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Audiovisuel de service public en France
Référence : préparation en français de l’article « Kein Programm links von der Mitte. Öffentlich-rechtlicher Rundfunkin Frankreich », fondation Friedrich-Ebert, mars 2022, https://www.fes.de/themenportal-geschichte-
kultur-medien-netz/artikelseite/kein-programm-links-von-der-mitte-oeffentlich-rechtlicher-rundfunk-in-frankreich et http://library.fes.de/pdf-files/a-p-b/19078.pdf
Face à un processus d’ubérisation (privatisation, appauvrissement, précarisation, uniformisation,
déclassement) de l’audiovisuel public français, il s’agit d’affirmer un service public riche et pluraliste,
européen et territorialisé, numérisé et innovant, solidaire et inclusif, créatif et démocratique.
Alors que l’Etat intervient peu dans la presse écrite, il s’est donné un rôle important dans l’audiovisuel :
expérimentation militaire puis civile de la radio/TV, création de radios puis d’un service public de
l’information en 1941, monopole d’Etat sur les ondes en 1945 et organisme audiovisuel global et unique
(ORTF) en 1964 par le général de Gaulle. En effet, les technologies audiovisuelles étaient considérées comme
dangereuses pour la souveraineté (face aux médias étrangers) et la police (face aux forces anarchistes) des
ondes.
Ce rôle a un peu décru avec la libéralisation en 1981 par François Mitterrand du fait de la régulation du secteur
par une autorité administrative dite « indépendante » appelée aujourd’hui Arcom (voir le graphique et la
présentation ci-dessous),la désignation indirecte (un changement surtout formel) des dirigeants de
l’audiovisuel public français (AP) via cette autorité et l’évolution du rapport de force avec l’arrivée des
radios/TV libres, associatives, commerciales, et surtout d’internet avec ses innombrables concurrents, la
possibilité d’influences étrangères et de risques pour l’ordre public : cyberattaques, écoutes, terrorisme,
harcèlement, piratage, fausses informations, défiance de l’opinion publique.
L’AP qui défend depuis 1953 le triptyque « informer, cultiver, distraire » - débat démocratique, insertion et
cohésion sociale, diversité culturelle, citoyenneté et inclusion - est donc en situation de résistance et espère
des pouvoirs publics des aides financières (mais c’est l’inverse qui arrive) et régulatrices (l’UE y travaille : e-
Privacy, GDPR, DMA, DSA, AMS).
L’ERE NUMERIQUE
A l’évidence, la consommation médiatique devient plus numérique. On consomme de plus en plus la radio-
TV via l’ADSL/fibre ou la 4-5G (plutôt que le hertzien traditionnel), et les contenus audio-vidéos en général
grâce au téléphone (plutôt que les terminaux traditionnels). En 2019, le temps passé sur internet (170 min) a
dépassé celui devant la TV (167 min) dans le monde1. De nouveaux équilibres se mettent en place entre les
pratiques des jeunes (plus individuelles mais en réseau) et des plus âgés (plus collectives). La consommation
audiovisuelle se fait davantage en mode « tiré » (demande), et moins « poussé » (offre). Cette nouvelle
« économie de l’attention »2 personnalisée nécessite de nouvelles stratégies de distribution (par rapport aux
acteurs des télécom et du numérique) et de visibilité (sur les app stores, les télécommandes et les interfaces
des récepteurs connectés).
Or, l’AP a su innover et se métamorphoser en adoptant la philosophie ATAWAD (any time, anywhere, any
device) des « public utilities » pour diffuser à 360° des médias globaux et mondiaux grâce à la maitrise des
NTIC : une large application du web (plateformes, moteurs de recherche, référencement), des réseaux sociaux,
du DAB, des OTT (podcasts, applications) et de la data ; des expérimentations IA (bots, assistant vocal), 8K,
5G, VR, son 3D… . L’interopérabilité et la multi-modalité permettent d’accéder « à la carte » à des contenus
linéaires et délinéaires (rattrapage ou original) gratuitement ou en payant.
Actuellement, francetvinfo.fr est le site internet d’info le plus consulté en août 2021 avec 140 millions (M) de
visiteurs contre 100 M au printemps 2017. Il y a 80 M de téléchargements par mois des podcasts produits par
Radio France (RF). Ce succès – qui s’ajoute à celui des audiences traditionnelles - est facilité par le fait que
ses radios détiennent tous les droits d’auteur, contre 20% à France Télévisions (FTV) où n’y a que 21,5 M de
vidéonautes uniques pour les replays sur le mois d’août 2021.
LA « DISTINCTIVENESS »
1 Zenith, Rapport, 2020
2 Y. Citton, L’économie de l’attention, La Découverte, 2014
Malgré la création de plateformes industrialisant la production de contenus délinaires socio-numérisés, il
semble que le linéaire (avec ses RDV et sa gratuité) et le terminal TV/radio (avec son anonymat et sa praticité)
ne vont pas disparaitre. Mais cela dépendra de la richesse de l’AP :
La « distinctiveness »3 de l’AP par rapport à l’audiovisuel privé se voit à travers le temps pour certains
contenus : documentaires, investigations, politique, éducation, science, culture « légitime ». Mais aussi à la
façon de les aborder : plus de diversité, complexité, contextualisation, apaisement, distanciation, et des
productions locales, inédites et patrimoniales. L’AP est moins racoleur (recherche de buzz et audience à tout
prix), moins libéral économiquement et moins conservateur sociétalement. L’AP valorise l’enquête et la
vérification plutôt que la désinformation et les rumeurs ; la réflexion et la discussion plutôt que les conflits et
l’opinion ; la tolérance et l’ouverture plutôt que la haine et la discrimination. Y compris pour le divertissement,
qui, comme l’information, est une construction sociale et peut être approché de nombreuses façons : plus
culturel et intellectuel, collaboratif et fraternel ; moins violent et stigmatisant, concurrentiel et individualiste.
Il contribue à l’émancipation et l’épanouissement individuel : éveil critique et créatif, ouverture d’esprit,
apprentissage de la citoyenneté et de la solidarité.
L’AP vise à proposer un « espace public » (Jürgen Habermas) démocratique en donnant la parole à divers
groupes cultuels, politiques, syndicaux, culturels, sociétaux, artistiques sans les communautariser. Son travail
d’inclusivité va à l’encontre de l’extrême-droitisation de la TV d’info en continu CNews (imitation de
Foxnews) et de la TV de divertissement C84 du puissant groupe Bolloré (édition, publicité, cinéma,
transport…). Celles-ci priorisent dans leurs agendas les discours xénophobes stigmatisant les populations
minoritaires, pauvres, immigrées, musulmanes, jeunes, de banlieue, de gauche, écologistes… - outrepassant
ainsi leurs cahiers des charges. Et elles soutiennent - via leurs présentateurs, éditorialistes et invités - le
candidat à la présidentielle Éric Zemmour (ex-chroniqueurs de l’AP puis de CNews), notamment dans son
militantisme anti-AP.
