3. ISBN: 2-9505434-0-5
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4. Élections législatives gabonaises
INTRODUCTION
L'année 90 aura été un tournant de l'histoire de l’Afrique
noire.
Deux défis, distincts et liés, sont à relever par les africains. Le
premier est la construction d'un état de droit par l'application des
principes universels de la démocratie dans la vie nationale. Le deuxième
est la recherche d’une meilleure voie de développement économique et
sociale à l’aide de l'outil démocratique.
Le Gabon, comme plusieurs pays d’Afrique noire connait
ainsi de nouvelles expériences de vie sociale et politique marquées du
sceau du pluralisme idéologique et politique.
Les dernières élections législatives de Septembre-Octobre 90
constituent en cela un spectre complexe de réflexion sociale qui
nécessite un déchiffrage approfondi.
Ce petit essai, qui vise par ailleurs à secouer les torpeurs
d’antan, tentera en quelques tableaux et commentaires de commencer le
décryptage de ces élections législatives, véritable miroir de la société
gabonaise.
Mon vœu est que d’autres essais plus argumentés soient
produits avec évidemment comme objectif d’apporter quelques
réponses fussent-elles partielles sur les multiples difficultés
d’interprétation de notre spectre social et politique gabonais. En d'autres
5
5. Élections législatives gabonaises
termes, que tous ensemble, nous puissions contribuer à la levée des
obstacles qui se dressent sur notre longue marche vers la démocratie et
un développement homogène et durable de la société gabonaise.
Je présente mes excuses au lecteur dès maintenant pour les
erreurs éventuels qu'il trouverait dans les tableaux chiffrés, bien que nos
sources soient celles du journal l’Union, l’organe de presse de l'État.
Toute la presse nationale, indépendante et étatique a été
unanime pour reconnaître après le 16 Septembre que l’organisation de
ces élections législatives n’a pas été un modèle du genre. L'impossibilité
d’accéder aux listes électorales, la non communication du nombre de
votants et d'abstentions après deux mois d'annonce des résultats
globaux, sont des preuves irréfutables de l’existence de zones d’ombre
contraires à la glasnost (transparence) souhaitée et expliquent donc la
présence quasi-inévitable d’erreur.
En outre certains recours entraîneront probablement quelques
corrections sur les résultats électoraux.
6
6. Élections législatives gabonaises
A.- DÊGRÉ D’EXPRESSION PLURALISTE
AU GABON
Ce paramètre est un indice de mesure qualitative de la vie
démocratique sur le territoire national. Plus le nombre de candidats en
compétition démocratique est élevé dans un lieu géographique donné,
plus grandes sont les libertés d’association et d’expression dans ce
lieu.
A.1. Degré d’expression pluraliste par province
Nombre de Nombre Degré de
Province candidats de sièges pluralisme
Estuaire 120 18 6,7 (7)
Haut-Ogooué 32 17 1,9 (2)
Moyen-Ogooué 58 9 6,4 (6)
Ngounié 65 17 3,8 (4)
Nyanga 56 10 5,6 (6)
Ogooué-Ivindo 28 9 3,1 (3)
Ogooué-Lolo 25 10 2,5 (3)
Ogooué- 59 13 4,5 (5)
Maritime
Woleu Ntem 87 17 5,1 (5)
Tableau 1. Degré d’expression pluraliste dans chaque province
7
7. Élections législatives gabonaises
Remarque
N.B. : Pour faciliter la compréhension, nous avons mis entre
parenthèse le chiffre arrondi qui donne ainsi le nombre de candidats en
compétition pour un siège. Ce tableau a été établi sut la base des listes
de candidats parues dans le n° spécial du journal l'Union du 13
Septembre. Aux 520 candidats annoncés d' autres se sont ajoutés. Le
problème se complique encore plus après l’annulation partielle du
scrutin du 16 Septembre. Malgré donc certaines erreurs inévitables en-
tre le scrutin du 13 Septembre et celui du 21 Octobre les moyennes
calculées pour chaque province varient peu.
A.2 - Commentaires.
A.2. a Niveau d’expression pluraliste dans chaque province.
