1. DÉCO
75
UN DÉCOR BIBLIQUE
Les chambres
dominent le paysage
escarpé et s’ouvrent de
plain-pied sur un
ancien chemin
de ronde (ci-dessous).
Saveurs bio sur la table
du petit déjeuner
au style monastique.
FERRONNERIE D’ART
À votre arrivée,
une clé digne
d’un château fort
ou d’un monastère
vous est confiée.
Chaque détail a été
pensé en accord avec
l’intégrité du site.
ACCROCHÉ
À LA FALAISE
Le village de Matera,
dans la Basilicate,
se dresse hors du
monde et du temps.
Un univers qui
a inspiré Pasolini,
Carlo Levi,
Cartier-Bresson...
SÉJOURNER DANS UNE SUITE-CAVERNE NÉOLITHIQUE, AU LUXE INSPIRÉ, ET S’ÉVEILLER AU CŒUR
D’UN SITE À LA BEAUTÉ TROUBLANTE... C’EST CE QUE PROPOSE MARGARET BERG, QUI A RÉHABILITÉ
D’ANCIENNES GROTTES DU VILLAGE TROGLODYTE POUR EN FAIRE UN HÔTEL, LE SASSI DI MATERA.
CAP AU SUD, À LA FRONTIÈRE DES POUILLES, POUR UNE DÉCONNEXION TOTALE.
A
l’origine, des grottes laissées à l’abandon,
puis classées au patrimoine mondial de
l’Unesco. Aujourd’hui, un hôtel inclassable,
où le luxe arbore un nouveau visage. Ce
lieu, on le doit à Margaret Berg, pasionaria
berlinoise tombée amoureuse de Matera,
où une fugue l’a menée quand elle avait 15 ans. Une at-
tirance irrésistible pour ce sud des extrêmes, au paysage
rugueux et solaire comme un film de Pasolini – le réali-
sateur y a tourné une de ses œuvres mythiques, « l’Évan-
gile selon saint Matthieu ». Ni Interpol ni ses parents n’ont
eu raison de sa détermination, et, vingt-cinq ans plus tard,
▼
PHOTOSMANUELZUBLENA
en Italie, une halte
magique à Matera
2. Daniele n’en est pas à son premier coup de
maître. Il débarque à Matera, sonde l’ampleur
gigantesque des travaux et accepte le pari de
créer un hôtel d’un genre nouveau : « Nous vou-
lons faire vivre à nos hôtes une émotion forte,
intense, à travers un lieu hors normes, mais qui
puisse aussi offrir le confort d’un hôtel de luxe. »
Finis le tout design et le style standardisé des
« concept-hotels ». Ici, aucune concession n’a
été faite à la beauté originelle du site. On
s’éclaire à la chandelle, et la lumière artifi-
cielle est subtilement nuancée en un délicat clair-obs-
cur... Les lits se lovent dans les courbes de la pierre, et le
raffinement du linge en lin rappelle les trousseaux d’au-
trefois. Une simplicité étudiée, proche du dénuement, en
parfaite osmose avec l’architecture monastique et l’envi-
ronnement minéral. Les dix-huit chambres s’ouvrent sur
un paysage escarpé, beau à couper le souffle. Difficile de
rester insensible, surtout quand on sait que Henri Cartier-
Bresson et Carlo Levi, l’auteur du « Christ s’est arrêté à
Eboli », ont, eux aussi, vibré pour Matera. SABINE BOUVET
Margaret est toujours là, animée par la passion
de ceux qui ont l’audace de forcer le destin.
Et il fallait un tempérament comme le sien
pour s’attaquer aux grottes de Matera : « In-
lassablement, je venais peindre dans ces
grottes, jusqu’au jour où j’ai eu l’idée folle de
les réhabiliter pour en faire un hôtel pas
comme les autres. » Laissant derrière elle les
sceptiques la taxant d’illuminée, elle se met en
quête d’un partenaire. Les grands noms solli-
cités de l’univers de la mode, de l’architecture
et du design – Armani, Prada, Renzo Piano, Antonio Citterio,
Matteo Thun... ne se laissent pas convaincre. Peu importe,
Margaret ne lâche pas l’affaire – elle en a vu d’autres – et
finit par rencontrer l’homme de la situation grâce à un ar-
ticle de presse titrant « L’homme qui sauve des villages ».
Lui, c’est Daniele Kihlgren, un Italo-Suédois de la même
trempe que Margaret, sorte de mécène éclairé qui em-
brasse les causes perdues comme on embrasse une reli-
gion. Auteur d’un hôtel conçu sur le même mode – l’Albergo
Diffuso, à Santo Stefano di Sessanio, dans les Abruzzes –,
76
PHOTOSMANUELZUBLENA
DE L’OMBRE
À LA LUMIÈRE
Pour Margaret Berg,
dénuement et
raffinement vont de
pair. Toutes les
chambres troglodytes
se déclinent sur le
même mode : pierre
brute, linge de lit
en lin et éclairage
à la chandelle.
Margaret Berg.
ICI, DANS CETTE AUTRE ITALIE, ON PLONGE DANS UNE AUSTÉRITÉ ÉBLOUISSANTE.
UNE SCÉNOGRAPHIE SUR MESURE BELLE COMME UN TABLEAU DU CARAVAGE.
L’HARMONIE DES VOÛTES
Dans les chambres, les plafonds
cathédrale ne laissent pas
insensibles. On est loin des codes
des hôtels contemporains.
▼
3. PHOTOSMANUELZUBLENA
DÉCO
LA NOUVELLE TENDANCE “LIFESTYLE”? LE LUXE BRUT. AUTREMENT DIT,
LA SIMPLICITÉ DANS LE RAFFINEMENT, L’IMMERSION DANS L’AUTHENTIQUE...
UNE SENSUALITÉ
À FLEUR DE ROCHE
L’hôtel privilégie
les produits naturels,
comme les chapelets
de savons et les huiles
essentielles présentées
dans des flacons
anciens.
CARNET DE VOYAGE
ALBERGO DIFFUSO SASSI DI MATERA,
avec Autrement l’Italie, 660 € par
personne 2 nuits en chambre double,
vol aller-retour Paris-Bari et location
de voiture 3 jours (rens. sur www.
autrement-italie.fr et 01.44.41.69.95).
À partir de 188 € la semaine pour
une location de voiture avec
Autoescape(rens.surwww.autoescape.
com). Pour info, un chauffeur et
un guide privé sont à votre disposition
pour découvrir les églises rupestres,
assister à une messe orthodoxe à San
Nicola di Bari, explorer les plages...
le “rough luxe”...
C’EST QUOI? En pleine crise, le « luxe à la dure » – mix entre service étoilé
et look brut de décoffrage – est devenu hype. Le designer Rabih Hage a lancé fin 2008
ce concept choc entre rusticité et dorures. Dans son hôtel Rough Luxe, the place
to be à Londres, peintures écaillées et meubles déglingués côtoient beau linge et œuvres
d’art. Preuve que rien n’est parfait... même pas le luxe!
POURQUOI ON AIME? Plus fun que les boutiques-hôtels, ce concept anti-bling-bling
so authentique ne prive pas de certains caprices. Sa devise? « Moitié brut, moitié luxe. »
OÙ? Pourquoi ne pas se louer une île rustico-chic en Islande*? À Milan, l’Antica
Locanda Solferino, chouchou des tops, mêle confort vieillot et service too much! Bref,
en pleine nature ou à la ville, on adhère au « rough luxe »! ÉLÉONORE KERN
*Rens. sur www.inishturkbeg.com