L’AP est aussi moins cher, systémique, automatisé, déterritorialisé et désocialisé que les plateformes, et moins
addictif, haineux, communautariste, panoptique et égocentré que les réseaux sociaux.
3 F. Marty, G. Tremblay, A.-J. Bizimana, & O. Kane, Le service public médiatique à l’ère numérique, RFSIC, 2021
4 C. Sécail, L’élection présidentielle 2022 vue par Cyril Hanouna, lesfocusdulcp,2022
Culturellement, l’AP finance et diffuse largement la création audiovisuelle : environ 600 films/an sur ses
antennes (430 pour Arte, sur les 2300 sur la TV numérique gratuite) ; des films davantage inédits que dans le
privé gratuit (28% sur France TV et Arte contre 13% dans le privé)5.
Ainsi, l’intervention contre-programmatique de l’AP contribue au pluralisme et à la cohésion sociale, freine
les effets de formatage et marketing, d’uniformisation et de circularité dus aux stratégies de convergence et
de concentration (Pierre Bourdieu) et solidifie la démocratie.
LES INJONCTIONS CONTRADICTOIRES
L’AP doit faire face à des injonctions contradictoires et évolutives des autorités publiques : demande de
créativité et rentabilité ; prise de risque et recherche d’audience ; culture « légitime » et divertissement ;
réduction de budget et augmentation des missions ; liberté journalistique et contrôle étatique ; pluralisme de
la presse/internet et fusion/fermeture de médias.
Un entre-soi élitiste avec des « hommes blancs de plus de 50 ans », de centre-ville, métropolitain, non
handicapés, diplômés, CSP+, actifs sont surreprésentés dans les effectifs, l’encadrement et à l’antenne. Ainsi,
la proportion des personnes apparaissant à l’écran perçues comme « non-blanches » sur France 2-F2 (12%),
France 3-F3 (8,7%) et F5 (9,6%) demeure sous la moyenne générale des chaînes mesurées (15%)6. Mais cela
n’a pas empêché la suppression en août 2020 de la chaîne France Ô (±0,6% Part d’audience-PDA) alors qu’elle
traitait des outremers, qu’il y a en métropole – où elle était diffusée – 1 M de personnes qui en sont issus et
qu’elle pouvait se transformer en chaîne de toutes les cultures mondiales, migrantes et urbaines pour un public
français particulièrement hétérogène et multiculturel.
L’AP dispose d’un budget d’environ 4,4 Mds pour 17 000 employés grâce à de la publicité (0,4 Mds pour
FTV), des subventions, mais surtout les 3,79 Mds de recettes de la redevance appelée contribution à l’AP
(CAP)7. C’est supérieur à son concurrent TV direct (2,3 Mds € de chiffre d’affaires pour le groupe TF1 de
3 686 employés) mais inférieur aux AP étrangers équivalents (8 Mds pour ZDF/ARD de 25 000 employés8 et
6 Mds pour BBC de 22 000 employés9), et très inférieur à Netflix (30 Mds de revenus pour 11 300 employés10).
Pourtant les autorités demandent à l’AP de faire des économies depuis 20 ans (190 M€ sur la période 2018-
2022 ; une enveloppe de 70 M€ a seulement compensé les pertes liées au confinement covidique de 2020 dans
le plan de relance économique de juillet 2020) tout en interdisant la publicité à FTV en soirée en 2009, et en
créant de nouvelles chaînes, sites internet, applications... Les conséquences sont sociales. FTV est « en plan
social depuis près de 10 ans » pour un « effort de productivité sans précédent » selon sa présidente11. Cela
représente une diminution du personnel de « 15% en net », soit 1500 salariés en moins qu’en 2012 « à
périmètre constant » qui laisse imaginer les effets pathogènes en termes de souffrance au travail.
Les politiques souhaitent rajeunir l’audience de l’AP. En effet, le premier téléphone arrive à 9 ans et 9 mois,
et les 4-14 ans ne regardent plus la TV que 0h59 par jour (2h08 en sept. 201012) contre 5h13 pour les plus de
50 ans (4h14 en 2010) et 3h21 (4h14 en 2010) en moyenne en septembre 202113. Pourtant, les parts de FTV
dans Gulli – TV pour 6-12 ans - ont été vendues en 2014 à Lagardère Active puis au groupe M6 en 2019 alors
qu’elle était/est rentable (1,4% PDA en août 2021). De même, le ministre de l’Economie a fait fermer la TV
France 4 en août 2021 alors que l’audience des plus de 50 ans y représentait 35% contre 63% pour FTV en
201914. Son utilisation comme établissement d’enseignement de substitution pendant le confinement avait
freiné sa fermeture. Elle aurait pu devenir une TV d’éducation populaire (formation, expérimentation,
recherche) en journée et de « culture jeune » le soir. FTV a dû segmenter et plateformiser son offre : sites
internet pour enfants (Okoo), éducatif (Lumni), de fictions et documentaires pour jeunes (Slash), d’un
concurrent de Neflix (Salto), infos pour jeunes européens (Entr). FTV a seulement obtenu une prolongation
du canal de F4 pour une double chaine : Okoo en journée et Culturebox (chaine culturelle créée début 2021
5 CNC, La diffusion des films à la télévision en 2019, 2020
6 CSA, Baromètre de la diversité de la société française, 2020
7 J.-R., Hugonet, Avis, Sénat, 2020
8 N. Harbusch,Gebühren 2020. 8 Milliarden Euro für ARD und ZDF, bild.de, 16/6/2021
9 BBC, Group Annual Report and Accounts,2020/21
10 Netflix, zonebourse.com, 2021
11 Assemblée nationale, Audition de Delphine Ernotte, 2021
12 Médiamat annuel, Médiamétrie, 2010
13 Médiamat mensuel, Médiamétrie, sept 2021
14 CSA, Rapport sur l’exécution du cahier des charges de France Télévisions, 2021
pour le confinement sur le canal de France Ô) en soirée. Or le rajeunissement est possible puisqu’Arte, dont
1,8 Mds de vidéos ont été vues en 2021 et qui a lancé la chaîne de TV connectée et hertzienne 77, a doublé
son audience sur les 15-34 ans15.
En 2016, une TV d’info en continu publique - franceinfo - a été créée pour diversifier le traitement de l’info
et concurrencer l’« hégémonie culturelle »16 des nombreuses TV d’info commerciales. Pourtant, il existe une
radio éponyme depuis 1987 et plusieurs TV/radios internationales d’info en continu - RFI, France 24 et MCD
- qui ont en moyenne 251,1 M de « contacts » (linéaires et délinéaires) dans le monde chaque semaine en
2020. De plus, sur demande de l’Etat17, il y a eu fusion des rédactions nationales F2 et F3 alors que les
journalistes de F3 ont des origines sociales, géographiques et éducatives plus diversifiées et moins élitistes et
bénéficiaient de davantage de liberté car F3 est moins l’objet d’enjeux.