• On remarque dans la quasi-totalité des provinces que trois
candidats au moins entrent en compétition pour l’obtention d'un siège;
avec des moyennes de 7 et 6 candidats pour un siège dans les provinces
de l'Estuaire et du Moyen-Ogooué. Il faut signaler que le record
d'expression pluraliste a été battu dans la compétition pour le 2ème
siège dans le 3ème arrondissement (Akébé Plaine...) de la capitale,
Libreville avec 14 candidats. Notons que la moyenne nationale
d'expression pluraliste étant de 4 candidats pour un siège au scrutin du
13 Septembre, 3 provinces sont en dessous de cette moyenne nationale
d’expression pluraliste :
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8. Élections législatives gabonaises
le Haut-Ogooué, l’Ogooué-Lolo et L'Ogooué-Ivindo (tableau 1). Cette
moyenne nationale monte à 6 candidats pour un siège au scrutin du 21
Octobre (380 candidats divisé par les 62 sièges à pourvoir).
A.2.b - A propos du découpage électoral.
*Ce tableau révèle des non-sens sur le découpage électoral
effectué à l’occasion de cette consultation électorale. L’indice de
population qui doit constituer le critère de répartition des sièges a été
mis de côté. Un des non-sens les plus flagrants est celui d'attribuer à
peu près le même nombre de sièges aux provinces de l'Estuaire
(Libreville), du Woleu-Ntem (Oyem) de la Ngounié Mouila) et du
Haut-Ogooué (Franceville). Toutes les sources démographiques, malgré
leur disparité s’accordent au moins à reconnaître que l’exode rural a
entraîné ces dernières années, une concentration humaine incontrôlée
dans nos grandes capitales africaines. Ainsi Libreville regroupe près du
tiers de la population du Gabon. Environ 300 000 âmes vivent dans la
capitale si l'on considère le chiffre d'un million d’habitants.
Il est donc anormal que les 4 provinces précitées aient
quasiment le même nombre de sièges à l’Assemblée nationale. Cette
anomalie démontre encore une fois que la rationalité n’a pas prévalu
dans ce découpage électoral.
Il faut Vraiment souhaiter que ce facteur démographique soit
mieux apprécié dans l’avenir proche de notre pays, non pas tant pour
des considérations électorales, mais pour l'objectif du développement
national.
9
9. Élections législatives gabonaises
L'aspect persuasif du degré d'expression pluraliste, qui a
permis de mesurer la volonté indéniable des partis politiques de jouer le
jeu démocratique sur tout le territoire national, ne permet pas d' évaluer
quantitativement leurs efforts respectifs. Le score de chaque parti dans
chacune des provinces du Gabon nous permettra de mieux mesurer leur
degré d'implantation réel, leur représentativité nationale.
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10. Élections législatives gabonaises
B. - REPRÉSENTATIVITÉ NATIONALE DES PARTIS
B1. Score national de chaque parti dans les provinces
EST HO MO NG NY OI OL OM WN Total
PDG 9 17 4 9 4 6 9 4 2 64
MRB 5 0 1 0 1 3 1 1 7 19
PGP 4 0 1 1 4 0 0 8 0 18
MOR 0 0 1 0 0 0 0 0 6 7
APSG 0 0 0 4 0 0 0 0 2 6
USG 0 0 2 2 0 0 0 0 0 4
CRP 0 0 0 1 0 0 0 0 0 1
UD 0 0 0 0 1 0 0 0 0 1
Sièges 18 17 9 17 10 9 10 13 17 120
Tableau 2. Score des élus de chaque parti dans les neuf provinces du
Gabon.
EST: Estuaire; HO: Haut-Ogooué; MO: Moyen-Ogooué;
NG: Ngounié; NY: Nyanga; OI: Ogooué-Ivindo;
OL: Ogooué-Lolo; OM: Ogooué-Maritime; WN: Woleu-Ntem.
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11. Élections législatives gabonaises
B.2. Commentaires
B.2.a. Remarques
Ce tableau ne donne pas une photographie tout à fait exacte
des partis à cause du boycott du 3ème tour de scrutin, du 28 Octobre
par le MORENA des Bûcherons (MRB). Ce boycott a favorisé
plusieurs partis. Par exemple, il est vraisemblable que les 2 respon-
sables du MRB, le Père Mba Abessolo et son lieutenant Mba Jules,
avec plus de 49 % de voix chacun auraient certainement gagné contre
leurs concurrents respectifs du PDG et du PGP, qui finalement l'ont
remporté par défaut. Quelques projections après le premier tour du 21
Octobre donnaient une bonne trentaine de sièges au parti des
Bûcherons.
