésenchymateuses, cheurs ont ensuite observé que les cellules du voisinage commençaient à migrer pour assurer la cicatrisation de la blessure. Ils ont ainsi montré qu’une protéine, SH3BP1, était essentielle à SH3BP1, une molécule essentielle la migration des cellules réparatrices. En e et, les cellules Légendes chez qui les chercheurs avaient bloqué l’expression du gène infographieIque codant pour cette protéine migraient moins bien. En temps nonseruptio normal, SH3BP1 inactive Rac, la protéine clé de la voie quamenimi, sim imilit ullo ea pe accum, d’un réseau d’actine mal organisé, et par conséquent d’avoir quia voluptaquis du mal à avancer dans la bonne direction. moluptae dis Par ailleurs, il existe un lien entre la voie Rac et une autre voie, moluptaquiam dont on connaît depuis une dizaine d’années le rôle dans le rectem quia tra c de vésicules de sécrétion vers la membrane cellulaire illab ipiendam, sitatur, assinul complexe protéique de cette voie, l’exocyste, interagit direc- liquaeprovid ea tement avec SH3BP1. que con cullab transporte SH3BP1 jusqu’au front de migration, schématise id mincturepro coressinti omnis Maria-Carla Parrini. Là, SH3BP1 agit sur la voie Rac et la es simporeseque formation du réseau d’actine, permettant ainsi une migration © SYLVIE DESSERT laborru ptasimint e cace. » Ces découvertes sont précieuses. En e et, cette eatur mo voloris connexion entre ces deux voies que sont Ral et Rac permet aut laboris no d’ores et déjà d’envisager de nouvelles stratégies pour inhiber la migration des cellules cancéreuses. Clara Delpas 10 ● ● N° 4 ● SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011
  • 11.  DÉCOUVERTES •• •• •• •• •• ••  Où en est la France ? Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire vient de publier un numéro sur l’assistance médicale à la procréation. Premier constat : en 2009, les techniques d’AMP ont permis la naissance de 21 759 enfants, soit 2,6 % des naissances en France. Un chiffre 19 dons d'embryons assez stable depuis 2005. Quelles en sont les raisons ? ons 190 dons d'ovocytes   Et quelles perspectives pour ces techniques ? 1110 dons de spermatozoïdes 2416 TEC (transfert d’embryons L congelés) e 7 juillet dernier, la loi de bioéthique a été publiée au Journal Officiel. Le cadre médical de l’assistance médicale à la procréation (AMP) y a été réaffirmé : FIV 5400 La fécondation inséminations intraconjugales elle reste limitée aux couples en âge de procréer et qui in vitro Répartition des actes souffrent d’infertilité. « Cette stricte réglementation peut repose d’assistance médicale FIV sur deux 8160 à la procréation en 2009 expliquer que le nombre de tentatives d’AMP reste stable techniques : FIV avec ICSI en France, mais aussi que des personnes recherchent dans la FIV d’autres pays des solutions à leur attente », explique Pierre classique (les Dans 95 % Jouannet YZ qui a coordonné le numéro du Bulletin spermatozoïdes des cas, épidémiologique hebdomadaire du 14 juin dédié à l’AMP. rencontrent les les enfants ovocytes dans un 4464 sont issus Couples homosexuels, femmes seules ou ménopausées milieu de culture) et FIV classique des gamètes n’y ont pas accès en France, contrairement à d’autres pays l’ICSI. Cette technique du couple. comme la Belgique, l’Espagne ou la Grèce. Et les patientes consiste en l’injection © CAROLE FUMAT françaises qui s’y rendent ont surtout recours aux dons de intra-cytoplasmique SOURCE : AGENCE DE LA BIOMÉDECINE BI  d’un spermatozoïde sperme ou d’ovocyte, ou encore à la gestation pour autrui. dans l’ovocyte. Mais certaines pourraient scientifique de l’ABM, souligne cependant les efforts dans en toute légitimité bénéfi- ce sens : « En 2004, nous étions en moyenne à une réim- 70 % c’est le pourcentage des cier d’une AMP dans notre pays, notamment pour les plantation de 2,15 embryons, aujourd’hui nous sommes à 1,8. D’ailleurs, le taux moyen d’accouchements gémel- couples qui deviennent dons d’ovocyte. Alors pour- laires en FIV en 2009 est de 18 %. » Pour améliorer encore parents en commençant quoi traverser les frontières? ces chiffres, Pierre Jouannet prône, chez les femmes les un parcours de FIV :  Pierre Jouannet : Centre de recherche 41 % lors d’une des Parce que les délais d’attente Sens, éthique, société (CNRS/Université plus jeunes et les plus fertiles, le transfert sélectif d’un Paris -Descartes), ancien président de la 4 tentatives de FIV, 11 % vont parfois jusqu’à 5 ans… fédération des Cecos embryon, celui doté des meilleures chances de s’implanter. par adoption, 11 % par Dans son rapport d’activité  BEH, 4 juin 2011; 23-24 « Les recherches actuellement menées sur les premiers stades conception naturelle et de 2010, l’Agence de la bio-  Revue adsp, juin 2011; 75 de développement devraient nous permettre de définir des 7 % grâce à de nouveaux médecine (ABM) le recon- critères rigoureux de sélection et privilégier traitements. naît : « La situation du don le transfert d’un seul embryon », confirme d’ovocytes en France est pré- Françoise Merlet. occupante. » En 2009, seules 328 femmes ont fait des dons, Autre perspective de l’AMP : la cryoconser- © AFP PHOTO/JEFF PACHOUD ce qui a permis 933 FIV () et 190 naissances. « Ce nombre vation des gamètes et des tissus germinaux est très largement insuffisant car, à raison de deux couples rece- (ovaires et testicules), notamment pour veurs pouvant bénéficier des ovocytes issus d’une donneuse, il contrer les effets destructeurs d’une chimio- aurait fallu 800 donneuses supplémentaires. » Résultat : plus thérapie sur les organes reproducteurs. de 1 600 couples étaient en attente d’un don fin 2009. « Avec l’Institut national du cancer et les pro- Pour Pierre Jouannet, l’AMP dans notre pays est aussi fessionnels, nous travaillons sur les possibilités confrontée à une « épidémie de grossesses multiples », Ysaline, de préserver la fertilité, notamment lorsque le conséquence du transfert de plusieurs embryons au une première traitement anticancéreux intervient avant la puberté», assure cours des FIV. « En 2006, le taux de naissances multiples en France ! Françoise Merlet. Pour les femmes, le tissu ovarien serait en France était de 20,6 % contre 5,8 % en Suède. Or ces prélevé, conservé, puis regreffé après le traitement. Une grossesses multiples comportent des risques non négligeables possibilité qui a déjà fait ses preuves : en 2009, Ysaline est le de complications pour les femmes et les enfants. » Françoise Merlet, médecin référent AMP à la Direction médicale et  www.agence- biomedecine.fr premier bébé français né suite à une autogreffe ovarienne. Une naissance naturelle. I Gaëlle Lahoreau SEPTEMBRE - OCTOBRE 2011  N° 4   11