Au final, il y a, à l’opposé des dynamiques pluralistes et émancipatrices sur internet, un risque
d’homogénéisation des points de vue via des journalistes interchangeables sous prétexte de convergence des
médias et de nécessité économique, d’objectifs de neutralité et d’efficacité. Seuls 2% des sujets diffusés par
franceinfo font référence au climat, soit le double du journal de 20h de F2 mais autant qu’à la TV commerciale
BFMTV (2,9% PDA)18. Un sondage auprès du public de l’AP (127 000 personnes) a souligné un manque de
proximité avec le public, de parole citoyenne, de débat et de diversité d’opinion en ce qui concerne RF19, mais
cela n’a pas empêché le début de fusion des médias en partie régionaux F3 et France Bleu.
LA PRESIDENTIELLE
Emmanuel Macron a débuté son mandat en qualifiant l’AP de « honte de la République » à cause de « la
mauvaise gestion, le gaspillage, la médiocrité des programmes et des contenus, les relations malsaines entre
l’audiovisuel et ses partenaires extérieurs (animateurs, producteurs, etc) »20 : les dirigeants de FTV Bastien
Millot et Patrick de Carolis ont été condamnés à 5 mois d’emprisonnement pour des contrats entachés de
favoritisme. D’où l’annonce, par la suite, d’une grande réforme de l’AP pour constituer une « BBC à la
française » : création d’une holding « France Médias » pour uniformiser la gestion d’un AP éclaté et
mutualiser les coûts ; –la modernisation de l’autorité administrative régulatrice pour intervenir dans le
numérique ; réforme de la publicité (géolocalisée, sur les films, pendant les films) et de la CAP (renvoyée à
2023) pour compenser les diminutions de recettes… Mais compte-tenu du souvenir de l’ORTF gaullienne,
des nombreuses manifestations qui ont émaillé le mandat et à l’approche de la présidentielle de 2022,
l’exécutif a préféré temporiser et faire voter des petites réformes plus discrètes. Le gouvernement suit donc la
« position intermédiaire » du think tank de centre gauche Terra Nova qui propose des convergences et
coordinations des moyens à propos de projets « concrets, pragmatiques et réalistes » grâce au soutien d’un
État à la fois tutelle, financeur et stratège21.
Ainsi, la principale réforme a été celle de l’autorité régulatrice. Depuis 2022, elle s’appelle Autorité de
régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) du fait de la fusion du Conseil supérieur
de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur
internet (Hadopi). Elle comprend, pour des mandats de 6 ans, 9 conseillers désignés par les principales
autorités politiques (7 sont issus du CSA dont le président qui préside à nouveau) et juridictionnelles (2
viennent de l’Hadopi et sont issus du Conseil d’Etat et de la Cour de cassation) (cf le graphique ci-dessus) et
355 collaborateurs pour un budget de 46,6 M€ en 2022, contre 37,4 M€ pour le CSA et 8,2 M€ pour Hadopi
en 2021. Elle est responsable de la régulation (conventions avec les radios, TV et plateformes), de l’évaluation
(représentativité des acteurs et des paroles politiques et citoyennes) et des sanctions (contre la désinformation,
la haine en ligne, le piratage, la pornographie via des listes noires, blocages, retraits ou déférencements). Ses
missions s’articulent autour de 6 axes : la promotion et la protection de la création ; la régulation technique et
économique ; l’accompagnement des publics ; l’observation et l’analyse ; le pluralisme et la cohésion sociale
; la régulation des plates-formes en ligne et réseaux sociaux.
15 T.-D. Nguyen,Le lifting payant d’Arte pour séduire le jeune public, Challenges.fr, 3/2/2022
16 A. Gramsci, Cahiers de prison, Gallimard, 2021
17 Cour des comptes, Rapport, 2016
18 Reporter d’espoirs, Comment les médias traitent-ils du changement climatique ?, 2020
19 Ma Télé Ma Radio Demain, Institut Ipsos, RF et FTV, 2018
20 L’Express, 5/12/2017
21 L.-C. Trebuchet, Audiovisuel public : tous ensemble vers le numérique (acte 2), Terra Nova, 2020
Globalement la droite a tendance à demander à l’AP de faire des économies tout en se numérisant/modernisant
pour concurrencer les plateformes numériques internationales. Elle veut supprimer la CAP (138€ par an par
foyer en métropole et 88€ en Outre-mer) que les représentants d’Emmanuel Macron jugent « archaïque » et
« injuste » car elle ne concerne que certains possesseurs de TV et dispositifs assimilés (d’où l’expression de
redevance TV qui est issue d’une redevance radio de 1933). Il s’agirait pour le président-candidat de donner
du pouvoir d’achat aux contribuables dans la continuité de la suppression en 2019 de la taxe d’habitation
(723€ par an par foyer en moyenne) qui était prélevée simultanément. La piste d’« un budget voté pour cinq
ans » est évoquée22 mais elle n’éviterait par de rendre l’AP davantage dépendant de l’exécutif qui imposerait
son budget lors du vote au Parlement. La dimension pédagogique d’un budget clairement identifié,
globalement pérenne et relativement autonome pour des médias en théorie indépendants par rapport aux
pouvoirs publics et aux annonceurs, et alternatifs aux médias commerciaux serait davantage altérée. De son
côté, Valérie Pécresse, la candidate du parti libéral-conservateur Les Républicains, a estimé que la
privatisation n’était pas un « tabou » alors que cela affaiblirait l’ensemble des médias commerciaux à cause
de la course aux annonceurs : TF1 et M6, qui veulent fusionner, se positionnent contre23. A l’extrême-droite,
Marine Le Pen, candidate du Rassemblement National (au 2nd tour de la présidentielle 2017), souhaite la
privatisation de l’AP24 à l’exception de « L’audiovisuel d’outre-mer par exemple, comme la voix de la France
dans le monde. Arte ne sera pas concerné. » Ni l’Institut national de l’audiovisuel-Ina (archives). Elle s’appuie
sur deux arguments principaux. Premièrement le pouvoir d’achat : « c’est immédiatement 2,8 Mds de [CAP
qui seraient rendus] aux Français ». Le second est lié à la maturation démocratique de l’audiovisuel où les
médias privés seraient suffisants. Éric Zemmour - qui concurrence le RN à sa droite et accentue la forte
polarisation actuelle - ajoute l’argument d’un manque de neutralité de l’AP où il s’estime censuré et combattu
pour ne garder dans le giron public que France 5, franceinfo, RFI, TV5 Monde, France Culture, Arte et l’Ina.
Comme dans certains pays dirigés par des conservateurs (Pologne, Hongrie, Autriche), l’AP est accusé de
propagande gauchiste (de fait, l’AP est jugé plus à gauche que dans des démocraties européennes similaires25),
à l’image de la radio France Inter dont les dirigeants assument, avec un succès d’audience, une approche
progressiste particulièrement incarnée par ses chroniqueurs-humoristes. A l’origine, cette proposition est
inspirée de la droite libérale. A l’image d’une note de la Fondapol26 - proche du parti conservateur-libéral Les
Républicains - où est proposé d’appliquer le principe de subsidiarité pour ne faire intervenir l’AP que sur
l’info - face aux « intérêts privés » - et la culture « élitiste » - face au « formatage » et « nivellement » liés à
la publicité.