*Les nombreuses irrégularités dénoncées lors de cette consul-
tation peuvent également remettre en cause la valeur de ce tableau des
résultats.
Toutefois, il nous a semblé pourtant nécessaire de mener cette
étude de comportement électoral en laissant le soin aux lecteurs
d’apporter les rectifications qui s’imposent.
B.2.b. Score de chaque parti politique.
*Le Parti démocratique gabonais, le PDG, et ses 22 ans
d’hégémonie sociale et politique, garde une implantation nationale
indéniable avec ses 64 élus; notamment dans la partie Sud-Est du
Gabon (Haut-Ogooué, Ogooué-Lolo et Ogooué-Ivindo) où le PDG
obtient plus de la moitié de ses sièges dans ces 3 provinces (33 sur 64).
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12. Élections législatives gabonaises
Cette répartition géographique des élus du PDG entraîne un sérieux
déséquilibre de son implantation nationale avec un déficit global dans
l'ensemble Ouest du Gabon et notamment dans la zone maritime du
Gabon. (voir carte en annexe).
Les irrégularités dénoncées ici et là par la presse nationale ou
le Comité de suivi des Actes de la Conférence nationale suffisent-elles
pour expliquer l'hégémonie géographique du PDG dans le Sud-Est?
Quelles sont les parts respectives de la contrainte, ou de l'adhésion dans
ce comportement électoral?
*Le MORENA des Bûcherons se retrouve finalement à
l'Assemblée nationale avec 19 députés, 1e PDG lui ayant ravi un élu
après les élections. Toutefois le faible score de ce parti est la
conséquence de l'appel surprenant au boycott de son leaderssimo, le
Père Paul Mba Abesssolo. Malgré l’onde de choc que ce boycott a
provoqué dans le parti, son implantation nationale est évidente puisque
ce dernier obtient,
malgré tout, des élus dans toutes les provinces, à l’exception du Haut-
Ogooué et de Ngounié.
*Le Parti gabonais du progrès, le PGP, asseoit
confortablement son assise dans l’Ogooué-Maritime avec 8 sièges sur
les 13. Il réussi de bons scores également dans la Nyanga (4 élus) et
dans l'Estuaire (4 élus). Mais son implantation nationale reste
incomplète.
* Le Mouvement de redressement national, le MORENA dit
fondamental ou originel fait un bon score dans la seule province du
Woleu-Ntem avec 6 é1us sur les 7 au total. Les multiples scissions
qu’a connu ce mouvement, qui pourtant a été le premier à poser ouverte-
13
13. Élections législatives gabonaises
ment la revendication du multipartisme en 1981 sur le sol national lui
valent le déficit électoral actuel.
* L’Association pour le socialisme au Gabon, l’APSG, et ses
4 élus dans la Ngounié et ses 2 élus dans le Woleu-Ntem, souffre
également d'un grave handicap électoral national.
*L’Union socialiste gabonaise, l’UDSG, marque quelques
points dans 2 provinces avec 2 élus dans 1e Moyen-Ogooué et 2 élus
dans la Ngounié.
*Le Cercle pour le renouveau et le progrès (CRP) et l’Union
démocratique (UD) entrent dans l'assemblée nationale avec chacun un
député.
B.2.c. Présence et implantation réelle des partis.
Il est évident que le nombre d’élus à lui seul, ne donne pas
une idée précise de la. représentativité d’un parti ou de sort degré
d'implantation réel. Les dirigeants politiques gabonais ont fait preuve de
maturité par leur volonté de présenter des candidats de leur parti sur tout
le territoire. Mais le tableau(3) bien que qualitatif, donne des indications
plus fiables sur la représentativité (ou le degré réel d'implantation) na-
tionale des partis politiques. Au nombre d’élus, ce tableau(3) tient
compte aussi du nombre de ballottages c’est-à-dire. du nombre de fois
où un parti vient en 2ème position après le 1er tour de scrutin. La
lecture des pourcentages recueillis par les partis politiques montre en
effet que les 2
14
14. Élections législatives gabonaises
premiers partis oui se retrouvent en compétition au 2e tour sont
dominants dans la circonscription électorale concernée.