De leur côté, les partis politiques du centre gauche aux anticapitalistes - divisés et faibles – s’opposent à ce
travail d’ubérisation de l’AP sans proposer un projet alternatif précis. Ils se focalisent sur le secteur privé,
notamment les effets de concentration sur le pluralisme. A l’image de la possible fusion des groupes TF1 et
M6, soutenue par l’exécutif pour contrer les publiphages et omnipotents GAFAM-NATU-BATX. D’où la
volonté de faire voter une loi anti-concentration par le parti de Jean-Luc Mélenchon - 3ème à la présidentielle
2017 -, le souhait d’un renforcement du statut juridique des rédactions et l’introduction d’une charte
déontologique dans la convention collective pour les protéger des actionnaires. D’où l’objectif – non précisé
- de maintenir un service public « fort » et « indépendant » pour les écologistes (EE/LV). Ces derniers – en
ascension électorale - veulent augmenter le financement des médias locaux, la représentation des femmes à
l’antenne et diminuer la publicité, notamment pour des produits climaticides. Les socialistes (PS) - en
difficulté électorale nationale - proposent, en plus, un rôle important de l’AP dans l’éducation et le
développement d’une culture scientifique.
RECOMMANDATIONS POUR DEMOCRATISER
Dans un pays classé 34è par Reporters Sans Frontières et 23è par Transparency International, l’autonomie de
l’AP a été demandée, annoncée, mais jamais obtenue. L’AP est restée un outil sous influence politique. En
témoignent les interventions des multiples institutions (Président de la République, Cour des comptes,
Parlement, ministères de la Culture, de l’Économie, Arcom) : organisation (lois), régulation (Arcom), objectifs
22 Suppression de la redevance : Attal écarte une mise en danger de l’audiovisuel public, Le Figaro, 8/3/2022
23 Présidentielle 2022 : faut-il supprimer la redevance audiovisuelle ?, Les Echos, 19/1/22
24 Interview, Le Figaro, 8/9/2021
25 Reuters Institute Report, 2019
26 O. Babeau, Refonder l’Audiovisuel Public, Fondapol, 2016
(cahiers des charges, contrats d’objectifs et de moyens de 5 ans depuis 2000 et de 2 ans depuis 2021), budget,
nomination des principaux dirigeants (vial’Arcom) désigne, évaluation (auditions, avis, rapports). Les effets
éditoriaux sont inévitables par le jeu des recrutements, carrières et hiérarchies. Même si la censure est plus
« invisible »27 qu’à l’époque gaullienne où le ministre de l’Information disposait d’un bureau au sommet de
la maison de la radio, en contradiction avec programme du Conseil national de la résistance de 1944 qui avait
demandé son « indépendance à l’égard de l’État, des puissances d’argent et des influences étrangères ». Le
refus de voir l’AP échapper aux institutions pousse les citoyens à s’échapper de l’AP.
Pourtant, au-delà de l’enrichissement info-culturel personnel via l’écoute de ses programmes, l’AP peut aider
davantage à l’empowerment des citoyens déjà très actifs. De même en politique où la démocratie participative
a pris de l’ampleur : conventions, budgets, primaires… Or, la possibilité d’interagir avec l’AP est devenue
une condition de son succès et ne peut plus se limiter aux sondages, commentaires et zapping. Cela demande
un travail d’horizontalisation de l’AP pour le rendre vraiment « public » (Jurgen Habermas) ou « commun »
(Elinor Ostrom), c’est-à-dire citoyen. Cela passe par la création d’espaces phygitaux dont dispose par exemple
la « maison de la radio et de la musique » qui rénove ses 100 000 m2.
L’AP étant financé à ¾ par la CAP et regardé par les citoyens, il doit être au service de ces derniers via un
travail de démocratisation culturelle – tant souhaitée depuis l’écrivain-ministre André Malraux - et
informationnelle – redoutée par les « gate keepers » politiques – plutôt que de se focaliser sur les questions
économique et numériques :
 Créativité : Créer au sein de l’AP un incubateur artistique grâce à des financements et du matériel,
des ressources internes (mécénat de compétences des salariés) et externes (vidéastes, influenceurs,
artistes, informaticiens, entrepreneurs, gamers, makers, streamers… sélectionnés sur concours public)
et des partenariats avec des établissements culturels, d’enseignement et de recherche, et faire intervenir
cet écosystème : expérimentation, écriture, production, tests, programmation, animation,
distribution…
 Information : Créer au sein de l’AP un laboratoire de critique métamédiatique et déontologique,
d’investigation et de médiation (le rôle actuel des médiateurs de l’AP étant insuffisant), d’éducation
aux médias et au codage grâce à des financements et du matériel, à des partenariats avec l’AFP et les
établissements d’enseignement et de recherche, et la participation d’associatifs, ONG, syndicalistes,
fact checkers, data scientists, infographistes, hackers, militants du « libre » (open gov, data, access,
source, science, wikipédiens), lanceurs d’alerte, médiateurs, documentaristes, journalistes
indépendants et de l’AP (dont il faut protéger davantage le statut et la diversité des rédactions).
 International : En complément d’Euronews ou du nouveau média numérique Entr, faire d’Arte un
média linéaire et délinéaire (VOD, SVOD, AVOD) mondial de référence grâce à l’ensemble des
productions (fiction, art, reportage) européennes (et au-delà). Cela demande d’augmenter la part de
production interne de l’AP pour faciliter leur diffusion au niveau des droits d’auteur.
 Organisation : En s’inspirant du modèle associatif, modifier le processus de sélection des dirigeants
de l’AP en donnant la possibilité de désignation à des représentants du personnel, de l’audience, des
partis politiques d’opposition… Les candidats devraient faire campagne puis rendre des comptes
régulièrement devant ces représentants lors d’un mandat unique de 5 ans comprenant un budget pour
5 ans et un objectif de transparence : salaires, budgets, audiences, données numériques, algorithmes,
choix stratégiques, RH, programmatiques, éditoriaux et de gouvernance.
 Inclusion : Faire en sorte que les salariés - a fortiori à l’antenne - mais aussi les invités et les personnes
dont il est question soient équitablement représentatifs de la population : origine sociale et
géographique, couleur de peau, genre, âge, métier, santé, langue, appartenance idéologique, politique
et syndicale.
 Financement : Donner à l’AP les moyens économiques équivalents à ceux de pays similaires,
notamment grâce à : 1) un fonds alimenté par une taxe sur le CA des acteurs du numérique (ott,
plateformes, moteurs de recherche et réseaux sociaux) diffusant de l’information de journalistes
professionnels ; 2) une modification de l’assiette et du montant de la CAP : 0€/an pour les exemptés
habituels, 88 pour les ultramarins, les possesseurs de terminaux numériques et radios, 138 pour les
possesseurs de TV (contre 335 dans tout foyer suisse en 2021) ; 3) une subvention.
27 P. Durand, Médiamorphoses, PUL, 2019
Dr Sebastien Poulain (laboratoire MICA, Université Bordeaux Montagne) a publié La radio du futur (Cahiers
d’histoire de la radiodiffusion, 2017), L’audiovisuel public est-il vraiment public ? (The Conversation, 2021)
et Les radios locales (avec Thierry Lefebvre, INA/L’Harmattan, 2021).

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  • 1. Audiovisuel de service public en France Référence : préparation en français de l’article « Kein Programm links von der Mitte. Öffentlich-rechtlicher Rundfunkin Frankreich », fondation Friedrich-Ebert, mars 2022, https://www.fes.de/themenportal-geschichte- kultur-medien-netz/artikelseite/kein-programm-links-von-der-mitte-oeffentlich-rechtlicher-rundfunk-in-frankreich et http://library.fes.de/pdf-files/a-p-b/19078.pdf Face à un processus d’ubérisation (privatisation, appauvrissement, précarisation, uniformisation, déclassement) de l’audiovisuel public français, il s’agit d’affirmer un service public riche et pluraliste, européen et territorialisé, numérisé et innovant, solidaire et inclusif, créatif et démocratique. Alors que l’Etat intervient peu dans la presse écrite, il s’est donné un rôle important dans l’audiovisuel : expérimentation militaire puis civile de la radio/TV, création de radios puis d’un service public de l’information en 1941, monopole d’Etat sur les ondes en 1945 et organisme audiovisuel global et unique (ORTF) en 1964 par le général de Gaulle. En effet, les technologies audiovisuelles étaient considérées comme dangereuses pour la souveraineté (face aux médias étrangers) et la police (face aux forces anarchistes) des ondes.
  • 2. Ce rôle a un peu décru avec la libéralisation en 1981 par François Mitterrand du fait de la régulation du secteur par une autorité administrative dite « indépendante » appelée aujourd’hui Arcom (voir le graphique et la présentation ci-dessous),la désignation indirecte (un changement surtout formel) des dirigeants de l’audiovisuel public français (AP) via cette autorité et l’évolution du rapport de force avec l’arrivée des radios/TV libres, associatives, commerciales, et surtout d’internet avec ses innombrables concurrents, la possibilité d’influences étrangères et de risques pour l’ordre public : cyberattaques, écoutes, terrorisme, harcèlement, piratage, fausses informations, défiance de l’opinion publique. L’AP qui défend depuis 1953 le triptyque « informer, cultiver, distraire » - débat démocratique, insertion et cohésion sociale, diversité culturelle, citoyenneté et inclusion - est donc en situation de résistance et espère des pouvoirs publics des aides financières (mais c’est l’inverse qui arrive) et régulatrices (l’UE y travaille : e- Privacy, GDPR, DMA, DSA, AMS).
  • 3. L’ERE NUMERIQUE A l’évidence, la consommation médiatique devient plus numérique. On consomme de plus en plus la radio- TV via l’ADSL/fibre ou la 4-5G (plutôt que le hertzien traditionnel), et les contenus audio-vidéos en général grâce au téléphone (plutôt que les terminaux traditionnels). En 2019, le temps passé sur internet (170 min) a dépassé celui devant la TV (167 min) dans le monde1. De nouveaux équilibres se mettent en place entre les pratiques des jeunes (plus individuelles mais en réseau) et des plus âgés (plus collectives). La consommation audiovisuelle se fait davantage en mode « tiré » (demande), et moins « poussé » (offre). Cette nouvelle « économie de l’attention »2 personnalisée nécessite de nouvelles stratégies de distribution (par rapport aux acteurs des télécom et du numérique) et de visibilité (sur les app stores, les télécommandes et les interfaces des récepteurs connectés). Or, l’AP a su innover et se métamorphoser en adoptant la philosophie ATAWAD (any time, anywhere, any device) des « public utilities » pour diffuser à 360° des médias globaux et mondiaux grâce à la maitrise des NTIC : une large application du web (plateformes, moteurs de recherche, référencement), des réseaux sociaux, du DAB, des OTT (podcasts, applications) et de la data ; des expérimentations IA (bots, assistant vocal), 8K, 5G, VR, son 3D… . L’interopérabilité et la multi-modalité permettent d’accéder « à la carte » à des contenus linéaires et délinéaires (rattrapage ou original) gratuitement ou en payant. Actuellement, francetvinfo.fr est le site internet d’info le plus consulté en août 2021 avec 140 millions (M) de visiteurs contre 100 M au printemps 2017. Il y a 80 M de téléchargements par mois des podcasts produits par Radio France (RF). Ce succès – qui s’ajoute à celui des audiences traditionnelles - est facilité par le fait que ses radios détiennent tous les droits d’auteur, contre 20% à France Télévisions (FTV) où n’y a que 21,5 M de vidéonautes uniques pour les replays sur le mois d’août 2021. LA « DISTINCTIVENESS » 1 Zenith, Rapport, 2020 2 Y. Citton, L’économie de l’attention, La Découverte, 2014
  • 4. Malgré la création de plateformes industrialisant la production de contenus délinaires socio-numérisés, il semble que le linéaire (avec ses RDV et sa gratuité) et le terminal TV/radio (avec son anonymat et sa praticité) ne vont pas disparaitre. Mais cela dépendra de la richesse de l’AP : La « distinctiveness »3 de l’AP par rapport à l’audiovisuel privé se voit à travers le temps pour certains contenus : documentaires, investigations, politique, éducation, science, culture « légitime ». Mais aussi à la façon de les aborder : plus de diversité, complexité, contextualisation, apaisement, distanciation, et des productions locales, inédites et patrimoniales. L’AP est moins racoleur (recherche de buzz et audience à tout prix), moins libéral économiquement et moins conservateur sociétalement. L’AP valorise l’enquête et la vérification plutôt que la désinformation et les rumeurs ; la réflexion et la discussion plutôt que les conflits et l’opinion ; la tolérance et l’ouverture plutôt que la haine et la discrimination. Y compris pour le divertissement, qui, comme l’information, est une construction sociale et peut être approché de nombreuses façons : plus culturel et intellectuel, collaboratif et fraternel ; moins violent et stigmatisant, concurrentiel et individualiste. Il contribue à l’émancipation et l’épanouissement individuel : éveil critique et créatif, ouverture d’esprit, apprentissage de la citoyenneté et de la solidarité. L’AP vise à proposer un « espace public » (Jürgen Habermas) démocratique en donnant la parole à divers groupes cultuels, politiques, syndicaux, culturels, sociétaux, artistiques sans les communautariser. Son travail d’inclusivité va à l’encontre de l’extrême-droitisation de la TV d’info en continu CNews (imitation de Foxnews) et de la TV de divertissement C84 du puissant groupe Bolloré (édition, publicité, cinéma, transport…). Celles-ci priorisent dans leurs agendas les discours xénophobes stigmatisant les populations minoritaires, pauvres, immigrées, musulmanes, jeunes, de banlieue, de gauche, écologistes… - outrepassant ainsi leurs cahiers des charges. Et elles soutiennent - via leurs présentateurs, éditorialistes et invités - le candidat à la présidentielle Éric Zemmour (ex-chroniqueurs de l’AP puis de CNews), notamment dans son militantisme anti-AP. L’AP est aussi moins cher, systémique, automatisé, déterritorialisé et désocialisé que les plateformes, et moins addictif, haineux, communautariste, panoptique et égocentré que les réseaux sociaux. 3 F. Marty, G. Tremblay, A.-J. Bizimana, & O. Kane, Le service public médiatique à l’ère numérique, RFSIC, 2021 4 C. Sécail, L’élection présidentielle 2022 vue par Cyril Hanouna, lesfocusdulcp,2022