EST HO MO NG NY OI OL OM WN
PDG *** *** ** *** ** *** *** ** **
MRB *** * * ** * ** * ** ***
PGP *** 0 ** * *** 0 * *** *
MOR * 0 * 0 0 0 * 0 ***
APSG 0 0 0 *** 0 0 0 0 *
USG 0 0 ** 0 0 0 0 0 0
Tableau 3. Degré d’implantation réel des partis politiques.
(***) bonne implantation;
(**) moyenne implantation;
(*) faible implantation;
(0) implantation quasi-nulle.
15
15. Élections législatives gabonaises
Commentaires
En regroupant les bonnes (3 étoiles) et moyennes (2 étoiles)
implantations de chaque parti, on obtient ainsi une mesure qualitative de
son degré d’implantation nationale réel. À l’inverse et on considérera
qu’un parti faiblement représentatif (1 étoile), ou d'implantation quasi-
nulle (0 étoile) n'est pas réellement implanté.
- Ainsi le PDG a une implantation réelle dans les 9 provinces.
- Le MRB n’est réellement implanté que dans 5 provinces,
dont le Woleu-Ntem l'Estuaire et le Moyen-Ogooué, l’Ogooué-Ivindo
et l’Ogooué-Maritime. Dans cette dernière même si le MRB n'obtient
qu'un élu il arrive plusieurs fois en 2ème position.
- Le PGP réussit à s’implanter solidement dans 4 provinces
dont l'Ogooué-Maritime, l’Estuaire, la Nyanga et le Moyen-Ogooué.
- Le MORENA fondamental ne s’implante sérieusement que
dans la seule province du Woleu-Ntem.
- L'APSG s'implante correctement dans la Ngounié.
-L’USG s’implante moyennement dans le Moyen-Ogooué et
la Ngounié mais n'a pas de véritable point d’ancrage électoral. Grâce à
ce tableau modulé, les poids électoraux de chaque parti sur l’ensemble
du territoire apparaissent plus clairement.
Ces tableaux (2) et (3) rnontrent donc avec netteté que 3 partis
se détachent grâce à leur représentativité nationale et le nombre de leurs
16
16. Élections législatives gabonaises
élus: le PDG, les Bûcherons, et le PGP. Toutefois de par son
implantation incomplète, le PGP ne peut prétendre à des ambitions
nationales qu’en comptant sur ses alliés du FUAPO que sont le
MORENA fondamental et l'APSG.
C. - DE LA CLASSIFICATION PDG/OPPOSITION.
Certains analystes ont rapidement conclu que le PDG gagnait
d'une courte tête ces élections législatives avec 64 élus face à
l'opposition qui fait un score honorable avec 56 élus. En pourcentage le
PDG et ses alliés indépendants obtiennent 53%. des sièges, alors que
l'opposition enregistre 47 % des sièges. Une question se pose
néanmoins dans cette manière de voir. Ces deux forces politiques
constituent-elles des forces politiques unies? et sont-elles vraiment en
opposition?
Un regard attentif du paysage politique permet de constater
que ni le PDG, encore moins l’Opposition sont des forces unies
actuellement. la classification PDG/Opposition est loin d’être
rigoureuse.
Le PDG, malgré une certaine discipline, est gangrené par des
divisions entre la première génération fondatrice du PDG en 1968 et
celle qui pousse à la relève que l'on appelle communément les
rénovateurs. L'appel à une nouvelle race de technocrates, à l’image du
premier ministre Oyé Mba, pour insuffler un souffle nouveau dans ce
parti (et dans l’économie gabonaise) rend paradoxalement l'analyse des
rapports de force à l'intérieur du PDG plus complexe.
17
17. Élections législatives gabonaises
En ajoutant à cette complexité les départs et les silences de
certains responsables de la première heure, ce parti au pouvoir traverse
bien une zone de turbulence. Il faudra s’attendre en tout cas à de belles
empoignades dans les mois à venir, sauf si le fondateur du PDG, le
Président de la République, arrive à discipliner son beau monde, comme
il l'a si bien fait au plus fort de la crise du PDG en mai 90, tout en
n’étant plus président-fondateur. Toutefois ce rôle influent du Président
de la République sur le PDG, l’absence du nouveau secrétaire-général
dans la dernière compétition électorale, et les multiples divisions
signalées précédemment rendent floue la question du n°1 de ce parti
dans la vie politique compétitive actuelle.