  • 5. Culturellement, l’AP finance et diffuse largement la création audiovisuelle : environ 600 films/an sur ses antennes (430 pour Arte, sur les 2300 sur la TV numérique gratuite) ; des films davantage inédits que dans le privé gratuit (28% sur France TV et Arte contre 13% dans le privé)5. Ainsi, l’intervention contre-programmatique de l’AP contribue au pluralisme et à la cohésion sociale, freine les effets de formatage et marketing, d’uniformisation et de circularité dus aux stratégies de convergence et de concentration (Pierre Bourdieu) et solidifie la démocratie. LES INJONCTIONS CONTRADICTOIRES L’AP doit faire face à des injonctions contradictoires et évolutives des autorités publiques : demande de créativité et rentabilité ; prise de risque et recherche d’audience ; culture « légitime » et divertissement ; réduction de budget et augmentation des missions ; liberté journalistique et contrôle étatique ; pluralisme de la presse/internet et fusion/fermeture de médias. Un entre-soi élitiste avec des « hommes blancs de plus de 50 ans », de centre-ville, métropolitain, non handicapés, diplômés, CSP+, actifs sont surreprésentés dans les effectifs, l’encadrement et à l’antenne. Ainsi, la proportion des personnes apparaissant à l’écran perçues comme « non-blanches » sur France 2-F2 (12%), France 3-F3 (8,7%) et F5 (9,6%) demeure sous la moyenne générale des chaînes mesurées (15%)6. Mais cela n’a pas empêché la suppression en août 2020 de la chaîne France Ô (±0,6% Part d’audience-PDA) alors qu’elle traitait des outremers, qu’il y a en métropole – où elle était diffusée – 1 M de personnes qui en sont issus et qu’elle pouvait se transformer en chaîne de toutes les cultures mondiales, migrantes et urbaines pour un public français particulièrement hétérogène et multiculturel. L’AP dispose d’un budget d’environ 4,4 Mds pour 17 000 employés grâce à de la publicité (0,4 Mds pour FTV), des subventions, mais surtout les 3,79 Mds de recettes de la redevance appelée contribution à l’AP (CAP)7. C’est supérieur à son concurrent TV direct (2,3 Mds € de chiffre d’affaires pour le groupe TF1 de 3 686 employés) mais inférieur aux AP étrangers équivalents (8 Mds pour ZDF/ARD de 25 000 employés8 et 6 Mds pour BBC de 22 000 employés9), et très inférieur à Netflix (30 Mds de revenus pour 11 300 employés10). Pourtant les autorités demandent à l’AP de faire des économies depuis 20 ans (190 M€ sur la période 2018- 2022 ; une enveloppe de 70 M€ a seulement compensé les pertes liées au confinement covidique de 2020 dans le plan de relance économique de juillet 2020) tout en interdisant la publicité à FTV en soirée en 2009, et en créant de nouvelles chaînes, sites internet, applications... Les conséquences sont sociales. FTV est « en plan social depuis près de 10 ans » pour un « effort de productivité sans précédent » selon sa présidente11. Cela représente une diminution du personnel de « 15% en net », soit 1500 salariés en moins qu’en 2012 « à périmètre constant » qui laisse imaginer les effets pathogènes en termes de souffrance au travail. Les politiques souhaitent rajeunir l’audience de l’AP. En effet, le premier téléphone arrive à 9 ans et 9 mois, et les 4-14 ans ne regardent plus la TV que 0h59 par jour (2h08 en sept. 201012) contre 5h13 pour les plus de 50 ans (4h14 en 2010) et 3h21 (4h14 en 2010) en moyenne en septembre 202113. Pourtant, les parts de FTV dans Gulli – TV pour 6-12 ans - ont été vendues en 2014 à Lagardère Active puis au groupe M6 en 2019 alors qu’elle était/est rentable (1,4% PDA en août 2021). De même, le ministre de l’Economie a fait fermer la TV France 4 en août 2021 alors que l’audience des plus de 50 ans y représentait 35% contre 63% pour FTV en 201914. Son utilisation comme établissement d’enseignement de substitution pendant le confinement avait freiné sa fermeture. Elle aurait pu devenir une TV d’éducation populaire (formation, expérimentation, recherche) en journée et de « culture jeune » le soir. FTV a dû segmenter et plateformiser son offre : sites internet pour enfants (Okoo), éducatif (Lumni), de fictions et documentaires pour jeunes (Slash), d’un concurrent de Neflix (Salto), infos pour jeunes européens (Entr). FTV a seulement obtenu une prolongation du canal de F4 pour une double chaine : Okoo en journée et Culturebox (chaine culturelle créée début 2021 5 CNC, La diffusion des films à la télévision en 2019, 2020 6 CSA, Baromètre de la diversité de la société française, 2020 7 J.-R., Hugonet, Avis, Sénat, 2020 8 N. Harbusch,Gebühren 2020. 8 Milliarden Euro für ARD und ZDF, bild.de, 16/6/2021 9 BBC, Group Annual Report and Accounts,2020/21 10 Netflix, zonebourse.com, 2021 11 Assemblée nationale, Audition de Delphine Ernotte, 2021 12 Médiamat annuel, Médiamétrie, 2010 13 Médiamat mensuel, Médiamétrie, sept 2021 14 CSA, Rapport sur l’exécution du cahier des charges de France Télévisions, 2021
  • 6. pour le confinement sur le canal de France Ô) en soirée. Or le rajeunissement est possible puisqu’Arte, dont 1,8 Mds de vidéos ont été vues en 2021 et qui a lancé la chaîne de TV connectée et hertzienne 77, a doublé son audience sur les 15-34 ans15. En 2016, une TV d’info en continu publique - franceinfo - a été créée pour diversifier le traitement de l’info et concurrencer l’« hégémonie culturelle »16 des nombreuses TV d’info commerciales. Pourtant, il existe une radio éponyme depuis 1987 et plusieurs TV/radios internationales d’info en continu - RFI, France 24 et MCD - qui ont en moyenne 251,1 M de « contacts » (linéaires et délinéaires) dans le monde chaque semaine en 2020. De plus, sur demande de l’Etat17, il y a eu fusion des rédactions nationales F2 et F3 alors que les journalistes de F3 ont des origines sociales, géographiques et éducatives plus diversifiées et moins élitistes et bénéficiaient de davantage de liberté car F3 est moins l’objet d’enjeux. Au final, il y a, à l’opposé des dynamiques pluralistes et émancipatrices sur internet, un risque d’homogénéisation des points de vue via des journalistes interchangeables sous prétexte de convergence des médias et de nécessité économique, d’objectifs de neutralité et d’efficacité. Seuls 2% des sujets diffusés par franceinfo font référence au climat, soit le double du journal de 