• L'Opposition, lancée dans la bataille électorale de manière
précipitée n'échappe pas à cette foire d’empoigne. Les multipIes
scissions ici et là (MORENA, USG, APSG, MRB) et les bagarres de
chapelles donnent une image bien chaotique des perspctives des uns et
des autres à court terme. Même le regroupement non organisé appelé
FUAPO malgré ses moments d'union ponctuels présente des fragilités
évidentes.
Parler de cette opposition comme une force politique parait
bien aventureux. L'activité parlementaire va rapidement permettre de
mesurer le degré de coordination de cette opposition. La constitution
d'une structure de coordination parlementaire, réunissant des partis de
sensibilités diverses de toute l’opposition peut être un bon test. Les
élections municipales, prévues cette année 91, seront également un test
de mesure de la maturité atteinte par cette opposition après les quelques
18
18. Élections législatives gabonaises
mois de vie électorale accélérée qu'elle vient de connaître; Les mois à
venir permettront de voir plus clair dans l’inévitable délimitation des
forces des forces politiques en compétition.
D. — DES HOMMES.
Dans la lutte contre L’arbitraire, les systèmes démocratiques
pluripartites mscrivent des règles de compétition non seulement entre
les partis, mais également entre des hommes (femmes y comprises) avec
comme objectif (sportif d’ailleurs) “que le meilleur gagne”. Le
suffrage populaire est donc un recours à cette qualification des
meilleurs et à une déqualification des moins bons sujets ou des
médiocres. Pour que cette compétition demeure saine, des règles strie
tes de mesure et de transparence sociale doivent être respectées par les
compétiteurs.
En reprenant donc l’examen de l’évolution politique de ces
derniers mois, le Gabon politique peut être divisé en 3 grandes forces
politiques: le PDG, les Bûcherons et le PGP, qui peuvent prétendre à
des ambitions nationales.
Il serait tentant alors de classer idéologiquement ces 3 forces
politiques représentatives, PDG Bûcherons, PGP (ou FUAPO),
respectivement de droite, centre et gauche, selon une classification
occidentale. Mais ceci n’est que conjectures et mérite des analyses plus
19
19. Élections législatives gabonaises
approfondies. L’emprunt de cette classification idéologique occidentale
étant d'ailleurs peu conforme à nos réalités sociologiques et historiques.
Partant de cette lecture du paysage politique “reconstitué”, la
logique oblige à admettre l'omniprésence de 3 personnalités influentes
de ces 3 forces politiques, à savoir : - le Président Bongo qui quelque
soit l'ambiguïté de cette position, parait demeurer le maître à bord du
PDG, malgré la poussée des multiples rénovateurs; le Père Mba
Abessolo, président des Bûcherons, qui ma1gré son itinéraire sinueux et
son imprévisibilité, conserve une certaine popularité, notamment en
milieu rural, grâce à son long passé d'opposant en France. - Maître
Agondjo président du PGP, qui vient de réaliser un bon parcours
électoral personnel dans la capitale économique, Port-Gentil. Ces 3
personnalités politiques, représentantes des 3 plus grandes forces
politiques actuelles deviennent incontournables pour la suite des
événements.
Néanmoins, il est bon de signaler que ce positionnement qui
ressort à la lumière de cette lecture objective du paysage politique actuel
n’exclut point l'existence de nombreux outsiders politiques de d’une
grande capacité.
20
20. Élections législatives gabonaises
ENSEIGNEMENTS ET RÉFLEXIONS.
a) Ces élections ont permis de mesurer le chemin parcouru
par notre jeune démocratie. Le Gabon et l’Afrique en général sont ainsi
en phase avec le mouvement mondial exigeant plus de liberté, de
démocratie et de justice sociale.
b) Les résultats de ces quelques mois ct l’apprentissage
démocratique sont donc globalement positifs. La multiplicité des
Journaux politiques la Clé (proche du MRB), la Relance du PDG,
Misamu du MORENA fondamental, le Progressiste du PGP, le Combat
de l'APSG... et des journaux satiriques, La Griffe, L’Oeil, le Scorpion...
démontrent le grand besoin de s’exprimer autrement qu’avaient les
Gabonaises et les Gabonais.
c) Certains, au moment de la Conférence nationale, avaient
ironisé sur l’expérience démocratique gabonaise devant le grand
nombre de partis politiques qui s’y étaient spontanément présentés sur
la scène politique, suggérant même que la limitation du nombre se fasse
de manière dictatoriale. La compétition démocratique a donné une
réponse valable sur cette question puisque le paysage pluripartite s’est
bien éclaici en 6 mois. Des 75 associations politiques enregistrées en
Mars 90 sont représentées à l'Assemblée nationale. Et comme nous
l’avons montré dans les lignes précédentes, 3 grandes forces politiques
émergent aujourd’hui au Gabon avec 3 fortes personnalités.
d) L’instauration de la démocratie a permis l'émergence de
nouvelles valeurs sociales autre que l'argent. C'est ainsi que plusieurs
personnes ont été élues sur la base de leur valeur morale, intellectuelles.
Des règles simples et rationnelles auraient d' ailleurs fait en sorte que
l'on ne se lance pas durant la campagne électorale dans une distribution
contestable de l’argent de l’État en ces temps de crise économique et
sociale.
21
21. Élections législatives gabonaises
e) Plusieurs exigences seront encore nécessaires pour
consolider notre jeune et fragile démocratie. Glasnost (transparence
politiquc), respect de la différence, l’acceptation consciente des règles
de la compétition démocratique et en particulier la règle de l’alternance
entre les hommes comme en idées ... sont autant d'épreuves que les
démocrates gabonais devront assumer pour la construction d’un état de
droit au Gabon et d’une société réellement démocratique.
Un regard plus attentif et plus profond sur la marche de cette
jeune démocratie doit nous amener à nc pas se contenter de projections
manichéennes, de copies, ou d’emprunts extérieurs à nos réalités
sociologiques. L'existence de constantes démocratiques universelIes ne
doit pas biffer nos spécificités sociologiques gabonaises. Les énergies
intellectuel1es doivent être stimulées vers cette nouvelle voie de
construction de notre société de l'an 2000, à l'aide de l’outil démocra-
tique.
g) L'expérience démocratique pluripartite d'aujourd’hui, qui
n’est pas la première au Gabon devrait s’enrichir des premières
expériences des années 60 de l’indépendance nationale. La génération
des 50-70 ans qui a connu ces expériences de vie politique pluraliste est
ici interpellée. Il serait dommage de reproduire les mêmes fautes,
h) La défense et la recherche de petits intérêts politiques, ma-
tériels, égoïstes, au regard des défis actuels du développement de notre
société gabonaise, constituent un cancer social que notre courageuse
démocratie doit réduire. L'avenir de la nation, des générations motrices
de l'an 2000, de nos enfants, en dépend.
22
22. Élections législatives gabonaises
i) De même les clivages partisans ou les bagarres de
leadership politique, ne doivent pas éclipser le bon sens, la raison ou
l’intérêt national. Des démonstrations plus convaincantes sur nos
capacités à relever les défis actuels sont attendues par la communauté
mondiale.
j) Cette mise en garde est d'autant plus nécessaire que la
consultation électorale il démontré que le fait tribal, ethnique, ou
provincial reste encore présent dans les attitudes et les comportements.
La manière perfide dont certains intellectuels et politiques usent de cette
donnée historique mérite qu’on s’y arrête.
Il doit y avoir aucun complexe à aborder ce problème, qui du
reste est mondial. Les dérives du fait tribal ou ethnique, que l'on appelle
communément le tribalisme procèdent de mal historique et universel
qu'est la non-acceptation et le non-respect de la différence sociale,
raciale et ethnique, et qui se pose dans la construction de toute nation
quelque soit la latitude géographique. Les conflits ethniques du Libéria
et ceux que l’URSS a connu en Azerbaïdjan, l'année 90 procèdent bien
de cette intolérance qui mine le monde entier.
Il n'est pas inutile de rappeler que d’autres formes d'exclusion
sociale, par la religion ou par le phénomène de l'immigration, sont des
problèmes qui menacent périodiquement la cohésion sociale des pays
comme la France après 200 ans de construction démocratique.
Ces exemples d’actualité doivent donc nous convaincre de la
nécessité d '’intégrer ce fait ethno-pro-provincial dans notre route vers
23
23. Élections législatives gabonaises
la démocratie et le développement du Gabon, avec comme message
immédiat: l’acceptation et le respect de la différence, le refus de
l’exclusion d’autrui. Une règle de la démocratie, simple à énoncer, mais
qui semble difficile à appliquer dans notre monde.
Fait à Paris, le 1er janvier 1991.