20h de F2 mais autant qu’à la TV commerciale BFMTV (2,9% PDA)18. Un sondage auprès du public de l’AP (127 000 personnes) a souligné un manque de proximité avec le public, de parole citoyenne, de débat et de diversité d’opinion en ce qui concerne RF19, mais cela n’a pas empêché le début de fusion des médias en partie régionaux F3 et France Bleu. LA PRESIDENTIELLE Emmanuel Macron a débuté son mandat en qualifiant l’AP de « honte de la République » à cause de « la mauvaise gestion, le gaspillage, la médiocrité des programmes et des contenus, les relations malsaines entre l’audiovisuel et ses partenaires extérieurs (animateurs, producteurs, etc) »20 : les dirigeants de FTV Bastien Millot et Patrick de Carolis ont été condamnés à 5 mois d’emprisonnement pour des contrats entachés de favoritisme. D’où l’annonce, par la suite, d’une grande réforme de l’AP pour constituer une « BBC à la française » : création d’une holding « France Médias » pour uniformiser la gestion d’un AP éclaté et mutualiser les coûts ; –la modernisation de l’autorité administrative régulatrice pour intervenir dans le numérique ; réforme de la publicité (géolocalisée, sur les films, pendant les films) et de la CAP (renvoyée à 2023) pour compenser les diminutions de recettes… Mais compte-tenu du souvenir de l’ORTF gaullienne, des nombreuses manifestations qui ont émaillé le mandat et à l’approche de la présidentielle de 2022, l’exécutif a préféré temporiser et faire voter des petites réformes plus discrètes. Le gouvernement suit donc la « position intermédiaire » du think tank de centre gauche Terra Nova qui propose des convergences et coordinations des moyens à propos de projets « concrets, pragmatiques et réalistes » grâce au soutien d’un État à la fois tutelle, financeur et stratège21. Ainsi, la principale réforme a été celle de l’autorité régulatrice. Depuis 2022, elle s’appelle Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) du fait de la fusion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi). Elle comprend, pour des mandats de 6 ans, 9 conseillers désignés par les principales autorités politiques (7 sont issus du CSA dont le président qui préside à nouveau) et juridictionnelles (2 viennent de l’Hadopi et sont issus du Conseil d’Etat et de la Cour de cassation) (cf le graphique ci-dessus) et 355 collaborateurs pour un budget de 46,6 M€ en 2022, contre 37,4 M€ pour le CSA et 8,2 M€ pour Hadopi en 2021. Elle est responsable de la régulation (conventions avec les radios, TV et plateformes), de l’évaluation (représentativité des acteurs et des paroles politiques et citoyennes) et des sanctions (contre la désinformation, la haine en ligne, le piratage, la pornographie via des listes noires, blocages, retraits ou déférencements). Ses missions s’articulent autour de 6 axes : la promotion et la protection de la création ; la régulation technique et économique ; l’accompagnement des publics ; l’observation et l’analyse ; le pluralisme et la cohésion sociale ; la régulation des plates-formes en ligne et réseaux sociaux. 15 T.-D. Nguyen,Le lifting payant d’Arte pour séduire le jeune public, Challenges.fr, 3/2/2022 16 A. Gramsci, Cahiers de prison, Gallimard, 2021 17 Cour des comptes, Rapport, 2016 18 Reporter d’espoirs, Comment les médias traitent-ils du changement climatique ?, 2020 19 Ma Télé Ma Radio Demain, Institut Ipsos, RF et FTV, 2018 20 L’Express, 5/12/2017 21 L.-C. Trebuchet, Audiovisuel public : tous ensemble vers le numérique (acte 2), Terra Nova, 2020
  • 7. Globalement la droite a tendance à demander à l’AP de faire des économies tout en se numérisant/modernisant pour concurrencer les plateformes numériques internationales. Elle veut supprimer la CAP (138€ par an par foyer en métropole et 88€ en Outre-mer) que les représentants d’Emmanuel Macron jugent « archaïque » et « injuste » car elle ne concerne que certains possesseurs de TV et dispositifs assimilés (d’où l’expression de redevance TV qui est issue d’une redevance radio de 1933). Il s’agirait pour le président-candidat de donner du pouvoir d’achat aux contribuables dans la continuité de la suppression en 2019 de la taxe d’habitation (723€ par an par foyer en moyenne) qui était prélevée simultanément. La piste d’« un budget voté pour cinq ans » est évoquée22 mais elle n’éviterait par de rendre l’AP davantage dépendant de l’exécutif qui imposerait son budget lors du vote au Parlement. La dimension pédagogique d’un budget clairement identifié, globalement pérenne et relativement autonome pour des médias en théorie indépendants par rapport aux pouvoirs publics et aux annonceurs, et alternatifs aux médias commerciaux serait davantage altérée. De son côté, Valérie Pécresse, la candidate du parti libéral-conservateur Les Républicains, a estimé que la privatisation n’était pas un « tabou » alors que cela affaiblirait l’ensemble des médias commerciaux à cause de la course aux annonceurs : TF1 et M6, qui veulent fusionner, se positionnent contre23. A l’extrême-droite, Marine Le Pen, candidate du Rassemblement National (au 2nd tour de la présidentielle 2017), souhaite la privatisation de l’AP24 à l’exception de « L’audiovisuel d’outre-mer par exemple, comme la voix de la France dans le monde. Arte ne sera pas concerné. » Ni l’Institut national de l’audiovisuel-Ina (archives). Elle s’appuie sur deux arguments principaux. Premièrement le pouvoir d’achat : « c’est immédiatement 2,8 Mds de [CAP qui seraient rendus] aux Français ». Le second est lié à la maturation démocratique de l’audiovisuel où les médias privés seraient suffisants. Éric Zemmour - qui concurrence le RN à sa droite et accentue la forte polarisation actuelle - ajoute l’argument d’un manque de neutralité de l’AP où il s’estime censuré et combattu pour ne garder dans le giron public que France 5, franceinfo, RFI, TV5 Monde, France Culture, Arte et l’Ina. Comme dans certains pays dirigés par des conservateurs (Pologne, Hongrie, Autriche), l’AP est accusé de propagande gauchiste (de fait, l’AP est jugé plus à gauche que dans des démocraties européennes similaires25), à l’image de la radio France Inter dont les dirigeants assument, avec un succès d’audience, une approche progressiste particulièrement incarnée par ses chroniqueurs-humoristes. A l’origine, cette proposition est inspirée de la droite libérale. A l’image d’une note de la Fondapol26 - proche du parti conservateur-libéral Les Républicains - où est proposé d’appliquer le principe de subsidiarité pour ne faire intervenir l’AP que sur l’info - face aux « intérêts privés » - et la culture « élitiste » - face au « formatage » et « nivellement » liés à la publicité. De leur côté, les partis politiques du centre gauche aux anticapitalistes - divisés et faibles – s’opposent à ce travail d’ubérisation de l’AP sans proposer un projet alternatif précis. Ils se focalisent sur le secteur privé, notamment les effets de concentration sur le pluralisme. A l’image de la possible fusion des groupes TF1 et M6, soutenue par l’exécutif pour contrer les publiphages et omnipotents GAFAM-NATU-BATX. D’où la volonté de faire voter une loi anti-concentration par le parti de Jean-Luc Mélenchon - 3ème à la présidentielle 2017 -, le souhait d’un renforcement du statut juridique des rédactions et l’introduction d’une charte déontologique dans la convention collective pour les protéger des actionnaires. D’où l’objectif – non précisé - de maintenir un service public « fort » et « indépendant » pour les écologistes (EE/LV). Ces derniers – en ascension électorale - veulent augmenter le financement des médias locaux, la représentation des femmes à l’antenne et diminuer la publicité, notamment pour des produits climaticides. Les socialistes (PS) - en difficulté électorale nationale - proposent, en plus, un rôle important de l’AP dans l’éducation et le développement d’une culture scientifique. RECOMMANDATIONS POUR DEMOCRATISER Dans un pays classé 34è par Reporters Sans Frontières et 23è par Transparency International, l’autonomie de l’AP a été demandée, annoncée, mais jamais obtenue. L’AP est restée un outil sous influence politique. En témoignent les interventions des multiples institutions (Président de la République, Cour des comptes, Parlement, ministères de la Culture, de l’Économie, Arcom) : organisation (lois), régulation (Arcom), objectifs 22 Suppression de la redevance : Attal écarte une mise en danger de l’audiovisuel public, Le Figaro, 8/3/2022 23 Présidentielle 2022 : faut-il supprimer la redevance audiovisuelle ?, Les Echos, 19/1/22 24 Interview, Le Figaro, 8/9/2021 25 Reuters Institute Report, 2019 26 O. Babeau, Refonder l’Audiovisuel Public, Fondapol, 2016
  • 8. (cahiers des charges, contrats d’objectifs et de moyens de 5 ans depuis 2000 et de 2 ans depuis 2021), budget, nomination des principaux dirigeants (vial’Arcom) désigne, évaluation (auditions, avis, rapports). Les effets éditoriaux sont inévitables par le jeu des recrutements, carrières et hiérarchies. Même si la censure est plus « invisible »27 qu’à l’époque gaullienne où le ministre de l’Information disposait d’un bureau au sommet de la maison de la radio, en contradiction avec programme du Conseil national de la résistance de 1944 qui avait demandé son « indépendance à l’égard de l’État, des puissances d’argent et des influences étrangères ». Le refus de voir l’AP échapper aux institutions pousse les citoyens à s’échapper de l’AP. Pourtant, au-delà de l’enrichissement info-culturel personnel via l’écoute de ses programmes, l’AP peut aider davantage à l’empowerment des citoyens déjà très actifs. De même en politique où la démocratie participative a pris de l’ampleur : conventions, budgets, primaires… Or, la possibilité d’interagir avec l’AP est devenue une condition de son succès et ne peut plus se limiter aux sondages, commentaires et zapping. Cela demande un travail d’horizontalisation de l’AP pour le rendre vraiment « public » (Jurgen Habermas) ou « commun » (Elinor Ostrom), c’est-à-dire citoyen. Cela passe par la création d’espaces phygitaux dont dispose par exemple la « maison de la radio et de la musique » qui rénove ses 100 000 m2. L’AP étant financé à ¾ par la CAP et regardé par les citoyens, il doit être au service de ces derniers via un travail de démocratisation culturelle – tant souhaitée depuis l’écrivain-ministre André Malraux - et informationnelle – redoutée par les « gate keepers » politiques – plutôt que de se focaliser sur les questions économique et numériques :  Créativité : Créer au sein de l’AP un incubateur artistique grâce à des financements et du matériel, des ressources internes (mécénat de compétences des salariés) et externes (vidéastes, influenceurs, artistes, informaticiens, entrepreneurs, gamers, makers, streamers… sélectionnés sur concours public) et des partenariats avec des établissements culturels, d’enseignement et de recherche, et faire intervenir cet écosystème : expérimentation, écriture, production, tests, programmation, animation, distribution…  Information : Créer au sein de l’AP un laboratoire de critique métamédiatique et déontologique, d’investigation et de médiation (le rôle actuel des médiateurs de l’AP étant insuffisant), d’éducation aux médias et au codage grâce à des financements et du matériel, à des partenariats avec l’AFP et les établissements d’enseignement et de recherche, et la participation d’associatifs, ONG, syndicalistes, fact checkers, data scientists, infographistes, hackers, militants du « libre » (open gov, data, access, source, science, wikipédiens), lanceurs d’alerte, médiateurs, documentaristes, journalistes indépendants et de l’AP (dont il faut protéger davantage le statut et la diversité des rédactions).  International : En complément d’Euronews ou du nouveau média numérique Entr, faire d’Arte un média linéaire et délinéaire (VOD, SVOD, AVOD) mondial de référence grâce à l’ensemble des productions (fiction, art, reportage) européennes (et au-delà). Cela demande d’augmenter la part de production interne de l’AP pour faciliter leur diffusion au niveau des droits d’auteur.  Organisation : En s’inspirant du modèle associatif, modifier le processus de sélection des dirigeants de l’AP en donnant la possibilité de désignation à des représentants du personnel, de l’audience, des partis politiques d’opposition… Les candidats devraient faire campagne puis rendre des comptes régulièrement devant ces représentants lors d’un mandat unique de 5 ans comprenant un budget pour 5 ans et un objectif de transparence : salaires, budgets, audiences, données numériques, algorithmes, choix stratégiques, RH, programmatiques, éditoriaux et de gouvernance.  Inclusion : Faire en sorte que les salariés - a fortiori à l’antenne - mais aussi les invités et les personnes dont il est question soient équitablement représentatifs de la population : origine sociale et géographique, couleur de peau, genre, âge, métier, santé, langue, appartenance idéologique, politique et syndicale.  Financement : Donner à l’AP les moyens économiques équivalents à ceux de pays similaires, notamment grâce à : 1) un fonds alimenté par une taxe sur le CA des acteurs du numérique (ott, plateformes, moteurs de recherche et réseaux sociaux) diffusant de l’information de journalistes professionnels ; 2) une modification de l’assiette et du montant de la CAP : 0€/an pour les exemptés habituels, 88 pour les ultramarins, les possesseurs de terminaux numériques et radios, 138 pour les possesseurs de TV (contre 335 dans tout foyer suisse en 2021) ; 3) une subvention. 27 P. Durand, Médiamorphoses, PUL, 2019
  • 9. Dr Sebastien Poulain (laboratoire MICA, Université Bordeaux Montagne) a publié La radio du futur (Cahiers d’histoire de la radiodiffusion, 2017), L’audiovisuel public est-il vraiment public ? (The Conversation, 2021) et Les radios locales (avec Thierry Lefebvre, INA/L’Harmattan, 2021).