24
24. Élections législatives gabonaises
Annexes
1. Listes des élus par parti et province
2. Abréviations et sigles
3. Carte électorale
4. Découpage électoral
25
25. Élections législatives gabonaises
PDG MRB PGP MOR APSG USB
Estuaire
Lasséni-Duboze Essono Ndong Loembé néant néant néant
Yeyet Delphine Obiang - Joseph
Ekomié Anguilé
Assélé J.-Boniface Désiré
Chambrier-Rahandi Nkoghe-Mba Obiang -
Ntoutoume-Emane Ndong
Biyoghe-Mba Paul Obame - Mouelle -
Nkoghe Adrien Abessolo Mandoungou
Eyeghe-Ekomie Eya-Otsaghe
Oye-Mba
Haut-Ogooué
Ongouori Georges
Kami Jules
Akeeyi J.-Marie
Bongue-Boma Paul
Myboto Zacharie
Nembe Sidoine
Marat-Abyla Luc néant néant néant néant néant
Ombouma Fabien
Ayatsou Antoine
Ngondjiga ludovic
Toungui Paul
Okenkali Luc
Odounga Faustin
Koupangoye Jérôme
AIi Ben Bongo
Ankambi Julien
Andjembé Léonard
26
27. Élections législatives gabonaises
PDG MRB PGP MOR APSG USB
Ogooué-Ivindo
Mongockodji Pépin Nkouegne
Henri
Dounga Justin Nto-Nze
Mindombi Jean Obame Anguere
Mbomo Marc
Zembi Marcel néant néant néant néant néant
Kakou Mayaza .
Ogooué-Lolo
Magnaga Fidèle Kouma J.-B.
Nzouba-Ndama
Lissenguet P.-Marie néant néant néant néant
Indoumou Barnabé
Moussavou Paulette
Mouvagha- Tchioba
Guedet-Manzela
Moukandja Félix
Kouamba Jacques
28
28. Élections législatives gabonaises
PDG MRB PGP MOR APSG USB
Ogooué-Maritime
Ougouligendé Bourdès Malonda Agondjo
Pierre-Louis
Mahothès-Magouindi Ambourouet
M. André
Boussoughou Pierre MboyiErnest néant néant néant
Mackagat Armand Gambo Pierre
Pambo Raphaël
Mackayat Hubert
Zizat Marc
Faessel Augustine
Woleu Ntem
Edzo-Medzo Angoué-Mba Ondo Bonjean Mengome
Antoine
Ondo Méthogo Obame Nguéma Edou Abessolo Zeng P.C.
Essima-Osse Ehya-Obiang
Nze Aron néant Bilonga Basile
Obiang Mba Oyono Aba’a
Ekabane-Obame Nguéma Ondo
Mengue-Oye
______________________________________________________________________________________
N.B.: Le CRP obtient 1 élu, Mme Maganga, dans la Ngounié
L’UD obtient aussi 1 élu Mr. Pambo Dieudonné,
dans la Nyanga.
29
29. Élections législatives gabonaises
ABREVIATIONS ET SIGLES
Partis politiques
PDG Parti démocratique gabonais
MRB Mouvement de redressement national (MORENA,
tendance des Bûcherons)
MOR Mouvement de redressement national (MORENA,
tendance originelle ou fondamentale)
PGP Parti gabonais du progrès
APSG Association pour le socialisme au Gabon
USG Union socialiste gabonaise
CRP Cercle pour le renouveau et le progrès
UD Union pour la démocratie et le développement
FUAPO Front uni des associations politiques de l’opposi-
tion regroupant le PGP, l’APSG, le MORENA
fondamental.
Provinces gabonaises.
EST Estuaire
HO Haut-Ogooué
MO Moyen-Ogooué
NG Ngounié
NY Nyanga
OI Ogooué-Ivindo
OL Ogooué-Lolo
OM Ogooué-Maritime
WN Woleu Ntem
30
33. Plus d’efforts, de rigueur, de pragmatisme, de créativité et
d’humilité sont aujourd’hui des préalables de conduite personnelle et
collective pour relever les grands défis actuels de nos pays africains. Tel est
le message que ces lignes de connaissance et de réflexion sur les élections
législatives pluralistes du Gabon entendent lancer, notamment auprès des
générations de l’an 2000.
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Maurice NDOUME NZÉ, 37 ANS, maître-Assistant
à l’Université des Sciences et Techniques de
Masuku (Franceville) Gabon.